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11/02/2016 | FRANCE | N°15DA00954

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 11 février 2016, 15DA00954


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...G...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 20 janvier 2014 par laquelle l'inspecteur du travail de la section Calais 3 a autorisé son licenciement pour motif économique par les administrateurs judiciaires de la société Calaire Chimie ainsi que la décision du 17 juillet 2014 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a confirmé la décision de l'inspecteur.

Par un jugement n° 140

5739 du 15 avril 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...G...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 20 janvier 2014 par laquelle l'inspecteur du travail de la section Calais 3 a autorisé son licenciement pour motif économique par les administrateurs judiciaires de la société Calaire Chimie ainsi que la décision du 17 juillet 2014 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a confirmé la décision de l'inspecteur.

Par un jugement n° 1405739 du 15 avril 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de M.G....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 juin 2015, M.G..., représenté par Me F... A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 15 avril 2015 du tribunal administratif de Lille ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 20 janvier 2014 par laquelle l'inspecteur du travail de la section Calais 3 a autorisé son licenciement pour motif économique par les administrateurs judiciaires de la société Calaire Chimie ainsi que la décision du 17 juillet 2014 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a confirmé cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la réalité du motif économique de son licenciement n'étant pas établie ;

- l'obligation de reclassement, tant interne qu'externe, a été méconnue ;

- le principe de proportionnalité a été méconnu.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 août 2015, la Selarl AJJIS, la Selarl FHB, administrateurs judiciaires de la société Calaire Chimie, et Me H...D..., liquidateur judiciaire de la société Calaire Chimie, représentés par Me B...C..., concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de M.G..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, d'une somme de 150 euros à verser à la Selarl AJJIS, d'une somme de 150 euros à verser à la Selarl FHB et d'une somme de 150 euros à verser à MeD....

Ils soutiennent que les moyens soulevés par M. G...ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 8 décembre 2015 la clôture d'instruction a été fixée au 28 décembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- l'accord du 15 janvier 1991 relatif à la politique de l'emploi attaché à la convention collective nationale des industries chimiques du 30 décembre 1952 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Maryse Pestka, rapporteur public,

- et les observations de Me B...C..., représentant la Selarl AJJIS, la Selarl FHB, administrateurs judiciaires de la société Calaire Chimie et Me H...D..., liquidateur judiciaire de la société Calaire Chimie.

1. Considérant que M. E...G..., délégué du personnel titulaire, délégué syndical, membre titulaire du comité d'entreprise, membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, conseiller prud'homal, représentant des salariés, agent des moyens généraux, au sein de la société Calaire Chimie, relève appel du jugement du 15 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 janvier 2014 par laquelle l'inspecteur du travail de la section Calais 3 a autorisé son licenciement pour motif économique par les administrateurs judiciaires de la société Calaire Chimie ainsi que de la décision du 17 juillet 2014 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a confirmé la décision de l'inspecteur ;

2. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ;

3. Considérant en premier lieu, que dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions d'effectifs envisagées et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel celle-ci appartient ;

4. Considérant que, par un jugement du 24 octobre 2013, le tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer a liquidé la société Calaire Chimie qui avait fait l'objet d'une cession totale à la société Synthexim par un jugement du 22 octobre 2013 de ce tribunal ; que dès lors l'inspecteur du travail et le ministre ont pu considérer, eu égard à l'autorité de la chose ainsi jugée, que la réalité de l'existence des difficultés économiques de la société Calaire Chimie de nature à fonder le motif économique du licenciement était établie, sans qu'il soit besoin à cet égard d'examiner les agissements dolosifs allégués de la société Tessenderlo et de Calaire Holding envers la société Calaire Chimie ;

5. Considérant, en second lieu, que lorsqu'en application des dispositions des articles L. 1233-3 et suivants du code du travail, l'employeur est tenu de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi comportant des mesures destinées à favoriser le reclassement des salariés dont le licenciement ne peut être évité, il appartient à l'autorité administrative saisie d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique, de s'assurer que la procédure de consultation des représentants du personnel a été respectée, que l'employeur a rempli ses obligations de reclassement et que les salariés protégés ont accès aux mesures prévues par le plan dans des conditions non discriminatoires ; qu'il ne lui appartient pas, en revanche, d'apprécier la validité du plan de sauvegarde de l'emploi, dès lors que l'autorisation de licenciement ne fait pas obstacle à ce que le salarié puisse ultérieurement contester cette validité devant la juridiction compétente ;

6. Considérant qu'eu égard à sa liquidation, aucun poste de reclassement au sein de la société Calaire Chimie n'a pu être proposé au requérant ; que celui-ci avait refusé les propositions de reclassement à l'étranger ; que conformément aux dispositions du plan de sauvegarde de l'emploi homologué le 31 octobre 2013, les administrateurs judiciaires de la société Calaire Chimie, au titre du reclassement interne, ont recensé les emplois disponibles, en France et à l'étranger, au sein des soixante-neuf sociétés du groupe ICIG dont faisait partie cette société ; que seules deux sociétés implantées en France ont formulé des offres de reclassement en proposant, pour l'une, un poste de responsable de développement " produits nouveaux " et pour l'autre, des postes d'opérateurs de production ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'une proposition écrite et précise d'emploi d'opérateur de production au sein de la société Symkem, en Côte d'Or, a été faite le 29 octobre 2013 à M. G...qui l'a refusée ; qu'à cet égard, il ne peut utilement soutenir que les mesures incitatives à la mobilité géographique contenues dans le plan de sauvegarde de l'emploi pour le salarié licencié et son conjoint seraient insuffisantes ;

7. Considérant que si M. G...invoque la méconnaissance du principe de proportionnalité dans le cadre des obligations de reclassement interne, il n'assortit pas, en tout état de cause, son moyen de précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 16 de l'accord du 15 janvier 1991 relatif à la politique de l'emploi attaché à la convention collective nationale des industries chimiques du 30 décembre 1952 : " Les entreprises doivent rechercher les possibilités de reclassement susceptibles de convenir aux salariés dont le licenciement aura dû être décidé de préférence dans la localité ou les localités voisines, ainsi que les moyens de formation et de reconversion qui pourraient être utilisés par eux (...) " ; qu'aux termes de son article 21 ; " La commission nationale paritaire de l'emploi est composée de représentants patronaux et, pour chaque organisation syndicale représentative au plan national, de 4 représentants, salariés d'entreprises relevant de la profession (...) " ; qu'aux termes de son article 23 : " L'union des industries chimiques assure la charge matérielle du secrétariat de la commission " ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les administrateurs judiciaires de la société Calaire Chimie ont informé par courrier du 26 septembre 2013 l'Union des industries chimiques du Nord-Pas-de-Calais de la cessation d'activité de la société Calaire Chimie et lui ont transmis un tableau récapitulatif détaillé pour chacun des salariés faisant apparaître ses fonctions, son statut, son coefficient, son ancienneté et sa formation ; qu'ainsi, cette commission était saisie depuis plus de deux mois quand la demande d'autorisation administrative de licenciement de M. G... a été introduite le 18 décembre 2013 auprès de l'inspecteur du travail ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les administrateurs judiciaires de la société Calaire chimie, auraient manqué à leur obligation conventionnelle de reclassement doit, en tout état de cause, être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. G...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 15 avril 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la Selarl AJJIS, de la Selarl FHB et Me D...présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. G...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de Selarl AJJIS, de la Selarl FHB administrateurs judiciaires de la société Calaire Chimie et MeD..., liquidateur judiciaire de la société Calaire Chimie présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...G..., au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, à la Selarl AJJIS, à la Selarl FHB administrateurs judiciaires de la société Calaire Chimie et à Me H...D..., liquidateur judiciaire de la société Calaire Chimie.

Délibéré après l'audience publique du 28 janvier 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 11 février 2016.

Le rapporteur,

Signé : J.-J. GAUTHÉLe président de chambre,

Signé : P.-L. ALBERTINILe greffier,

Signé : B. LEFORT

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Béatrice Lefort

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N°15DA00954

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA00954
Date de la décision : 11/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-03 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-Jacques Gauthé
Rapporteur public ?: Mme Pestka
Avocat(s) : SCP PHILIPPE BRUN

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-02-11;15da00954 ?
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