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28/01/2016 | FRANCE | N°15DA00760-15DA00828

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 28 janvier 2016, 15DA00760-15DA00828


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable et d'assainissement (SIAEPA) de La Haye (Seine-Maritime) a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner solidairement l'Etat et la société Auxiliaire de Travaux (SAT) à réparer les conséquences dommageables des désordres affectant la station d'épuration de Nolléval, de mettre 85% des préjudices résultant de ces dommages à la charge finale de l'Etat et les 15% restant à la charge de la SAT, enfin, de mettre, dans les mêmes proportions, à l

a charge de l'Etat et de la SAT une somme totale de 10 500 euros au titre de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable et d'assainissement (SIAEPA) de La Haye (Seine-Maritime) a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner solidairement l'Etat et la société Auxiliaire de Travaux (SAT) à réparer les conséquences dommageables des désordres affectant la station d'épuration de Nolléval, de mettre 85% des préjudices résultant de ces dommages à la charge finale de l'Etat et les 15% restant à la charge de la SAT, enfin, de mettre, dans les mêmes proportions, à la charge de l'Etat et de la SAT une somme totale de 10 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1201894 du 17 mars 2015, le tribunal administratif de Rouen a condamné solidairement l'Etat et la société SAT à verser au SIAEPA de La Haye une somme globale de 354 424 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts au taux légal à compter du 11 juin 2012, les intérêts échus au 11 juin 2013 puis à chaque échéance annuelle étant capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts, condamné la SAT à garantir l'Etat à concurrence de 15% de cette somme, mis la somme de 15 800 euros toutes taxes comprises à la charge de l'Etat au titre des frais et honoraires d'expertise et la somme de 2 788 euros toutes taxes comprises à la charge de la SAT au même titre, mis les sommes respectives de 850 euros et 150 euros à la charge de l'Etat et de la SAT au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions de la demande, de même que les conclusions de la SAT tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 8 mai 2015 sous le n° 15DA00760, la société Auxiliaire de Travaux (SAT), représentée par Me C...D..., demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rouen du 17 mars 2015 en tant qu'il la condamne à indemniser le SIAEPA de La Haye et de rejeter, dans cette mesure, la demande présentée par ce syndicat devant ce tribunal ;

2°) à titre subsidiaire, de réduire à de plus justes proportions la part d'indemnité qui serait laissée à sa charge et de réformer, dans cette mesure, ce jugement ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, à défaut, du SIAEPA de La Haye, une somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le SIAEPA de La Haye, qui n'est propriétaire ni de la station d'épuration en cause, ni du terrain d'assiette de celle-ci, ne peut se prévaloir de la qualité de maître d'ouvrage, qui seule lui donnerait intérêt pour intenter une action devant le tribunal administratif de Rouen sur le fondement de la garantie des constructeurs ;

- l'ensemble des causes identifiées par l'expert comme ayant concouru aux dysfonctionnements de la station étant exclusivement imputables au maître d'oeuvre et à un autre constructeur, sa responsabilité ne saurait être engagée, alors, au surplus, qu'elle n'a commis aucune faute dans l'exécution des opérations qui lui ont été confiées ;

- le tribunal administratif s'est livré à une évaluation excessive des préjudices subis par le SIAEPA de La Haye.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2015, le syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable et d'assainissement (SIAEPA) de La Haye, représenté par Me A... B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la SAT au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il peut se prévaloir de la qualité de maître de l'ouvrage, dès lors qu'il justifie être le propriétaire des deux parcelles sur lesquelles cet ouvrage, dont il a financé la construction, a été implanté ;

- le tribunal administratif a retenu à juste titre la responsabilité de la SAT dans la survenance des désordres en cause ;

- la part d'indemnité qu'il conviendra de laisser à la charge de la SAT ne pourra être inférieure à 15 % de son préjudice ;

- si la cour estimait devoir réduire cette part, il lui appartiendrait de relever à due concurrence celle mise à la charge de l'Etat ;

- le tribunal administratif a fait une juste appréciation de son préjudice ;

- la SAT n'est ni recevable, ni fondée à demander que le montant d'une éventuelle subvention vienne en déduction du coût des réparations à effectuer sur l'ouvrage.

II. Par un recours et un mémoire, enregistrés le 18 mai 2015 et le 1er juillet 2015 sous le n° 15DA00828, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt demande à la cour de ramener à de plus justes proportions la part d'indemnité mise à la charge de l'Etat par le jugement attaqué et de réformer, en conséquence, ce jugement.

Il soutient que :

- le jugement ne comporte pas les signatures mentionnées à l'article R. 741-7 du code de justice administrative et est entaché d'une insuffisance de motivation ;

- le tribunal administratif a insuffisamment tenu compte de l'obligation de conseil qui pesait sur les entrepreneurs et notamment sur la SAT au titre du lot n° 3, jusqu'à la réception de l'ouvrage ;

- les premiers juges n'ont pas davantage tiré des conséquences suffisantes du défaut d'entretien de la station par ses gestionnaires successifs au titre de l'imputabilité des désordres.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- l'arrêté du 7 décembre 1979 relatif aux concours apportés aux collectivités locales et à leurs groupements par l'Etat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Maryse Pestka, rapporteur public,

- et les observations de Me C...D..., représentant la SAT.

1. Considérant que la requête de la société Auxiliaire de Travaux (SAT) et le recours du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sont dirigés contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt ;

2. Considérant que le Syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable et d'assainissement (SIAEPA) de La Haye (Seine-Maritime) a entrepris l'édification d'une station d'épuration sur le territoire de la commune de Nolléval ; qu'il a confié à la direction départementale de l'agriculture et de la forêt de la Seine-Maritime la maîtrise d'oeuvre de l'opération, ainsi que la direction des travaux, qui ont été répartis en quatre lots, dont le troisième, afférent à la construction de la structure de la station, a été attribué à la Société Auxiliaire de Travaux (SAT) ; que, suivant les préconisations du maître d'oeuvre, la technique d'épuration par filtres à sable a été retenue ; que ces travaux, qui ont débuté le 20 mai 1998, ont fait l'objet d'une réception sans réserve le 5 juillet 1999 ; que, toutefois, des dysfonctionnements, se traduisant par un colmatage de l'installation, sont apparus dès le mois de mai 2001 et ont perduré, malgré un remplacement des filtres, puis des pompes du poste de relevage ; que le SIAEPA de La Haye a demandé au tribunal administratif de Rouen, après expertise, de condamner solidairement l'Etat et la SAT à réparer les conséquences dommageables des désordres affectant cette station ; que, par un jugement du 17 mars 2015, le tribunal administratif de Rouen, faisant partiellement droit à cette demande, a condamné solidairement l'Etat et la SAT à verser au SIAEPA de La Haye une somme globale de 354 424 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts au taux légal à compter du 11 juin 2012 et de la capitalisation de ces intérêts, condamné la SAT à garantir l'Etat à concurrence de 15 % de cette somme et réparti selon la même proportion la charge des frais et honoraires d'expertise entre l'Etat et la SAT ; que cette dernière relève appel de ce jugement et demande, à titre principal, sa mise hors de cause, à titre subsidiaire, de réduire à de plus justes proportions la part d'indemnité qui serait laissée à sa charge et de réformer, dans cette mesure, ce jugement ; que le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt relève appel du même jugement et demande à la cour de ramener à de plus justes proportions la part d'indemnité mise à la charge de l'Etat et de réformer, dans cette mesure, ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ;

4. Considérant qu'il ressort des motifs du jugement attaqué que ceux-ci énoncent avec une précision suffisante, en réponse aux moyens du demandeur et en tirant notamment les conséquences des constatations de l'expert, les considérations de fait et de droit justifiant, d'une part, que la responsabilité solidaire de l'Etat et de la SAT soit retenue au titre de la garantie des constructeurs, d'autre part, la répartition, déterminée par le tribunal, de la charge de l'indemnité accordée au SIAEPA de La Haye ; que le tribunal n'avait pas à identifier davantage les passages précis du rapport d'expertise sur lesquels il fondait son appréciation des faits de l'espèce ; que, par suite et contrairement à ce que soutient le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, ce jugement est suffisamment motivé ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-7 de ce code : " Dans les tribunaux administratifs (...), la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'examen de la minute de ce jugement, jointe au dossier de première instance transmis à la cour, que le moyen du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt tiré de ce qu'il serait irrégulier, pour ne pas comporter les signatures requises par les dispositions précitées de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, manque en fait ; que la circonstance que l'expédition notifiée au préfet de la Seine-Maritime ne comporterait pas ces signatures est sans incidence sur la régularité du jugement ;

Sur la recevabilité de la demande présentée par le SIAEPA de La Haye devant le tribunal administratif de Rouen :

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des pièces versées au dossier d'appel par le SIAEPA de La Haye que ce dernier, d'une part, a conclu en tant que maître d'ouvrage les actes d'engagement afférents aux travaux d'implantation de la station d'épuration en cause, pour le financement desquels il précise avoir perçu des subventions de l'agence de l'eau Seine-Normandie, et, d'autre part, a acquis la propriété des terrains d'assiette de cet ouvrage ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le SIAEPA de la Haye n'aurait pas justifié d'un intérêt suffisant pour saisir le tribunal administratif de Rouen d'une action fondée sur la garantie décennale des constructeurs, faute de pouvoir se prévaloir de la qualité de maître d'ouvrage, manque en fait ; qu'il suit de là que la fin de non-recevoir opposée par la SAT à la demande introduite par le SIAEPA de La Haye devant le tribunal administratif de Rouen doit être écartée ;

Sur le principe de la responsabilité :

8. Considérant qu'il résulte des principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans ;

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert désigné par le juge des référés, qu'un phénomène de colmatage récurrent a été mis en évidence sur les installations en cause dès l'année 2001 et a ensuite perduré, malgré des modifications techniques destinées à y remédier ; qu'en effet, d'une part, le débit des pompes installées au niveau du poste de relèvement principal s'est avéré trop important pour assurer un rendement optimal de la station, dont les fosses de prétraitement n'ont pas été à même de jouer pleinement leur office, alors en outre que, ni le volume journalier des eaux pluviales entrant dans l'installation, évalué à 46,5 m3 alors qu'il peut atteindre 80 m3 par temps de pluie, ni les phénomènes de remontée des eaux de la rivière l'Andelle située à proximité n'ont été suffisamment pris en compte ; que, d'autre part, la station elle-même a été sous-dimensionnée au regard du volume des eaux qu'elle serait ainsi amenée à traiter ; que, dans ces conditions, le procédé de traitement par filtres à sable s'est avéré inadapté, le volume et le débit excessifs des effluents pris en charge, associé à un rendement insuffisant de la filière de prétraitement entraînant invariablement un colmatage des filtres ; que les dysfonctionnements récurrents résultant de ces défauts de conception ont entraîné un amoindrissement sensible du rendement épuratoire de la station et une baisse corrélative de la qualité des effluents rejetés dans le milieu naturel ; qu'ainsi, ces désordres, constatés après la réception, le 5 juillet 1999, de l'ouvrage et dans le délai de garantie décennale, valablement interrompu par la demande d'expertise formée par le SIAEPA de La Haye le 17 décembre 2008 devant le juge des référés, sont de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ; que ces désordres entrent, par suite, dans le champ d'application des principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs ; que, dès lors et ainsi que l'a retenu à bon droit le tribunal administratif de Rouen, le SIAEPA de La Haye est fondé à rechercher à ce titre la responsabilité solidaire de l'Etat et de la SAT à raison des conséquences dommageables de ces désordres ;

10. Considérant qu'il est constant que, malgré les préconisations du maître d'oeuvre, le SIAEPA de La Haye n'a, dans un premier temps, pas confié l'exploitation et l'entretien de l'ouvrage à un prestataire, mais qu'il en a assumé lui-même la gestion en régie jusqu'à la fin du mois d'avril 2001 ; qu'il résulte de l'instruction que des visites effectuées par le service d'assistance technique à l'exploitation des stations d'épuration (SATESE) ont révélé, y compris après cette date, des lacunes dans le suivi du fonctionnement de l'ouvrage, dans la surveillance des raccordements au réseau et dans l'entretien général des installations ; que, s'il n'est pas contesté qu'un suivi plus rigoureux de la part de l'exploitant, d'ailleurs préconisé par l'expert, aurait permis de déceler plus précocement les dysfonctionnements à l'origine des désordres, il n'est pas établi qu'une gestion plus appropriée aurait pu conduire à en prévenir les conséquences dommageables, les désordres décrits au point 9 étant la conséquence d'une mauvaise conception de l'ouvrage ; qu'il suit de là que le moyen tiré par le ministre de ce qu'en n'ayant pas pris les mesures propres à assurer un suivi et un entretien approprié de la station, le SIAEPA de La Haye, maître de l'ouvrage, aurait commis une faute de nature à exonérer les constructeurs d'une part de leur responsabilité doit être écarté ;

Sur l'imputabilité des désordres :

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les dysfonctionnements ayant rendu l'ouvrage en cause impropre à sa destination trouvent leur origine directe dans des erreurs de conception de l'ouvrage, notamment dans un sous-dimensionnement de ses équipements, résultant d'une sous-évaluation des volumes d'effluents pris en charge, en particulier des eaux pluviales, et dans le débit excessif des pompes mises en oeuvre au niveau du poste de relèvement principal ; qu'ainsi, dans les conditions de fonctionnement induites par ces lacunes rappelées au point 9, le procédé de traitement par filtres à sables s'est avéré, par lui-même, inapproprié ; que les opérations de conception incombaient à la direction départementale de l'agriculture et de la forêt de la Seine-Maritime, qui s'était vu confier la maîtrise d'oeuvre de l'opération, selon les modalités prévues pour la mission normalisée avec projet visée à l'article 7 de l'arrêté du 7 décembre 1979 modifié relatif aux concours apportés aux collectivités locales et à leurs groupements par l'Etat, et qui a préconisé, dans ce cadre, le procédé de traitement mis en oeuvre ;

12. Considérant, toutefois, qu'il est constant que la SAT s'est, ainsi qu'il a été dit au point 2, vu confier l'exécution des travaux du lot n° 3, afférents à la construction de la structure même de la station d'épuration ; qu'en sa qualité de professionnel expérimenté dans le domaine de la construction d'installations de ce type, il appartenait à la SAT, si elle estimait pouvoir remplir la mission pour laquelle elle s'était portée candidate, d'appeler, dans le cadre de son obligation contractuelle de conseil, l'attention du maître d'ouvrage et, le cas échéant, celle du maître d'oeuvre sur l'insuffisant dimensionnement du projet entrepris, ainsi que sur l'inadaptation, dans ces conditions de mise en oeuvre, du procédé de filtrage préconisé ; que, si cette société a émis des réserves quant au colmatage des filtres à sable, il résulte de l'instruction que ces réserves, qui ont fait l'objet d'un courrier du 6 janvier 2003, n'ont été émises qu'à l'occasion d'une réunion organisée le 27 septembre 2002, plus de trois ans après la réception de l'ouvrage, et qu'elles avaient seulement trait à l'absence de prise en compte des venues d'eaux sur le site de l'installation lors de crues de la rivière l'Andelle ; que, par suite et alors même que la SAT n'était pas en charge des pompes du poste de relevage, qui, ainsi qu'il a été dit, ne sont pas, à elles seules, à l'origine des désordres, celle-ci n'est pas fondée à demander sa mise hors de cause ;

13. Considérant qu'eu égard à ce qui a été dit aux points 10, 11 et 12, le tribunal administratif de Rouen n'a pas fait, dans les circonstances de l'espèce, une inexacte appréciation des responsabilités encourues en estimant que la SAT devrait garantir l'Etat à concurrence de 15% des sommes mises à sa charge ;

Sur la réparation :

14. Considérant que, si la SAT soutient que le tribunal administratif se serait livré à une évaluation excessive des préjudices subis par le SIAEPA de La Haye, dès lors que les prétentions indemnitaires de ce dernier reposeraient seulement sur des estimations, elle n'avance aucun argument sérieux de nature à remettre en cause cette évaluation à la somme de 354 424 euros toutes taxes comprises, à laquelle les premiers juges ont procédé, en retenant l'option d'une reconstruction de l'ouvrage avec remplacement de l'ensemble des éléments déficients et sur la base des prix actualisés du marché initial, ainsi que des préconisations de l'expert ; qu'en particulier, le taux de 12% retenu par le tribunal au titre de la mission de maîtrise d'oeuvre et qui est celui proposé par l'expert n'est pas sérieusement contesté ; qu'en outre, si, en l'état du fonctionnement défectueux de la station, le remplacement, effectué le 22 juillet 2002, du sable des filtres colmatés n'était pas suffisant pour permettre de remédier à lui seul aux désordres constatés, il constituait, toutefois, une opération nécessaire pour permettre d'envisager la remise en service de l'ouvrage à une date à laquelle l'origine des dysfonctionnements n'était pas connue ; que le tribunal administratif a ainsi inclus à juste titre la somme de 48 215,54 euros correspondante dans le préjudice subi par le SIAEPA de La Haye ; qu'enfin, cette reconstruction étant insusceptible de donner lieu au versement d'une nouvelle subvention de l'Agence de l'eau Seine-Normandie, la SAT n'est pas fondée à demander la déduction d'une telle subvention du préjudice subi par le SIAEPA de La Haye ;

Sur les frais d'expertise :

15. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce et eu égard notamment à ce qui a été dit au point 13, il y a lieu de laisser à la charge de l'Etat et de la SAT respectivement 85% et 15% des frais et honoraires d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 18 588 euros toutes taxes comprises ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAT et le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 17 mars 2015, le tribunal administratif de Rouen les a condamnés solidairement à indemniser le SIAEPA de La Haye sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs et a mis respectivement à la charge de cette société et à celle de l'Etat 15% et 85% des sommes correspondantes, ainsi que des frais et honoraires d'expertise ; que les conclusions de la SAT tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'il y a lieu, en application des mêmes dispositions et dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SAT une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le SIAEPA de La Haye et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAT et le recours du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sont rejetés.

Article 2 : La SAT versera au SIAEPA de La Haye la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Auxiliaire de Travaux (SAT), au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, ainsi qu'au syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable et d'assainissement (SIAEPA) de La Haye.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 14 janvier 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 28 janvier 2016.

Le rapporteur,

Signé : J.-F. PAPINLe président de chambre,

Signé : P.-L. ALBERTINILe greffier,

Signé : B. LEFORT

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Béatrice Lefort

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N°s15DA00760, 15DA00828

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA00760-15DA00828
Date de la décision : 28/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04-03 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité décennale. Désordres de nature à engager la responsabilité décennale des constructeurs.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: Mme Pestka
Avocat(s) : BILLEBEAU - MARINACCE ; BILLEBEAU - MARINACCE ;

Origine de la décision
Date de l'import : 13/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-01-28;15da00760.15da00828 ?
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