Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen l'annulation de l'arrêté du 9 septembre 2014 du préfet de la Seine-Maritime lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français ;
Par un jugement n° 1403280 du 15 janvier 2015, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 9 février 2015, M.A..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 15 janvier 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2014 du préfet de la Seine-Maritime ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " long séjour UE - salarié " ou de réexaminer sa situation, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le refus de séjour méconnaît l'alinéa 1er de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;
- il a été pris au terme d'une procédure irrégulière, faute pour le préfet d'avoir sollicité l'avis du maire conformément à l'article R. 313-34-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le privant ainsi d'une garantie ;
- il est insuffisamment motivé et ne procède pas d'un examen sérieux de sa situation personnelle ;
- il méconnaît l'article 3 de l'accord franco-marocain ;
- il méconnaît l'article L. 313-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ainsi que l'article 1er du protocole additionnel de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet aurait dû faire usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation ;
- l'obligation de quitter le territoire méconnaît l'alinéa 1er de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;
- elle est fondée sur une décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour elle-même entachée d'illégalité ;
- elle porte atteinte à son droit de propriété ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 décembre 2015, le préfet de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Domingo, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.A..., ressortissant marocain né en 1970 et entré en France en 2013, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié sur le fondement des dispositions de l'article L 313-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il relève appel du jugement du 15 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant l'annulation de l'arrêté du 9 septembre 2014 du préfet de la Seine-Maritime lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français ;
Sur le refus de titre de séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la loi n° 2000-231 du 12 avril 2000 : " Dans ses relations avec l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er, toute personne a le droit de connaître le prénom, le nom, la qualité et l'adresse administratives de l'agent chargé d'instruire sa demande ou de traiter l'affaire qui la concerne ; ces éléments figurent sur les correspondances qui lui sont adressées. Si des motifs intéressant la sécurité publique ou la sécurité des personnes le justifient, l'anonymat de l'agent est respecté. / Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci " ;
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le droit de toute personne de connaître le prénom, le nom, la qualité et l'adresse administratives de l'agent chargé d'instruire sa demande ou de traiter son affaire, ne concerne que les correspondances échangées entre l'administration et ses usagers et qu'elles ne s'appliquent pas aux décisions, lesquelles ne doivent comporter que les mentions relatives à leur auteur ; que le moyen tiré de ce que la décision litigieuse, dont l'auteur est clairement identifié, ne comporte que les seules initiales de l'agent ayant instruit la demande de titre de séjour de M. A...doit, dès lors, être écarté ;
4. Considérant que la décision attaquée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que le préfet de la Seine-Maritime, qui n'avait pas à faire état de l'ensemble des éléments relatifs à la situation personnelle de l'intéressé, a ainsi suffisamment motivé son refus de séjour ; que la circonstance que le préfet ait notifié sa décision à l'ancienne adresse de M. A...alors que ce dernier avait informé ses services de sa nouvelle adresse n'est pas de nature à démontrer que le représentant de l'Etat se serait abstenu de procéder à un examen particulier de la situation du requérant ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger titulaire de la carte de résident de longue durée-CE définie par les dispositions communautaires applicables en cette matière et accordée dans un autre Etat membre de l'Union européenne qui justifie de ressources stables et suffisantes pour subvenir à ses besoins et, le cas échéant, à ceux de sa famille ainsi que d'une assurance maladie obtient, sous réserve qu'il en fasse la demande dans les trois mois qui suivent son entrée en France et sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée : (...) 5° Une carte de séjour temporaire portant la mention de l'activité professionnelle pour laquelle il a obtenu l'autorisation préalable requise, dans les conditions définies, selon le cas, aux 1°, 2° ou 3° de l'article L. 313-10 (...) " ; qu'il résulte des dispositions du 1° de l'article L 313-10 du code précité, que la délivrance d'un carte de séjour temporaire en qualité de salarié est subordonnée à la présentation d'un contrat de travail visé par l'autorité administrative ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...est entré en France le 25 mars 2013 sous couvert d'une carte de résident " longue durée - CE " délivrée par les autorités italiennes ; qu'il n'est pas contesté que M. A...n'était pas détenteur d'un contrat de travail visé par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ; que, par suite, il ne remplissait pas les conditions de l'article L. 313-4-1 du même code pour l'obtention du titre de séjour " salarié " qu'il sollicitait ; que, dans ces conditions, le préfet qui n'était en tout état de cause pas tenu de saisir le maire de la commune de résidence de l'intéressé afin qu'il formule un avis sur le caractère suffisant des ressources dont pouvait disposer M.A..., pouvait pour ce seul motif rejeter la demande de titre de séjour dont il avait été saisi sur le fondement des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié ", éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles (...)" ; que M.A..., qui ne présente pas un contrat visé par les autorités compétentes tel qu'exigé par les dispositions précitées de l'article 3 de l'accord franco-marocain, ne peut davantage se prévaloir de l'application des stipulations précitées de l'accord franco-marocain ;
8. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, le préfet ait commis une erreur manifeste d'appréciation en s'abstenant de faire usage de son pouvoir discrétionnaire et de procéder à la régularisation de la situation de M.A... ;
9. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est en tout état de cause inopérant à l'encontre d'une décision refusant la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié ;
10. Considérant que la décision attaquée qui n'est fondée que sur le non respect des conditions légales pour se maintenir régulièrement sur le territoire national et qui n'a pas pour objet de priver le requérant de la propriété des parts sociales qu'il détient dans une entreprise commerciale, ne méconnaît ni les dispositions des articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ni les stipulations de l'article 1er du protocole additionnel de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
11. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance de l'alinéa 1er de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3 ci-dessus ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision de refus de séjour ne peut être accueilli ;
13. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
14. Considérant que si M. A...se prévaut d'une insertion professionnelle réussie ainsi que de liens amicaux et professionnels qu'il aurait noués en France, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il n'était entré en France que le 25 mars 2013 à l'âge de 43 ans et qu'il ne justifie pas être dans l'impossibilité de poursuivre sa vie privée ou professionnelle de pizzaiolo en Italie, pays dans lequel il a vécu pendant 15 ans et où il est légalement admissible ; que, dans les circonstances de l'espèce et eu égard notamment tant à la durée qu'aux conditions de séjour en France de l'intéressé, la mesure d'éloignement prononcée par le préfet de la Seine-Maritime n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
15. Considérant que le moyen tiré de l'atteinte au droit de propriété doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 10 ;
16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience publique du 12 janvier 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Michel Hoffmann, président de chambre,
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- M. Laurent Domingo, premier conseiller.
Lu en audience publique le 26 janvier 2016.
Le rapporteur,
Signé : L. DOMINGOLe président de chambre,
Signé : M. C...
Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier
Marie-Thérèse Lévèque
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N°15DA00205