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31/12/2015 | FRANCE | N°15DA01234

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 31 décembre 2015, 15DA01234


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2014 du préfet de l'Eure rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.

Par un jugement n° 1500610 du 2 juin 2015, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enre

gistrée le 22 juillet 2015, MmeC..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annul...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2014 du préfet de l'Eure rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.

Par un jugement n° 1500610 du 2 juin 2015, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 juillet 2015, MmeC..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 2 juin 2015 du tribunal administratif de Rouen ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2014 du préfet de l'Eure ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer une carte de séjour temporaire valable un an et portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa demande de titre de séjour et de lui délivrer, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de huit jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, une autorisation provisoire de séjour le temps nécessaire à ce nouvel examen, ou, toujours à défaut, de ne pas exécuter la mesure d'éloignement compte tenu des circonstances de fait nouvelles intervenues dans sa situation après l'édiction de l'arrêté contesté et de lui délivrer, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, une carte de séjour temporaire valable un an et portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me B...au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 742-1 et L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste du préfet dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaît son droit à être entendue tel qu'il ressort du droit de l'Union ;

- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste du préfet dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 août 2015, le préfet de l'Eure conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme C...ne sont pas fondés.

Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 juin 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeC..., ressortissante turque, relève appel du jugement du 2 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 novembre 2014 du préfet de l'Eure rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'il est admis à séjourner en France en application des dispositions du chapitre Ier du présent titre, l'étranger qui demande à bénéficier de l'asile se voit remettre un document provisoire de séjour lui permettant de déposer une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. (...). Ce document est renouvelé jusqu'à ce que l'office statue et, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d'asile, jusqu'à ce que la cour statue " ; qu'aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. Le a du 3° du II de l'article L. 511-1 n'est pas applicable " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée régulièrement par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé devant elle, par la Cour nationale du droit d'asile ; qu'en l'absence d'une telle notification, et alors même qu'il incombe aux services de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou de la Cour nationale du droit d'asile d'y pourvoir, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger à qui l'asile a été refusé comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision du 28 août 2014 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté la demande de protection de Mme C... lui a été avisée par voie postale le 2 septembre 2014 à l'adresse qu'elle avait indiquée ; que l'avis de réception de ce courrier fait mention de ce qu'il n'a pas été réclamé par l'intéressée qui doit, dès lors, être regardée comme en ayant reçu la notification ; qu'à défaut d'avoir été contestée devant la Cour nationale du droit d'asile dans le délai d'un mois qui était imparti à l'intéressée, cette décision est devenue définitive ; que la contestation de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides devant la Cour nationale du droit d'asile, le 23 février 2015, soit après l'expiration du délai de recours et postérieurement à l'arrêté contesté, et alors qu'au demeurant, la convocation de l'intéressée à une audience devant cette cour ne permet de présumer du caractère recevable de son recours, est sans incidence sur la possibilité pour le préfet de mettre en oeuvre les dispositions précitées en présence d'une telle décision devenue définitive faute de contestation dans le délai ; que, dès lors, le préfet de l'Eure n'a, en tout état de cause, pas méconnu les dispositions de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni celles de l'article L. 742-3 de ce code en prenant l'arrêté contesté ;

4. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit au point 3, la demande d'asile de Mme C...a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 28 août 2014, devenue définitive faute de recours dans le délai imparti ; que, dès lors, le préfet était tenu de lui refuser la délivrance du titre de séjour sollicité au titre de l'asile sur le fondement des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, les moyens tirés de ce que le refus de séjour sur le fondement des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile serait insuffisamment motivé, méconnaîtrait son droit au respect de sa vie privée et familiale tel qu'il ressort de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'intérêt supérieur de son enfant au sens des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ou que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle, doivent être écartés comme inopérants ;

5. Considérant que MmeC..., qui a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile, a ainsi été mise à même de faire valoir, avant l'intervention de l'arrêté qui lui a refusé l'admission au séjour et l'a également obligée à quitter le territoire français, tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de ces mesures ; qu'en outre, lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; que, par suite, la garantie consistant dans le droit à être entendu préalablement à la mesure d'éloignement, telle qu'elle est notamment consacrée par le droit de l'Union, n'a pas été méconnue ;

6. Considérant que MmeC..., entrée en France le 12 février 2014 en vue d'y solliciter l'asile, fait valoir qu'elle vit en concubinage avec un compatriote titulaire d'un titre de séjour valable jusqu'en 2018, dont la famille se trouve en France et avec lequel elle a donné naissance à une enfant née le 30 novembre 2014 ; qu'elle se prévaut également de la présence de son frère sur le territoire français ; que toutefois, l'intéressée ne justifie pas par les pièces produites au dossier de la vie commune alléguée ni de l'ancienneté de la relation alléguée avec le père de son enfant ; qu'elle ne justifie pas davantage qu'elle serait isolée en cas de retour dans son pays d'origine qu'elle avait quitté depuis seulement neuf mois à la date de l'arrêté contesté et où elle avait vécu jusqu'à l'âge de vingt-deux ans ; que, dans ces conditions, la décision l'obligeant à quitter le territoire français n'a pas porté au droit de Mme C...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît ainsi pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'alors que l'intéressée ne soutient pas qu'elle était dans l'impossibilité de supporter le voyage sans danger pour sa santé du fait de sa grossesse, et pour les mêmes motifs, le préfet de l'Eure n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire serait illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus d'un titre de séjour ;

8. Considérant que, pour les raisons exposées au points 6 et 7, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire doit être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet de l'Eure.

Délibéré après l'audience publique du 17 décembre 2015 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 31 décembre 2015.

L'assesseur le plus ancien,

Signé : O. NIZETLe président de chambre,

président rapporteur,

Signé : P.-L. ALBERTINILe greffier,

Signé : M.-T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

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N°15DA01234

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA01234
Date de la décision : 31/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: Mme Pestka
Avocat(s) : SELARL MADELINE-LEPRINCE-MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-12-31;15da01234 ?
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