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04/11/2015 | FRANCE | N°15DA00339.doc

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 04 novembre 2015, 15DA00339.doc


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Vivauto PL a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 8 février 2013 par lequel le préfet de la Somme a suspendu pour une durée d'un an l'agrément du centre de contrôle technique poids lourds de Glisy (Somme) qu'elle exploite sous l'enseigne Autovision PL et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1300394 du 30 décembre 2014, le tribunal a

dministratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Vivauto PL a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 8 février 2013 par lequel le préfet de la Somme a suspendu pour une durée d'un an l'agrément du centre de contrôle technique poids lourds de Glisy (Somme) qu'elle exploite sous l'enseigne Autovision PL et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1300394 du 30 décembre 2014, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 février et 13 octobre 2015, la société Vivauto PL, représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 30 décembre 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 8 février 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'une omission à statuer ;

- il se fonde à tort sur les dispositions de l'arrêté du 18 juin 1991 ;

- la décision attaquée a méconnu le caractère contradictoire de la procédure ;

- le principe d'impartialité n'a pas été respecté ;

- les dispositions de l'article R. 323-14 du code de la route méconnaissent le principe de légalité des délits et des peines ;

- le principe de responsabilité personnelle a été méconnu ;

- la sanction est disproportionnée ;

- elle n'a pas eu connaissance des agissements de ses employés qu'elle a mis à pied ;

- elle a pris les mesures destinées à corriger les dysfonctionnements relevés.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 3 juillet 2015 et le 19 octobre 2015, le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté du ministère de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer du 27 juillet 2004 relatif au contrôle technique des véhicules lourds ;

- le code de la route ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lavail Dellaporta, président assesseur,

- les conclusions de M. Guyau, rapporteur public,

- et les observations de Me B...substituant MeC..., pour la société Vivauto PL.

1. Considérant que le 29 octobre 2012, une opération de vérification menée conjointement par les services de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Picardie et la police judiciaire a révélé que les contrôleurs du centre de contrôle technique de poids lourds Autovision de Glisy, exploité par la société Vivauto PL, délivraient, contre rémunération, des certificats de contrôle technique falsifiés sans avoir examiné les véhicules concernés ; qu'outre des mesures de suspension temporaire de l'agrément individuel des employés coupables de ces faits, le préfet de la Somme a, par arrêté du 8 février 2013, prononcé la suspension de l'agrément des installations de ce centre pour une durée d'un an ; que la société Vivauto PL relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il résulte des termes mêmes du considérant 7 du jugement du tribunal administratif d'Amiens que les premiers juges ont statué sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 323-14 du code de la route et du principe de légalité des délits et des peines ; que le moyen tiré d'une omission de statuer manque en fait et doit être écarté ; qu'il en est de même de celui tiré de la référence erronée aux dispositions de l'arrêté du 18 juin 1991 relatif au contrôle technique des véhicules de moins de 3,5 tonnes, dès lors qu'il résulte des visas du jugement attaqué que les premiers juges ont entendu statuer au regard des dispositions de l'arrêté du 27 juillet 2004 relatif au contrôle technique des véhicules lourds ; que cette erreur matérielle, qui concerne au demeurant le bien-fondé du jugement, n'a donc aucune influence sur sa régularité ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué :

3. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article R. 323-14 du code de la route, il ne peut être procédé au retrait ou à la suspension de l'agrément qu'après que son bénéficiaire et le représentant du réseau de contrôle auquel les installations sont éventuellement rattachées ont pu être entendus et mis à même de présenter des observations écrites ou orales ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 25 de l'arrêté ministériel du 27 juillet 2004 relatif au contrôle technique des véhicules lourds, pris pour leur application, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) Avant toute décision, le préfet informe par écrit l'exploitant du centre de contrôle de son intention de suspendre ou de retirer l'agrément du centre, pour tout ou partie des catégories de contrôles, en indiquant les faits qui lui sont reprochés et en leur communiquant le dossier sur la base duquel la procédure est initiée. Celui-ci dispose d'un délai d'un mois, à compter de la présentation du courrier, pour être entendu et faire part de ses observations. (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'administration a fait connaître à la société Vivauto PL les manquements constatés au cours d'une visite de contrôle par un courrier daté du 7 novembre 2012 en l'invitant à faire connaître ses observations écrites ; que la société a ensuite été convoquée à une réunion contradictoire le 4 janvier 2013 au cours de laquelle elle a eu l'occasion de commenter les observations écrites qu'elle avait transmises à la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Picardie le 27 décembre 2012 ; qu'à l'issue de la réunion contradictoire dont il a été dressé procès-verbal, la société requérante, qui, contrairement à ce qu'elle soutient, a eu connaissance de l'ensemble des faits relevés à l'occasion du contrôle du 29 octobre 2012, y compris de ceux concernant les agissements de ses employés qu'elle a au demeurant mis à pied dès le lendemain, a présenté de nouvelles observations écrites par courrier du 25 janvier 2013 ; que la circonstance que lors de la réunion du 4 janvier 2013, les agents de l'administration n'aient pas encore été mis en possession des observations écrites de l'entreprise du 27 décembre 2012 demeure sans incidence sur la régularité de la procédure dès lors qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet a bien pris connaissance de ces observations avant de se prononcer et qu'aucune disposition n'impose en outre que des observations écrites soient présentées avant que des observations orales ne soient recueillies par les services de contrôle ; que par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire doit être écarté ;

4. Considérant que l'attribution, par des dispositions législatives ou réglementaires, à une autorité administrative du pouvoir de fixer des règles dans un domaine déterminé et d'en assurer elle-même le respect, par l'exercice d'un pouvoir de contrôle des activités exercées et de sanction des manquements constatés, ne contrevient pas aux exigences de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen et de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que ce pouvoir de sanction est aménagé de telle façon que soient assurés le respect des droits de la défense, le caractère contradictoire de la procédure et l'impartialité de la décision ; que si les agents chargés de la surveillance des centres de contrôle technique agissent pour le compte du ministre chargé du transport sous l'autorité du préfet, les conditions dans lesquelles ces agents s'acquittent de cette fonction et la procédure contradictoire prévue tant par les dispositions du IV de l'article R. 323-14 du code de la route que par celles de l'article 25 précité de l'arrêté du 27 juillet 2004 ne conduisent pas le préfet à prendre parti avant l'issue de cette procédure sur les faits qui sont reprochés aux personnes morales ou physiques qui peuvent, le cas échéant, être sanctionnés ; qu'il suit de là que le moyen invoqué ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant que si la société Vivauto PL fait valoir que le préfet de la Somme aurait manqué, au cas particulier, au principe général d'impartialité qui s'impose à l'ensemble des autorités administratives en prenant parti par avance sur les faits susceptibles de justifier la mesure envisagée dans une correspondance du 7 novembre 2012, il résulte des termes de cette dernière que le représentant de l'Etat s'est borné à satisfaire aux exigences du caractère contradictoire de la procédure en informant, d'une part, la société requérante de l'existence de dysfonctionnements susceptibles de motiver l'application d'une sanction et en l'invitant, d'autre part, à présenter ses observations sur les éléments recueillis par l'administration à l'issue du contrôle du 29 octobre 2012 ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 323-14 du code de la route : " I. L'agrément des installations d'un centre de contrôle est délivré par le préfet du département où est implanté le centre. / (...) IV. - L'agrément des installations de contrôle peut être suspendu ou retiré pour tout ou partie des catégories de contrôles techniques qu'il concerne si les conditions de bon fonctionnement des installations ou si les prescriptions qui leur sont imposées par la présente section ne sont plus respectées, et après que la personne bénéficiaire de l'agrément et le représentant du réseau de contrôle auquel les installations sont éventuellement rattachées ont pu être entendus et mis à même de présenter des observations écrites ou orales. / En cas d'urgence, l'agrément des installations de contrôle peut être suspendu immédiatement pour une durée maximale de deux mois " ;

7. Considérant qu'il ressort des termes mêmes des dispositions précitées du code de la route, que pour les sanctions administratives susceptibles d'être infligées aux exploitants de centre de contrôle technique, le principe de légalité des délits et des peines est satisfait dès lors que les textes applicables font référence aux obligations auxquelles les intéressés sont soumis en raison de l'activité qu'ils exercent ; que, par suite, le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, des dispositions de l'article R. 323-14 du code de la route ne peut être accueilli ;

8. Considérant que le préfet de la Somme s'est fondé pour prendre la sanction de suspension d'agrément sur le motif que les agissements constatés révélaient un dysfonctionnement grave dans la gestion du centre, son organisation et la surveillance de l'activité des contrôleurs et du chef du centre de contrôle technique en cause et donc sur des manquements propres à la société exploitant ce centre ; que par suite le moyen tiré de la méconnaissance du principe de responsabilité personnelle ne peut, dès lors, qu'être écarté ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport rédigé le 6 novembre 2012 par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Picardie, que les contrôleurs techniques du centre de Glisy et la société Vivauto PL qui les employait se sont rendus coupables de graves manquements à la réglementation du contrôle technique des véhicules ; que ces agissements révèlent, en particulier, de sérieuses carences de la part de la société dans l'organisation et le fonctionnement de ce centre et un défaut caractérisé de surveillance de ses préposés, alors qu'au cours des années précédentes, notamment en 2007 et 2009, diverses anomalies dans le fonctionnement du centre avaient déjà été relevées à plusieurs reprises ; que la société Vivauto PL ne saurait s'exonérer de sa responsabilité en faisant valoir que les mesures de contrôle et d'audit qu'elle a mises en oeuvre conformément aux dispositions règlementaires de même que d'autres contrôles assurés par l'organisme technique central (OTC) n'auraient pas permis de déceler les agissements frauduleux des contrôleurs du centre de Glisy avant le contrôle du 29 octobre 2012 ; qu'elle ne peut davantage, s'agissant d'une mesure de sanction, utilement exciper de la circonstance que des mesures correctrices auraient été ultérieurement adoptées par elle ; que, par suite, en décidant, dans les circonstances de l'espèce, de suspendre pour une durée d'un an l'agrément de l'installation de Glisy, le préfet de la Somme n'a pas infligé à celle-ci une sanction disproportionnée ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Vivauto PL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Vivauto PL est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Vivauto PL et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Copie sera adressée au préfet de la Somme.

Délibéré après l'audience publique du 23 octobre 2015 à laquelle siégeaient :

- M. Michel Hoffmann, président de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- M. Laurent Domingo, premier conseiller.

Lu en audience publique le 4 novembre 2015.

Le rapporteur,

Signé : M. LAVAIL DELLAPORTALe président de chambre,

Signé : M. A...

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

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N°15DA00339


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA00339.doc
Date de la décision : 04/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

55-02 Professions, charges et offices. Accès aux professions.


Composition du Tribunal
Président : M. Hoffmann
Rapporteur ?: M. Marc (AC) Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : KGA AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-11-04;15da00339.doc ?
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