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24/09/2015 | FRANCE | N°15DA00626

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (bis), 24 septembre 2015, 15DA00626


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés du 6 mars 2015 par lesquels le préfet de la Seine-Maritime, d'une part, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination et, d'autre part, a ordonné son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1500720 du 9 mars 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 6 mars 2015 ordonnant le pla

cement de l'intéressé en rétention administrative et a rejeté le surplus de la demande....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés du 6 mars 2015 par lesquels le préfet de la Seine-Maritime, d'une part, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination et, d'autre part, a ordonné son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1500720 du 9 mars 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 6 mars 2015 ordonnant le placement de l'intéressé en rétention administrative et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 avril 2015, le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant que, par son article 1er, il a annulé l'arrêté du 6 mars 2015 ordonnant le placement en rétention administrative de M.B... ;

2°) de rejeter, dans cette mesure, la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Rouen.

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation (...) " ; qu'en vertu des dispositions du II de l'article L. 511-1 du même code, le risque que l'étranger se soustraie à son obligation de quitter le territoire est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, notamment en vertu du a) lorsque l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français ou n'y a pas sollicité de titre de séjour, ou en vertu du f) si l'étranger a dissimulé des éléments de son identité ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., ressortissant tunisien né le 10 mars 1985, a déclaré être entré en France irrégulièrement en 2009 démuni de tout titre l'y autorisant ; qu'il s'y est irrégulièrement maintenu depuis cette date ; qu'à la suite de la retenue pour vérification du droit au séjour dont il a fait l'objet par les services de police du Havre le 5 mars 2015, le préfet de la Seine-Maritime a ordonné, par un arrêté du 6 mars 2015, son placement en rétention administrative pour une durée de cinq jours ; qu'il ressort des éléments versés au dossier, et notamment du procès-verbal d'audition, que l'intéressé a utilisé un document d'identité française et un titre de séjour falsifiés et a exercé pendant plusieurs années une activité professionnelle en usant de ces documents ; que l'intéressé a changé à plusieurs reprises de villes et de domiciliation au cours de son séjour irrégulier ; qu'interrogé par les personnels de police, il a également procédé à des fausses déclarations notamment concernant sa nationalité ; que son passeport tunisien en cours de validité ayant été découvert à la suite d'une perquisition de police à son domicile où il l'avait caché, il doit être regardé comme ayant dissimulé des éléments de son identité et, en tout état de cause, sa véritable nationalité ; que, par suite et alors même qu'à la date de l'arrêté attaqué, l'intéressé justifiait d'un passeport tunisien en cours de validité ainsi que d'une adresse qui présentait une certaine stabilité, ces circonstances ne sont pas, à elles seules en l'espèce, de nature à faire regarder l'intéressé comme présentant des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à la mesure d'éloignement dont il fait l'objet, au sens des dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a retenu le motif tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

3. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés devant la juridiction administrative par M. B...à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision ordonnant son placement en rétention administrative ;

4. Considérant que, par un arrêté du 15 janvier 2013, le préfet de la Seine-Maritime a donné délégation à M.C..., chef de la section éloignement et contentieux, à effet de signer notamment les mesures ordonnant le placement en rétention administrative ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté ;

5. Considérant que l'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'acte doit être écarté ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'un étranger fait l'objet d'une mesure (...) de placement en rétention et qu'il ne parle pas le français, il indique au début de la procédure une langue qu'il comprend. Il indique également s'il sait lire. Ces informations sont mentionnées sur la décision (...) de placement. Ces mentions font foi sauf preuve contraire. La langue que l'étranger a déclaré comprendre est utilisée jusqu'à la fin de la procédure. Si l'étranger refuse d'indiquer une langue qu'il comprend, la langue utilisée est le français " ;

7. Considérant que M. B...a déclaré lors de son audition par les services de police comprendre le français tout en souhaitant bénéficier d'un interprète en langue arabe et il a précisé comprendre la langue arabe lors de la notification, le 6 mars 2015, en présence d'un interprète dans cette langue, de la décision ordonnant son placement en rétention administrative ; qu'il ressort des procès-verbaux d'audition établis les 5 et 6 mars 2015 qu'un interprète en langue arabe a été requis tout au long de la procédure préalable à la mesure attaquée ; que, par suite, les dispositions de l'article L. 111-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en ce qu'elles confèrent des garanties à l'étranger placé en rétention, n'ont pas été méconnues ;

8. Considérant que l'arrêté préfectoral attaqué est suffisamment motivé et a été pris ainsi qu'il a été dit au point 4, par un agent de la préfecture ayant régulièrement reçu délégation de signature en matière d'étrangers ; que M. B...ne fait pas état d'éléments permettant de constater que son droit à être entendu préalablement à l'intervention de celle-ci n'aurait pas pu s'exercer de manière utile ; qu'en dépit de sa volonté d'insertion dans la société française, l'intéressé ne justifie pas de l'existence de liens familiaux d'une particulière intensité sur le territoire français ou d'y disposer de l'ensemble de ses centres d'intérêts de telle sorte que la mesure ne repose pas sur une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; que M.B..., qui a utilisé un titre de séjour falsifié et n'a pas sollicité de titre de séjour, ne justifie pas d'une entrée et d'une présence régulières en France ; qu'il pouvait, dès lors, faire l'objet d'un éloignement sans délai de départ volontaire en application du a) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, M. B... n'est pas fondé, en tout état de cause, à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire et du refus de délai de départ volontaire ;

9. Considérant qu'un justiciable ne peut se prévaloir, à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des stipulations inconditionnelles d'une directive que lorsque l'Etat n'a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires ; qu'il suit de là que M. B...ne peut se prévaloir des stipulations des articles 8-4 et 15 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 et des paragraphes 16 et 17 de son préambule, laquelle a été transposée dans le droit national par la loi du 16 juin 2011, antérieurement à la décision litigieuse ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et de ce qui a été dit au point 2, que la décision contestée n'est pas entachée d'une erreur d'appréciation dans la mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 6 mars 2015 ayant ordonné le placement de M. B... en rétention administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement du 9 mars 2015 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Rouen tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 mars 2015 ordonnant son placement en rétention administrative est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...B....

Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 15DA00626
Date de la décision : 24/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-02 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Légalité interne.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: M. Riou

Origine de la décision
Date de l'import : 03/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-09-24;15da00626 ?
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