La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/09/2015 | FRANCE | N°15DA00414

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (bis), 24 septembre 2015, 15DA00414


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 3 octobre 2014 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1404325 du 12 février 2015, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 mars 2015, Mme F

...C..., veuveA..., représentée par Me D...G..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 3 octobre 2014 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1404325 du 12 février 2015, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 mars 2015, Mme F...C..., veuveA..., représentée par Me D...G..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

2°) d'enjoindre à l'autorité préfectorale de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou la mention " salariée " ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans ces deux cas, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de la munir, dans ce dernier cas et dans l'attente de la nouvelle décision à intervenir, d'une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Hadi Habchi, premier conseiller,

- et les observations de Me B...E..., substituant Me D...G..., représentant MmeC....

Sur la régularité du jugement :

1. Considérant qu'il ressort des termes du jugement attaqué qu'en écartant le moyen tiré de la violation pour erreur de droit de l'article 6 paragraphe 2 de l'accord franco-algérien, le tribunal administratif s'est nécessairement prononcé sur l'interprétation à donner à ces stipulations ; que, par suite, il n'a pas entaché sa décision d'une omission à statuer sur un moyen ;

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision refusant de renouveler le certificat de résidence :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français / (...) / Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux ; / (...) " ;

3. Considérant qu'il est constant qu'à la date à laquelle le préfet a pris son arrêté, le mari, de nationalité française, de MmeC..., ressortissante algérienne, était décédé ; qu'elle n'avait donc plus la qualité de conjoint d'un ressortissant français au sens de ces stipulations ; que, par suite, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas commis d'erreur de droit en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement du paragraphe 2 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

4. Considérant que Mme C...ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ne s'appliquent pas aux ressortissants algériens et qui ne constituaient pas, au demeurant, l'un des fondements de sa demande ;

5. Considérant que les stipulations de l'accord franco-algérien, qui régissent la situation de MmeC..., n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit ; qu'il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation ;

6. Considérant que MmeC..., qui avait épousé un ressortissant français, est entrée régulièrement sur le territoire français le 15 décembre 2007, à l'âge de vingt ans ; que, malgré la cessation de la vie commune dans les mois qui ont suivi son arrivée en France, elle a obtenu un certificat de résidence algérien valable du 21 mai 2010 au 20 mai 2011 en qualité de conjoint d'un ressortissant français ; qu'après son divorce et un second mariage, le 28 septembre 2011, avec M. A..., également ressortissant français, Mme C...a sollicité et obtenu, toujours en cette qualité, un certificat de résidence algérien d'un an, valable du 15 février 2013 au 14 février 2014 ; qu'à la suite du décès de son second époux, le 26 mars 2013, Mme C...a vécu en France sans charge de famille ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait isolée en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite et en dépit de son activité professionnelle récente dans un cabinet médical, en ne prononçant pas sa régularisation, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de l'opportunité de cette régularisation ;

7. Considérant que les stipulations combinées des articles 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne font pas obstacle à ce que les conditions du séjour en France de ressortissants étrangers soient régies par des accords internationaux pouvant prévoir, le cas échéant, des conditions différentes de celles fixées par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les stipulations de l'article 6 paragraphe 2 de l'accord franco-algérien soumettent le renouvellement du certificat de résidence pour les conjoints de Français à une condition de communauté de vie sans prévoir d'exception en cas du décès du conjoint français ; que ces stipulations sont désormais plus restrictives que les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction résultant de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, qui prévoient un droit au renouvellement du titre de séjour en cas de décès du conjoint français ; que, toutefois, ces dispositions ne sont pas directement applicables aux ressortissants algériens qui sont régis par l'accord franco-algérien ; que la différence de traitement ainsi réservé à ces ressortissants par rapport à d'autres catégories d'étrangers soumis au code précité résulte de l'accord international lui-même ; que, compte tenu des objectifs de l'accord et des possibilités de régularisation dont dispose en cas exceptionnel l'autorité administrative française, il n'apparaît pas que cette différence de traitement serait, par elle-même, incompatible avec les stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le moyen tiré de ce que ces stipulations devraient être écartées au bénéfice des dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 6 paragraphe 5 de l'accord franco-algérien : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus / (...) " ;

9. Considérant que Mme C...a demandé, le 31 janvier 2014, le renouvellement du certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " qui lui avait été accordé le 15 février 2013 en qualité de conjoint d'un ressortissant français, sur le fondement des stipulations de l'article 6 paragraphe 2 de l'accord franco-algérien, et non sur celui du paragraphe 5 du même article ; que si cette demande comportait également une demande en qualité de salariée, il ne ressort pas des termes de ce courrier que Mme C...entendait solliciter un certificat de résidence en application du paragraphe 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que, par suite, le moyen tiré du défaut d'examen de sa situation personnelle au titre de ces stipulations ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 6, Mme C...n'a plus d'attaches familiales en France et n'est pas dépourvue d'attaches familiales en Algérie où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt ans ; que si l'exercice d'une activité professionnelle, au titre d'un simple remplacement à la date de la décision attaquée, et quelques liens amicaux attestent d'une insertion, ces circonstances ne suffisent pas à justifier que l'intéressée aurait désormais l'ensemble de ses centres d'intérêt en France ; que, compte tenu des conditions du séjour de Mme C...et en dépit de sa durée, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision attaquée a été prise ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes raisons, il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article 7 de l'accord franco-algérien : " / (...) / b) Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi, un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention " salarié " : cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française (...) " ;

12. Considérant qu'il est constant que le contrat de travail dont Mme C...disposait à la date de la décision attaquée n'était pas visé par les services du ministre chargé de l'emploi, contrairement aux exigences des stipulations précitées de l'article 7 de l'accord franco-algérien, applicable aux titulaires d'un certificat de résident portant la mention " vie privée et familiale " ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de titre de séjour est entachée d'illégalité ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

14. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point précédent que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale à raison de l'illégalité de la décision lui refusant le renouvellement de son titre de séjour ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 12 que Mme C...ne se trouvait pas dans l'un des cas d'obtention de plein droit du certificat de résidence ; que, par suite, le préfet de la Seine-Maritime pouvait légalement l'obliger à quitter le territoire français ;

16. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité ;

En ce qui concerne le délai de départ volontaire accordé :

17. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. - (...) Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ;

18. Considérant que Mme C...s'est prévalue de circonstances particulières, tenant au règlement de la succession de son mari, nécessitant que, à titre exceptionnel, un délai de départ supérieur à trente jours lui fût accordé ; que le préfet a fixé à soixante jours ce délai ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ce délai ferait obstacle à l'exercice des droits de MmeC... ; que, par suite, en fixant le délai de départ volontaire, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

19. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 16 que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale à raison de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

20. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.

''

''

''

''

N°15DA00414 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 15DA00414
Date de la décision : 24/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Hadi Habchi
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : SELARL MADELINE-LEPRINCE-MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 03/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-09-24;15da00414 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award