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24/09/2015 | FRANCE | N°14DA00495

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 24 septembre 2015, 14DA00495


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Association nationale des gens du voyage catholiques (ANGVC) et M. A...ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 28 février 2012 par laquelle le conseil municipal de la commune de Béthisy-Saint-Pierre a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune et d'enjoindre à la commune d'adopter un plan local d'urbanisme modifié.

Par un jugement n° 1202117 du 31 décembre 2013, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.

Proc

dure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 mars 2014 et ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Association nationale des gens du voyage catholiques (ANGVC) et M. A...ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 28 février 2012 par laquelle le conseil municipal de la commune de Béthisy-Saint-Pierre a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune et d'enjoindre à la commune d'adopter un plan local d'urbanisme modifié.

Par un jugement n° 1202117 du 31 décembre 2013, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 mars 2014 et 26 janvier 2015, l'ANGVC et M. F...A..., représentés par Me B...D..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 28 février 2012 ;

3°) d'enjoindre à la commune d'adopter un nouveau plan local d'urbanisme prenant en compte les besoins des gens du voyage en matière d'habitat et d'urbanisme ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Béthisy-Saint-Pierre la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Christian Bernier, président-assesseur,

- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,

- et les observations de Me C...E..., représentant la commune de Béthisy-Saint-Pierre.

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune et tirée du défaut d'intérêt donnant qualité à agir à l'Association nationale des gens du voyage catholiques ;

Sur la régularité du jugement :

1. Considérant qu'il résulte des motifs du jugement attaqué que le tribunal administratif d'Amiens, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a visé le moyen tiré de ce que, en ne prévoyant pas, ou en interdisant dans certaines zones, les stationnements et occupation du sol par les caravanes, le plan local d'urbanisme avait édicté une interdiction générale et absolue, non limitée dans le temps et dans l'espace et qu'il y a répondu au point 5 ; que ce jugement est ainsi suffisamment motivé ;

Sur la légalité du plan local d'urbanisme :

Sur le moyen tiré de ce que les observations du commissaire enquêteur n'auraient pas été prises en compte :

2. Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne fait obligation au conseil municipal de se conformer aux suggestions ou recommandations émises par le commissaire enquêteur dans son rapport ;

3. Considérant que les auteurs du plan local d'urbanisme de la commune de Béthisy-Saint-Pierre, approuvé par la délibération du 28 février 2012, n'étaient pas tenus par la suggestion émanant du commissaire enquêteur de prendre en compte, dans le rapport de présentation du plan, la présence dans la commune de gens du voyage sédentarisés résidant de manière permanente dans des habitats mobiles ; qu'en tout état de cause, ils l'ont prise en considération dans le rapport de présentation ;

Sur la méconnaissance des articles L. 110 et L. 121-1 du code de l'urbanisme :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 110 du code de l'urbanisme : " Le territoire français est le patrimoine commun de la nation. Chaque collectivité publique en est le gestionnaire et le garant dans le cadre de ses compétences. Afin (...), d'assurer sans discrimination aux populations résidentes et futures des conditions d'habitat, d'emploi, de services et de transports répondant à la diversité de ses besoins et de ses ressources, (...) et de promouvoir l'équilibre entre les populations résidant dans les zones urbaines et rurales et de rationaliser la demande de déplacements, les collectivités publiques harmonisent, dans le respect réciproque de leur autonomie, leurs prévisions et leurs décisions d'utilisation de l'espace. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 121-1 du même code alors applicable : " (...) les plans locaux d'urbanisme (...) déterminent les conditions permettant d'assurer, dans le respect des objectifs du développement durable : / (...) / 2° La diversité des fonctions urbaines et rurales et la mixité sociale dans l'habitat, en prévoyant des capacités de construction et de réhabilitation suffisantes pour la satisfaction, sans discrimination, des besoins présents et futurs en matière d'habitat, (...) " ;

5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs pas allégué que la population de la commune de Béthisy-Saint-Pierre se caractériserait par une importante présence de gens du voyage résidant de manière permanente dans des habitats mobiles ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 3, la commune n'a pas ignoré l'existence de gens du voyage sur son territoire ; qu'en outre, cette collectivité locale, qui compte moins de cinq mille habitants, n'est pas au nombre des communes devant obligatoirement accueillir une aire d'accueil des gens du voyage sur le fondement de la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage ; qu'enfin, il résulte du point 3-2-4 du rapport de présentation du plan local d'urbanisme que si quelques constructions spontanées, le plus souvent à usage d'habitation, liées au mode de vie des gens du voyage, se sont développées dans un secteur naturel de la commune, et que si le plan n'autorise pas d'extension de ce bâti, le projet communal n'ignore pas, en tout état de cause, la réalité de l'habitat sédentarisé des gens du voyage et la question de sa prise en compte au regard des évolutions susceptibles d'intervenir ; qu'en effet, le rapport indique que, sur la base des conclusions du diagnostic engagé par l'Etat, la commune pourrait être conduite à ajuster le plan local d'urbanisme dans le cadre d'une prochaine modification ou révision d'ici 2016 ; que, dès lors, la seule circonstance que la possibilité d'installer des résidences mobiles ne soit prévue, à ce stade, dans aucune de ces zones est insuffisante pour établir que les auteurs du plan local d'urbanisme auraient méconnu les objectifs de mixité sociale fixés par les dispositions de l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme et auraient de ce fait adopté un document discriminatoire en contradiction avec les dispositions de l'article L. 110 du même code ;

Sur le moyen tiré de ce que le plan local d'urbanisme interdirait de manière générale et absolue l'installation de résidences mobiles permanentes :

6. Considérant qu'un plan local d'urbanisme a pour objet de déterminer le parti d'aménagement à retenir en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction ;

7. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le plan local d'urbanisme de la commune de Béthisy-Saint-Pierre, qui satisfait à l'objet rappelé au point précédent, aurait entendu prohiber de manière générale et absolue l'installation de résidences mobiles permanentes ou empiéter sur les pouvoirs de police municipal que le maire exerce en vertu du code général des collectivités territoriales ;

Sur la méconnaissance des articles L. 123-1, L. 123-1-2 et R.123-2 du code de l'urbanisme :

8. Considérant qu'il résulte des dispositions des articles L. 123-1, L. 123-1-2 et R. 123-2 du code de l'urbanisme que le plan local d'urbanisme comprend notamment un rapport de présentation qui explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement ; que ce rapport s'appuie sur un diagnostic établi au regard des prévisions économiques et démographiques et des besoins répertoriés en matière de développement économique, de surfaces et de développement agricoles, de développement forestier, d'aménagement de l'espace, d'environnement, notamment en matière de biodiversité, d'équilibre social de l'habitat, de transports, de commerce, d'équipements et de services ;

9. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le diagnostic du plan local d'urbanisme n'aurait pas été établi au regard des prévisions et besoins cités par les dispositions mentionnées ci-dessus ; que s'il ne fait pas mention de " la réalité de l'habitat mobile sur la commune ", il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en tout état de cause et ainsi qu'il a été dit au point 5, l'importance prise par ce mode d'habitat à Béthisy-Saint-Pierre était telle que le diagnostic opéré aurait été vicié, faute pour ses auteurs d'en avoir tenu compte ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

10. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

11. Considérant que le plan local d'urbanisme de la commune de Béthisy-Saint-Pierre vise à assurer le développement équilibré d'une commune rurale, de moins de cinq mille habitants, située dans un milieu naturel à dominante forestière et à assurer l'insertion harmonieuse des installations et constructions ; qu'à cette fin, il détermine des zones qui auront vocation à accueillir l'habitat, les activités économiques industrielles, artisanales et commerciales, les équipements et les services, les activités agricoles, ainsi que les secteurs naturels à préserver ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 5, que la présence des gens du voyage aurait été un élément significatif au plan démographique ou au regard du mode d'utilisation du sol, qui aurait dû être pris en compte de manière spécifique par les auteurs du plan pour la détermination des zones et l'édiction des prescriptions qui leur sont attachées ; qu'ainsi, sans ignorer la présence de quelques familles en voie de sédentarisation sur le territoire communal, ni les évolutions qui pourraient résulter de la mise en oeuvre du schéma départemental ou de la loi concernant les gens du voyage, en ne prévoyant pas, à la date de la délibération, de dispositions particulières au bénéfice des personnes souhaitant installer leur résidence mobile sur le territoire de la commune, les auteurs du plan n'ont pas, en tout état de cause, porté une atteinte disproportionnée à leur droit à une vie privée et familiale normale ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ANGVC et M. A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge globale de l'ANGVC et de M. A..., une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Béthisy-Saint-Pierre sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'Association nationale des gens du voyage catholiques et de M. A... est rejetée.

Article 2 : L'Association nationale des gens du voyage catholiques et M. A...verseront à la commune de Béthisy-Saint-Pierre la somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'Association nationale des gens du voyage catholiques, à M. F...A...et à la commune de Béthisy-Saint-Pierre.

Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Oise.

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N°14DA00495 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14DA00495
Date de la décision : 24/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU).


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Christian Bernier
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : LEPRETRE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-09-24;14da00495 ?
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