Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le centre hospitalier de Cambrai à lui verser une somme de 220 320,06 euros en réparation des préjudices subis du fait des conséquences de l'opération chirurgicale du 2 novembre 2000.
Par un jugement n° 1107542 du 20 novembre 2013, le tribunal administratif de Lille a condamné le centre hospitalier de Cambrai à verser à Mme A...une somme de 59 152,90 euros.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 janvier 2014 et le 28 juillet 2015, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Lille du 20 novembre 2013 ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Cambrai à lui verser une somme supplémentaire de 111 163,87 euros ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Cambrai une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Domingo, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Guyau, rapporteur public.
1. Considérant que Mme A...relève appel du jugement du 20 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Lille n'a fait que partiellement droit à ses conclusions tendant à la condamnation du centre hospitalier de Cambrai à l'indemniser des fautes résultant, d'une part, d'un défaut d'information sur les conséquences de l'intervention chirurgicale dont elle a fait l'objet et, d'autre part, des erreurs médicales commises à l'occasion de celle-ci ;
Sur la faute liée à un défaut d'information :
2. Considérant que, lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que, si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité ou de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les médecins de leur obligation ;
3. Considérant qu'un manquement des médecins à leur obligation d'information engage la responsabilité de l'hôpital dans la mesure où il a privé le patient d'une chance de se soustraire au risque lié à l'intervention en refusant qu'elle soit pratiquée ; que c'est seulement dans le cas où l'intervention était impérieusement requise, en sorte que le patient ne disposait d'aucune possibilité raisonnable de refus, que les juges du fond peuvent nier l'existence d'une perte de chance ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, d'une part, que la fracture du tibia et du péroné de la jambe gauche dont souffrait Mme A... nécessitait de manière impérieuse une intervention chirurgicale visant à en permettre la consolidation et, d'autre part, qu'il n'y avait pas d'alternative thérapeutique moins risquée que l'opération réalisée ; que, dès lors, Mme A... ne disposait pas d'une possibilité raisonnable de refuser cette intervention ; que, par suite, la faute commise par le centre hospitalier de Cambrai, qui n'a pas informé l'intéressée des risques encourus, n'a pas entraîné, dans les circonstances de l'espèce, de perte de chance pour Mme A... de se soustraire au risque qui s'est réalisé ; qu'aucune indemnisation n'est, par conséquent, due à ce titre ;
Sur l'indemnisation des préjudices résultant des conséquences de l'intervention chirurgicale :
En ce qui concerne la perte de gains professionnels actuels :
5. Considérant que si Mme A... n'a pas, en méconnaissance de ses obligations fiscales, déclaré de revenus au titre de l'année 2000, il résulte néanmoins de l'instruction que l'intéressée exerçait, entre le 1er janvier 2000 et le 30 octobre 2000, une activité professionnelle de personnel d'entretien auprès de deux particuliers et pour laquelle elle était rémunérée par des chèques emploi service ; qu'à la suite de la prise en charge médicale par le centre hospitalier de Cambrai de la fracture de sa jambe gauche, Mme A...s'est trouvée, entre le 1er décembre 2000, date de sa sortie du centre hospitalier, et le 11 juillet 2003, date de consolidation de son état de santé, dans une situation d'incapacité temporaire partielle que l'expert a évalué entre 25 % et 50 % selon les périodes et qui doit être regardée comme l'ayant empêchée d'exercer une activité professionnelle ; que la caisse primaire d'assurance maladie du Hainaut n'a versé aucune compensation à ce titre à l'intéressée ; que, toutefois, la fracture de Mme A...aurait, en tout état de cause, fait subir à l'intéressée une période d'incapacité de six mois ; qu'il y a donc lieu de considérer que seule la période d'incapacité du 1er mai 2001 au 11 juillet 2003, imputable aux fautes commises par le centre hospitalier, est susceptible d'ouvrir un droit à indemnité ; qu'au regard des justificatifs des revenus d'activité versés par la requérante, notamment le relevé de carrière à la date du 12 mars 2001 établi par la caisse régionale d'assurance maladie Nord Picardie, permettant de retenir, eu égard aux périodes d'inactivité, une base de revenus nets de 1 000 euros par an, le préjudice tenant aux pertes de gains professionnels actuels doit être fixé à la somme de 1 191 euros ; que compte tenu du taux de 70 % retenu par les premiers juges et non contesté en appel, correspondant à la perte de chance d'échapper à la réalisation du dommage, il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier de Cambrai une indemnité de 834 euros au titre de la réparation de ce préjudice ;
En ce qui concerne la perte de gains professionnels futurs :
6. Considérant que Mme A...n'établit pas que la faute médicale commise par le centre hospitalier de Cambrai l'a empêchée, compte tenu de son incapacité partielle permanente, évaluée à 10 %, d'exercer, entre la date de consolidation de son état de santé le 11 juillet 2003 et au plus tard la date à laquelle elle a été admise, en 2004, à faire valoir ses droits à pension, une activité professionnelle de nature à lui procurer des revenus équivalents à ceux qu'elle soutient avoir perçu avant sa prise en charge médicale ; que, par suite, les conclusions présentées à ce titre par la requérante ne peuvent qu'être écartées ;
En ce qui concerne l'incidence professionnelle :
7. Considérant que Mme A...n'établit pas, par les pièces qu'elle produit, que la perte de revenus qu'elle a subie, mentionnée au point 5, ait pu avoir une incidence sur la détermination de ses droits de retraite, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que ces revenus sont susceptibles de figurer parmi les 21 meilleurs salaires annuels sur la base desquels la caisse régionale d'assurance maladie Nord Picardie a calculé ces droits, ni de valider des trimestres complémentaires qui auraient pu être pris en compte dans l'établissement de sa pension ;
En ce qui concerne le préjudice esthétique et le préjudice sexuel :
8. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que Mme A...souffre, à raison des fautes commises par le centre hospitalier de Cambrai dans la prise en charge de sa fracture de la jambe, d'un préjudice esthétique ou d'un préjudice sexuel ; que c'est par suite à bon droit que les premiers juges ont rejeté la demande de l'intéressée tendant à l'indemnisation de ces postes de préjudice ;
En ce qui concerne les souffrances endurées et le préjudice d'agrément :
9. Considérant que, par le jugement attaqué du 20 novembre 2013, les premiers juges ont considéré que les préjudices correspondant aux souffrances endurées par Mme A..., que l'expert a estimé à 4,5 sur une échelle de 7, et au préjudice d'agrément subi par la requérante en raison de l'impossibilité de pratiquer le vélo, devaient être indemnisés, dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu du taux de perte de chance, par une somme globale de 7 400 euros ; que Mme A...ne se prévaut en appel d'aucun élément susceptible de remettre en cause l'appréciation que les premiers juges ont porté à bon droit sur ces postes de préjudice ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a condamné le centre hospitalier de Cambrai à ne lui allouer que la somme de 59 152,90 euros ; qu'il convient de porter cette somme à 59 986,90 euros ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de Mme A...présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La somme de 59 152,90 euros que le centre hospitalier de Cambrai a été condamné à verser à Mme A...par le jugement du 20 novembre 2013 est portée à 59 986,90 euros.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Lille du 20 novembre 2013 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A...et au centre hospitalier de Cambrai.
Copie sera adressée à la caisse primaire d'assurance maladie du Hainaut et à l'agence régionale de santé du Nord/Pas-de-Calais.
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N°14DA00159