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21/07/2015 | FRANCE | N°14DA00879

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 21 juillet 2015, 14DA00879


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, de condamner la commune de Maromme à lui verser une somme de 55 456 euros à parfaire, majorée des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa demande préalable, en réparation des préjudices subis à raison de l'illégalité de la décision du 7 novembre 2000 du maire de Maromme le maintenant en surnombre pendant un an dans le grade d'assistant territorial d'enseignement artistique à temps complet et le nommant sur u

n poste à temps incomplet, d'autre part, de mettre à la charge de la commune de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, de condamner la commune de Maromme à lui verser une somme de 55 456 euros à parfaire, majorée des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa demande préalable, en réparation des préjudices subis à raison de l'illégalité de la décision du 7 novembre 2000 du maire de Maromme le maintenant en surnombre pendant un an dans le grade d'assistant territorial d'enseignement artistique à temps complet et le nommant sur un poste à temps incomplet, d'autre part, de mettre à la charge de la commune de Maromme une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1100940 du 18 mars 2014, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 mai 2014, M.A..., représenté par Me F... D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la commune de Maromme à lui verser l'indemnité demandée ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Maromme une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret-loi du 29 octobre 1936 relatif aux cumuls de retraites, de rémunérations et de fonctions ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Maryse Pestka, rapporteur public,

- et les observations de Me C...E..., représentant la commune de Maromme.

1. Considérant que M.A..., qui avait été recruté par la commune de Maromme (Seine-Maritime) en tant qu'assistant territorial d'enseignement artistique à temps complet, relève appel du jugement du 18 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la condamnation de cette commune à lui verser une somme de 55 456 euros à parfaire, majorée des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa demande préalable, en réparation des préjudices subis à raison de l'illégalité de la décision du 7 novembre 2000 du maire de Maromme le maintenant en surnombre pendant un an dans le grade d'assistant territorial d'enseignement artistique à temps complet et le nommant sur un poste à temps incomplet ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Maromme :

2. Considérant que le juge d'appel, auquel est déféré un jugement ayant rejeté au fond des conclusions sans que le juge de première instance ait eu besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées devant lui, ne peut faire droit à ces conclusions qu'après avoir écarté expressément ces fins de non-recevoir, alors même que le défendeur, sans pour autant les abandonner, ne les aurait pas reprises en appel ; que si M. A...a présenté devant les premiers juges des conclusions tendant à la condamnation de la commune de Maromme à l'indemniser de chefs de préjudice supplémentaires par rapport à ceux invoqués dans sa réclamation préalable, ces conclusions se rattachaient au même fait générateur et à la même cause juridique que la demande initiale de l'intéressé, dont elles ne constituaient qu'un développement et un complément ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée en première instance par la commune de Maromme et tirée de l'absence de liaison du contentieux afférent à l'indemnisation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence dont a fait pour la première fois état M. A...devant le tribunal administratif doit être écartée ;

Sur l'exception de prescription quadriennale :

3. Considérant que s'agissant de la période antérieure au 1er janvier 2006, le délai de prescription quadriennale n'a commencé à courir à l'égard de M. A...qu'à compter de la date de l'arrêt de la cour de céans du 14 février 2007 confirmant le jugement du 8 mars 2005 par lequel le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision du 7 novembre 2000 mentionnée au point 1 ; qu'ainsi, le 24 novembre 2010, date de réception par la commune de Maromme de la réclamation préalable à fin d'indemnisation formée par l'intéressé, la créance, dont il se prévalait à raison de l'illégalité de cette décision, n'était pas atteinte par la prescription, fût-ce partiellement ; qu'il suit de là que l'exception de prescription quadriennale opposée par la commune de Maromme en tant qu'elle concerne la période antérieure au 1er janvier 2006 doit être écartée ;

Sur la responsabilité :

4. Considérant que, comme il vient d'être dit au point 3, par un jugement du 8 mars 2005, le tribunal administratif de Rouen a annulé, pour un motif de légalité interne, la décision du 7 novembre 2000 par laquelle le maire de Maromme a maintenu en surnombre M. A... pendant un an dans le grade d'assistant territorial à temps complet et l'a nommé sur un poste à temps incomplet ; que l'illégalité dont est entachée cette décision est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Maromme à l'égard de M. A...;

Sur le préjudice :

5. Considérant qu'en vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre ; que sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité ; que, pour l'évaluation du montant de l'indemnité due, doit être prise en compte la perte du traitement ainsi que celle des primes et indemnités dont l'intéressé avait, pour la période en cause, une chance sérieuse de bénéficier, à l'exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions ; qu'enfin, il y a lieu de déduire, le cas échéant, le montant des rémunérations que l'agent a pu se procurer par son travail au cours de la période d'éviction ;

6. Considérant qu'en vertu de l'article 97 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable au présent litige, dans le cas où un emploi est susceptible d'être supprimé au sein des effectifs d'une collectivité territoriale et que cette dernière n'est pas en mesure d'offrir au fonctionnaire occupant cet emploi un autre emploi correspondant à son grade, l'intéressé est maintenu en surnombre pendant un an ; qu'au terme de ce délai, le fonctionnaire concerné est pris en charge, en fonction de son grade, soit par le Centre national de la fonction publique territoriale, soit par le centre de gestion dans le ressort duquel se trouve la collectivité ou l'établissement ; que, pendant la période de prise en charge, l'intéressé reçoit la rémunération correspondant à l'indice détenu dans son grade, déduction faite du montant des rémunérations nettes perçues à titre de cumul d'activités ; qu'aux termes de l'article 7 du décret-loi du 29 octobre 1936, en vigueur jusqu'au 1er juillet 2007 : " Nul ne peut exercer simultanément plusieurs emplois rémunérés sur les budgets des collectivités visées par l'article 1er. / Est considéré comme emploi pour l'application des règles posées au présent titre, toute fonction qui, en raison de son importance, suffirait à occuper normalement à elle seule l'activité d'un agent et dont la rémunération, quelle que soit sa dénomination, constituerait à raison de sa quotité un traitement normal pour ledit agent. / (...) / Il ne pourra être dérogé qu'à titre exceptionnel aux dispositions qui précèdent. " ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M.A..., maintenu en surnombre durant un an dans les effectifs de la commune de Maromme, a été ensuite pris en charge, à compter du 15 novembre 2001 et jusqu'au 1er septembre 2007, par le centre de gestion de la fonction publique territoriale de la Seine-Maritime, qui, conformément aux dispositions sus-rappelées de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984, lui a versé, durant cette période, une rémunération correspondant à l'indice détenu par lui dans son grade, après déduction du montant des rémunérations nettes perçues de la commune de Gonfreville-l'Orcher, qui l'employait en tant qu'intervenant à temps incomplet au sein de son école de musique, soit un tiers temps complet, dans le cadre d'un cumul d'activités ; qu'en raison de la faible quotité horaire de ces fonctions, M. A... ne peut être regardé comme ayant occupé un emploi, au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article 7 du décret-loi du 29 octobre 1936, lui faisant obligation d'obtenir une autorisation de cumuls de rémunérations ; qu'ainsi, au cours de cette période, M. A... a subi un préjudice, en lien avec son placement illégal auprès du centre de gestion, pour avoir été privé, en raison de la déduction ainsi pratiquée, d'une partie de sa rémunération ; qu'il y a lieu de lui allouer la somme non contestée de 30 947 euros ;

8. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la prime annuelle versée par la commune de Maromme à ses agents puisse être regardée, ainsi que cette dernière se borne à l'alléguer, comme ayant le caractère d'une indemnité destinée à compenser les frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif par les agents communaux de leurs fonctions ; que cette prime doit, dès lors, être regardée comme constituant un complément de rémunération dont M. A... aurait pu bénéficier au cours de la période durant laquelle il a été pris en charge par le centre de gestion de la fonction publique territoriale de la Seine-Maritime ; que, par suite, et alors même qu'il ne peut justifier d'un service fait au sein des effectifs de la commune de Maromme, le requérant est fondé à demander la condamnation de celle-ci à lui verser, en réparation du préjudice subi, une indemnité évaluée à la somme non contestée de 9 509 euros ;

9. Considérant, en revanche, que, si M. A...soutient qu'il a subi un préjudice moral lié aux conditions vexatoires dans lesquelles serait intervenue la suppression illégale de son poste, il n'établit pas, par ses seules allégations, la réalité de telles conditions, ni, par suite, celle du préjudice dont il fait état ;

10. Considérant que M. A...a droit aux intérêts au taux légal sur l'indemnité totale de 40 456 euros mise à la charge de la commune de Maromme, à compter du 24 novembre 2010, date de réception par cette commune de sa demande préalable à fin d'indemnisation ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 18 mars 2014, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; qu'en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Maromme le versement à M. A...d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M.A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Maromme demande au titre des frais de même nature ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 18 mars 2014 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La commune de Maromme versera à M. A...la somme de 40 456 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 24 novembre 2010.

Article 3 : La commune de Maromme versera à M. A...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Maromme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et à la commune de Maromme.

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14DA00879
Date de la décision : 21/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Rémunération - Indemnités et avantages divers.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. Nowak
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: Mme Pestka
Avocat(s) : SCP CHENEAU et PUYBASSET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/08/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-07-21;14da00879 ?
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