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23/06/2015 | FRANCE | N°13DA02080

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (ter), 23 juin 2015, 13DA02080


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Les Terres à Maisons Ile-de-France SNC a demandé au tribunal administratif de Rouen le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 705 095 euros et la restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 322 568 euros, au titre de la période du 1er janvier 2008 au 10 mars 2010.

Par un jugement n° 1102010 du 17 octobre 2013, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et u

n mémoire, enregistrés le 15 décembre 2013 et le 4 juin 2015, la société Les Terres à Maison...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Les Terres à Maisons Ile-de-France SNC a demandé au tribunal administratif de Rouen le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 705 095 euros et la restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 322 568 euros, au titre de la période du 1er janvier 2008 au 10 mars 2010.

Par un jugement n° 1102010 du 17 octobre 2013, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 décembre 2013 et le 4 juin 2015, la société Les Terres à Maisons Ile-de-France SNC, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 17 octobre 2013 ;

2°) de prononcer le remboursement et la restitution demandées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Domingo, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Marjanovic, rapporteur public.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

1. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 12 de la directive n° 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée : " 1. Les États membres peuvent considérer comme assujetti quiconque effectue, à titre occasionnel (...) notamment une seule des opérations suivantes : (...) b) la livraison d'un terrain à bâtir. (...) 3. Aux fins du paragraphe 1, point b), sont considérés comme " terrains à bâtir " les terrains nus ou aménagés, définis comme tels par les États membres " ; qu'en vertu de l'article 135 de la même directive : " 1. Les États membres exonèrent les opérations suivantes : (...) k) les livraisons de biens immeubles non bâtis autres que celles des terrains à bâtir visés à l'article 12, paragraphe 1, point b) (...) " ; que selon l'article 392 : " Les États membres peuvent prévoir que, pour les livraisons de bâtiments et de terrains à bâtir achetés en vue de la revente par un assujetti qui n'a pas eu droit à déduction à l'occasion de l'acquisition, la base d'imposition est constituée par la différence entre le prix de vente et le prix d'achat " ;

2. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 257 du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur : " Sont également soumis à la taxe sur la valeur ajoutée (...) 6° Sous réserve du 7° : a. les opérations qui portent sur des immeubles (...) et dont les résultats doivent être compris dans les bases de l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux ; / 7° Les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles. Ces opérations sont imposables même lorsqu'elles revêtent un caractère civil. 1. Sont notamment visés : les ventes (...) de terrains à bâtir, des biens assimilés à ces terrains (...) Ces dispositions ne sont pas applicables aux terrains acquis par des personnes physiques en vue de la construction d'immeubles que ces personnes affectent à un usage d'habitation (...) " ; que l'article 268 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur, dispose que : " En ce qui concerne les opérations visées au 6° de l'article 257, la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée est constituée par la différence entre : a. D'une part, le prix exprimé et les charges qui viennent s'y ajouter, ou la valeur vénale du bien si elle est supérieure au prix majoré des charges ; b. D'autre part (...) les sommes que le cédant a versées, à quelque titre que ce soit, pour l'acquisition du bien " ; qu'aux termes de l'article 231 à l'annexe II au code général des impôts applicable jusqu'au 1er janvier 2008 : " 1° Les personnes désignées au 6° de l'article 257 du code général des impôts ne peuvent pas déduire la taxe qui a grevé le prix d'acquisition ou de construction des immeubles (...) " ; qu'enfin aux termes du IV de l'article 206 de cette annexe applicable à compter du 1er janvier 2008 : " (...) / 2. Le coefficient d'admission est nul dans les cas suivants : (...) / 9° Pour les biens acquis ou construits ainsi que les services acquis dont la valeur d'achat, de construction (...) est prise en compte pour l'application des dispositions du 6° de l'article 257 du code général des impôts (...). " ;

3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 257 du code général des impôts que les opérations réalisées par un marchand de biens ou un lotisseur ne sont imposables sur le fondement du 6° de cet article que pour autant qu'elles ne relèvent pas du 7° de ce même article ; que les ventes de terrains à bâtir réalisées au profit de personnes physiques en vue de la construction d'immeubles que ces personnes affectent à un usage d'habitation, qui sont placées hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée immobilière au titre du 7° de l'article 257 du code précité, peuvent être soumises à la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge au titre du 6° du même article si le vendeur est un marchand de biens ou un lotisseur ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Les Terres à Maisons Ile-de-France SNC faisait l'acquisition en vue de la revente à des particuliers de terrains dont il n'est pas contesté qu'ils pouvaient recevoir, dès leur acquisition, des constructions et présentaient ainsi la nature de terrains à bâtir ; que ces opérations de cession de terrains, qui entraient dans le champ d'application de 6° de l'article 257 du code général des impôts, étaient ainsi soumises à la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge en application des dispositions précitées de l'article 268 du même code ;

5. Considérant, en premier lieu, que les dispositions dérogatoires précitées de l'article 392 de la directive 2006/112/CE procédant à la refonte de la directive 77/388/CEE, reprenant précisément les dispositions du f) de l'article 28-3 de cette directive, lesquelles ont été transcrites en droit interne aux articles 268 du code général des impôts et 231 puis 206 de l'annexe II à ce code, prévoient clairement que les opérations de la nature de celles auxquelles se livre la société requérante peuvent être soumises à un régime de taxation sur la marge, dérogatoire au régime de droit commun et alors même que l'acquisition des terrains à bâtir n'aurait pas été assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'en ne prévoyant que la taxation sur la marge réalisée sur des opérations portant sur des terrains à bâtir et dont les résultats doivent être compris dans les bases de l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels ou commerciaux, les dispositions précitées du 6° de l'article 257 du code général des impôts ne sont pas incompatibles avec celles de l'article 392 de la directive du 28 novembre 2006 ; que la circonstance que la Commission européenne a adressé à la France, selon la procédure alors prévue par l'article 226 du Traité des Communautés européennes, un avis motivé tendant à ce que celle-ci modifie sa législation et que, par la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010, le législateur français a procédé à la modification de ce régime au motif qu'il ne respectait pas les dispositions de la directive du 28 novembre 2006, est sans incidence sur la compatibilité du régime issu des dispositions du 6° par rapport aux objectifs de cette directive ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les opérations en cause ne pourraient être soumises à la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge en application des dispositions précitées ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions précitées du 7° de l'article 257 du code général des impôts prévoyant que ce 7° n'était pas applicable aux cessions de terrains acquis par des personnes physiques en vue de la construction d'immeubles que ces personnes affectent à un usage d'habitation n'étaient incompatibles avec la directive du 17 mai 1977 et avec la directive du 28 novembre 2006 qu'en tant qu'elles aboutissaient à faire échapper entièrement à cette taxe les opérations en cause, dès lors qu'en application des dispositions combinées de l'article 13 B, h) et de l'article 2 de la première puis de l'article 135 paragraphe 1, point k) et de l'article 2 de la seconde, toute livraison de terrains à bâtir réalisée à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel doit être soumise à la taxe sur la valeur ajoutée ; que, cependant, tel n'était pas le cas des opérations ainsi visées lorsqu'elles étaient réalisées par des lotisseurs ou des marchands de biens, ces dispositions n'ayant pas pour effet, pour de telles opérations, d'aboutir à une exonération mais seulement, compte tenu des dispositions du 6°, de les soumettre au régime de taxation sur la marge prévu par la combinaison de ce dernier et de l'article 268 du code général des impôts ; que, ainsi qu'il a été dit au point 5, le régime ainsi prévu au 6° était lui-même compatible avec les directives précitées, l'article 28-3-f de la directive du 17 mai 1977 puis l'article 392 de la directive du 28 novembre 2006 autorisant les Etats membres à prévoir que, pour la livraison de terrains à bâtir achetés en vue de la revente par un assujetti qui n'a pas eu droit à déduction à l'occasion de l'acquisition, la base d'imposition est constituée par la différence entre le prix de vente et le prix d'achat ; que, par suite, la société Les Terres à Maisons Ile-de-France SNC n'est pas fondée à soutenir que l'incompatibilité des dispositions du 7° mentionnées ci-dessus imposait d'écarter l'application du 6° aux opérations de cession de terrains à bâtir à des personnes physiques en vue de la construction d'immeubles que ces personnes affectaient à un usage d'habitation qu'elle a réalisées au cours de la période du 1er janvier 2008 au 10 mars 2010 ;

7. Considérant, en troisième lieu, que pour refuser de faire droit aux demandes de remboursement et de restitution présentées par la société Les Terres à Maisons Ile-de-France SNC, l'administration s'est bornée à faire application des dispositions alors en vigueur des articles 257 et 268 du code général des impôts en considérant qu'elle n'étaient pas incompatibles avec les dispositions de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 et n'a pas opposé au contribuable les dispositions d'une directive qui n'aurait pas fait l'objet d'une transposition dans le droit interne ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Les Terres à Maisons Ile-de-France SNC n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société Les Terres à Maisons Ile-de-France SNC la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Les Terres à Maisons Ile-de-France SNC est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Les Terres à Maisons Ile-de-France SNC et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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N°13DA02080


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 13DA02080
Date de la décision : 23/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Communautés européennes et Union européenne - Règles applicables - Fiscalité - Taxe sur la valeur ajoutée.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. Hoffmann
Rapporteur ?: M. Laurent Domingo
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : AURELIA SOCIETE D'AVOCATS SELARL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-06-23;13da02080 ?
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