Vu la requête, enregistrée le 20 février 2014, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par la SELARL Eden avocats ; M. A... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1303325 du 9 décembre 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 5 décembre 2013 du préfet de la Seine-Maritime lui faisant obligation de quitter le territoire français, sans lui accorder le bénéfice d'un délai de départ volontaire et fixant l'Arménie comme pays de destination en cas d'exécution d'office de cette mesure d'éloignement, et, d'autre part, de l'arrêté du même jour du préfet de la Seine-Maritime ordonnant son placement en rétention administrative ;
2°) d'annuler l'arrêté du 5 décembre 2013 du préfet de la Seine-Maritime lui faisant obligation de quitter le territoire, sans lui accorder le bénéfice d'un délai de départ volontaire et fixant l'Arménie comme pays de destination en cas d'exécution d'office de cette mesure d'éloignement ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour d'un mois dans les huit jours à compter de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, sa situation dans le délai d'un mois ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à son conseil dans les conditions prévues par l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement dispensant le rapporteur public, sur sa proposition, d'exposer à l'audience ses conclusions ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Isabelle Agier-Cabanes, président-assesseur,
- les observations de Me Marie Verilhac, avocat de M.A... ;
Sur la décision faisant obligation de quitter le territoire :
1. Considérant que selon la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne (C-166/13 du 5 novembre 2014) rendue sur renvoi préjudiciel d'une juridiction administrative française, le droit d'être entendu dans toute procédure, tel qu'il s'applique dans le cadre de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier et, notamment, de l'article 6 de celle-ci, doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à ce qu'une autorité nationale n'entende pas le ressortissant d'un pays tiers spécifiquement au sujet d'une décision de retour lorsque, après avoir constaté le caractère irrégulier de son séjour sur le territoire national à l'issue d'une procédure ayant pleinement respecté son droit d'être entendu, elle envisage de prendre à son égard une telle décision, que cette décision de retour soit consécutive ou non à un refus de titre de séjour ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal d'audition signé par l'intéressé, que M.A..., qui a été entendu par les services de police le 5 décembre 2013, en particulier en ce qui concerne son âge, sa nationalité, sa situation de famille, ses attaches dans son pays d'origine, ainsi qu'en ce qui concerne les conditions de son entrée en France et de son hébergement, a également été informé qu'il était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prise par l'autorité préfectorale et a été invité à faire connaître ses observations sur cette éventualité ; qu'en dehors de son désaccord, il n'a fait état d'aucun élément particulier, qui aurait pu être ignoré de l'autorité préfectorale ; que, dans ces conditions, M. A...n'a pas été privé du droit d'être entendu et de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision en litige ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaîtrait le principe général du droit d'être entendu, qui est au nombre des principes fondamentaux du droit de l'Union, énoncé notamment par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, doit être écarté ;
3. Considérant que la décision contestée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que par suite, et dès lors que le préfet n'est pas tenu de mentionner l'ensemble des éléments relatifs à la situation personnelle de M.A..., elle est suffisamment motivée ;
4. Considérant que M. A...se prévaut d'une entrée sur le territoire français en 2008 alors âgé de 17 ans, de la présence en France de son père, qui dispose d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade, de sa mère, de deux soeurs scolarisées dont l'une est majeure et d'un frère né en France en 2012 ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui s'est maintenu en France en dépit d'une mesure d'éloignement du 22 septembre 2010 et deux refus d'admission au séjour, est célibataire et sans enfant ; que si son père est temporairement admis au séjour pour bénéficier de soins, ses parents n'ont pas vocation, en dépit de ce qu'il allègue, à s'établir durablement sur le territoire ; qu'il n'établit pas être dépourvu de toute autre attache dans son pays d'origine où vit notamment sa grand-mère ; que, par suite et eu égard aux conditions du séjour en France de M.A..., désormais âgé de vingt deux ans et alors même qu'il a entrepris une formation professionnelle et suivi des cours de français, la décision en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de M.A... ;
Sur la décision de refus d'accorder un délai de départ volontaire :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) / d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 " ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., après être entré irrégulièrement en France en 2008, selon ses dires, s'y est maintenu en dépit d'une mesure d'éloignement et deux refus d'admission au séjour des 24 janvier et 2 juillet 2013 ; que, par suite, sa situation entrait dans le champ d'application des dispositions précitées du d) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent à l'autorité administrative de priver l'étranger d'un délai de départ volontaire sauf circonstance particulière ; que, si le requérant se prévaut de la durée de sa présence en France, de la stabilité de son domicile et de la présence de sa famille en France, le préfet a pu estimer, compte tenu notamment de ce que l'intéressé se maintient irrégulièrement sur le territoire depuis septembre 2010, de la non-exécution de la mesure d'éloignement prise à son encontre et de ce qu'il ne possédait pas de document d'identité en cours de validité, que M. A...n'était pas dans une situation particulière permettant d'écarter le risque de fuite ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
7. Considérant que la décision par laquelle le préfet fixe le pays de destination énonce de manière suffisamment précise et circonstanciée les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde et précise, notamment, que M. A...n'établit pas que sa vie ou sa liberté seraient menacées ou qu'il encourrait des risques d'être exposé à des traitements inhumains ou dégradants ; que, par suite, elle est suffisamment motivée alors même qu'elle ne vise pas le dernier alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
8. Considérant que M. A...ne produit aucun élément de nature à établir la réalité des risques personnels, directs et actuels qu'il prétend encourir en cas d'éloignement vers l'Arménie à raison de son appartenance à la minorité yézide ; qu'au demeurant, sa demande d'asile a été rejetée par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile ; qu'ainsi, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er: La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.
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N°14DA00318
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