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25/09/2014 | FRANCE | N°14DA00261

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (bis), 25 septembre 2014, 14DA00261


Vu, I, sous le n° 14DA00261, la requête enregistrée le 11 février 2014, présentée par le préfet de la Seine-Maritime qui demande à la cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 1400245 du 29 janvier 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen, d'une part, a annulé ses décisions du 27 janvier 2014 tendant à la remise de M. D...aux autorités hongroises et ordonnant son assignation à résidence et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à M. C... une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa s

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Vu, I, sous le n° 14DA00261, la requête enregistrée le 11 février 2014, présentée par le préfet de la Seine-Maritime qui demande à la cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 1400245 du 29 janvier 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen, d'une part, a annulé ses décisions du 27 janvier 2014 tendant à la remise de M. D...aux autorités hongroises et ordonnant son assignation à résidence et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à M. C... une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement ;

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Vu, II, sous le n° 14DA00262, la requête enregistrée le 11 février 2014, présentée par le préfet de la Seine-Maritime qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400245 du 29 janvier 2014 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen qui a annulé, à la demande de M.D..., ses arrêtés du 27 janvier 2014 par lesquels il a ordonné la remise de l'intéressé aux autorités hongroises et l'a assigné à résidence ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Rouen ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu le règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des États membres par un ressortissant d'un pays tiers ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lucienne Erstein, président de la cour,

- et les conclusions de Mme Perrine Hamon, rapporteur public ;

1. Considérant que les requêtes n° 14DA00261 et n° 14DA00262, présentées par le préfet de la Seine-Maritime, sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par une seule décision ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : 1° L'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat en application des dispositions du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers, ou d'engagements identiques à ceux prévus par ledit règlement avec d'autres Etats / (...) / Les dispositions du présent article ne font pas obstacle au droit souverain de l'Etat d'accorder l'asile à toute personne qui se trouverait néanmoins dans l'un des cas mentionnés aux 1° à 4° " ; qu'aux termes des dispositions du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 : " (...) / 2. Par dérogation au paragraphe 1, chaque Etat membre peut examiner une demande d'asile qui lui est présentée par un ressortissant d'un pays tiers, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. Dans ce cas, cet Etat devient l'Etat membre responsable au sens du présent règlement et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité (...) " ;

3. Considérant que si la Hongrie est un Etat membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il appartient néanmoins à l'administration d'apprécier dans chaque cas, au vu des pièces qui lui sont soumises et sous le contrôle du juge, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités de ce pays répondent à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ; que les documents d'ordre général relatifs aux modalités d'application des règles relatives à l'asile par les autorités hongroises, notamment le rapport du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en date du 24 avril 2012, le rapport du Hungarian Helsinki Committee ainsi que plusieurs articles émanant de l'organisation Amnesty International de décembre 2011 que mentionne M.C..., ne suffisent pas à établir que la réadmission d'un demandeur d'asile vers la Hongrie est, par elle-même, constitutive d'une atteinte grave au droit d'asile ; que si l'intéressé fait état de tensions et de violences dans les camps de Debrecen et de Briscke entre demandeurs d'asile y séjournant, il ne ressort pas de son récit que l'intéressé aurait été directement victime de violences ou aurait subi des menaces ; que s'il souligne que l'administration du camp n'assurait qu'un repas par jour pendant son séjour et n'avoir pu travailler à Briscke compte tenu du comportement hostile de la population locale, ces circonstances, à les supposer établies et pour regrettables qu'elles soient, ne peuvent être regardées en l'espèce comme l'ayant privé de l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ; que la circonstance, en outre, qu'il a été déplacé du camp de Debrecen à celui de Briscke par les autorités hongroises ne révèle ni par elle-même, ni, en l'espèce, une atteinte aux droits protégés dont il se prévaut ; qu'il ressort également des pièces du dossier que sa demande d'asile a été enregistrée dès son placement au camp de Debrecen le 22 juin 2013 par les autorités hongroises qui indiquent qu'elles ont dû en interrompre l'examen le 14 octobre 2013 du fait du départ volontaire de l'intéressé ; que ce dernier confirme qu'il a choisi de quitter la Hongrie par ses propres moyens un mois et demi après son arrivée sur le territoire de ce pays ; que, dans ces conditions, M. C...n'établit pas que sa demande d'asile n'a pas été traitée par les autorités hongroises dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile et qu'il aurait personnellement subi des mauvais traitements lors de sa rétention ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a, pour prononcer l'annulation de l'arrêté de remise de l'intéressé aux autorités hongroises et, par voie de conséquence, de l'arrêté l'assignant à résidence, retenu le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C...devant la juridiction administrative ;

Sur l'arrêté de remise aux autorités hongroises :

6. Considérant que la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation manque en fait et doit être écarté ;

7. Considérant que le préfet de la Seine-Maritime a procédé à un réexamen de la situation personnelle de l'intéressé, notamment au regard des nouvelles observations écrites qu'il avait présentées à la suite de l'annulation du premier arrêté de remise aux autorités hongroises du 2 janvier 2014 ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point précédent que la situation personnelle de M. C...ayant été réexaminée par l'autorité préfectorale, la décision attaquée n'est pas identique à celle annulée par le tribunal administratif de Rouen le 3 janvier 2014 ; que, par suite, le moyen, tiré du détournement de pouvoir, ne peut qu'être écarté ;

9. Considérant que, par un arrêt du même jour, la cour a prononcé l'annulation du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen avait annulé l'arrêté du 2 janvier 2014 par lequel le préfet de la Seine-Maritime avait, une première fois, ordonné sa remise aux autorités hongroises et a rejeté les conclusions de M. C...dirigées contre cette décision ; que, par suite, en confirmant la remise de l'intéressé aux autorités hongroises par un nouvel arrêté du 27 janvier 2014, le préfet n'a pas méconnu l'autorité de la chose jugée ;

10. Considérant que, par les dispositions de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger sa remise aux autorités d'un Etat membre de l'Union européenne ; que, dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision de remise aux autorités d'un Etat membre de l'Union européenne ;

11. Considérant que, pour les mêmes raisons que celles exposées au point 3, les moyens, tirés de la méconnaissance des garanties dans la mise en oeuvre du droit d'asile, des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des stipulations de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, doivent être écartés ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté de remise aux autorités hongroises est entaché d'illégalité ;

Sur l'arrêté portant assignation à résidence :

13. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 12 que l'intéressé n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'arrêté de remise aux autorités hongroises pour soutenir que l'arrêté portant assignation à résidence serait privé de base légale ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen, à la demande de M.C..., a annulé les arrêtés du 27 janvier 2014 ordonnant sa remise aux autorités hongroises et l'assignant à résidence ;

Sur les conclusions aux fins de sursis à exécution :

15. Considérant que le présent arrêt statue sur la requête n° 14DA00262 présentée par le préfet de la Seine-Maritime contre le jugement attaqué du 29 janvier 2014 du tribunal administratif de Rouen ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce même jugement sont devenues sans objet ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

16. Considérant que, le requérant ayant la qualité de partie perdante, les conclusions qu'il a présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 29 janvier 2014 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Rouen est rejetée.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution.

Article 4 : Les conclusions présentées en appel par M.C..., sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. D...et à Me A...B....

Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 14DA00261
Date de la décision : 25/09/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Erstein
Rapporteur ?: M. Olivier Yeznikian
Rapporteur public ?: Mme Hamon
Avocat(s) : QUEVREMONT ; QUEVREMONT ; QUEVREMONT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2014-09-25;14da00261 ?
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