Vu la requête, enregistrée le 20 janvier 2014, présentée pour l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) DE HAUTE-NORMANDIE, dont le siège est 61 rue Pierre Renaudel à Rouen (76100), par la SCP Emo Hebert et associés ; l'URSSAF DE HAUTE-NORMANDIE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1201872 du 19 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision du 12 avril 2012 de l'inspecteur du travail de la 6ème section de la Seine-Maritime lui accordant l'autorisation de licencier M. B...;
2°) de rejeter la demande de M. B...;
3°) de mettre à la charge de M. B...une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Maryse Pestka, rapporteur public,
- les observations de Me Sandrine Gillet, avocat de l'URSSAF DE HAUTE-NORMANDIE,
- les observations de M. A...B...;
1. Considérant que l'URSSAF DE HAUTE-NORMANDIE relève appel du jugement du 19 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision du 12 avril 2012 de l'inspecteur du travail de la 6ème section de la Seine-Maritime lui accordant l'autorisation de licencier M.B..., ancien délégué du personnel titulaire, conseiller du salarié et candidat aux élections prud'homales ;
2. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives ou candidats à ces fonctions, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque leur licenciement est envisagé, celui-ci ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec leur appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'à cette fin, l'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat ;
3. Considérant que le caractère contradictoire de l'enquête menée conformément aux dispositions précitées impose à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé fondée sur un motif disciplinaire, d'informer le salarié concerné des agissements qui lui sont reprochés et de l'identité des personnes qui en ont témoigné ; qu'il implique que le salarié protégé soit mis à même de prendre connaissance en temps utile de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande, sans que la circonstance que le salarié est susceptible de connaître le contenu de certaines de ces pièces puisse exonérer l'inspecteur du travail de cette obligation ; qu'il implique également de mettre à même l'employeur et le salarié de prendre connaissance de l'ensemble des éléments déterminants qu'il a pu recueillir, y compris des témoignages, et qui sont de nature à établir ou non la matérialité des faits allégués à l'appui de la demande d'autorisation ; que, toutefois, le caractère contradictoire de l'enquête n'impose pas à l'administration de communiquer au salarié, de sa propre initiative ou dans tous les cas, l'ensemble de ces pièces et éléments ; que lorsque la communication de ces éléments serait de nature à porter gravement préjudice aux personnes qui les ont communiqués, l'inspecteur du travail doit se limiter à informer le salarié protégé et l'employeur, de façon suffisamment circonstanciée, de leur teneur ;
4. Considérant qu'à la suite de l'annulation d'une précédente décision du 9 janvier 2009 de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement de M.B..., prononcée par un jugement du 12 janvier 2012 du tribunal administratif de Rouen, confirmé par un arrêt du 8 novembre 2012 de la cour de céans, l'inspecteur du travail a engagé une nouvelle procédure en informant l'intéressé des faits qui lui étaient reprochés et de l'identité des personnes qui avaient alors témoigné ; que M. B...a également eu connaissance en temps utile de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande de licenciement ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier qu'au cours de la nouvelle enquête, l'inspecteur du travail a recueilli, afin de procéder à des recoupements, outre les témoignages initiaux, ceux de deux autres personnes ; que ces derniers témoignages, dont il n'a pas tenu M. B...informé de la teneur, l'ont conduit à considérer comme établis l'ensemble des propos à caractère raciste reprochés à l'intéressé, alors que seuls certains de ceux-ci avait été tenus pour établis à l'issue de la précédente enquête ; qu'il s'ensuit que l'enquête n'a pas été menée contradictoirement ; que par suite, la décision du 12 avril 2012 a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'URSSAF DE HAUTE-NORMANDIE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision du 12 avril 2012 de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement de M. B...; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. B...qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à l'URSSAF DE HAUTE-NORMANDIE d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'en application de ces mêmes dispositions, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'URSSAF DE HAUTE-NORMANDIE le versement à M. B...d'une somme au titre des frais de même nature ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'URSSAF DE HAUTE-NORMANDIE est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de M. B...présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'URSSAF DE HAUTE-NORMANDIE, à M. A... B...et au ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social.
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N°14DA00117
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