Vu le recours, enregistré le 28 décembre 2012, présenté par le ministre de l'égalité des territoires et du logement ;
Le ministre de l'égalité des territoires et du logement demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1002666 du 30 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé, à la demande de M. et Mme A...C..., l'arrêté du maire de la commune de Guignemicourt du 11 mai 2010 prononçant un sursis à statuer sur leur demande de permis de construire ;
2°) de rejeter la demande de M. et MmeC... ;
.........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marie-Odile Le Roux, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Hubert Delesalle, rapporteur public ;
1. Considérant que M. et Mme C...sont propriétaires d'une parcelle de terrain cadastrée ZE27, située rue de la Vallée sur le territoire de la commune de Guignemicourt (80540) ; qu'en réponse à leur demande de permis de construire une maison d'habitation sur ce terrain, le maire de la commune de Guignemicourt, agissant au nom de l'État, a prononcé un sursis à statuer pour une durée de deux ans par un arrêté du 11 mai 2010 en retenant deux motifs tirés, pour le premier, de ce que la parcelle servant de terrain d'assiette du projet de construction était susceptible d'être classée en zone naturelle et, pour le second, de ce qu'elle faisait l'objet d'un emplacement réservé pour la création d'un tronçon du chemin du tour de ville ; que, par un jugement du 30 octobre 2012 dont le ministre de l'égalité des territoires et du logement relève appel, le tribunal administratif d'Amiens a, notamment, par son article 1er, annulé l'arrêté du maire de Guignemicourt du 11 mai 2010 ;
Sur les motifs d'annulation retenus par le tribunal :
2. Considérant que, pour annuler la décision du maire de Guignemicourt du 11 mai 2010, le tribunal administratif d'Amiens s'est fondé sur deux motifs tirés, l'un, de l'incompétence de l'adjoint au maire de Guignemicourt pour prendre la décision attaquée et, l'autre, de l'absence d'incompatibilité entre le projet de construction des requérants et la réalisation du tronçon du chemin du tour de ville prévue au futur plan local d'urbanisme ; qu'en application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il appartient à la cour de se prononcer sur ces deux motifs d'annulation qui sont contestés devant elle ;
En ce qui concerne le premier motif d'annulation :
3. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints (...) " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement. (...) " ;
4. Considérant que le certificat du maire de la commune établi le 27 novembre 2012 se borne à attester, plus de quatre ans après les faits, que son arrêté du 21 mars 2008 donnant délégation d'une partie de ses fonctions à un adjoint avait " reçu les formalités réglementaires d'affichage " sans préciser ni les dates de ces formalités, ni leurs modalités ; que, compte tenu de ses imprécisions, ce certificat ne saurait suffire à établir l'accomplissement régulier des formalités de publicité de l'arrêté de délégation de fonctions du 21 mars 2008 qui sont seules de nature à lui conférer un caractère exécutoire ; que, dans ces conditions, l'arrêté de délégation n'était pas opposable le 18 mai 2010, date à laquelle l'adjoint chargé de l'urbanisme a signé l'arrêté en litige ; que, par suite, cet arrêté a été pris par une autorité incompétente ;
En ce qui concerne le second motif d'annulation :
5. Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 123-6 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " A compter de la publication de la délibération prescrivant l'élaboration d'un plan local d'urbanisme, l'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 111-8, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan " ;
6. Considérant que l'emplacement réservé par le futur plan local d'urbanisme de la commune de Guignemicourt pour la réalisation du chemin du tour de ville est constitué d'une étroite bande de terrain en limite de la parcelle servant d'assiette au projet de construction en cause ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment de l'étude du 11 août 2010 réalisée par M. B..., expert foncier, que le projet aurait été de nature à compromettre la réalisation de ce chemin du tour de ville et, pour cette seule raison, l'exécution du futur plan local d'urbanisme de la commune ; que, par suite, le maire de la commune ne pouvait se fonder sur ce motif pour opposer à M. et Mme C...un sursis à statuer sur leur demande de permis de construire ;
7. Considérant que la finalité de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme est d'éviter que l'administration, à la suite d'une annulation, prenne une décision entachée d'une illégalité déjà soumise au juge ; que le premier motif du jugement attaqué, analysé au point 4, permettait à lui seul de fonder l'annulation de l'arrêté attaqué ; que si, ainsi que le soutient le ministre, le second motif du jugement, analysé au point précédent, n'aurait pas suffi à lui seul à justifier la même annulation, il permet, en tout état de cause, d'informer l'administration de l'illégalité qui entachait l'un des motifs de sa décision ; que le ministre ne peut donc utilement se prévaloir de la violation de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'égalité des territoires et du logement n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté du maire de la commune de Guignemicourt du 11 mai 2010 ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme C...et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le recours du ministre de l'égalité des territoires et du logement est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à M. et Mme C...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'égalité des territoires et du logement et à M. et Mme A...C....
Copie sera transmise pour information à la commune de Guignemicourt.
''
''
''
''
N°12DA01953 2