Vu la requête, enregistrée le 27 avril 2012, présentée pour Mme F...C..., demeurant..., par la SCP Savoye, Daval ;
Mme C...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement nos 0905046-0906546 du 23 février 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a, d'une part, rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté non daté par lequel le maire de la commune de Givenchy-en-Gohelle a délivré le permis de construire à l'EARL des Alouettes pour la construction d'un bâtiment agricole et, d'autre part, dit qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de la commune de Givenchy-en-Gohelle du 10 juin 2009 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces deux arrêtés ;
3°) de mettre à la charge solidaire de la commune de Givenchy-en-Gohelle et de l'EARL des Alouettes la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 12 mars 2014, présentée pour l'EARL des Alouettes ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bertrand Baillard, premier conseiller,
- les conclusions de M. Hubert Delesalle, rapporteur public,
- et les observations de Me E...A..., substituant Me Savoye, avocat de Mme F... C..., de Me Jean-François Pambo, avocat de la commune de Givenchy-en-Gohelle, et de Me D...B..., intervenant en qualité de collaboratrice de la société d'avocats Fidal, avocat de l'EARL des Alouettes ;
1. Considérant que, par un jugement du 23 février 2012 dont Mme C...relève appel, le tribunal administrative de Lille, après jonction des deux instances introduites par MmeC..., a, d'une part, prononcé un non-lieu à statuer sur la demande de cette dernière tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 juin 2009 par lequel le maire de Givenchy-en-Gohelle a délivré à l'EARL des Alouettes un permis de construire pour la réalisation d'un bâtiment agricole sur une parcelle située rue des Alouettes et, d'autre part, rejeté son autre demande tendant à l'annulation d'un second permis de construire non daté, par lequel la même autorité a délivré à l'EARL un nouveau permis de construire pour la réalisation d'un bâtiment identique sur la même parcelle ;
Sur le non-lieu à statuer opposé par le tribunal à la demande dirigée contre le permis de construire du 10 juin 2009 :
2. Considérant que si la délivrance d'un nouveau permis de construire au bénéficiaire d'un précédent permis, sur le même terrain, a implicitement mais nécessairement pour effet de rapporter le permis initial, ce retrait est indivisible de la délivrance du nouveau permis ; que, par suite, les conclusions aux fins d'annulation du permis initial ne deviennent sans objet du fait de la délivrance d'un nouveau permis qu'à la condition que le retrait qu'il a opéré ait acquis, à la date à laquelle le juge qui en est saisi se prononce, un caractère définitif ; que tel n'est pas le cas lorsque le nouveau permis de construire a fait l'objet d'un recours en annulation ;
3. Considérant que si, par l'arrêté non daté mais postérieur à celui du 10 juin 2009, le maire de Givenchy-en-Gohelle a délivré à l'EARL des Alouettes un nouveau permis de construire autorisant un projet identique sur le même terrain d'assiette qui avait pour effet de rapporter le permis initial, ce second permis a fait lui-même l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; que si les premiers juges ont rejeté la demande dirigée contre le nouvel arrêté par le jugement attaqué, ils ne pouvaient toutefois pas prononcer un non-lieu à statuer sur la demande dirigée contre le permis de construire du 10 juin 2009 dès lors qu'à la date à laquelle ils ont rendu leur jugement, celui-ci était susceptible d'appel et le retrait du premier permis n'avait donc pas acquis de caractère définitif ; que la requérante est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a estimé que sa demande dirigée contre le permis de construire du 10 juin 2009 était privée d'objet ; que, dès lors, le jugement attaqué est irrégulier sur ce point et doit être dans cette mesure annulé ;
4. Considérant qu'il y a lieu pour la cour d'évoquer, dans la même mesure, et de statuer sur la demande dirigée contre le permis de construire du 10 juin 2009 présentée devant le tribunal administratif ;
Sur la légalité de l'arrêté du 10 juin 2009 :
5. Considérant que Mme C...soutient que le permis de construire délivré le 10 juin 2009 méconnaît l'article 10 NC 13 du plan local d'urbanisme de la commune de Givenchy-en-Gohelle relatif aux " espaces libres et plantations " dans les zones à vocation agricole protégée qui dispose notamment que : " Toute installation, quelle que soit sa surface, devra être masquée par deux rangées d'arbres : l'une d'arbres feuillus de haute tige, l'autre d'arbustes buissonneux " ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des plans masse produits au soutien de la demande du permis de construire en litige, que la plantation d'une haie en limite séparative est du bâtiment projeté était prévue et que des plantations préexistaient à l'ouest du bâtiment ; que, toutefois, contrairement à ce que font valoir l'EARL des Alouettes et la commune de Givenchy-en-Gohelle, ces seules plantations ne sauraient être considérées comme suffisantes au regard des exigences de l'article 10 NC 13 du plan local d'urbanisme de la commune dans la mesure où le bâtiment projeté n'est pas masqué du côté de la propriété de MmeC... ; que, dès lors, en accordant le permis de construire du 10 juin 2009, le maire de Givenchy-en-Gohelle a commis une erreur d'appréciation ;
7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations " ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la propriété de Mme C...est située à moins de 25 mètres environ du projet de bâtiment d'élevage pour lequel le maire de Givenchy-en-Gohelle a accordé un permis de construire à l'EARL des Alouettes, lequel a vocation à abriter soixante vaches allaitantes, quarante-cinq bovins d'engraissement et des veaux destinés à renouveler le troupeau ; que si la construction autorisée par le permis attaqué, placée hors des vents dominants, est destinée à remplacer une étable existante devenue vétuste et présente des améliorations par rapport à cette dernière, notamment sur le plan des nuisances olfactives et acoustiques, il ressort des pièces du dossier que la construction projetée, qui sera située non pas à l'emplacement de la précédente stabulation mais sensiblement plus près de l'habitation existante de MmeC..., est de nature non pas à supprimer ou atténuer mais à renforcer, compte tenu de cette importante proximité, les gênes notamment olfactives, acoustiques ou celles liées à la présence de mouches, inhérentes à ce type d'élevage pour lequel les règlements sanitaires départementaux prévoient le plus souvent une distance minimale de 50 mètres avec les habitations des tiers, alors même que ce type de disposition n'était pas, à la date de la décision attaquée, repris dans le règlement sanitaire du Pas-de-Calais ; que, dans les circonstances de l'espèce, le permis de construire est, dès lors, de nature à porter atteinte à la salubrité publique au sens des dispositions précitées du code de l'urbanisme ; que, par suite, en accordant à l'EARL des Alouettes l'autorisation de construire ce bâtiment à proximité de la maison d'habitation occupée par MmeC..., le maire de Givenchy-en-Gohelle a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;
9. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, en l'état du dossier, aucun autre moyen n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la décision attaquée ;
Sur la légalité du permis de construire non daté :
10. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux évoqués au point 8, le maire de Givenchy-en-Gohelle a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en délivrant le permis de construire non daté n° PC 062371090007 ;
11. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, en l'état du dossier, aucun autre moyen n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la décision attaquée ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'EARL des Alouettes et de la commune de Givenchy-en-Gohelle la somme que Mme C...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font par ailleurs obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par l'EARL des Alouettes soit mise à la charge de MmeC..., qui n'est pas la partie perdante ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 23 février 2012 du tribunal administratif de Lille est annulé.
Article 2 : L'arrêté du maire de Givenchy-en-Gohelle du 10 juin 2009 et le permis de construire n° PC 062371090007 sont annulés.
Article 3 : Les conclusions présentées par Mme C...et par l'EARL des Alouettes sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...C..., à l'EARL des Alouettes et à la commune de Givenchy-en-Gohelle.
Copie sera adressée au procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Arras en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative et, pour information, au préfet du Pas-de-Calais.
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N°12DA00639 2