Vu la requête, enregistrée le 24 avril 2012, présentée pour M. et Mme B... A..., demeurant..., par la SCP Montigny et Doyen ;
M. et Mme A... demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement nos 1001294-1101404 du 21 février 2012 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de la commune de La Neuville-d'Aumont, annulé l'arrêté du 16 avril 2010 du préfet de l'Oise leur accordant un permis de construire sur le territoire de la commune de La Neuville-d'Aumont et l'arrêté du 8 mars 2011 portant permis de construire modificatif ;
2°) de rejeter la demande la commune de La Neuville-d'Aumont ;
3°) de mettre à la charge de la commune de La Neuville-d'Aumont une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la condamner aux dépens ;
.........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code du patrimoine ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Hubert Delesalle, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Agnès Eliot, rapporteur public,
- et les observations de Me Philippe Peynet, avocat de la commune de La Neuville-d'Aumont ;
1. Considérant que M. et Mme A...ont sollicité le 17 avril 2009 la délivrance d'un permis de construire pour la réalisation d'une construction à usage d'habitation et d'une annexe comprenant un garage et trois boxes à chevaux sur un terrain leur appartenant sur le territoire de la commune de La Neuville-d'Aumont ; que leur demande a été rejetée le 3 novembre 2009 par un arrêté du maire, pris au nom de l'Etat, en application des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, en raison des risques d'atteinte à la sécurité et à la salubrité publiques ; que, saisi d'un recours hiérarchique, le préfet de l'Oise a accordé le permis de construire sollicité par un arrêté du 16 avril 2010 dont la commune de La Neuville-d'Aumont a demandé l'annulation au tribunal administratif d'Amiens ; que le juge des référés de ce tribunal ayant suspendu l'exécution de cet arrêté par une ordonnance du 22 juillet 2010, le préfet de l'Oise a édicté, le 8 mars 2011, un arrêté modifiant le permis de construire précédent tenant compte des travaux réalisés par les pétitionnaires en 2010 et reprenant les prescriptions de l'architecte des Bâtiments de France ; que la commune en a également sollicité l'annulation ; que M. et Mme A...relèvent appel du jugement du 21 février 2012 par lequel le tribunal administratif d'Amiens, après avoir joint les deux demandes, a annulé les arrêtés des 16 avril 2010 et 8 mars 2011 pris par le préfet de l'Oise ;
Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel :
2. Considérant que, contrairement à ce que fait valoir la commune de La Neuville-d'Aumont, M. et Mme A...ont acquitté la contribution juridique de 35 euros prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts ; que, par suite, la fin de non-recevoir doit être écartée ;
Sur la légalité des permis de construire :
3. Considérant que, pour annuler le permis de construire initial et le permis de construire modificatif, le tribunal s'est fondé sur le motif tiré de l'atteinte à l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, selon lequel : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. " ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la parcelle propriété de M. et Mme A..., composée d'un chemin de cinq mètres de large et de soixante mètres de long débouchant sur un vaste terrain naturel, et classée en zone à fort aléa de coulées de boues à l'atlas départemental des risques naturels majeurs de l'Oise, reçoit les eaux pluviales en provenance des routes départementales n° 114 et n° 115 dont elle constitue l'exutoire ; que la nécessité de conserver au terrain son rôle d'exutoire a été soulignée dans le rapport d'étude des solutions d'assainissement réalisé le 30 janvier 2012 dans le cadre de l'élaboration du plan local d'urbanisme, ainsi que dans le projet de plan lui-même ; que, toutefois, à la suite de travaux réalisés en 2006 par la commune, les eaux pluviales sont recueillies par un avaloir prolongé par une canalisation d'une dizaine de mètres débouchant dans un fossé le long du chemin de M. et Mme A...; que ces derniers ont prolongé ce fossé en 2010, sur une quarantaine de mètres, vers un bassin de décantation ; qu'il ressort d'un rapport d'un hydrogéologue agréé que le système ainsi conçu permet, compte tenu notamment de la pente existante, d'accueillir les eaux pluviales provenant d'un sous-bassin versant de référence de 36,3 hectares pour des débits de pointe correspondant à de fortes pluies d'intensité décennale et même centennale ; que l'expert, dont les conclusions ne sont pas sérieusement remises en cause, en a ainsi déduit que le projet de M. A...n'était pas de nature à modifier ou à perturber le ruissellement du secteur nord-est de la commune ; que le maître d'oeuvre du projet a également indiqué que la conception de celui-ci répondait " aux normes des zones à risque d'inondation " ; qu'enfin, il ressort des pièces du dossier, et en particulier d'une lettre des pétitionnaires adressée au maire le 5 novembre 2009, que le revêtement du chemin d'accès est composé d'une couche de cailloux compactés assurant un drainage naturel ; que, dans ces conditions, c'est sans erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme que le préfet de l'Oise a pu accorder à M. et Mme A...les permis de construire des 16 avril 2010 et 8 mars 2011 ; que, par suite, c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme pour les annuler ;
6. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par la commune de La Neuville-d'Aumont ;
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 8 mars 2011 accordant le permis de construire modificatif :
7. Considérant que si, eu égard à leur caractère provisoire, les décisions du juge des référés n'ont pas, au principal, l'autorité de la chose jugée, elles sont néanmoins, conformément au principe rappelé à l'article L. 11 du code de justice administrative, exécutoires et, en vertu de l'autorité qui s'attache aux décisions de justice, obligatoires ; qu'il en résulte notamment que lorsque le juge des référés a prononcé la suspension d'une décision administrative et qu'il n'a pas été mis fin à cette suspension - soit, par l'aboutissement d'une voie de recours, soit dans les conditions prévues à l'article L. 521-4 du code de justice administrative, soit par l'intervention d'une décision au fond - l'administration ne saurait légalement reprendre une même décision sans qu'il ait été remédié au vice que le juge des référés avait pris en considération pour prononcer la suspension ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du plan de masse joint à la demande de permis de construire initial, ainsi que d'une correspondance du 23 mai 2009 adressée par M. A... à la direction départementale de l'équipement et de l'agriculture de l'Oise, que le projet du pétitionnaire prévoyait dès l'origine des travaux de prolongation du fossé au-delà du chemin d'accès afin de canaliser les eaux pluviales communales en aval des bâtiments jusqu'à une cuvette en terre végétale ; que le permis de construire modificatif a été accordé pour le même projet à la suite de la réalisation de travaux prévus dès l'origine ; que, dans ces conditions, ces circonstances n'étaient pas de nature à remédier au vice pris en considération par le juge des référés pour suspendre le permis de construire initial en raison du doute sérieux sur sa légalité au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; que, par suite, le préfet de l'Oise a méconnu le caractère exécutoire et obligatoire de l'ordonnance du 22 juillet 2010 du juge des référés prononçant une suspension à laquelle il n'avait pas été mis fin ; qu'il a ainsi entaché sa décision d'illégalité ;
9. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens présentés n'apparaît, en l'état de l'instruction, fondé et de nature à entraîner l'annulation de l'arrêté du 8 mars 2011 ;
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 16 avril 2010 accordant le permis de construire initial :
10. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 425-1 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est situé dans le champ de visibilité d'un édifice classé ou inscrit au titre des monuments historiques (...), le permis de construire (...) tient lieu de l'autorisation prévue à l'article L. 621-31 du code du patrimoine dès lors que la décision a fait l'objet de l'accord de l'architecte des Bâtiments de France " ; qu'aux termes de l'article L. 621-31 du code du patrimoine dans sa rédaction alors applicable : " Lorsqu'un immeuble est situé dans le champ de visibilité d'un édifice classé au titre des monuments historiques ou inscrit, il ne peut faire l'objet (...) d'aucune construction nouvelle (...) sans une autorisation préalable. / (...) / En cas de désaccord soit du maire ou de l'autorité administrative compétente pour délivrer le permis de construire, (...) avec l'avis émis par l'architecte des Bâtiments de France, le représentant de l'Etat dans la région émet, après consultation de la section de la commission régionale du patrimoine et des sites, un avis qui se substitue à celui de l'architecte des Bâtiments de France. (...) Si le représentant de l'Etat infirme l'avis de l'architecte des Bâtiments de France, le maire ou l'autorité administrative compétente est fondé à délivrer le permis de construire, le permis de démolir ou le permis d'aménager initialement refusé ou ne pas s'opposer à la déclaration préalable. Les délais de saisine du préfet de région et ceux impartis à la section de la commission régionale du patrimoine et des sites, au préfet ou au maire, ou à l'autorité administrative compétente pour statuer sont fixés par décret en Conseil d'Etat. / (...) " ;
11. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et il n'est pas contesté, que le projet de M. A...est situé dans le périmètre de 500 mètres autour d'une église classée monuments historiques avec laquelle il est en covisibilité ; qu'à ce titre, l'architecte des Bâtiments de France a émis le 2 juillet 2009 un avis favorable assorti de prescriptions, lesquelles n'ont pas été reprises par le préfet de l'Oise qui les a au contraire écartées ; qu'en procédant ainsi sans contester préalablement l'avis de l'architecte des Bâtiments de France devant le préfet de région, ainsi que le prévoit l'article L. 621-31 du code du patrimoine, le préfet de l'Oise a entaché sa décision d'illégalité ;
12. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens présentés n'apparaît, en l'état de l'instruction, fondé et de nature à entraîner l'annulation de l'arrêté du 16 avril 2010 ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé les arrêtés de permis de construire des 16 avril 2010 et 8 mars 2011 pris par le préfet de l'Oise ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées aux titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme A...le versement à la commune de La Neuville-d'Aumont d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.
Article 2 : M. et Mme A... verseront à la commune de La Neuville-d'Aumont une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A..., à la commune de La Neuville-d'Aumont et au ministre de l'égalité des territoires et du logement.
''
''
''
''
2
N°12DA00615