Vu la requête, enregistrée le 28 novembre 2012, présentée pour la société Honoré Récupération, dont le siège est 30 Zamin, 2ème avenue à Lomme Cedex (59465), par Me A...B... ; la société Honoré Récupération demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0907646 du 11 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté, d'une part, sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2002, 2003 et 2004 et, d'autre part, à ce que l'Etat lui verse la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions supplémentaires ;
3) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
---------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public ;
1. Considérant que la société à responsabilité limitée Honoré Récupération, qui a pour activité le négoce de palettes d'occasion en bois, relève appel du jugement du 11 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2002, 2003 et 2004 ;
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
2. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) " ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'aux termes de l'article 54 du code précité : " Les contribuables (...) sont tenus de représenter à toute réquisition de l'administration tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration. (...) " ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que, dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;
3. Considérant qu'en vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis ; que la seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder, en droit, la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense ; que le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration ;
4. Considérant que la SARL Honoré Récupération a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004, au cours de laquelle le service vérificateur, après avoir considéré la comptabilité comme irrégulière et non probante, a rejeté des charges qu'elle avait comptabilisées et les a réintégrées dans ses résultats imposables ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a relevé, s'agissant des achats de palettes d'occasion dits " achats comptoir " réalisés auprès des particuliers, représentant 72 %, 55 % et 57 % des achats de l'entreprise au cours respectivement des exercices 2002, 2003 et 2004, le caractère insuffisant des pièces comptables fournisseurs, ces achats n'étant justifiés que par une liste comportant des montants ainsi que des noms sans précision d'adresse ; que, si la particularité du produit et les usages de ce type de négoce ne lui permettaient pas de contraindre ses fournisseurs à accepter les paiements par chèque ou à signer des documents tenant lieu de facture, cette situation ne la dispensait pas pour autant d'établir, comme elle y était tenue, tous documents comptables ou extra-comptables de nature à justifier du montant des charges réelles qu'elle exposait à ce titre ; que, par suite, l'administration était en droit d'estimer que la preuve de la déductibilité des charges, au-delà de ce que le service a admis après modifications des rectifications effectuées, n'était pas apportée ;
6. Considérant que la circonstance que la société Honoré Récupération n'aurait pas eu davantage de pièces justificatives d'achat lors d'une précédente vérification de comptabilité, portant sur la période du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1998, qui n'a donné lieu à aucun redressement, est sans incidence sur le bien-fondé des impositions contestées ;
Sur les pénalités :
7. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) " ;
8. Considérant que la société Honoré Récupération n'a pas pris les dispositions pour justifier les achats qu'elle effectuait auprès de particuliers, qui représentaient pourtant la plus grande partie de ses achats ; que, compte tenu de la nature de ces rehaussements sur trois exercices consécutifs, et même si un précédent contrôle en 1999 n'a donné lieu à aucun redressement, l'administration doit être regardée comme établissant la mauvaise foi de la SARL Honoré Récupération de nature à justifier l'application des pénalités prévues par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Honoré Récupération n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la SARL Honoré Récupération, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Honoré Récupération est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Honoré Récupération et au ministre de l'économie et des finances.
Copie sera adressée au directeur chargé de la direction de contrôle fiscal Nord.
''
''
''
''
4
N°12DA01723