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13/06/2013 | FRANCE | N°12DA00121

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (bis), 13 juin 2013, 12DA00121


Vu la requête, enregistrée le 24 janvier 2012, présentée pour la commune de Verberie, représentée par son maire en exercice, par la SCP Ricard, Demeure et associés ;

La commune de Verberie demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1000290-0903306-0903307-0903308 du 15 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a, sur déféré du préfet de l'Oise et à la demande de l'association Pas de centrale en Basse Automne, de l'association Regroupement des organismes de sauvegarde de l'Oise, de l'association Picardie nature et du syndicat mixte d'aménag

ement et de gestion du parc naturel Oise-Pays de France, annulé la délibér...

Vu la requête, enregistrée le 24 janvier 2012, présentée pour la commune de Verberie, représentée par son maire en exercice, par la SCP Ricard, Demeure et associés ;

La commune de Verberie demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1000290-0903306-0903307-0903308 du 15 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a, sur déféré du préfet de l'Oise et à la demande de l'association Pas de centrale en Basse Automne, de l'association Regroupement des organismes de sauvegarde de l'Oise, de l'association Picardie nature et du syndicat mixte d'aménagement et de gestion du parc naturel Oise-Pays de France, annulé la délibération du 19 octobre 2009 du conseil municipal approuvant la révision simplifiée du plan local d'urbanisme ;

2°) de rejeter la demande présentée par le préfet de l'Oise, par l'association Pas de centrale en Basse Automne, par l'association Regroupement des organismes de sauvegarde de l'Oise, par l'association Picardie nature et par le syndicat mixte d'aménagement et de gestion du parc naturel Oise-Pays de France ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, de l'association Pas de centrale en Basse Automne, de l'association Regroupement des organismes de sauvegarde de l'Oise, de l'association Picardie nature et du syndicat mixte d'aménagement et de gestion du parc naturel Oise-Pays de France une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 4 juin 2013, présentée pour la commune de Verberie, par la SCP Ricard, Demeure et associés ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Hubert Delesalle, premier conseiller,

- les conclusions de M. David Moreau, rapporteur public,

- et les observations de Me Alexandre Faro, avocat de l'association Pas de centrale en Basse Automne ;

Sur les fins de non-recevoir opposées à la requête d'appel :

1. Considérant que, par une délibération du 19 octobre 2009, le conseil municipal de la commune de Verberie a approuvé la révision simplifiée du plan local d'urbanisme, créant une zone 1AUe pouvant accueillir des ouvrages, installations ou constructions de production, de transport et de distribution et de stockage d'énergie, ainsi qu'une zone Nf, secteur naturel de passage de faune ; que cette délibération a été annulée par un jugement du tribunal administratif d'Amiens du 15 novembre 2011 dont la commune relève appel ; que, par un jugement du même jour, devenu définitif, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 13 janvier 2009 du ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire ayant autorisé la SAS Yfrégie à exploiter, dans la zone objet de la révision du plan local d'urbanisme de la commune de Verberie, une installation de production d'électricité en raison de l'erreur manifeste d'appréciation dont cette décision était entachée compte tenu de la localisation du projet ; que l'annulation de l'autorisation ministérielle d'exploiter ne rend, toutefois, pas sans objet les conclusions d'appel de la commune dirigées contre le jugement ayant annulé la délibération portant révision du plan local d'urbanisme ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le préfet de l'Oise et tirée de l'absence d'utilité à faire appel de ce jugement, doit être écartée ;

2. Considérant que, par une délibération du 25 mars 2008, le conseil municipal de la commune de Verberie a donné délégation permanente à son maire pour la représenter en justice conformément aux dispositions du 16° de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le syndicat mixte d'aménagement et de gestion du parc naturel Oise-Pays de France et tirée de l'absence de justification de la qualité du maire pour agir au nom de la commune de Verberie doit être écartée ;

Sur la légalité de la délibération du 19 octobre 2009 :

3. Considérant que, pour prononcer l'annulation de cette délibération, le tribunal administratif d'Amiens s'est fondé sur trois motifs tirés, pour le premier, du caractère incomplet du dossier soumis à enquête publique, pour le deuxième, de l'insuffisance du rapport de présentation et, pour le dernier, d'une erreur manifeste d'appréciation dans le classement opéré par la révision ; qu'en application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement annulant un acte en matière d'urbanisme, de se prononcer sur les différents motifs d'annulation retenus par les premiers juges, dès lors que ceux-ci sont contestés devant lui ;

En ce qui concerne l'absence du plan d'aménagement et de développement durable (PADD) révisé dans le dossier soumis à enquête publique :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-13 du code de l'urbanisme dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération du 19 octobre 2009 : " Le plan local d'urbanisme est (...) révisé par délibération du conseil municipal après enquête publique. / (...) / Lorsque la révision a pour seul objet la réalisation d'une construction ou d'une opération, à caractère public ou privé, présentant un intérêt général notamment pour la commune ou toute autre collectivité, elle peut, à l'initiative du maire, être effectuée selon une procédure simplifiée. (...). Le dossier de l'enquête publique est complété par une notice présentant la construction ou l'opération d'intérêt général. (...) " ;

5. Considérant que, par une délibération du 22 septembre 2008 prise dans le cadre de la procédure de révision simplifiée, le conseil municipal de la commune de Verberie a donné une nouvelle orientation au plan d'aménagement et de développement durable du plan local d'urbanisme, laquelle consiste en l'affirmation de la volonté de la commune de permettre l'implantation d'une centrale au gaz naturel ; qu'il ressort des pièces du dossier que le rapport de présentation soumis à l'enquête publique exposait de manière détaillée cette nouvelle orientation ; que la notice explicative comme le compte-rendu de la réunion de consultation des communes limitrophes du 27 mai 2009 joints au dossier soumis à enquête, faisaient explicitement référence au débat tenu à l'occasion de l'adoption de la délibération du 22 septembre 2008 ; que, par suite, la seule circonstance que le plan d'aménagement et de développement durable révisé n'ait pas figuré dans le dossier soumis à enquête publique n'a pas pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population, ni été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative ; que, par suite, elle n'a pas été susceptible, en l'espèce, d'entacher d'irrégularité la procédure d'enquête publique contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif ;

En ce qui concerne l'insuffisance du rapport de présentation :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-10 du code de l'urbanisme : " Font l'objet d'une évaluation environnementale dans les conditions prévues par la présente section : / (...) / 4° Les plans locaux d'urbanisme susceptibles d'avoir des effets notables sur l'environnement compte tenu de la superficie du territoire auxquels ils s'appliquent, de la nature et de l'importance des travaux et aménagements qu'ils autorisent et de la sensibilité du milieu dans lequel ceux-ci doivent être réalisés. / Sauf dans le cas où elle ne prévoit que des changements mineurs, la révision de ces documents donne lieu soit à une nouvelle évaluation environnementale, soit à une actualisation de l'évaluation environnementale réalisée lors de leur élaboration " ; qu'en application des dispositions de l'article L. 121-15 du code de l'urbanisme, les plans locaux d'urbanisme, ainsi que leur modification ou révision, ne sont soumis à une évaluation environnementale que dans les cas où ils remplissent les conditions fixées par les dispositions de l'article R. 121-14 du même code, et sous réserve des dispenses prévues par celles de l'article R. 121-16 ; qu'il résulte toutefois de la combinaison de ces deux derniers articles que la révision d'un plan local d'urbanisme ayant pour objet d'autoriser la réalisation d'ouvrages susceptibles d'affecter significativement un site Natura 2000 fait toujours l'objet d'une telle évaluation ;

7. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article R. 123-2-1 du code de l'urbanisme, lorsque le plan local d'urbanisme doit faire l'objet d'une évaluation environnementale, le rapport de présentation doit, notamment, analyser l'état initial de l'environnement et les perspectives de son évolution, analyser les incidences notables prévisibles de la mise en oeuvre du plan sur l'environnement en exposant les conséquences éventuelles de l'adoption du plan sur la protection des zones revêtant une importance particulière pour l'environnement, exposer les motifs de la délimitation des zones, des règles qui y sont applicables et des orientations d'aménagement et présenter les mesures envisagées pour éviter, réduire et, si possible, compenser s'il y a lieu, les conséquences dommageables de la mise en oeuvre du plan sur l'environnement ; qu'en vertu de ces mêmes dispositions, en cas de révision, le rapport de présentation est complété par l'exposé des motifs des changements apportés ;

8. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, le rapport de présentation, auquel étaient annexées deux études paysagères, comportait des éléments suffisants sur l'impact du projet sur des édifices classés ou inscrits ;

9. Considérant, en deuxième lieu, que l'évaluation environnementale élaborée dans le cadre d'un plan local d'urbanisme doit seulement analyser les incidences notables prévisibles de la mise en oeuvre du plan sur l'environnement et n'a pas pour objet de décrire l'ensemble des conséquences du fonctionnement d'une activité susceptible d'être accueillie le cas échéant ; que, dans ces conditions, le rapport de présentation pouvait sans irrégularité s'abstenir d'exposer l'impact visuel du panache de vapeur que dégagerait la centrale au gaz naturel ;

10. Considérant, en dernier lieu, que le rapport de présentation comprend une analyse détaillée de l'état initial de l'environnement, aussi bien en ce qui concerne les secteurs nouvellement classés en zone Nf et 1AUe qu'en ce qui concerne le site Natura 2000 des Coteaux de la vallée de l'Automne, situé à proximité immédiate du site, que du biocorridor de Verberie-Roberval ; que, s'agissant de l'analyse des incidences sur ce biocorridor, le point 3.1.11 de sa troisième partie qui y est consacré se borne certes à mentionner ce que seraient les conséquences d'un " projet qui interromprait les possibilités de déplacements de la faune terrestre " qui ne correspond plus au projet envisagé objet de la révision du plan local d'urbanisme ; que, néanmoins, la quatrième partie du rapport, qui est consacrée à l'exposé des motifs pour lesquels le projet a été retenu et à la présentation des dispositions révisées du plan, et la cinquième partie, qui présentent les mesures pour éviter, réduire ou compenser les conséquences dommageables du plan sur l'environnement, exposent, à travers l'examen de ces mesures, de manière suffisante, les incidences notables prévisibles de la mise en oeuvre du plan sur l'environnement, en particulier l'impact des lumières ou des bruits sur la faune ;

11. Considérant que, par suite, c'est à tort que les premiers juges ont considéré comme fondé le moyen tiré de l'insuffisance du rapport de présentation ;

En ce qui concerne l'erreur manifeste d'appréciation :

12. Considérant qu'il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction ; que s'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts ;

13. Considérant que la zone 1AUe est située à environ trois cents mètres du corridor écologique de Verberie-Roberval dont elle est séparée par une zone Nf, zone naturelle de passage de faune à protéger ; qu'il ressort des pièces du dossier, et il n'est pas contesté, que ce corridor, qui constitue l'une des rares zones d'échange subsistant entre les massifs forestiers de Halatte et de Compiègne, en particulier pour la faune et spécialement les cervidés, présente un intérêt majeur pour les éco-systèmes notamment au plan local et interrégional ; que, situé dans un secteur qui ne fait l'objet d'aucune protection spécifique au titre de la législation sur l'environnement, ce corridor est, en outre, déjà fragilisé par la traversée de l'autoroute A1 et de la ligne de train à grande vitesse Nord et présente également à proximité du projet en cause un resserrement qui réduit encore sa fonctionnalité ; que le projet d'implantation de la centrale et le zonage qui le permet ont notamment reçu un avis défavorable à deux reprises du conseil scientifique régional du patrimoine naturel de Picardie, saisi par la direction régionale de l'environnement, ainsi que du commissaire enquêteur à l'issue de l'enquête publique ; que s'il est vrai que, sur la base des travaux d'une association spécialisée, la commune de Verberie a défini d'importantes " mesures compensatoires " incluant notamment l'élargissement de la zone Nf, l'éloignement de l'usine par rapport à la zone de passage de la grande faune et diverses autres mesures de réduction de l'impact du chantier et de l'installation, cet ensemble de précautions ne suffit pas à garantir durablement la fonction même du biocorridor dont la pérennité constitue un enjeu environnemental majeur ; qu'au surplus, les spécifications précises du projet envisagé figurant dans le rapport de présentation sont dépourvues de tout caractère réglementaire ; que, dans ces conditions, compte tenu de la sensibilité particulière du biocorridor et de l'existence de risques importants d'atteinte à sa pérennité, le conseil municipal de la commune de Verberie a commis une erreur manifeste d'appréciation en approuvant la révision simplifiée du plan local d'urbanisme de la commune ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Verberie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la délibération du 19 octobre 2009 de son conseil municipal approuvant la révision simplifiée de son plan local d'urbanisme ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, de l'association Pas de centrale en Basse Automne, de l'association Regroupement des organismes de sauvegarde de l'Oise, de l'association Picardie nature et du syndicat mixte d'aménagement et de gestion du parc naturel Oise-Pays de France, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, la somme que la commune de Verberie demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Verberie le versement à l'association Pas de centrale en Basse Automne et au syndicat mixte d'aménagement et de gestion du parc naturel Oise-Pays de France d'une somme de 1 000 euros chacun au titre des frais de même nature qu'ils ont exposés ; qu'il y a également lieu de mettre à la charge de la commune le versement à l'association Regroupement des organismes de sauvegarde de l'Oise et à l'association Picardie nature une somme de 1 000 euros au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Verberie est rejetée.

Article 2 : La commune de Verberie versera à l'association Pas de centrale en Basse Automne une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La commune de Verberie versera au syndicat mixte d'aménagement et de gestion du parc naturel Oise-Pays de France une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La commune de Verberie versera à l'association Regroupement des organismes de sauvegarde de l'Oise et à l'association Picardie nature une somme globale de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Verberie, au préfet de l'Oise, à l'association Pas de centrale en Basse Automne, à l'association Regroupement des organismes de sauvegarde de l'Oise, à l'association Picardie nature et au syndicat mixte d'aménagement et de gestion du parc naturel Oise-Pays de France.

Copie sera adressée au ministre de l'égalité des territoires et du logement et au ministre de l'intérieur.

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N°12DA00121


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 12DA00121
Date de la décision : 13/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU).


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Hubert Delesalle
Rapporteur public ?: M. Moreau
Avocat(s) : SCP RICARD DEMEURE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2013-06-13;12da00121 ?
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