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30/05/2013 | FRANCE | N°12DA01144

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 30 mai 2013, 12DA01144


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 27 juillet 2012 et régularisée par la production de l'original le 30 juillet 2012, présentée pour la société Eiffage Travaux Publics Nord, dont le siège est situé 53 boulevard Faidherbe à Arras (62000), venant aux droits de la société SGTN, représentée par son représentant légal, par la Selarl Espace juridique Avocats ;

La société Eiffage Travaux Publics Nord demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903916 du 5 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la con

damnation de Lille métropole communauté urbaine à lui verser la somme de 211 355,76 e...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 27 juillet 2012 et régularisée par la production de l'original le 30 juillet 2012, présentée pour la société Eiffage Travaux Publics Nord, dont le siège est situé 53 boulevard Faidherbe à Arras (62000), venant aux droits de la société SGTN, représentée par son représentant légal, par la Selarl Espace juridique Avocats ;

La société Eiffage Travaux Publics Nord demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903916 du 5 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de Lille métropole communauté urbaine à lui verser la somme de 211 355,76 euros, soit 252 781,48 euros toutes taxes comprises (TTC), assortie des intérêts à compter de la date d'introduction de sa requête et capitalisés, en règlement du solde du marché relatif à la construction des ouvrages de transport des eaux usées des quartiers du Chemin de Warneton-Bas, de la Gaie Berche et " Louis XVIII " vers la station d'épuration de Comines et d'un bassin de rétention ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de Lille métropole communauté urbaine la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée par télécopie le 16 mai 2013 et confirmée par la production de l'original le 17 mai 2013, présentée pour Lille métropole communauté urbaine ;

Vu la note en délibéré, enregistrée par télécopie le 17 mai 2013 et confirmée par la production de l'original le 30 mai 2013, présentée pour la société Eiffage Travaux Publics Nord ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Agnès Eliot, premier conseiller,

- les conclusions de M. David Moreau, rapporteur public,

- et les observations de Me Erwan Le Briquir, avocat de la société Eiffage Travaux Publics Nord, et de Me A...du Besset, intervenant en qualité de collaborateur de la SCP Sartorio, avocat de Lille métropole communauté urbaine ;

1. Considérant que, par acte d'engagement signé le 12 mai 2005, Lille métropole communauté urbaine a confié à un groupement d'entreprises dont la société SGTN, aux droits de laquelle vient la société Eiffage Travaux Publics Nord, était mandataire, la réalisation du marché de travaux relatif à la construction des ouvrages de transport des eaux usées des quartiers du Chemin de Warneton-Bas, de la Gaie Perche et " Louis XVIII " vers la station d'épuration de Comines-Pureté et la construction d'un bassin de rétention des eaux pluviales provenant du quartier " Louis XVIII " ; que cette société a contesté le décompte général que lui a transmis le maître d'ouvrage ; que la société Eiffage Travaux Publics Nord relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de Lille métropole communauté urbaine à lui verser la somme de 252 781,48 euros toutes taxes comprises (TTC), assortie des intérêts à compter de la date d'introduction de sa demande et des intérêts capitalisés, en règlement du solde du marché ;

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne la mise à disposition tardive des emprises de l'opération :

2. Considérant que le titulaire du marché a droit à l'indemnisation intégrale du préjudice qu'il a subi du fait de retards dans l'exécution du marché imputables au maître de l'ouvrage ou à ses autres cocontractants et distincts de l'allongement de la durée du chantier due à la réalisation des travaux supplémentaires, dès lors que ce préjudice apparaît certain et présente avec ces retards un lien de causalité direct ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 1.2 du règlement de consultation repris par l'article 1.4 du cahier des clauses techniques particulières : " (...) Les travaux de construction du bassin à ciel ouvert et du collecteur d'eaux usées permettant la desserte des quartiers " Louis XVIII " seront réalisés en priorité " ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les travaux, objet du marché en litige, devaient être initialement réalisés du 15 juillet 2005 au 15 février 2006 et principalement en période hivernale ;

5. Considérant que si Lille métropole communauté urbaine n'avait pas procédé, au 15 juillet 2005, à la libération des emprises foncières des terrains nécessaires au terrassement du bassin de rétention du quartier " Louis XVIII " rendant impossible le démarrage du chantier selon le calendrier prévu, il ne résulte pas de l'instruction que la société devait nécessairement commencer par ces travaux de terrassement, même si les stipulations précitées envisageaient leur réalisation en priorité ; que ces mêmes stipulations ne faisaient ainsi pas obstacle à ce que l'entreprise modifie le planning de ses interventions en fonction des contraintes du chantier qui lui étaient imposées par le maître d'ouvrage et débute par les travaux des collecteurs dans d'autres quartiers ; qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que l'entreprise a finalement commencé par réaliser le collecteur " Warneton-Bas " ;

6. Considérant qu'il ne résulte pas, en outre, de l'instruction que l'emprise des terrains ayant été libérée dès le 16 septembre 2005, l'entreprise ne pouvait exécuter les travaux de terrassement relatifs au bassin de rétention prévus pour durer dix jours au cours de cette période de fin d'été ; qu'ainsi, la société Eiffage Travaux Publics Nord n'établit pas qu'elle aurait été dans l'impossibilité d'échapper aux intempéries survenues aux mois d'octobre et novembre 2005, ayant provoqué le ralentissement des travaux de terrassement ; qu'elle ne justifie pas davantage avoir été dans l'obligation, à raison du retard pris sur le chantier, d'indemniser les exploitants présents sur les terrains, où se déroulaient les travaux ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société appelante n'est pas fondée à demander l'indemnisation du préjudice qu'elle aurait subi du fait de l'absence de libération des emprises dans les délais prévus par le marché ;

En ce qui concerne l'hétérogénéité des terrains :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 3.1 dit " Classement des terrains " du cahier des clauses techniques particulières du marché : " Les terrains sont classés de manière générale en terrains non consistants susceptibles de s'ébouler (terrains exigeants des précautions), mais peuvent évoluer vers des terrains boulants avec présence d'eau, ou vers des terrains très compacts nécessitant l'emploi d'engins de terrassement de forte puissance (terrains difficiles). Les prix du bordereau et notamment ceux des terrassements sont réputés prendre en compte les caractéristiques de sol " ;

9. Considérant que si la classification " guide des terrassements routiers " (GTR) des terrains objet de l'opération en cause n'était pas indiquée dans les documents de la consultation, il ressort toutefois des stipulations de l'article 3.1 précitées que la communauté urbaine a expressément souligné le caractère hétérogène des terrains ainsi que les difficultés susceptibles d'en résulter, en prévoyant notamment la nécessité de faire usage d'engins de terrassement adaptés ; qu'il résulte ainsi de l'instruction que l'entreprise chargée de ces travaux, professionnelle du secteur, était suffisamment informée de l'hétérogénéité des sols pour en tenir compte dès la phase de préparation du chantier ; que, par suite, Lille métropole communauté urbaine n'a pas commis de faute de nature à justifier la réparation de travaux supplémentaires réalisés à ce titre ;

En ce qui concerne l'existence de collecteurs en charge non répertoriés :

10. Considérant que des collecteurs non répertoriés dans les documents du marché ont été découverts lors de l'exécution des travaux alors que les canalisations étaient en charge et que le réseau n'était pas étanche ; que cette situation a contraint l'entreprise à utiliser du matériel plus adapté et à ralentir les cadences de travail de ses équipes ; que si Lille métropole communauté urbaine n'a pu avoir connaissance de l'existence de ces collecteurs non répertoriés, cette circonstance ne fait pas obstacle à l'indemnisation de travaux supplémentaires réalisés sans ordre de service du maître d'ouvrage, mais rendus indispensables pour la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art, quel qu'en soit le montant ; qu'il ne résulte pas de l'instruction, contrairement à ce que fait valoir Lille métropole communauté urbaine, que ne devraient pas être compris dans ces travaux supplémentaires la mise en place de pistes destinées à la circulation des engins ou la mise en oeuvre de blindage lourd ; qu'il n'apparaît pas que ce dernier poste aurait déjà été rémunéré ; que, par suite, la société Eiffage Travaux Publics Nord est fondée à demander la condamnation de Lille métropole communauté urbaine à lui verser la somme de 99 184,28 euros toutes taxes comprises dont elle justifie, correspondant au montant de ces travaux supplémentaires ;

Sur les intérêts et leur capitalisation :

11. Considérant que la société Eiffage Travaux Publics Nord a droit aux intérêts moratoires dans les conditions définies à l'article 5-1 du cahier des clauses administratives particulières du marché dont elle était titulaire, qui renvoie à l'article 96 du code des marchés publics alors applicable et au décret du 21 février 2002 relatif à la mise en oeuvre du délai maximum de paiement dans les marchés publics ; que la demande d'indemnisation de la société Eiffage Travaux Publics Nord ayant été reçue par Lille métropole communauté urbaine le 25 novembre 2008, la somme de 99 184,28 euros TTC sera assortie des intérêts contractuels à compter du 10 janvier 2009 ;

12. Considérant que la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année ; qu'en ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 16 juin 2009 ; qu'à cette date, il n'était pas dû une année d'intérêts ; qu'en revanche, il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 10 janvier 2010, date à laquelle il était dû, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Eiffage Travaux Publics Nord est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande de condamnation de Lille métropole communauté urbaine dans la limite de la somme de 99 184,28 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts moratoires et de leur capitalisation ainsi qu'il a été dit aux points 11 et 12 ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Lille métropole communauté urbaine une somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature exposés par la société Eiffage Travaux Publics Nord en première instance et en appel et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Eiffage Travaux Publics Nord, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, la somme que demande Lille métropole communauté urbaine sur le même fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : Lille métropole communauté urbaine versera à la société Eiffage Travaux Publics Nord la somme de 99 184,28 euros toutes taxes comprises, majorée des intérêts moratoires contractuels à compter du 10 janvier 2009, ces intérêts étant capitalisés au 10 janvier 2010 ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 2 : Lille métropole communauté urbaine versera à la société Eiffage Travaux Publics Nord une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le jugement n° 0903916 du 5 juin 2012 du tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la société Eiffage Travaux Publics Nord et les conclusions de Lille métropole communauté urbaine présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Eiffage Travaux Publics Nord et à Lille Métropole Communauté Urbaine.

Copie sera adressée pour information au préfet du Nord.

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N°12DA01144


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12DA01144
Date de la décision : 30/05/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat.

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Rémunération du co-contractant - Indemnités - Travaux supplémentaires.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: Mme Agnès Eliot
Rapporteur public ?: M. Moreau
Avocat(s) : SCP SARTORIO-LONQUEUE-SAGALOVITSCH et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2013-05-30;12da01144 ?
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