Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 10 janvier 2012, présentée par le MINISTRE DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA SANTE ; le MINISTRE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0902496-1001082 du 15 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de l'association de gestion et de comptabilité 60, annulé la décision en date du 18 mars 2010 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité annulant l a décision du 23 juillet 2009 de l'inspecteur du travail et refusant l'autorisation de licencier pour motif économique Mme A ;
2°) de rejeter la demande de l'association de gestion et de comptabilité 60 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public,
- les observations de Me Lecareux, avocat, pour Mme A ;
1. Considérant que par une décision du 23 juillet 2009, l'inspecteur du travail a refusé à l'association de gestion et de comptabilité 60 l'autorisation de licenciement pour motif économique de Mme A, membre titulaire du comité d'entreprise ; que par une décision du 18 mars 2010, le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, saisi par la voie du recours hiérarchique, a, d'une part, annulé la décision de l'inspecteur du travail pour insuffisance de motivation et, d'autre part, refusé d'autoriser le licenciement demandé au motif que les propositions de reclassement formulées ne peuvent caractériser des efforts de reclassement valables et suffisants ; que le MINISTRE DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA SANTE relève appel du jugement du 15 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé sa décision ;
2. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis du mandat de membre du comité d'entreprise bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande d'autorisation de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient. Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par une lettre en date du 17 février 2009, l'association de gestion et de comptabilité 60 a fait à Mme A deux offres de reclassement, la première en qualité d'assistant au directeur général de l'association sis à Beauvais et la seconde comme comptable-assistante sur le site de Compiègne ; que si le poste de comptable-assistant impliquait une modification de la classification et de la rémunération de Mme A, il est toutefois constant que le poste d'assistante de direction qui lui a été proposé constituait une offre satisfaisante de reclassement dans la mesure où elle portait sur un emploi équivalent à celui qu'elle détenait au regard de sa qualification, de sa classification et de sa rémunération ; que l'intéressée a refusé cette proposition au motif que son nouveau lieu de travail serait situé à trois-quarts d'heures de son domicile ; qu'il n'est pas établi que ce poste a été proposé à Mme A dans le but d'obtenir sa démission du comité d'entreprise ; que, par ailleurs, par une lettre en date du 30 mars 2009, l'association de gestion et de comptabilité 60 lui a proposé un 3ème poste, celui de chargé de développement commercial situé à Compiègne ; que ce poste portait également sur un emploi équivalent à celui détenu par l'intéressée et n'impliquait aucune diminution de rémunération alors même qu'à l'issue de la 1ère année de fonctions, elle aurait comporté une partie fixe et une partie variable en fonction des objectifs atteints ; qu'il permettait également à Mme A de poursuivre l'exercice de ses fonctions représentatives ; que dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que l'association de gestion et de comptabilité 60 devait être regardée comme ayant fait les efforts nécessaires de reclassement lui incombant ;
5. Considérant, en second lieu, que la demande d'autorisation de licenciement de Mme A est fondée sur le motif économique tiré de la nécessité de procéder à une réorganisation des services de l'association de gestion et de comptabilité 60 afin de sauvegarder sa compétitivité, eu égard aux déficits comptables enregistrés par celle-ci depuis 2006 ; que ce motif est établi ; que dans ce cadre, le poste d'assistante de direction qu'occupait Mme A a été supprimé, à la suite de la démission du directeur auquel était rattachée l'intéressée ; que si Mme A exerçait son mandat de manière active au sein du comité d'entreprise, il ne ressort pas des pièces du dossier que la demande d'autorisation de licenciement de celle-ci aurait eu un lien avec l'exercice de ses fonctions représentatives ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que ce motif ne pouvait davantage justifier la décision du ministre du travail de refuser l'autorisation de licenciement demandé ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par l'association de gestion et de comptabilité 60, que le MINISTRE DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA SANTE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 15 novembre 2011, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 18 mars 2010 du ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat le versement à l'association de gestion et de comptabilité 60 d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'association de gestion et de comptabilité 60 la somme que demande Mme A, qui, dès lors qu'elle n'aurait pas eu qualité, si elle n'avait pas été mise en cause pour produire des observations, pour former tierce opposition contre le présent arrêt, ne peut être regardée comme une partie pour l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du MINISTRE DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI ET DE LA SANTE est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à l'association de gestion et de comptabilité 60 une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions de Mme A présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI, DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE ET DU DIALOGUE SOCIAL et à l'association de gestion et de comptabilité 60.
Copie sera adressée à Mme Valérie A.
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N°12DA00046