Vu la requête, enregistrée le 18 octobre 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Ning A, demeurant ..., par Me Boucq, avocat ; Mme A demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1103394 du 21 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Aisne du 11 mai 2011 en tant qu'il lui refuse un titre de séjour et l'oblige à quitter le territoire, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", et à la condamnation de l'Etat au paiement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) d'annuler l'arrêté du 11 mai 2011 du préfet de l'Aisne ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aisne de lui délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " avec autorisation de travailler ou de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai de huit jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Michel Durand, président-assesseur,
- et les observations de Me Boucq, avocat, pour Mme A ;
Considérant que, par arrêté en date du 11 mai 2011, le préfet de l'Aisne a refusé à Mme A, ressortissante chinoise née le 16 août 1980, la délivrance du titre de séjour qu'elle sollicitait, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a désigné le pays de destination ; que Mme A relève appel du jugement, en date du 21 septembre 2011, par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Considérant que, par un arrêté du 23 novembre 2010 publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet de l'Aisne a donné à M. Jackie B, secrétaire général de la préfecture, délégation à l'effet de signer, " en toutes matières, tous arrêts, décisions, circulaires (...) " ; que, par cette délégation, M. B était compétent pour prendre les décisions attaquées ;
En ce qui concerne le refus de séjour :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire délivrée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant " (...) " ; que, pour l'application de ces dispositions, il appartient à l'administration saisie d'une demande de renouvellement d'une carte de séjour présentée en qualité d'étudiant, d'apprécier, sous le contrôle du juge, la réalité et le sérieux des études poursuivies ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A a été inscrite au titre de l'année universitaire 2003 à 2004, en cours de langue et civilisation françaises ; qu'au titre des années 2004 à 2006, elle a suivi un master I en administration économique et sociale à l'université d'Artois qu'elle a ensuite doublé ; qu'au titre des années universitaires 2006 à 2008, elle s'est inscrite en master II administration économique et sociale, qu'elle a doublé l'année d'après avant d'être ajournée ; qu'au titre de l'année 2008 à 2009, elle s'est inscrite en master II " management et stratégie d'entreprise " dans un institut privé parisien, puis au titre de l'année 2009 à 2010, en master II " commerce international " à l'université de Valenciennes ; qu'à l'appui de sa demande de renouvellement de titre de séjour " étudiant " présentée le 20 octobre 2010, Mme A a produit une attestation d'inscription en master II " stratégie de l'entreprise et analyse des projets " dans un organisme de formation situé à Paris, qui a attesté le 19 janvier 2011, qu'elle avait fait une demande de suspension provisoire des cours en raison de son état de grossesse ; que, dans ces conditions et bien que faisant valoir les difficultés liées à la conciliation de ses études avec la naissance de son enfant le 17 mars 2011, au soutien desquelles elle n'apporte d'ailleurs aucun élément probant, Mme A n'établit pas le caractère sérieux du suivi de ses études ; que, par suite, le préfet n'a pas commis d'erreur dans l'appréciation du sérieux des études poursuivies par Mme A ;
Considérant, en deuxième lieu, que Mme A ne peut utilement faire valoir, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision du préfet de l'Aisne lui refusant le renouvellement de son titre de séjour " étudiant ", que ladite décision porte atteinte à sa vie privée et familiale ;
Considérant, en troisième lieu, que, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; que Mme A a sollicité le renouvellement de son titre de séjour " étudiant " ; qu'ainsi, elle ne peut utilement invoquer le moyen tiré de ce que le préfet de l'Aisne aurait pu lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale ", à l'encontre du refus opposé à une demande de titre de séjour qui n'a pas été présentée sur ce fondement ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
Considérant qu'il est constant que Mme A est entrée en France en 2003 dans le but d'y suivre des études et a bénéficié d'une carte de séjour temporaire " étudiant " valable du 1er octobre 2003 au 30 septembre 2004, régulièrement renouvelée jusqu'au 30 septembre 2010 ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressée a épousé en Chine en 2008 un compatriote bénéficiant en France d'un titre de séjour temporaire d'une durée d'un an ; qu'elle a donné naissance en France à deux enfants en 2009 et 2011 ; que l'aîné est scolarisé en France depuis le 18 octobre 2011 ; que, dans ces conditions et nonobstant la création par son époux d'une entreprise, Mme A ne fait état d'aucun obstacle à la reconstitution de sa cellule familiale dans son pays d'origine, où se trouvent encore ses parents et où elle a vécu jusqu'à l'âge de 23 ans ; que, par suite, les circonstances, au demeurant non établies, selon lesquelles le retour en Chine serait traumatisant pour ses enfants et représenterait un coût financier important, ne sont pas de nature à faire regarder la décision l'obligeant à quitter le territoire comme portant une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'ainsi, alors même que Mme A ne constituerait pas une menace à l'ordre public, le préfet n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis d'erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne le délai de départ volontaire :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des motifs qui précèdent, que Mme A n'est pas fondée à invoquer l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant un délai de départ volontaire pour quitter le territoire ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 7 de la directive du 16 décembre 2008 susvisée : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les États membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les États membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. 2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée du séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux. (...) " ;
Considérant qu'en invoquant seulement l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire, Mme A ne fait pas état de circonstances particulières qui justifieraient un délai supplémentaire au délai maximum imparti et fixé par le préfet pour quitter le territoire ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant un délai de départ volontaire de trente jours est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
Considérant que le préfet de l'Aisne, n'a pas, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, tant en ce qui concerne les conditions de séjour en France de Mme A, que sa situation personnelle et familiale, méconnu les stipulations de l'article 8 précité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en fixant la Chine comme pays à destination duquel la requérante devait être reconduite ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Ning A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Copie sera transmise au préfet de l'Aisne.
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N°11DA01602 2