Vu, I, sous le n° 10DA01005, le recours enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 10 août 2010, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour, d'une part, d'annuler l'article 1er du jugement n° 0900005 en date du 22 avril 2010 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a réduit de 28 142 euros la cotisation de taxe professionnelle à laquelle la SAS CRH Ile-de-France Distribution a été assujettie au titre de l'année 2007 à raison de son établissement situé à Senlis et, d'autre part et dans la même mesure, de rétablir la SAS CRH Ile-de-France Distribution au rôle de la taxe professionnelle de l'année 2007 ;
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Vu, II, sous le n° 10DA01006, le recours enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 10 août 2010, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour, d'une part, d'annuler l'article 1er du jugement n° 0901408 en date du 22 avril 2010 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a réduit de 27 940 euros la cotisation de taxe professionnelle à laquelle la SA CRH Ile-de France Distribution a été assujettie au titre de l'année 2008 à raison de son établissement situé à Senlis et, d'autre part et dans la même mesure, de rétablir la SAS CRH Ile-de-France Distribution au rôle de la taxe professionnelle de l'année 2008 ;
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Vu, III, sous le n° 10DA01007, le recours enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 10 août 2010, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour, d'une part, d'annuler l'article 1er du jugement n° 0803351 en date du 22 avril 2010 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a réduit de 28 858 euros la cotisation de taxe professionnelle à laquelle la SAS Matériaux Service, devenue la SAS CRH Ile-de-France Distribution, a été assujettie au titre de l'année 2006 à raison de son établissement situé à Senlis et, d'autre part et dans la même mesure, de rétablir la SAS Matériaux Service, devenue la SAS CRH Ile-de-France Distribution au rôle de la taxe professionnelle de l'année 2006 ;
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code civil ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller, les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;
Considérant que les recours susvisés présentent à juger des questions identiques et concernent la situation d'un même contribuable au regard d'une même imposition ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur les conclusions des recours du ministre :
Considérant que, le 15 janvier 2004, la SAS Matériaux Services, devenue en 2009 la SAS CRH Ile-de-France Distribution a, en sa qualité d'associé unique de la SAS Voituriez Matériaux Service et en application de l'article 1844-5 du code civil, procédé au 1er janvier 2004 à la dissolution sans liquidation de cette société ; que cette opération ayant entraîné la transmission universelle du patrimoine de la société dissoute à la SAS Matériaux Services, cette dernière, qui avait initialement souscrit la déclaration des bases d'imposition à la taxe professionnelle de son établissement de Senlis en retenant, s'agissant de la valeur locative des immobilisations non passibles d'une taxe foncière, la valeur inscrite au dernier bilan de la société dissoute, a, par trois réclamations, sollicité la réduction de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie en 2006, 2007 et 2008 à raison de cet établissement, en demandant qu'à cette valeur d'origine soit substituée la valeur nette comptable de ces immobilisations ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT relève appel des jugements par lesquels, après que l'administration fiscale eût rejeté ces demandes, le Tribunal administratif d'Amiens y a fait droit ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1844-5 du code civil : La réunion de toutes les parts sociales en une seule main n'entraîne pas la dissolution de plein droit de la société. Tout intéressé peut demander cette dissolution si la situation n'a pas été régularisée dans le délai d'un an. (...) / En cas de dissolution, celle-ci entraîne la transmission universelle du patrimoine de la société à l'associé unique, sans qu'il y ait lieu à liquidation (...) ; que, selon les dispositions de l'article 1469 du code général des impôts, relatif à la taxe professionnelle, alors en vigueur : La valeur locative est déterminée comme suit : (...) 3° quater Le prix de revient d'un bien cédé n'est pas modifié lorsque ce bien est rattaché au même établissement avant et après la cession et lorsque, directement ou indirectement : / a) l'entreprise cessionnaire contrôle l'entreprise cédante ou est contrôlée par elle ; / b) ou ces deux entreprises sont contrôlées par la même entreprise ;
Considérant qu'il résulte des termes mêmes du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts qu'ainsi que l'ont relevé les jugements attaqués, les cessions de biens visées par les dispositions précitées, invoquées en l'espèce par l'administration, s'entendent des seuls transferts de propriété consentis entre un cédant et un cessionnaire ; que ces dispositions, dont les termes renvoient à une opération définie et régie par le droit civil, ne sauraient s'entendre comme incluant toutes autres opérations qui, sans constituer des cessions proprement dites, ont pour conséquence une mutation patrimoniale ; que, si en vertu des dispositions précitées de l'article 1844-5 du code civil, la dissolution sans liquidation d'une société dont toutes les parts ont été réunies en une seule main entraîne le transfert du patrimoine de la société dissoute à l'associé unique qui subsiste, cette mutation patrimoniale, qui ne constitue pas une cession au regard du droit civil, n'entre pas dans le champ d'application du 3° quater de l'article 1469 ; que, par suite et contrairement à ce que soutient le ministre, le Tribunal administratif d'Amiens n'a pas commis d'erreur de droit, d'une part, en conférant cette portée à ces dispositions sans se référer aux débats parlementaires ayant précédé leur adoption, ni à d'autres débats parlementaires postérieurs et, d'autre part, en jugeant que la transmission de biens intervenue en l'espèce au profit de la SAS Matériaux Service ne pouvait être regardée comme une cession au sens des dispositions précitées du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : la taxe professionnelle a pour base : / 1° Dans le cas des contribuables autres que ceux visés au 2° : / a) la valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A et 1518 B des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle (...) ; qu'aux termes de l'article 1469 du même code : La valeur locative est déterminée comme suit : (...) 2° Les équipements et biens mobiliers dont la durée d'amortissement ... est au moins égale à trente ans sont évalués suivant les règles applicables aux bâtiments industriels ; (...) / 3° Pour les autres biens, lorsqu'ils appartiennent au redevable, lui sont concédés ou font l'objet d'un contrat de crédit-bail mobilier, la valeur locative est égale à 16 % du prix de revient (...) ; qu'aux termes de l'article 1499 de ce code : La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat (...) ; qu'aux termes de l'article 310 HF de l'annexe II au code général des impôts : Pour la détermination de la valeur locative qui sert de base à la taxe professionnelle : (...) / 2° Le prix de revient des immobilisations est celui qui doit être retenu pour le calcul des amortissements ; (...) ; qu'aux termes de l'article 38 quinquies de l'annexe III au même code : (...) Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / Cette valeur d'origine s'entend : (...) / (...) Pour les immobilisations apportées à l'entreprise par des tiers, de la valeur d'apport (...) ;
Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que, lorsqu'une société acquiert des immobilisations à l'occasion de la dissolution sans liquidation d'une société dont elle a réuni toutes les parts, le prix de revient de ces immobilisations, au sens de l'article 1499 du code général des impôts et de l'article 310 HF de son annexe II, n'est pas la valeur d'origine des immobilisations dans les comptes de la société dont le patrimoine a fait l'objet d'une transmission, qui avait constitué un prix de revient pour cette société, mais la valeur réelle constatée par la société recevant ces immobilisations, qui est sa propre valeur d'origine ;
Considérant qu'en l'espèce, il résulte des énonciations de la décision de dissolution sans liquidation prise le 15 janvier 2004 par la SAS Matériaux Service que la dissolution sans liquidation de la SAS Voituriez Matériaux Service a été réalisée sur la base des valeurs nettes comptables et que les biens non passibles d'une taxe foncière reçus par la société cessionnaire de la société dissoute ont ainsi été repris à l'actif du bilan de la première de ces sociétés à leurs valeurs nettes comptables au 1er janvier 2004 ; que, dès lors, le ministre n'est pas fondé à soutenir que le prix de revient de ces immobilisations, au sens et pour l'application des dispositions précitées, devrait s'entendre de leurs valeurs d'origine dans les comptes de la société dissoute ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT n'est pas fondé à prétendre que c'est à tort que, par les jugements attaqués, qui sont exempts de contradiction de motifs, le Tribunal administratif d'Amiens a réduit les cotisations de taxe professionnelle auxquelles la société défenderesse a été assujettie à raison de son établissement de Senlis au titre des années 2006, 2007 et 2008 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros que demande la SAS CHR Ile-de-France Distribution à ce titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT sont rejetés.
Article 2 : L'Etat versera à la SAS CRH Ile-de-France Distribution la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT et à la SAS CRH Ile-de-France Distribution.
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