Vu la requête, enregistrée le 9 juillet 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la Société civile d'exploitation agricole SCEA DU STEENBOURG venant aux droits de l'EARL du Steenbourg, dont le siège social est situé 9 voie Romaine à Crochte (59380), par Me Meignié, avocat ; la SCEA DU STEENBOURG demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0507528 du 7 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation du Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord (SIAN), d'une part, à l'indemniser du préjudice résultant de la submersion d'une partie des terres qu'elle exploite sur la commune de Crochte, qui comprend la perte de ses récoltes à compter de la campagne culturale 1999 d'un montant de 9 603 euros, celle de la campagne 2005 fixée à 5 964 euros et celle des campagnes 2006 et 2007 fixées à 3 460 euros, ainsi que le coût des travaux de drainage nécessaires évalués à 13 000 euros et, d'autre part, à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi qu'aux dépens ;
2°) de condamner le Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord à lui verser, d'une part, la somme de 19 493 euros au titre des dommages causés aux récoltes de 1999 à 2008 et, d'autre part, la somme de 38 195,20 euros au titre du coût des travaux de drainage nécessaires à revaloriser suivant l'indice applicable au jour de la réalisation des travaux ;
3°) de lui donner acte de ce qu'elle se réserve expressément la possibilité de demander réparation de son préjudice postérieur à l'année culturale 2008 jusqu'à la réalisation complète des travaux de drainage ;
4°) de mettre à la charge du Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La SCEA DU STEENBOURG soutient, à titre principal, qu'à tout le moins depuis 1999, les parcelles cadastrées section A n° 572, 75 et 74 qu'elle exploite respectivement depuis 1994, 1990 et 1992 sont continuellement inondées, ce qui a entraîné le pourrissement des terres qui ne sont plus exploitées ; qu'il n'est pas contesté que l'inondation de ces parcelles provient directement du sens de l'écoulement naturel des eaux qui stagnent, d'une part, en raison de l'implantation de la station d'épuration, construite en 1984 et exploitée par le Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord, et, d'autre part, par les racines et radicelles des peupliers plantés par le syndicat sur la parcelle 571, en limite séparative des parcelles 572 et 74, qui ont bouché le système de drainage en terre cuite qui passe à l'est de la parcelle 74 puis se dirigent, via un collecteur, vers le cours d'eau La Becque ; que le rapport d'expertise, rendu le 16 juillet 2005, révèle que la partie ouest des trois parcelles est située au point le plus haut, que la partie basse est située à l'est de la parcelle 74, que la station d'épuration a été édifiée au nord des parcelles et au niveau le plus bas et que le Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord n'a pris aucune précaution pour préserver l'efficacité du système de drainage ; que le syndicat a ainsi engagé sa responsabilité ; que le tribunal a considéré à tort qu'il lui appartenait de vérifier l'état du système de drainage avant d'exploiter les parcelles ; que cette vérification préalable est impossible, le système de drainage étant enterré ; qu'à titre subsidiaire, une mesure expertise technique est nécessaire ; que, s'agissant des préjudices subis, il y a lieu de distinguer le préjudice pour perte de récolte de celui résultant du coût des travaux à réaliser pour remédier à l'inondation des parcelles ; que la perte d'exploitation pour les campagnes 1999 à 2007 s'élève à 17 493 euros ; que la perte de récolte de blé pour l'année 2008 s'élève à 2 000 euros ; que les travaux de remise en état du système de drainage, seule solution selon l'expert pour remédier aux désordres, s'élèvent à 38 195,20 euros (hors taxes) ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 9 mars 2010, présenté pour la SCEA DU STEENBOURG qui conclut par les mêmes moyens, nouveau rapport d'expertise déposé le 30 novembre 2009 à l'appui, à ce que le Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord soit condamné à lui verser les sommes de 25 371 euros pour perte d'exploitation pour les campagnes 1999 à 2009 en lui donnant acte de ce qu'elle se réserve expressément la possibilité de demander réparation de son préjudice postérieur à l'année culturale 2008 jusqu'à la réalisation complète des travaux de drainage et 10 640 euros (hors taxes) pour les travaux de drainage ; la société requérante fait valoir, en outre, que cette nouvelle expertise permet d'établir et de caractériser la responsabilité du syndicat ;
Vu la lettre, en date du 15 décembre 2006, mettant en demeure le Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, de produire, dans un délai d'un mois, ses conclusions en réponse à la requête susvisée, à peine d'être réputé avoir acquiescé aux faits exposés dans cette requête ;
Vu la mise en demeure, en date du 18 mars 2010, adressée au Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative et l'avis de réception de cette mise en demeure ;
Vu l'ordonnance, en date du 6 septembre 2010, fixant la clôture de l'instruction au 8 octobre 2010 à 16 heures 30 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Michel Durand, président-assesseur, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;
Considérant que la SCEA DU STEENBOURG relève appel du jugement du 7 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation du Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord à l'indemniser du préjudice résultant de la submersion d'une partie des terres qu'elle exploite sur la commune de Crochte ainsi que du coût des travaux de drainage nécessaires ; qu'en défense, le Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord, qui a été mis en demeure en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative tant en première instance, le 15 décembre 2006, qu'en appel, le 18 mars 2010, de présenter ses observations, n'a produit aucun mémoire en défense ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 612-6 du code de justice administrative : Si, malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant ;
Considérant que le Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord n'a pas fait réponse aux mises en demeure qui lui ont été adressées par le tribunal administratif et la cour administrative d'appel en application de l'article R. 612-3 susmentionné ; que, dans sa demande présentée devant le tribunal administratif, la SCEA DU STEENBOURG exposait que les parcelles cadastrées section A n° 572, 74 et 75, qu'elle exploite sur le territoire de la commune de Crochte, étaient inexploitables en raison d'une humidité excessive et d'inondations fréquentes imputables tant à la présence de la station d'épuration dont le syndicat susmentionné est propriétaire, qu'à celle d'arbres plantés sur le terrain de ladite station et dont les radicelles ont obstrué la canalisation de drainage des parcelles ; que, dès lors, ledit syndicat doit être regardé comme ayant acquiescé aux faits exposés dans le recours ; que l'inexactitude de ces faits ne ressort d'aucune des pièces du dossier ; que, par suite, l'impossibilité d'exploiter normalement les terres du fait d'une humidité excessive est imputable à la fois à la présence de l'ouvrage public et à celle des arbres plantés sur la propriété du syndicat responsable de l'ouvrage ; que, par suite, ce dernier doit être déclaré entièrement responsable de l'impossibilité d'exploiter les parcelles en cause ;
Considérant qu'il est constant que les parcelles dont s'agit comportent un dispositif de drainage sous la forme d'une canalisation enterrée dont la présence est antérieure à la construction de la station d'épuration ; que l'obstruction de ce dispositif de drainage est imputable à la prolifération des radicelles des arbres plantés sur la propriété du syndicat intercommunal ; que cette situation ne résulte pas nécessairement de la présence de l'ouvrage public ; que, dès lors, la SCEA DU STEENBOURG est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a écarté la responsabilité du Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord, au motif qu'en prenant les parcelles en exploitation en 1999, soit postérieurement à l'édification de la station d'épuration intervenue avant 1984, elle avait omis de prendre en compte l'incidence normalement associée à la présence de l'ouvrage public et qu'elle n'avait été victime que de sa propre imprévoyance ; que, par suite, la requérante est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ; qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les conditions de la mise en jeu de la responsabilité du Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'exploitation des parcelles, ci-dessus mentionnées, nécessite la présence d'un dispositif de drainage ; que l'inefficacité de ce dispositif est entièrement imputable à la présence des arbres dont le Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord est responsable ; que, par suite, ce dernier doit être déclaré entièrement responsable de l'impossibilité d'exploiter les parcelles en cause ;
Sur les préjudices :
Considérant, en premier lieu, que, si la SCEA DU STEENBOURG demande le remboursement du coût de remise en état de l'entier dispositif de drainage représentant une longueur de 2 903 mètres linéaires, il résulte de l'instruction que la dégradation du dispositif de drainage imputable aux peupliers plantés sur la parcelle d'assise de la station d'épuration ne représente qu'une longueur de 50 mètres linéaires ; que le préjudice dont la SCEA DU STEENBOURG est fondée à demander réparation à ce titre est, par suite, limité au coût correspondant à la réfection de la canalisation sur cette distance ; qu'en l'état de l'instruction, il en sera fait une juste appréciation en le fixant à 2 000 euros, tous préjudices confondus ;
Considérant, en second lieu, qu'il ressort du rapport d'expertise et des dernières écritures de la requérante, non contestés par le Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord, que les pertes de cultures subies par la SCEA DU STEENBOURG entre 1999 et 2009 représentent un montant de 23 371 euros ;
Considérant que, par suite, il y a lieu de condamner le Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord à payer à la SCEA DU STEENBOURG une indemnité globale de 25 371 euros en réparation de l'ensemble de ses préjudices ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord à payer à la SCEA DU STEENBOURG une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0507528 du 7 mai 2009 du Tribunal administratif de Lille est annulé.
Article 2 : Le Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord est condamné à payer à la SCEA DU STEENBOURG une somme de 25 371 euros en réparation de ses préjudices.
Article 3 : Le Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord versera à la SCEA DU STEENBOURG une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SCEA DU STEENBOURG est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SCEA DU STEENBOURG venant aux droits de l'EARL du Steenbourg et au Syndicat intercommunal d'assainissement du Nord.
Copie sera adressée au préfet de la région Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord.
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N°09DA01010