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04/11/2010 | FRANCE | N°09DA00572

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (bis), 04 novembre 2010, 09DA00572


Vu la requête, enregistrée le 8 avril 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Hervé A, demeurant ..., par Me Koskas, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703068 du 12 février 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 19 octobre 2007 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité a rejeté son recours dirigé contre la décision de l'inspecteur du travail du 24 avril 2007 autorisant son licenciemen

t et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à lui payer une somme...

Vu la requête, enregistrée le 8 avril 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Hervé A, demeurant ..., par Me Koskas, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703068 du 12 février 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 19 octobre 2007 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité a rejeté son recours dirigé contre la décision de l'inspecteur du travail du 24 avril 2007 autorisant son licenciement et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à lui payer une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler la décision du ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité du 19 octobre 2007 ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient qu'a été commise une erreur manifeste de droit concernant l'appréciation de la réalité du motif économique invoqué ; que cette appréciation n'a pas été menée dans le cadre du groupe auquel appartient l'entreprise parmi les sociétés oeuvrant dans le même secteur d'activité ; qu'il n'existait aucune menace sur la compétitivité des sociétés du groupe oeuvrant dans le même secteur d'activité ; que la restructuration décidée s'inscrit en réalité dans le cadre d'une recherche de rentabilité passant par une délocalisation d'une partie de la production en Pologne ; que la réalité du motif économique invoqué doit être appréciée à la date de la décision de l'autorité administrative, à laquelle la compétitivité n'était pas durablement menacée ; qu'une erreur manifeste de droit a été commise concernant l'obligation de reclassement ; que les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements n'ont été définitivement arrêtés qu'après le 14 décembre 2006 ; que le Tribunal a inversé la charge de la preuve et que le jugement est contradictoire ; que l'obligation de reclassement doit être satisfaite de manière individuelle, sérieuse et loyale ; que le point de départ de cette obligation doit être fixé à la date à laquelle le salarié peut se prononcer en connaissance de cause, soit lorsque le nombre de suppressions d'emplois a été définitivement arrêté, les critères d'ordre des licenciements ont été arrêtés et les mesures du plan de sauvegarde de l'emploi ont été déterminées ; qu'avant cela, le salarié ne peut savoir si son licenciement sera envisagé ; que, dès lors, les propositions de reclassement faites pendant la période de consultation ne peuvent être regardées comme satisfaisant à l'obligation de reclassement ; qu'au surplus, ces propositions n'étaient ni sérieuses, ni loyales ; que les circulaire et lettre des 15 mars et 22 mars 2006 n'étaient pas individualisées et laissaient des délais de réponse trop courts ; que les postes de production proposés entraînaient une baisse significative de salaire ; que la société a reclassé 13 salariés sur le site de Vaux-Andigny avant le 30 novembre 2006 mais qu'aucun de ces postes ne lui a été proposé individuellement ; que 7 de ces postes n'étaient pas mentionnés dans la lettre du 15 mars 2006 et encore moins dans celle du 20 septembre 2006 ; que les salariés reclassés sur ces postes ont bénéficié d'entretiens avec la direction et de propositions de reclassement concrètes et acceptables ; qu'il n'y a eu aucune recherche de reclassement après la consultation du comité d'entreprise sur le plan de sauvegarde de l'emploi, le 14 décembre 2006, le requérant n'ayant reçu aucune proposition de reclassement entre cette date et l'engagement de la procédure de licenciement ; qu'il n'est pas établi que pendant cette période, la société était dans l'impossibilité de proposer un reclassement dans la société ou dans le groupe ; qu'une erreur manifeste d'appréciation a également été commise concernant le lien entre la demande d'autorisation de licenciement et le mandat ; que ce lien est démontré par la proportion anormalement élevée de représentants du personnel par rapport au nombre total de licenciés et le nombre de syndiqués à la CGT et à la CFDT concernés par cette procédure ; que les pièces du dossier démontrent que les relations sociales avec la CGT étaient particulièrement tendues ; qu'il n'est pas démontré que cette proportion ne serait que le résultat de l'application des critères d'ordre des licenciements ; que la demande d'autorisation de licenciement était discriminatoire ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu l'ordonnance du 11 mai 2209 fixant la clôture de l'instruction au 12 novembre 2009 à 16 h 30 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 août 2009, présenté pour la société Zehnder Group Vaux-Andigny, dont le siège social est situé 17 rue des Parachutistes de la France Libre, BP 1, à Vaux-Andigny (02110), représentée par son président en exercice, par Me Pichard, avocat, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation du requérant à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle fait valoir que le motif économique est avéré car il existait une menace pour la compétitivité de l'entreprise et du groupe dont elle relève ; que l'obligation de reclassement a été respectée et, comme elle devait l'être, l'a été dès que le licenciement était envisagé, c'est-à-dire dès que la procédure collective de consultation a été engagée ; que le plan de sauvegarde de l'emploi n'a jamais envisagé de supprimer 110 emplois ; que les recherches et propositions de reclassement ont été loyales et sérieuses ; que les postes sur lesquels 13 salariés ont pu être reclassés sur le site de Vaux-Andigny ont été proposés au requérant ; que la recherche du reclassement s'est poursuivie après le 14 décembre 2006 mais qu'il n'y avait plus de poste disponible à proposer ; que les premiers juges n'ont pas inversé la charge de la preuve ; qu'il n'y a pas de lien entre la demande d'autorisation de licenciement et le mandat ; que l'argument tiré d'une prétendue proportion anormalement élevée de représentants du personnel par rapport au nombre de licenciés et du nombre de syndiqués à la CGT et à la CFDT est juridiquement infondé et dénature la réalité de la situation de l'entreprise ; qu'il n'existait pas de situation très conflictuelle entre la CGT et l'entreprise ; qu'elle n'a jamais recherché le conflit avec ce syndicat ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 5 octobre 2009, présenté pour M. A qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 novembre 2009, présenté pour la société Zehnder Group Vaux-Andigny qui conclut au rejet de la requête par les mêmes moyens ;

Vu l'ordonnance du 16 novembre 2009 décidant la réouverture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 janvier 2010, présenté pour M. A qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 2 mars 2010 et régularisé par la production de l'original le 4 mars 2010, présenté pour la société Zehnder Group Vaux-Andigny qui conclut aux mêmes fins que ses précédents mémoires par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller, les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Barge, avocat, pour la société Zehnder Group Vaux-Andigny ;

Considérant que, par décision du 24 avril 2007, l'inspecteur du travail de la 1ère section de l'Aisne a autorisé la société Zehnder Group Vaux-Andigny à procéder au licenciement, pour un motif de caractère économique, de M. Hervé A, accrocheur-décrocheur et membre suppléant du comité d'entreprise ; que M. A relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 19 octobre 2007 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité a rejeté son recours hiérarchique et confirmé la décision du 24 avril 2007 ;

Sur les conclusions en annulation :

Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis du mandat de membre du comité d'entreprise bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande d'autorisation de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 321-1, alors applicable, du code du travail : Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou d'une transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. / (...) / Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi de catégorie inférieure ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient. Les offres de reclassement proposées au salarié doivent être écrites et précises ;

En ce qui concerne le caractère économique du motif de la demande d'autorisation de licenciement :

Considérant que, pour apprécier la réalité des motifs économiques allégués à l'appui d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé par une société qui fait partie d'un groupe, l'autorité administrative ne peut se borner à prendre en considération la seule situation de l'entreprise demanderesse, mais est tenue d'apprécier les difficultés économiques de cette dernière au regard des sociétés du groupe auquel elle appartient et qui oeuvrent dans le même secteur d'activité qu'elle ;

Considérant que la société par actions simplifiée Zehnder Group Vaux-Andigny a pour activité la production, sur son site industriel de Vaux-Andigny (Aisne), de radiateurs et sèche-serviettes destinés aux logements ; qu'elle fait partie d'un groupe de sociétés dont le siège se situe en Suisse et comprenant des filiales de production en France, en Suisse, en Allemagne, en Italie, en Pologne, aux Etats-Unis, aux Pays-Bas et en Chine ; qu'il ressort des pièces du dossier que cette société et les autres sociétés du groupe dont elle relève oeuvrant dans le même secteur d'activité sont confrontées, au moins depuis l'année 2004, à une baisse sensible et continue de leurs activités se caractérisant par un recul en volume de la production et du chiffre d'affaires, reculs qui ont nécessité, chaque année, un recours important au chômage partiel ; que ces reculs s'expliquent tant par le renchérissement important des coûts de plusieurs matières premières, dont l'aluminium et l'acier, que par la concurrence de producteurs étrangers présentant des coûts de production, notamment de main-d'oeuvre, moindres ; qu'ainsi, la compétitivité de la société Zehnder Group Vaux-Andigny et des autres sociétés du groupe oeuvrant dans le même secteur d'activité se trouvait durablement menacée ; que, par suite, en estimant que la réalité du motif économique invoqué par la société Zehnder Group Vaux-Andigny est avérée, le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées du premier alinéa de l'article L. 321-1 du code du travail ;

En ce qui concerne l'obligation de reclassement :

Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce qui est soutenu par le requérant, il appartient à l'employeur de rechercher des possibilités de reclassement et, le cas échéant, de faire des offres écrites et précises de reclassement au salarié dès que le licenciement pour motif économique est envisagé et, dès lors, en cas de licenciement collectif, dés le début de la procédure de consultation des représentants du personnel ; qu'en l'espèce, la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise prévue par l'article L. 432-1 du code du travail a débuté le 27 janvier 2005 par la présentation d'un projet de restructuration et de réduction des effectifs ; que, la société envisageant de licencier plus de dix salariés pour motif économique, la consultation imposée par l'article L. 321-2 du code du travail a été ouverte le 5 janvier 2006 ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à prétendre que l'obligation de reclassement imposée à l'employeur a été méconnue au motif que des offres de reclassement lui ont été faites au cours de l'année 2006 avant que, le 14 décembre 2006, le comité d'entreprise se soit prononcé sur le plan de sauvegarde de l'emploi ainsi qu'avant que, à la suite de cet avis, aient été définitivement arrêtés le nombre d'emplois supprimés, les critères d'ordre des licenciements et le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi ;

Considérant, en deuxième lieu, que, si le requérant soutient qu'aucune offre de reclassement ne lui a été proposée après le 14 décembre 2006, il ressort toutefois suffisamment des pièces produites par la société défenderesse qu'entre le 14 décembre 2006 et la date de la décision de l'inspecteur du travail, aucun emploi relevant de la même catégorie professionnelle que celle de l'intéressé ou emploi équivalent, susceptible de lui être proposé à titre de reclassement, ne s'est trouvé disponible au sein des sociétés du groupe Zehnder, le requérant n'apportant à cet égard pas d'élément propre à établir le contraire ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, par des lettres des 15 mars et 22 mars 2006, la société Zehnder Group Vaux-Andigny a informé le requérant de l'existence de sept postes à pourvoir au sein de l'entreprise à Vaux-Andigny ou dans un établissement secondaire à Etreux (Aisne), de deux postes à pourvoir dans une société du même groupe à Carmaux et d'un poste à pourvoir dans une société du groupe en Suisse ; que le requérant soutient avoir reçu ces lettres les 20 mars et 30 mars 2006 ; que, si ces dernières impartissaient au salarié des délais expirant respectivement les 24 mars et 31 mars 2006 pour faire savoir s'il était intéressé par l'un ou l'autre de ces postes, ces délais étaient toutefois suffisants à une simple déclaration d'intérêt, alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que le respect de ces délais aurait été en fait imposé à peine de rejet d'une manifestation d'intérêt postérieure à ces dates et, en outre, que la lettre du 22 mars 2006 ouvrait une nouvelle possibilité de déclarer son intérêt pour les 8 postes déjà mentionnés dans celle du 15 mars précédent et, pour le reste, faisait état de 2 autres postes disponibles ; que le requérant n'a pas manifesté son intérêt pour l'un de ces dix emplois ; que, par lettre du 12 juillet 2006, l'employeur a proposé au requérant un poste de préparateur logistique situé dans l'établissement d'Etreux et deux postes d'agents de production dans une société du groupe à Carmaux (Tarn) et que, le 13 juillet 2006, un entretien professionnel s'est tenu à l'issue duquel le requérant a indiqué ne pas être intéressé par ces postes ; que, si le requérant soutient que les postes d'agents de production à Carmaux entraînaient une perte salariale significative, il ressort toutefois du plan de sauvegarde de l'emploi que des garanties de carrière et de rémunération y étaient prévues afin de supprimer ou d'atténuer pendant au moins deux ans les incidences éventuelles d'un tel reclassement et que M. A en avait été informé lors de l'entretien du 13 juillet 2006 ; qu'ainsi, les postes proposés en juillet 2006 étant au nombre de ceux déjà proposés en mars de la même année, dix postes ont été proposés à l'intéressé en vue d'un éventuel reclassement ; que, si le requérant soutient que la société Zehnder Group Vaux-Andigny a reclassé treize salariés avant le 30 novembre 2006 sur son site de Vaux-Andigny, il ressort des pièces du dossier qu'à cette date la société avait procédé à douze reclassements internes sur son site de Vaux-Andigny et un reclassement sur le poste de préparateur logistique à Etreux et que sept des treize postes sur lesquels sont intervenus ces reclassements avaient été proposés au requérant ; qu'en tout état de cause, il n'est pas allégué et ne ressort pas du dossier que les six autres postes sur lesquels sont intervenus ces reclassements concernaient des emplois relevant de la même catégorie professionnelle des agents de production que celle dont relevait l'intéressé ou des emplois équivalents à son emploi d'accrocheur-décrocheur ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré d'une méconnaissance de l'obligation de reclassement doit être écarté ;

En ce qui concerne le lien avec le mandat :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 122-45, alors applicable, du code du travail : (...) aucun salarié ne peut être (...) licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, (...) en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques ethniques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son patronyme ou (...) en raison de son état de santé ou de son handicap. / (...) / En cas de litige relatif à l'application des alinéas précédents, le salarié concerné (...) présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il juge utiles ;

Considérant qu'à l'appui du moyen tiré de ce que la demande d'autorisation de licenciement le concernant était en lien avec ses fonctions représentatives normalement exercées ou son appartenance syndicale, le requérant soutient que la proportion des demandes de licenciement concernant des salariés protégés était anormalement élevée par rapport à l'ensemble des licenciements envisagés et que la plus grande part de ces demandes concernait des salariés syndiqués auprès de la CGT ou de la CFDT ; que l'entreprise entretenait une situation très conflictuelle avec la première de ces organisations syndicales ; qu'il n'a reçu aucune proposition de reclassement loyale et sérieuse ;

Considérant, en premier lieu et ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que la société Zehnder Group Vaux-Andigny n'a pas méconnu l'obligation de reclassement qui lui incombait ; que, dès lors, le moyen tiré de ce qu'une telle méconnaissance serait propre à laisser supposer une discrimination prohibée par l'article L. 122-45 du code du travail et, partant, un lien avec le mandat, ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, dans le cadre du licenciement collectif pour motif économique pratiqué au sein de la société Zehnder Group Vaux-Andigny, l'employeur a prononcé la rupture de 62 contrats de travail à durée indéterminée au sein des catégories professionnelles des agents de production et des techniciens administratifs, soit 17 % de l'effectif de l'entreprise au mois de janvier 2007 ; que la proportion des salariés protégés, au nombre de 14, ayant fait l'objet d'une demande d'autorisation de licenciement s'établissait ainsi à 22,5 % de l'ensemble des salariés dont les contrats de travail ont été rompus ; que cette proportion n'était pas anormalement élevée ; que si les salariés membres de la CGT représentaient la majorité de ces 14 salariés protégés, il ressort des pièces du dossier que les membres de ce syndicat étaient également majoritaires au sein des institutions représentatives du personnel de l'entreprise et parmi les délégués du personnel et le sont demeurés à l'issue des licenciements ; que le choix des salariés protégés concernés par les demandes d'autorisation de licenciement a été fait par application des critères d'ordre des licenciements définis par le plan de sauvegarde de l'emploi et sur la validité desquels il n'appartient pas à l'autorité administrative de se prononcer, dès lors qu'aucun de ces critères, se rapportant aux compétences techniques mises en oeuvre dans l'entreprise, à la polyvalence, à l'assiduité et à la disponibilité, aux charges de famille, aux caractéristiques sociales rendant la réinsertion difficile et à l'ancienneté, ne présentait pas un caractère discriminatoire au regard de l'article L. 122-45 précité du code du travail ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'application qui a été faite au requérant des critères en fonction desquels cet ordre a été défini ait été en rapport avec l'exercice du mandat ; qu'il n'en ressort pas non plus que les relations sociales dans l'entreprise, qui ne peuvent s'apprécier au regard d'une seule organisation syndicale, étaient particulièrement mauvaises ou tendues, et ce, alors même que la présentation en 2005 par l'employeur d'un projet de licenciement économique collectif devant le comité d'entreprise et, à la suite, la définition du contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi ont pu être propres à entraîner une dégradation de ces relations sociales ; qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, le moyen tiré d'un lien avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande le requérant sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'accueillir les conclusions de la société Zehnder Group Vaux-Andigny présentées sur le même fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Zehnder Group Vaux-Andigny tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Hervé A, à la société Zehnder Group Vaux-Andigny et au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 09DA00572
Date de la décision : 04/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Antoine Durup de Baleine
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : CABINET GRUMBACH ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-11-04;09da00572 ?
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