Vu la requête, enregistrée par télécopie le 20 août 2009 et régularisée par la production de l'original le 21 août 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SAS INTERAL EUROPE, dont le siège est Route de Survilliers, ZA du Pré de la Dame Jeanne à Plailly (60128), par Me Gabrielian, avocat ; la SAS INTERAL EUROPE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0700733 du 23 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution sur l'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2000, 2001 et 2002 ainsi qu'à la condamnation de l'Etat à lui payer une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que le jugement est entaché d'une irrégularité manifeste et n'est fondé ni en fait, ni en droit ; que les premiers juges auraient dû davantage s'interroger sur la problématique de l'absence de facturation d'intérêts au titre de prêts ou d'avances au sein d'un groupe de sociétés ; que la société a eu la volonté non équivoque d'agir dans son propre intérêt en s'assurant le maintien d'un débouché essentiel pour ses productions et son chiffre d'affaires ; que les intérêts des deux sociétés étaient assez fortement imbriqués ; qu'elle s'intégrait dans un processus de fabrication et de commercialisation du groupe ; que la société a été contrainte de renoncer à facturer des intérêts à des sociétés du groupe dont le solde des comptes était resté débiteur en considération des situations bilancielles desdites sociétés ; qu'à défaut, elle n'aurait pas été à même de sauvegarder des débouchés commerciaux ; que la rémunération des avances en comptes courants aurait placé ces sociétés dans l'impossibilité de rembourser à la SAS INTERAL EUROPE la créance en principal ; que les sociétés concernées par les rappels sont Gardeil, GIE Interal Europe, Flodor Commerce, Soprex, Unichips France, Interal France et San Carlo France ; qu'il existe des relations commerciales directes ou indirectes entre ces sociétés ; que les situations nettes des sociétés bénéficiaires des avances sont négatives ou très légèrement positives selon les exercices desdites sociétés ; que c'est au mépris de ces bilans que le tribunal administratif a cru devoir retenir la position de l'administration fiscale ; que les premiers juges ont dénaturé l'organigramme du groupe ; qu'il était de bonne gestion de ne pas exiger le versement de tels intérêts de manière à éviter de prendre le risque de placer ces sociétés dans des situations telles qu'elles auraient été acculées à des procédures d'apurement collectif du passif ; que la facturation d'intérêts aurait certainement conduit la SAS INTERAL EUROPE à prendre le risque de perdre les débouchés commerciaux correspondants ; que la préservation des débouchés commerciaux des sociétés commerciales va permettre d'éviter les pertes de marché qui pourraient en résulter au niveau des sociétés industrielles qui fabriquent les produits en cause et ne livrent que les sociétés commerciales du groupe ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 octobre 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que la SAS INTERAL EUROPE a pour activité le commerce des produits alimentaires du groupe Unichips ; que la société requérante n'établit pas qu'elle aurait entretenu des relations commerciales substantielles avec les sociétés auxquelles elle a consenti des avances non rémunérées ; que les difficultés financières de ces sociétés ne sauraient être invoquées, dès lors qu'à une seule exception près ne concernant qu'un seul exercice, leurs situations nettes étaient positives et que leurs résultats étaient bénéficiaires ; qu'en l'absence de relations commerciales et de réelles difficultés financières, la renonciation aux produits financiers constitue un acte anormal de gestion ;
Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 20 juin 2010 et régularisé par la production de l'original le 24 juin 2010, présenté pour la SAS INTERAL EUROPE, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Gabrielian, pour la SAS INTERAL EUROPE ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que, si la requérante soutient que le jugement est entaché d'une irrégularité manifeste, elle n'en précise pas la nature et n'apporte aucune précision au soutien de ce moyen ;
Sur les conclusions en décharge :
Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité de la SAS INTERAL EUROPE portant sur la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2002, l'administration a constaté que cette société s'était abstenue de percevoir comme de facturer des intérêts sur des avances consenties par elle à plusieurs autres sociétés ainsi qu'à un groupement d'intérêt économique ; qu'au motif qu'une telle renonciation ne relevait pas d'une gestion commerciale normale, elle a réintégré dans les bénéfices des exercices clos en 2000, 2001 et 2002 les sommes correspondant à la valeur des intérêts ainsi non perçus ou facturés ; que la SAS INTERAL EUROPE relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments d'imposition résultant de cette réintégration ;
Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale ; que les abandons de créances et avances sans intérêts accordés par une entreprise au profit d'un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages, l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que, s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances ou d'intérêts consenti par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties ;
Considérant, en premier lieu, que la SAS INTERAL EUROPE, qui a pour activité le commerce des produits alimentaires du groupe Unichips, soutient que la renonciation aux produits financiers des avances en comptes courants consenties au groupement d'intérêt économique Interal Europe ainsi qu'aux sociétés Gardeil, Flodor Commerce, Soprex, Unichips France, Interal France et San Carlo France trouve sa contrepartie dans la nécessité pour elle de ne pas aggraver la situation financière de ce groupement et de ces sociétés, qui représentent pour elle des débouchés commerciaux significatifs ; que, toutefois, la société requérante ne justifie pas, par ses seules allégations ainsi qu'en produisant un document présenté comme un organigramme du groupe Unichips en France, de la nature et de l'importance des relations commerciales que, d'après elle, elle entretenait, au cours des exercices 2000 à 2002, avec ce groupement et ces sociétés ; qu'il ne ressort pas de ce document, à le supposer intelligible, que la SAS INTERAL EUROPE aurait alors entretenu des relations commerciales avec les sociétés San Carlo France, Interal France et Flodor Commerce ainsi qu'avec le groupement d'intérêt économique Interal Europe ; que, d'après le même document, la société Unichips France se bornait à délivrer à la requérante des prestations de services, sans en constituer un fournisseur de marchandises ou un client ; qu'en outre, le seul constat de l'existence de relations commerciales ou de liens économiques d'autre nature entre la société requérante et les sociétés et le groupement susnommés n'est pas, en lui-même, propre à permettre de regarder comme relevant d'une gestion commerciale normale la renonciation à percevoir des produits sur les avances consenties à ces tierces personnes ; qu'il en va de même de la circonstance que la requérante et ces tierces personnes font partie d'un même groupe ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que les sociétés Gardeil, Soprex, Flodor Commerce et Unichips France ont dégagé des résultats bénéficiaires au titre de chacun des exercices clos en 2000, 2001 et 2002 ; que la seule circonstance que la situation nette comptable de la société Flodor Commerce était négative à la clôture de l'exercice 2000 n'est pas de nature à établir que la facturation d'intérêts à cette société en aurait remis en cause la situation financière et l'existence et ce, eu égard tant au montant, de 183 078 euros, de son résultat bénéficiaire de cet exercice, qu'à celui, de 368,17 euros, des intérêts, calculés au taux de 4 %, auxquels la société requérante a renoncé au titre du même exercice au profit de cette société, à supposer que ces deux entreprises auraient entretenu des relations commerciales ; que la requérante n'établit donc pas que la renonciation à percevoir des intérêts sur ces quatre sociétés aurait été nécessaire à la préservation de ses sources d'approvisionnement ou de ses débouchés commerciaux ;
Considérant, dès lors, que la SAS INTERAL EUROPE ne justifie pas de l'existence de contreparties que, dans son intérêt propre, elle aurait retiré de la renonciation à percevoir des intérêts sur les avances consenties aux tierces personnes susmentionnées et que, par suite, l'administration établit que cette renonciation ne relevait pas d'une gestion commerciale normale ;
Considérant, enfin, que, si la société requérante indique contester le taux, de 4 %, retenu par l'administration pour calculer les produits financiers auxquels cette société a renoncé, cette contestation n'est pas assortie des précisions suffisantes pour permettre à la Cour d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SAS INTERAL EUROPE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande la SAS INTERAL EUROPE à ce titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SAS INTERAL EUROPE est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS INTERAL EUROPE et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.
Copie sera adressée au directeur de contrôle fiscal Nord.
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N°09DA01258 2