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04/03/2010 | FRANCE | N°09DA01025

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 04 mars 2010, 09DA01025


Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Haci A, demeurant ..., par la Selarl Blery, Engueleguele ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900695 du 11 juin 2009 du Tribunal administratif d'Amiens rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 février 2009 par lequel le préfet de la Somme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a prononcé à son égard une mesure d'obligation de quitter le territoire français, dans un délai d'un mois, et a fixé le pays dont

il a la nationalité comme pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêt...

Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Haci A, demeurant ..., par la Selarl Blery, Engueleguele ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900695 du 11 juin 2009 du Tribunal administratif d'Amiens rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 février 2009 par lequel le préfet de la Somme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a prononcé à son égard une mesure d'obligation de quitter le territoire français, dans un délai d'un mois, et a fixé le pays dont il a la nationalité comme pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté du 15 février 2009 ;

Il soutient que l'arrêté du 15 février 2009 porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il est entré en France le 20 janvier 2005 et s'est marié avec une ressortissante française le 23 février 2008 ; qu'il a une vie privée et familiale réelle avec son épouse et qu'il prend soin des trois enfants de celle-ci ; que les certificats médicaux qu'il produit concernant son épouse, qui sont contemporains de la décision en litige et suffisamment circonstanciés, montrent que l'état de santé de celle-ci rend sa présence permanente indispensable auprès d'elle ; que son épouse a depuis 2005 une santé extrêmement fragile et est suivie par de nombreux médecins ; qu'elle a été opérée d'un cancer à l'estomac et souffre d'un syndrome dépressif sévère ; qu'il est son seul soutien ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu la mise en demeure adressée le 5 octobre 2009 au préfet de la Somme, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 novembre 2009, présenté par le préfet de la Somme ; il conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que l'arrêté du 15 février 2009 en litige ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale et ne méconnaît ainsi pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'intéressé ne peut voir sa situation régularisée en France par son mariage dans la mesure où il y est entré irrégulièrement ; qu'il doit repartir dans son pays d'origine pour effectuer les démarches utiles à l'obtention d'un visa de long séjour en qualité de conjoint de français ; que si le requérant déclare qu'il s'occupe des enfants de son épouse, il n'en est pas le père et n'établit pas contribuer à leur entretien ; que le fait que M. A ne constitue pas une menace à l'ordre public ne peut être utilement invoqué par l'intéressé pour justifier la délivrance de plein droit d'un titre de séjour ; que les certificats médicaux produits sont insuffisamment circonstanciés et n'attestent pas de la nécessité de sa présence permanente auprès de son épouse ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré par télécopie le 20 novembre 2009 et régularisé par la production de l'original le 23 novembre 2009, présenté pour M. A ; il conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu la décision du 23 novembre 2009 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant l'aide juridictionnelle totale à M. A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Marianne Terrasse, président-assesseur, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que M. A, de nationalité turque, qui a déclaré être entré en France le 20 janvier 2005, a demandé son admission au séjour au titre de l'asile politique le 15 février 2005 ; que sa demande a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 30 mai 2005 et que ce refus a été confirmé par la Commission des recours des réfugiés le 28 novembre 2005 ; que l'intéressé a fait l'objet d'une invitation à quitter le territoire, par un arrêté du 9 décembre 2005 du préfet du Val d'Oise ; que M. A a sollicité le réexamen de sa demande d'asile, qui a de nouveau été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 26 avril 2006 ; que l'intéressé s'est marié avec une ressortissante française, le 23 février 2008, et a demandé le 10 avril 2008 son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 15 février 2009, le préfet de la Somme a refusé à M. A de lui délivrer un titre de séjour, a prononcé à son égard une mesure d'obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays dont il a la nationalité comme pays de destination de cette mesure ; que M. A relève appel du jugement du 11 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté du 15 février 2009 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que M. A s'est marié le 23 février 2008 avec une ressortissante française, mère de trois enfants nés d'une précédente union ; que la réalité de la communauté de vie entre les époux n'est pas contestée ; que l'intéressé se prévaut de l'état de santé de son épouse, opérée en 2005 d'un cancer à l'estomac et souffrant depuis d'un syndrome dépressif, qui rend sa présence indispensable et permanente auprès d'elle ; qu'il justifie par les pièces qu'il produit, en particulier un certificat médical du 17 avril 2008 émanant du chef de service de chirurgie viscérale et digestive du Centre hospitalier universitaire d'Amiens, que l'état de santé de son épouse, consécutif à une intervention majeure pour une pathologie néoplasique de l'estomac, nécessite une aide et un soutien physique et psychologique indispensable à son équilibre et qu'il assure ; qu'il suit de là que la présence de ce dernier est nécessaire auprès de son épouse et des enfants de celle-ci ; qu'ainsi et eu égard à l'ensemble des circonstances particulières de l'espèce, l'arrêté du 15 février 2009 en litige a porté au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 février 2009 ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0900695 du 11 juin 2009 du Tribunal administratif d'Amiens et l'arrêté du 15 février 2009 du préfet de la Somme sont annulés.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Hacik A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera transmise au préfet de la Somme.

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N°09DA01025 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09DA01025
Date de la décision : 04/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Gayet
Rapporteur ?: Mme Marianne (AC) Terrasse
Rapporteur public ?: M. de Pontonx
Avocat(s) : SELARL BLÉRY - ENGUÉLÉGUÉLÉ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-03-04;09da01025 ?
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