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22/12/2008 | FRANCE | N°07DA00687

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 22 décembre 2008, 07DA00687


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 4 mai 2007, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ;

Le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0402318, en date du 20 mars 2007, par lequel le Tribunal administratif de Lille a annulé sa décision du 6 février 2004 par laquelle il fixait le montant de la dotation générale de décentralisation attribuée pour l'année 2004 à la région Nord/Pas-de-Calais ;

Le M

INISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 4 mai 2007, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ;

Le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0402318, en date du 20 mars 2007, par lequel le Tribunal administratif de Lille a annulé sa décision du 6 février 2004 par laquelle il fixait le montant de la dotation générale de décentralisation attribuée pour l'année 2004 à la région Nord/Pas-de-Calais ;

Le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES soutient qu'il a bien suivi les dispositions prévues par l'article L. 1614-3 du code général des collectivités territoriales en arrêtant le montant de la dotation générale de décentralisation pour l'année 2004, la commission consultative d'évaluation des charges ayant bien été saisie pour avis des conséquences des nouveaux barèmes de redevance dues au Réseau Ferré de France ; qu'il n'était toutefois pas tenu de saisir cette commission alors qu'il versait une allocation prévisionnelle pour compenser cette augmentation de charge pour la région dans l'attente d'en connaître le montant définitif ; que la commission consultative d'évaluation des charges n'a pas pu se prononcer sur ce sujet avant 2006 du fait d'un remaniement de sa composition survenue en 2004 ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 14 février 2008 et régularisé par la production de l'original le 15 février 2008, présenté pour le président du conseil régional Nord/Pas-de-Calais, dont le siège est à l'Hôtel de Région à Lille cedex (59555), par la société d'avocats Latournerie, Wolfrom et Associés, qui conclut au rejet du recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; le président du conseil régional Nord/Pas-de-Calais soutient que le versement d'une allocation prévisionnelle ne dispensait nullement le ministre de soumettre pour avis cette charge nouvelle pour la région à la commission consultative d'évaluation des charges ; que le caractère provisoire de la dotation versée n'apparaît pas sur la décision transmise à la région et que, de plus, le montant définitif de cette dotation n'a été arrêté qu'en 2007 ; qu'en tout état de cause, l'Etat n'a pas intégralement compensé le relèvement des barèmes de Réseau ferré de France ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 mai 2008, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, qui confirme ses précédentes écritures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 décembre 2008 à laquelle siégeaient M. Marc Estève, président de chambre, M. Albert Lequien, président-assesseur et M. Jean-Marc Guyau, premier conseiller :

- le rapport de M. Jean-Marc Guyau, premier conseiller ;

- les observations de Me Roche, pour la région Nord/Pas-de-Calais ;

- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES relève appel d'un jugement du Tribunal administratif de Lille en date du 20 mars 2007 qui annulait sa décision du 6 février 2004 fixant le montant de la dotation générale de décentralisation attribuée pour l'année 2004 à la région Nord/Pas-de-Calais ;

Sur la légalité de la décision en date du 6 février 2004 par laquelle le ministre de l'intérieur a fixé la montant de la dotation générale de décentralisation pour l'année 2004 à la région Nord/Pas-de-Calais :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1614-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : « Tout accroissement net de charges résultant des transferts de compétences effectués entre l'Etat et les collectivités territoriales est accompagné du transfert concomitant par l'Etat aux communes, aux départements et aux régions des ressources nécessaires à l'exercice normal de ces compétences. Ces ressources sont équivalentes aux dépenses effectuées, à la date du transfert, par l'Etat au titre des compétences transférées et évoluent chaque année, dès la première année, comme la dotation globale de fonctionnement. Elles assurent la compensation intégrale des charges transférées. » ; qu'aux termes de l'article L. 1614-3 dudit code : « Le montant des dépenses résultant des accroissements et diminutions de charges est constaté pour chaque collectivité par arrêté conjoint du ministre chargé de l'intérieur et du ministre chargé du budget, après avis d'une commission présidée par un magistrat de la Cour des comptes et comprenant des représentants de chaque catégorie de collectivités concernées. Les modalités d'application du présent alinéa, notamment en ce qui concerne la procédure de décompte et la composition de la commission, sont fixées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d'Etat. » ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que, dans le cadre d'un transfert de compétences de l'Etat vers les collectivités territoriales, la commission consultative sur l'évaluation des charges procède à la vérification de la concordance des dépenses de l'Etat et des sommes transférées pour chaque catégorie de collectivité et se prononce sur le montant de la compensation allouée à chaque collectivité ; qu'il ressort des pièces du dossier, sans que cela soit contesté, que la compensation des charges résultant de la modification du barème des redevances des infrastructures ferroviaires au titre de l'exercice 2004 a donné lieu à une allocation provisionnelle notifiée à la région par circulaire du 6 février 2004, le montant définitif n'ayant été arrêté après consultation de la commission susmentionnée que par arrêté du 23 janvier 2007 ; que la décision attaquée, qui se bornait à octroyer une avance à la région à titre provisionnel n'avait pas à être précédée de la consultation de la commission susmentionnée ; que le ministre de l'intérieur est donc fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Lille s'est fondé, pour annuler la décision du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, sur la circonstance qu'une telle consultation s'imposait lors du versement d'une dotation provisoire ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par la région Nord/Pas-de-Calais devant le Tribunal administratif de Lille ;

Sur l'exception d'illégalité de l'arrêté interministériel du 29 décembre 2003 fixant le barème des redevances d'utilisation du réseau ferré national :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la loi du 13 février 1997 portant création de l'établissement public Réseau ferré de France en vue du renouveau du transport ferroviaire : « Les ressources de Réseau ferré de France sont constituées par : / - les redevances liées à l'utilisation du réseau ferré national (...). / Le calcul des redevances (...) tient notamment compte du coût de l'infrastructure, de la situation du marché des transports et des caractéristiques de l'offre et de la demande, des impératifs de l'utilisation optimale du réseau ferré national et de l'harmonisation des conditions de la concurrence intermodale ; les règles de détermination de ces redevances sont fixées par décret en Conseil d'Etat (...) » ; qu'aux termes de l'article 132 de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains : « Tout projet de modification des modalités de fixation des redevances d'infrastructures ferroviaires au sens de l'article 13 de la loi n° 97-135 du 13 février 1997 portant création de l'établissement public Réseau ferré de France doit faire l'objet d'une consultation et d'un avis de la ou des régions concernées » ; qu'aux termes de l'article 9 du décret du 5 mai 1997 relatif aux redevances d'utilisation du réseau ferré national : « Sur proposition de Réseau ferré de France, un arrêté des ministres chargés des transports, de l'économie et du budget fixe (...) le barème des redevances et ses conditions d'application conformément aux dispositions du présent décret. / L'arrêté est publié trois mois au moins avant l'entrée en vigueur de l'horaire annuel de service prévu à l'article 21 du décret n° 2003-194 du 7 mars 2003 relatif à l'utilisation du réseau ferré national » ; qu'enfin, selon le premier alinéa de l'article 7 du décret du 27 novembre 2001 relatif au transfert de compétences en matière de transports collectifs d'intérêt régional : « Tout projet portant modification de la structure ou du barème des redevances d'infrastructure pouvant avoir une incidence dans le ressort territorial d'une région est soumis pour avis à cette région au moins trois mois avant la date prévue pour l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la consultation prévue par les dispositions précitées du premier alinéa de l'article 7 du décret du 27 novembre 2001 a été opérée par lettre du 7 octobre 2003, à laquelle le président du conseil de la REGION NORD/PAS-DE-CALAIS a répondu par courrier circonstancié du 5 décembre 2003 ; que la lettre de saisine comportait, comme pièces jointes, le projet d'arrêté, un projet de barème des redevances pour les années 2004/2005 établi par Réseau ferré de France ainsi que deux tableaux dressés par le Réseau et faisant état des redevances prévisionnelles attendues pour les deux années à venir ; que les services de la région ont sollicité des éclaircissements et précisions complémentaires, qui leur ont été fournis le 20 novembre 2003 ; qu'il résulte de ces éléments que la REGION NORD/PAS-DE-CALAIS a été mise en mesure de se prononcer en connaissance de cause sur le projet transmis, au regard, notamment, de l'établissement de ses prévisions budgétaires ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que la procédure de consultation préalable prévue à l'article 132 de la loi du 13 décembre 2000 et à l'article 7 du décret du 27 novembre 2001 n'aurait pas été respectée ;

Considérant que la circonstance que l'horaire de service de l'ensemble des mouvements de trains et matériels roulants pour l'année 2004 est entré en vigueur, non pas trois mois après, mais une quinzaine de jours avant la publication de l'arrêté attaqué, est sans incidence sur la légalité de celui-ci ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 9 du décret du 5 mai 1997 doit être écarté ;

Considérant qu'en fixant pour objectif à la politique d'aménagement et de développement du territoire, la mise en valeur et le développement équilibré de l'ensemble du territoire de la République, l'article 1er de la loi du 4 février 1995 n'a pas entendu poser un principe normatif dont la violation pourrait être utilement invoquée devant le juge de la légalité ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué méconnaîtrait cette disposition ne peut qu'être écarté ;

Considérant que, si le paragraphe 4 de l'article 7 de la directive 2001/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2001, concernant la répartition des capacités d'infrastructures ferroviaires, la tarification de l'infrastructure ferroviaire et la certification en matière de sécurité, prévoit que « la redevance d'utilisation de l'infrastructure peut inclure une redevance au titre de la rareté des capacités de la section identifiable de l'infrastructure pendant les périodes de saturation », cette disposition n'imposait pas que le droit de réservation d'arrêt en gare, qui ne constitue que l'un des éléments du droit de réservation des capacités du réseau ferré national, fût limité aux seules sections du réseau connaissant un fort trafic ferroviaire ; que la redevance au titre de la rareté des capacités de l'infrastructure pendant les périodes de saturation est, d'ailleurs, prévue à l'article 6 du décret du 5 mai 1997 sous forme de modulations du droit de réservation lui-même ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de la directive 2001/14/CE du 26 février 2001 doit être écarté ;

Sur la violation des dispositions de l'article L. 1614-8-1° du code général des collectivités territoriales :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1614-8-1° du code général des collectivités territoriales : « Toute disposition législative ou réglementaire ayant une incidence financière sur les charges transférées en application de l'article 21-1 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 précitée donne lieu à révision dans les conditions prévues aux articles L. 1614-1 à L. 1614-3. Cette révision a pour objet de compenser intégralement la charge supplémentaire pour la région résultant de ces dispositions. » ;

Considérant que le principe de compensation intégrale des charges supplémentaires transférées aux régions posé par l'article L. 1614-8-1° du code précité ne peut être utilement invoqué compte tenu du caractère provisoire de l'allocation versée à la région Nord/Pas-de-Calais par la décision attaquée ; qu'ainsi, ce moyen doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a annulé sa décision du 6 février 2004 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à la région Nord/Pas-de-Calais la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lille du 20 mars 2007 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la région Nord/Pas-de-Calais devant le Tribunal administratif de Lille est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES et au président du conseil régional Nord/Pas-de-Calais.

Copie sera transmise au préfet de la région Nord/Pas-de-Calais.

N°07DA00687 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07DA00687
Date de la décision : 22/12/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Estève
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Guyau
Rapporteur public ?: M. Lepers
Avocat(s) : SOCIÉTÉ D'AVOCATS LATOURNERIE WOLFROM et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2008-12-22;07da00687 ?
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