Vu, I, sous le n° 07DA00973, la requête, enregistrée le 28 juin 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour les époux X, demeurant ..., par la SELARL Guevenoux, Glorian ; les époux X demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 0402399-0402400-0402407 du 26 avril 2007 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté le surplus de leurs conclusions tendant à ce que le défendeur soit condamné, à titre principal, à détruire sous astreinte le terrain multisports jouxtant leur propriété et, à titre subsidiaire, de condamner la commune de Trosly-Breuil à réaliser un écran acoustique sous astreinte ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Trosly-Breuil la somme de 20 000 euros au titre des troubles de voisinage et de jouissance occasionnés par l'existence et le fonctionnement d'un ouvrage public ;
3°) de condamner la commune de Trosly-Breuil à leur rembourser la somme de 2 068,06 euros au titre des frais d'expertise ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Trosly-Breuil une somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que c'est à tort que le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs conclusions sur l'illégalité de l'autorisation de travaux accordée par le maire de la commune de Trosly-Breuil à sa collectivité pour la construction d'une aire de jeux et d'un terrain multisports dénommé « City Stade » du fait de la caducité des règles d'urbanisme contenues dans le cahier des charges du lotissement dit des « Vignes Mondaines », en vertu des dispositions de l'article L. 315-2-1 du code de l'urbanisme en vigueur au moment des faits ; que l'obsolescence des règles spécifiques d'urbanisme entre co-lotis ne trouve à s'appliquer que sous la réserve du respect de mesures d'informations prévues par l'article R. 315-44-1 du code de l'urbanisme et réaffirmées par l'article R. 442-25 du code de l'urbanisme dans sa version actuelle ; qu'ainsi, la commune était tenue de prendre en compte la cahier des charges du lotissement qui spécifiait que la parcelle sur laquelle a été implantée le « City Stade » était inconstructible ; que, par ailleurs, la commune de Trosly-Breuil a méconnu les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme car l'équipement installé porte atteinte à la salubrité publique du fait des nuisances sonores provoquées ; que la responsabilité de la commune de Trosly-Breuil peut être recherchée au titre des dommages de travaux publics car les nuisances engendrées par l'utilisation du « City Stade » présentent un caractère anormal et spécial, tant du fait des nuisances sonores que de la possibilité pour les utilisateurs d'avoir une vue à l'intérieur de leur habitation en prenant appui sur les superstructures ; qu'ils sont fondés à demander, à titre principal, pour faire cesser les dommages, la destruction de l'équipement ou, à titre subsidiaire, la réalisation d'un écran acoustique et en tout état de cause une indemnisation du préjudice subi ;
Vu, II, sous le n° 07DA00974, la requête, enregistrée le 28 juin 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour les époux Y, demeurant ..., par la SELARL Guevenoux, Glorian ; les époux Y demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 0402399-0402400-0402407 du 26 avril 2007 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté le surplus de leurs conclusions tendant à ce que le défendeur soit condamné, à titre principal, à détruire sous astreinte le terrain multisports jouxtant leur propriété et, à titre subsidiaire, de condamner la commune de Trosly-Breuil à réaliser un écran acoustique sous astreinte ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Trosly-Breuil la somme de 20 000 euros au titre des troubles de voisinage et de jouissance occasionnés par l'existence et le fonctionnement d'un ouvrage public ;
3°) de condamner la commune de Trosly-Breuil à leur rembourser la somme de 2 068,06 euros au titre des frais d'expertise ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Trosly-Breuil une somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils se prévalent des mêmes moyens que ceux analysés sous le précédent numéro ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, commun aux deux numéros, enregistré le 29 novembre 2007, présenté pour la commune de Trosly-Breuil, par la SCP Leclercq, Caron, Bouquet, Chivot ; la commune conclut à l'annulation du jugement n° 0402399-0402400-0402407 du 26 avril 2007 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens l'a condamnée à indemniser les époux X et Y au titre des troubles de voisinage, au rejet des requêtes des époux X et Y et à la condamnation des époux X et Y à verser la somme de 1 500 euros chacun au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La commune soutient que l'installation du « City Stade » a fait l'objet d'une demande de travaux conformément aux dispositions de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme et non d'un permis de construire comme le soutiennent les demandeurs ; quand bien même le cahier des charges du lotissement trouverait à s'appliquer en lieu et place du document d'urbanisme de la commune, les spécifications dudit cahier des charges prévoyaient explicitement que les parcelles sur lesquelles a été édifié le « City Stade » étaient réservées pour l'implantation d'aires de jeux et dés lors, la construction est tout à fait régulière ; par ailleurs, les conclusions sur la légalité du titre sont irrecevables car tardives ; les demandeurs ne précisent pas en quoi l'équipement en cause pourrait porter atteinte à la sécurité ou à la salubrité publique ; les dommages invoqués ne sont pas anormaux car prévisibles, ni spéciaux et ne peuvent faire l'objet d'une indemnisation ; de plus, les conclusions de l'expert judiciaire sont en totale contradiction avec celles de l'expert mandaté par la commune lors de l'établissement du projet d'implantation ; la réparation des dommages de travaux publics ne peut avoir lieu que par le moyen d'une indemnité, il n'y a donc pas lieu de détruire l'ouvrage contesté ;
Vu les ordonnances en date du 18 février 2008 fixant la clôture d'instruction au 18 mars 2008 pour les deux numéros, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juillet 2008, à laquelle siégeaient M. Marc Estève, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur, et M. Jean-Marc Guyau, premier conseiller :
- le rapport de M. Jean-Marc Guyau, premier conseiller ;
- les observations de Me Perrier, pour les époux X et Y, et de Me Chivot, pour la commune de Trosly-Breuil ;
- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes n° 07DA00973, présentée pour les époux X, et n° 07DA00974, présentée pour les époux Y, présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Considérant que M. et Mme X et M. et Mme Y sont propriétaires d'une habitation dans le lotissement dit des « Vignes Mondaines » sur le territoire de la commune de Trosly-Breuil ; que leurs propriétés sont riveraines des parcelles n° 44 et n° 47 du même lotissement sur lesquelles la commune a fait aménager des aires de jeux et un terrain multisports, l'ensemble dénommé « City Stade » et implanté en 2003 ; que le 5 juin 2004, les époux X et Y ont présenté un recours préalable auprès du maire de la commune de Trosly-Breuil pour faire cesser les troubles générés par l'utilisation du « City Stade » ; qu'en l'absence de réponse de la commune, ils ont saisi le Tribunal administratif d'Amiens le 13 octobre 2004 ; que la commune a été condamnée à leur verser une somme de 2 000 euros en réparation du préjudice résultant de l'existence et du fonctionnement d'un ouvrage public le 26 avril 2007 ;
Considérant que les requêtes des consorts X et Y concluent uniquement à la condamnation de la commune de Trosly-Breuil à réparer le préjudice résultant pour eux du fonctionnement du « City Stade » et ne mentionnent les vices entachant, selon eux, la décision d'urbanisme ayant conduit à l'installation de l'aire de jeux, que pour établir son caractère fautif ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres terrains de responsabilité ;
Sur la responsabilité de la commune :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert nommé par les premiers juges, que les nuisances sonores provoquées par le « City Stade » excèdent les sujétions que les riverains d'un tel ouvrage public sont normalement appelés à supporter du fait de son fonctionnement ; que, notamment, les mesures effectuées dans les jardins des demandeurs font apparaître que le bruit particulier issu du « City Stade » a une émergence, au regard du bruit ambiant, nettement supérieure aux valeurs maximales définies par l'article R. 1334-33 du code de la santé publique de 5 dB en période diurne ; que cette émergence est variable et dépend du nombre de personnes se trouvant sur l'aire de jeux, de leurs activités et de leur comportement ; qu'il s'ensuit que, dans les circonstances de l'espèce, les inconvénients, dont se plaignent les époux X et Y, qui sont tiers par rapport à l'ouvrage public, présentent un caractère anormal et spécial et sont donc de nature à leur ouvrir un droit à indemnisation de la part de la commune de Trosly-Breuil, propriétaire de l'installation incriminée ;
Sur les préjudices :
Considérant que si le préjudice auditif des requérants est établi, il n'en va pas de même des autres chefs de préjudice allégués, dès lors que les requérants ne démontrent pas que les utilisateurs de l'aire de jeux disposeraient de vues sur l'intérieur de leur habitation ou qu'ils seraient eux-mêmes partiellement privés d'une vue sur le ciel ; qu'ainsi, le Tribunal administratif d'Amiens a fait une juste appréciation des troubles subis par les époux X et Y dans leurs conditions d'existence du fait des nuisances sonores provoquées par le « City Stade » en les fixant la réparation de ceux-ci à une somme de 2 000 euros ; qu'il y a lieu de rejeter le surplus de leurs conclusions à fin d'indemnisation ;
Sur les conclusions à fins d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. » ;
Considérant que le préjudice subi du fait de l'existence et de l'utilisation du « City Stade » est réparé au moyen d'une indemnisation ; que la condamnation de la commune de Trosly-Breuil n'implique pas que les époux X et Y puissent demander que soient ordonnés des travaux de destruction du terrain de jeux ou la construction d'un écran acoustique ; que, dès lors, les conclusions à fins d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les époux X et Y ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté le surplus de leurs conclusions tendant à ce que le défendeur soit condamné, à titre principal, à détruire sous astreinte le terrain multisports jouxtant leur propriété et, à titre subsidiaire, de condamner la commune de Trosly-Breuil à réaliser un écran acoustique sous astreinte ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que les conclusions sur ce point des époux X et Y ont déjà été satisfaites en première instance et qu'ils ne font état d'aucune difficulté d'exécution ; qu'il y a lieu de rejeter celles-ci comme étant irrecevables ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Trosly-Breuil, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer aux époux X et Y les sommes qu'ils réclament au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner les époux X et Y à verser chacun à la commune de Trosly-Breuil la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes des époux X et Y sont rejetées.
Article 2 : Les époux X et Y verseront chacun à la commune de Trosly-Breuil une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié aux époux X et Y et à la commune de Trosly-Breuil.
N° 07DA00973,07DA00974