Vu la requête, enregistrée le 10 avril 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SAS SOCIETE FRANÇAISE DE PARFUMERIE, dont le siège est Parc des Rouges Barres, 55 rue Delcenserie à Marcq en Baroeul (59700), par Me Malguid Bassez ; la SAS SOCIETE FRANÇAISE DE PARFUMERIE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0507117 du 25 janvier 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la réintégration des déficits déclarés au titre de la période allant du 1er janvier 2002 au 30 septembre 2003 en tant qu'associée de la SNC X ;
2°) de prononcer la réintégration demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles ;
Elle soutient :
- que le jugement ne répond pas aux moyens de la demande ;
- que la proposition de rectification du 28 juin 2004 est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne comporte pas d'indications suffisantes pour apprécier les termes de comparaison retenus et n'a pas permis à la société de contester utilement les rehaussements envisagés, ce qui entache d'irrégularité la procédure d'imposition ;
- que le Tribunal a inversé la charge de la preuve ;
- que la méthode statistique retenue par l'administration pour déterminer le caractère excessif du loyer comporte des imperfections qui lui retirent toute valeur probante dès lors qu'elle ne fait apparaître aucun élément propre aux centres commerciaux en cause ; que le Tribunal ne pouvait estimer que tout droit d'entrée versé à un propriétaire de galerie marchande représente l'acquisition d'un élément incorporel alors que la doctrine 4 C-2111 n° 2 du 30 octobre 1997 ne lui donne cette qualification que si pris en considération avec le loyer, il forme une masse supérieure au niveau normal de loyer ;
- que les montants des loyers du local de Calais et de celui de Leers sont inférieurs aux moyennes retenues par l'administration et que les droits d'entrée les concernant ne pouvaient être considérés comme des éléments incorporels ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 septembre 2007, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique tendant au rejet de la requête ; il soutient que la procédure d'imposition a été régulière ; que les renseignements communiqués au contribuable relatifs à des éléments de comparaison doivent respecter les exigences liées au secret professionnel et qu'il ne peut donc fournir de données propres à ces entreprises ; qu'en l'espèce, les renseignements donnés répondaient à ces exigences ; que la charge de la preuve n'est pas inversée ; que la démarche de l'administration avait pour objet de qualifier un versement et non de fixer un montant de loyer ; que la méthode comparative retenue comprend un échantillonnage de locaux similaires à ceux loués par la société qui n'apporte aucun élément de comparaison nouveau venant appuyer sa position ; que s'agissant du site de Leers, les circonstances qu'il a été livré coque nue et qu'il peut être demandé des sommes pour couvrir les travaux, justifient que le loyer soit inférieur à la moyenne ; que pour ce site et celui de Calais, la comptabilisation en loyer du droit d'entrée n'est pas compatible avec les caractéristiques du contrat-type ; que la demande au titre de l'article L. 761-1 n'est pas fondée ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 12 octobre 2007, présenté pour la SAS SOCIETE FRANÇAISE DE PARFUMERIE tendant aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens et en outre par les moyens que les éléments des baux ne suffisent pas à qualifier le droit d'entrée en un élément indépendant du loyer ; que l'absence de remboursement prorata temporis en cas de rupture du bail et l'absence d'actualisation démontrent qu'il s'agit d'un supplément de loyer payé dès l'origine ; que ces éléments ne permettent pas de qualifier ces sommes d'éléments incorporels ;
Vu le mémoire, enregistré le 28 novembre 2007, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2008 à laquelle siégeaient Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, M. Christian Bauzerand et M. Patrick Minne, premiers conseillers :
- le rapport de Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la SNC ZOOM 59, absorbée à compter du 1er octobre 2003 par la
SNC X, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité et d'un contrôle sur pièces à la suite desquels l'administration a remis en cause le caractère déductible de droits d'entrée versés par la société au propriétaire des locaux commerciaux qu'elle a pris en location dans diverses galeries commerciales ; qu'en conséquence, l'administration a refusé leur inscription en charge des résultats de la SNC X par fractions annuelles égales sur la durée des baux et a rejeté les déficits déclarés par la SAS SOCIETE FRANÇAISE DE PARFUMERIE, associée de la SNC X, à concurrence de ses droits dans ladite société, au titre de la période du 1er janvier 2002 au 30 septembre 2003 ; que la SAS SOCIETE FRANÇAISE DE PARFUMERIE relève appel du jugement ayant rejeté sa demande tendant à la réintégration de ces déficits ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : « L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification adressée à la SAS SOCIETE FRANÇAISE DE PARFUMERIE le 28 juin 2004 comporte un tableau des termes de comparaison que l'administration a utilisés pour justifier des montants de loyer pratiqués pour des locaux analogues à ceux en cause, comprenant notamment des indications sur le montant des loyers en 2001 et 2002, la localisation de la galerie commerciale, l'existence d'un droit d'entrée et l'année du bail ; que l'administration a également fourni la liste des galeries commerciales et des enseignes qu'elle a retenues ainsi que des indications sur les surfaces en cause ; qu'elle a ainsi suffisamment motivé sa proposition de rectification et mis le contribuable en mesure de la discuter utilement alors même que ces documents ne permettent pas de rattacher le loyer versé à l'enseigne concernée et à la surface correspondante ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 39-1 du code général des impôts : « Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant notamment : 1° (...) le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire. » ; que pour déterminer si une indemnité versée par un preneur au bailleur est une charge de loyer déductible ou le prix d'acquisition d'éléments incorporels de fonds de commerce ou relève pour partie de l'une ou l'autre de ces catégories, il y a lieu de tenir compte non seulement des clauses du bail et du montant de l'indemnité stipulée mais aussi du niveau normal de loyer correspondant au local ainsi que des avantages effectivement offerts par le propriétaire en sus du droit de jouissance qui découle du contrat de bail ;
En ce qui concerne les locaux situés dans des galeries commerciales de l'agglomération lilloise :
Considérant qu'il est constant que pour occuper les locaux qui lui ont été donnés à bail, la SNC ZOOM 59, aux droits de laquelle vient la SNC X, a versé en sus des loyers prévus un droit d'entrée traité de manière distincte du loyer par les stipulations des baux de location et non remboursables en cas de fin anticipée de la location ; que l'administration a établi, par des éléments de comparaison, que le taux moyen de location des surfaces de ventes analogues dans des galeries commerciales comparables était inférieur aux seuls montants des loyers en cause ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les évaluations retenues par l'administration ne seraient pas représentatives de la situation des locaux situés dans des centres commerciaux de l'agglomération de Lille même si le locataire n'a pas eu à supporter leur pré-équipement immobilier ; que par ailleurs, il est constant que le local de Leers, livré nu, justifie un loyer de niveau inférieur aux autres locaux sans que cette circonstance remette en cause l'appréciation portée par l'administration ; qu'ainsi, les droits d'entrée litigieux ne peuvent s'analyser comme un complément de loyer ; que l'administration a pu à bon droit estimer qu'ils avaient pour contrepartie l'acquisition d'un élément incorporel des fonds de commerce et qu'ils n'ont par suite pas la nature d'une charge d'exploitation déductible des résultats des exercices en cause ;
En ce qui concerne les locaux situés à Calais :
Considérant qu'il est constant que le niveau de loyer relatif à ces locaux est inférieur aux références retenues par l'administration qui n'a fourni aucun élément propre à l'agglomération de Calais ; que les seules stipulations du contrat de location ne suffisent pas à elles seules à exclure que le droit d'entrée acquitté pour ces locaux soit qualifié de loyer ; que dès lors, l'administration ne pouvait légalement estimer que le droit d'entrée relatif à ces locaux n'avait pas le caractère d'une charge déductible des résultats et que la SAS SOCIETE FRANÇAISE DE PARFUMERIE est fondée à demander que la quote-part annuelle sur le droit d'entrée dans lesdits locaux soit prise en compte, à concurrence de sa participation dans la SNC X, dans son déficit reportable au titre de la période allant du 1er janvier 2002 au 30 septembre 2003 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS SOCIETE FRANÇAISE DE PARFUMERIE est seulement fondée dans cette mesure à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui a répondu à l'ensemble des moyens de la demande sans inverser la charge de la preuve, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme que la SAS SOCIETE FRANÇAISE DE PARFUMERIE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La quote-part annuelle sur le droit d'entrée dans les locaux de Calais est prise en compte au titre de la période allant du 1er janvier 2002 au 30 septembre 2003 dans le déficit reportable de la SAS SOCIETE FRANÇAISE DE PARFUMERIE, à concurrence de sa participation dans la SNC X.
Article 2 : Le déficit reporté de la SAS SOCIETE FRANÇAISE DE PARFUMERIE est rectifié en application de l'article 1er du présent arrêt.
Article 3 : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus de la requête de la SAS SOCIETE FRANÇAISE DE PARFUMERIE est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS SOCIETE FRANÇAISE DE PARFUMERIE et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Copie sera adressée au directeur de contrôle fiscal Nord.
2
N°07DA00544