Vu la requête, enregistrée le 22 février 2007 et le mémoire, enregistré par télécopie le 1er juin 2007 et régularisé par la production de l'original le 11 juin 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentés pour la société anonyme PIPELIFE FRANCE, sise Zone Artisanale à Gaillon (27600), par la SELARL Victor ; la société PIPELIFE FRANCE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0301849 du 21 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a annulé la décision du 6 août 2003 par laquelle l'inspecteur du travail lui a accordé l'autorisation de licencier pour motif économique M. X, salarié protégé ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Rouen ;
Elle soutient que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la société avait manqué à son obligation en matière de reclassement dès lors qu'elle a procédé dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi à une recherche des possibilités de reclassement de M. X et qu'elle n'avait pas à rechercher un reclassement à l'étranger pour un salarié qui n'avait pas de compétences linguistiques et qui n'avait pas manifesté d'intérêt de principe pour un poste à l'étranger ; que le périmètre de reclassement ne s'étendait pas aux entités du groupe Pipelife International situées hors de France dès lors qu'aucune permutation de personnel n'était envisageable ; que la réalité du motif économique du licenciement est établie dès lors que la société a subi des pertes financières importantes du fait de la baisse de son chiffre d'affaires ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu l'ordonnance du 5 mars 2007 portant clôture de l'instruction au 1er juin 2007 ;
Vu l'ordonnance du 11 juin 2007 portant report de la clôture de l'instruction au 31 juillet 2007 ;
Vu le mémoire, enregistré le 10 décembre 2007 après clôture de l'instruction, présenté pour M. Manuel X, demeurant ..., par la SCP Mairin ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 décembre 2007, présentée pour la société PIPELIFE FRANCE, par la SELARL Victor ;
Vu l'examen des pièces desquelles il résulte que la requête a été communiquée au ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité qui n'a pas produit de mémoire en défense ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 décembre 2007 à laquelle siégeaient, M. Jean-Claude Stortz, président de chambre, M. Alain Dupouy, président-assesseur et M. Alain de Pontonx, premier conseiller :
- le rapport de M. Alain Dupouy, président-assesseur ;
- les observations de Me Grange, pour la société PIPELIFE FRANCE ;
- et les conclusions de M. Pierre Le Garzic, commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;
Considérant que par une décision du 6 août 2003, l'inspecteur du travail a accordé à la société PIPELIFE FRANCE l'autorisation de licencier pour motif économique M. X, délégué du personnel suppléant ; que la société PIPELIFE FRANCE relève appel du jugement du 21 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a annulé ladite décision du 6 août 2003 ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 321-1 du code du travail dans sa rédaction alors applicable : « Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification substantielle du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques (...) Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient. Les offres de reclassement proposées au salarié doivent être écrites et précises » ;
Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que le licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte, notamment, de la nécessité des réductions d'effectifs envisagées et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière y compris lorsque l'entreprise fait l'objet d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ;
Considérant que la société PIPELIFE FRANCE appartient au groupe Pipelife International, détenu à 50 % par les groupes Wienerberger et Solvay ; qu'il ressort des pièces du dossier que la société a, dans le cadre de la restructuration de ses activités du fait de la fermeture de son établissement situé à Saint Gilles, mis en place pour l'ensemble de ses salariés licenciés, un plan de sauvegarde de l'emploi et établi une liste de postes au sein de ses deux autres établissements situés en France, qu'elle a porté à la connaissance de l'ensemble desdits salariés, dont M. X, par une lettre du 26 mai 2003 ; que la société PIPELIFE FRANCE a, également, proposé à l'intéressé un poste d'opérateur sur le site de Gaillon, par une lettre du 3 juin 2003, comportant des indications sur la nature de ce poste ; que M. X n'a pas donné suite à cette offre qui impliquait une mutation géographique ; que dans ces conditions, la société PIPELIFE FRANCE, qui a fait une proposition de reclassement suffisamment précise et individualisée à M. X, doit être regardée comme ayant respecté l'obligation de reclassement qui lui incombe ; que par suite, c'est à tort que le Tribunal administratif de Rouen s'est fondé, pour annuler la décision du 6 août 2003 en litige, sur la méconnaissance de cette obligation ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens présentés par M. X en première instance ;
Considérant que pour apprécier la réalité des motifs économiques allégués à l'appui d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé présentée par une société, l'autorité administrative ne peut se borner à prendre en considération la seule situation de l'établissement où travaillaient les intéressés mais est tenue de faire porter son examen sur la situation économique de l'ensemble des activités et établissements gérés par cette société et, lorsque la société en cause appartient à un groupe, celle des sociétés du groupe oeuvrant dans le même secteur d'activité, en France et à l'étranger ; que M. X fait valoir que l'inspecteur du travail n'a pas apprécié la réalité des difficultés économiques au niveau du groupe auquel appartient la société PIPELIFE FRANCE mais seulement au niveau de cette société ; qu'alors qu'il ne ressort pas des termes de la décision du 6 août 2003 que l'inspecteur du travail aurait pris en considération la situation économique de l'ensemble des sociétés du groupe Pipelife International oeuvrant dans le même secteur d'activité, le ministre défendeur n'apporte aucun élément de nature à établir que l'inspecteur du travail se serait fondé effectivement sur la situation du groupe pour accorder l'autorisation de licenciement demandée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens présentés par M. X, que la société PIPELIFE FRANCE n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a annulé la décision du 6 août 2003 en litige ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société PIPELIFE FRANCE est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA PIPELIFE FRANCE, à M. Manuel X et au ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.
N°07DA00272 2