Vu la requête, enregistrée le 18 décembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Evelyne X, M. José X,
Mlle Brigitte X, M. Lucien X et Mlle Maryse X, demeurant ..., M. Philippe X, demeurant ..., par Me Lequillerier ; les requérants demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0202060 du 12 octobre 2006 du Tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a rejeté leur demande tendant à ce que le centre hospitalier de Compiègne et le centre hospitalier de Clermont soient condamnés solidairement à leur verser des indemnités en réparation du préjudice qu'ils ont subi du fait du décès de Mme Ginette X ;
2°) à titre principal, de condamner solidairement le centre hospitalier de Compiègne et le centre hospitalier de Clermont à verser une somme de 20 000 euros à Mme Evelyne X et une somme de 10 000 euros à chacun des autres requérants ;
3°) à titre subsidiaire d'ordonner une expertise aux fins de déterminer si le diagnostic a été établi conformément aux règles de l'art, si la nature des soins administrés étaient appropriés et si l'administration de valium n'est pas à l'origine du décès de Mme Ginette X ;
4°) de mettre à la charge des centres hospitaliers de Compiègne et de Clermont les dépens et une somme de 3 045 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent :
- que le centre hospitalier de Compiègne a commis soit une faute médicale en estimant à tort que les médicaments ingérés par Mme Ginette X lors de sa tentative de suicide avaient été éliminés sans nécessité d'un lavage gastrique soit une faute dans l'organisation du service en lui permettant, par un défaut de surveillance, d'absorber de nouveaux médicaments ; que le surdosage a pu provenir de l'injection de valium pratiquée par le centre hospitalier de Clermont pour réanimer Mme X qui ne se serait pas réalisé si un lavage gastrique ou d'autres examens avaient été réalisés et que, par ailleurs, rien n'indique que Mme X a été fouillée à son arrivée aux urgences ni que ses effets personnels lui auraient été retirés de sorte qu'elle a pu continuer l'absorption de médicaments ; que compte tenu de son état dépressif avec idéation suicidaire, le personnel hospitalier devait faire preuve d'une vigilance accrue ; qu'elle aurait dû rester sous surveillance cardiaque au centre hospitalier de Compiègne au moins la nuit ; que la responsabilité du centre hospitalier de Clermont est également engagée dès lors que l'expertise toxicologique a montré que les concentrations sanguines étaient trop fortes pour correspondre aux doses consommées par Mme X lors de sa tentative de suicide et correspond à une ingestion médicamenteuse quelques heures avant le décès ; qu'il y a lieu de présumer que la procédure d'admission des malades qui impose une fouille du patient et une prise des médicaments sous surveillance infirmière n'a pas été respectée et que Mme X avait toujours des médicaments à sa disposition ; que le Tribunal n'a pas répondu sur ce point ; qu'aucun élément du dossier n'indique la nature exacte des soins pratiqués pour la réanimer et ne permet pas d'apprécier si les soins ont été appropriés ; que les premiers juges ne pouvaient se fonder sur la circonstance que le décès serait dû à une prise plus importante de médicaments lors de la tentative de suicide ou à une ingestion quelques heures avant le décès pour ne retenir aucune responsabilité ; qu'il incombait au centre hospitalier de Compiègne de s'assurer tant à l'entrée dans l'établissement qu'avant le transfert, de la concentration sanguine de chaque médicament ; qu'il ne saurait être exclu que la dernière injection de valium fut fatale ; que la présomption de fautes dans l'organisation et le fonctionnement de ces établissements est démontrée ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 13 avril 2007 et confirmé par courrier original le 18 avril 2007, présenté pour le centre hospitalier interdépartemental de Clermont, dont le siège est 2 rue des Finets à Clermont (60607), par Me Meignié ; il conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que l'argumentation des requérants est contredite par l'ensemble des pièces produites et en particulier par le rapport d'expertise qui a conclu à une absence de fautes après avoir parfaitement décrit les traitements entrepris et les soins reçus par la patiente ; qu'aucune faute dans l'organisation du service n'a été commise par le centre hospitalier de Clermont qui a parfaitement respecté la procédure d'accueil des malades au sein de l'établissement ; qu'aucune faute médicale ne peut être retenue dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que la prise de valium ait provoqué la surdose médicamenteuse ; que le Tribunal a exactement déduit des éléments de l'instruction que la concentration sanguine ne pouvait être reliée avec certitude à une dose précise, que le moment de la prise de la dose litigieuse ne pouvait être déterminé et que la cause du décès n'était pas établie ;
Vu la mise en demeure adressée le 11 juin 2007 à Me Le Prado, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 12 juillet 2007 et confirmé par courrier original le 13 juillet 2007, présenté pour le centre hospitalier de Compiègne, dont le siège est 8 avenue Henri Adnot à Compiègne (60320 Cedex), par Me Le Prado, tendant au rejet de la requête ; il soutient qu'aucune faute n'a été commise par le centre hospitalier de Compiègne ; qu'à son arrivée, le 14 février 1999, Mme X a été prise en charge par un médecin, un interne, une infirmière et une infirmière psychiatrique ; qu'il en a été de même le lendemain ; que son examen neurologique était normal ; qu'après avoir été gardée en observation pendant une vingtaine d'heures, elle ne présentait plus de contre-indication à son transfert au centre hospitalier de Clermont ; que l'expert n'a pas conclu à la nécessité d'un lavage gastrique et n'a relevé aucune faute ; qu'il n'est pas établi que le décès trouverait sa cause dans une absorption de médicaments au centre hospitalier alors qu'aucun médicament ni objet dangereux n'est laissé à la disposition des malades ; qu'une nouvelle expertise serait frustratoire ;
Vu les observations, enregistrées le 27 juillet 2007, présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de Creil faisant savoir à la Cour qu'elle n'entend pas intervenir ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 27 août 2007, présenté pour les requérants, tendant aux mêmes fins que leur requête par les mêmes moyens et en outre par les moyens que le rapport du docteur Y est insuffisant ; que le décès ayant pour cause une absorption excessive de diverses substances, la question se pose de savoir comment elle a pu se les procurer alors qu'elle était hospitalisée ; que l'existence d'un protocole d'accueil et les déclarations du personnel ne peuvent être une réponse suffisante ; que la preuve du dysfonctionnement du service s'induit des circonstances du décès qui n'aurait pu se produire si le protocole avait été respecté à la lettre ;
Vu l'ordonnance en date du 28 août 2007 fixant la clôture d'instruction au
21 septembre 2007, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 novembre 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant,
président-assesseur et M. Christian Bauzerand, premier conseiller :
- le rapport de Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mme Ginette X a été hospitalisée le 14 février 1999 au centre hospitalier de Compiègne à la suite d'une tentative de suicide par absorption de médicaments ; que le 15 février, son état s'étant amélioré, elle a été transférée par le SAMU, à la demande de sa famille, au centre hospitalier spécialisé de Clermont de l'Oise ; que le 16 février au matin, elle a été victime d'un malaise dans les couloirs de l'établissement et est décédée ; que l'instruction a révélé que ce décès était dû à une intoxication médicamenteuse ; que la mère de la victime et ses frères et soeurs ont demandé au Tribunal administratif d'Amiens de condamner solidairement les deux établissements hospitaliers à réparer le préjudice moral ainsi subi ; qu'ils relèvent appel du jugement rejetant leur demande ;
Sur la responsabilité du centre hospitalier de Compiègne :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert commis par le tribunal administratif que les soins médicaux apportés par le centre hospitalier de Compiègne ne révèlent aucune faute médicale ; qu'en particulier, Mme X qui avait été gardée en observation la nuit du 14 février 1999 et avait fait l'objet d'une réévaluation psychiatrique et somatique le lendemain, ne présentait plus de contre-indication à son transfert au centre hospitalier interdépartemental de Clermont ; que s'il résulte de l'instruction que la surdose médicamenteuse peut être due à une prise plus importante de médicaments lors de la tentative de suicide, il n'a pas été possible de déterminer la dose précise qui a été absorbée ni le moment auquel Mme X a pris ces médicaments ; que la circonstance qu'il n'a pas été pratiqué de lavage gastrique ne suffit pas, alors que la pratique d'un tel acte n'est pas systématique et compte tenu de l'état de santé de Mme X constaté lors de son hospitalisation, à révéler l'existence d'une faute médicale ;
Considérant, en second lieu, qu'il ne résulte d'aucun élément du dossier qu'une faute dans l'organisation du service aurait été commise par le centre hospitalier de Compiègne ;
Sur la responsabilité du centre hospitalier interdépartemental de Clermont :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert commis par le Tribunal que les soins de réanimation de Mme X ont été pratiqués dans les règles de l'art et ont été adaptés à son état ; que la circonstance, à la supposer établie, qu'ils n'aient pas été transcrits sur son dossier médical ne saurait suffire à établir l'existence d'une faute médicale ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les mesures d'expertise et d'analyse toxicologiques n'ont pas permis de déterminer la quantité ni le moment où Mme X a absorbé les médicaments qui ont été la cause de son décès ; qu'ainsi, les requérants n'établissent, en tout état de cause, pas qu'un défaut d'organisation du service aurait permis à Mme X de prendre ces médicaments alors qu'elle était au centre hospitalier interdépartemental de Clermont ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de Compiègne et du centre hospitalier interdépartemental de Clermont, qui ne sont pas, en la présente instance, les parties perdantes, la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Considérant, d'autre part, que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge des requérants, la somme que le centre hospitalier interdépartemental de Clermont demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête susvisée est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier interdépartemental de Clermont tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Evelyne X, à M. José X, à Mlle Brigitte X, à M. Lucien X, à Mlle Maryse X, à M. Philippe X, au centre hospitalier de Compiègne, au centre hospitalier interdépartemental de Clermont et à la caisse primaire d'assurance maladie de Creil.
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N°06DA01690