Vu, I, sous le n° 07DA00734, la requête, enregistrée le 15 mai 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Lanfen épouse , demeurant ..., par Me Lebaupain ; elle demande à la Cour :
11) d'annuler le jugement n° 0602864, en date du 22 février 2007, par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Oise, en date du 21 septembre 2006, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour temporaire ; à la condamnation du préfet de l'Oise aux dépens ;
2°) d'annuler la décision du préfet de l'Oise, en date du 21 septembre 2006, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;
3°) d'enjoindre le préfet de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour temporaire ;
Vu, II, sous le n° 07DA00740, la requête, enregistrée le 16 mai 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Youshui , demeurant ..., par Me Lebaupain ; il demande à la Cour :
11) d'annuler le jugement n° 0602865, en date du 22 février 2007, par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Oise, en date du 21 septembre 2006, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour temporaire ; à la condamnation du préfet de l'Oise aux dépens ;
2°) d'annuler la décision du préfet de l'Oise, en date du 21 septembre 2006, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;
3°) d'enjoindre le préfet de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour temporaire ;
Ils soutiennent que les jugements du Tribunal administratif d'Amiens et les décisions du préfet de l'Oise attaqués ont été pris en méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce qu'ils portent une atteinte disproportionnée à leur vie privée et familiale au regard des motifs des refus ; qu'ils n'ont plus d'attaches familiales dans leur pays d'origine, leur seule famille, à savoir leurs deux filles, leurs deux petits enfants et une soeur de Mme , résidant en France ; que ce sont des personnes âgées plus capables de travailler ; qu'ils n'ont plus de ressources et sont pris en charge intégralement par leurs enfants ; qu'ils sont toujours restés en relation avec leurs enfants et que le départ de ces derniers de Chine s'est fait à leur initiative et sans que M. et Mme en soient à l'origine ;
Vu les jugements et les décisions attaqués ;
Vu les deux ordonnances du 24 mai 2007 portant clôture de l'instruction au 24 juillet 2007 à 16 heures 30 ;
Vu le mémoire en défense commun aux deux affaires, enregistré le15 juin 2007, présenté par le préfet de l'Oise, qui demande à la Cour de rejeter les requêtes formulées par M. et Mme ; il soutient que les liens familiaux soulevés par les requérants relèvent d'une pratique frauduleuse visant uniquement à obtenir un titre de séjour ; que les décisions de refus de titre de séjour n'ont pas porté atteinte de manière disproportionnée à leur vie familiale ; que leur maintien en France n'est indispensable pour aucune raison ; qu'ils n'établissent pas ne plus avoir de lien avec leur pays d'origine ; que ces deux décisions ne sont entachées d'aucune erreur manifeste d'appréciation et respectent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le mémoire, enregistré le 17 juillet 2007, présenté pour M. et Mme épouse , qui concluent aux mêmes fins que les requêtes par les mêmes moyens ;
Vu les deux ordonnances du 23 juillet 2007 portant réouverture des instructions ;
Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 2 août 2007 et confirmé par l'original le
13 août 2007, présenté, dans les deux instances, par le préfet de l'Oise, qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 octobre 2007 à laquelle siégeaient M. Marc Estève, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et
M. Alain Stéphan, premier conseiller :
- le rapport de M. Alain Stéphan, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;
Sur la jonction :
Considérant que les requêtes présentées sous les nos 07DA00734 et 07DA00740 concernent un même litige et présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu d'y statuer par un même arrêt ;
Sur la légalité des décisions attaquées :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : « (…) 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (…) » ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au
bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;
Considérant que M. et Mme , nés tous deux en 1956 en Chine, soutiennent être entrés en France irrégulièrement en 2003, où résident depuis plusieurs années leurs deux filles, et sont pris en charge, en France, depuis 2003, par une de leurs filles qui, comme son concubin et leurs enfants nés en France, possède la nationalité française ; que M. et Mme font valoir, sans être sérieusement contredits, qu'ils sont désormais dépourvus de toute attache familiale dans leur pays d'origine où ils ne possèdent plus de biens personnels ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, les décisions du préfet de l'Oise en date du 21 septembre 2006, refusant à M. et Mme la délivrance d'un titre de séjour ont porté à leur droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises ; qu'elles ont, par suite, méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des requêtes, que M. et Mme sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à l'annulation des décisions, en date du 21 septembre 2006, par lesquelles le préfet de l'Oise leur a refusé la délivrance d'un titre de séjour ;
Sur les conclusions tendant à ce que soit prescrite, sous astreinte, la délivrance d'une carte de séjour temporaire à M. et Mme :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ; et qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : « Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. » ;
Considérant, que le présent arrêt, qui annule les décisions du préfet de l'Oise refusant à
M. et Mme la délivrance d'un titre de séjour temporaire implique nécessairement, ainsi qu'il a été dit, qu'ils soient mis en possession des titres de séjour demandés ; qu'il y a lieu, en conséquence, et sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte, d'enjoindre au préfet de l'Oise de leur délivrer à chacun une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les jugements nos 0602864 et 0602865, en date du 22 février 2007, du Tribunal administratif d'Amiens et les décisions en date du 21 septembre 2006 du préfet de l'Oise portant refus d'un titre de séjour à Mme épouse et à M. sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Oise de délivrer à Mme épouse et à M. une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Lanfen épouse , à M. Youshui et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.
Copie sera transmise au préfet de l'Oise.
Nos07DA00734,07DA00740 2