Vu la requête, enregistrée le 28 février 2006 par télécopie, confirmée le 1er mars 2006 par la production de l'original au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SARL L'ESPLANADE, dont le siège est 8 avenue Léon Jouhaux à Lille (59800), par la
SELARL Blondel, Pambo, Van den Schrieck, Robilliart ; la SARL L'ESPLANADE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0305208 en date du 15 décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés et d'imposition forfaitaire annuelle auxquels elle a été assujettie au titre des années 1998 et 1999, ainsi que des pénalités y afférentes et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme au titre des frais irrépétibles ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que c'est à tort que le Tribunal a estimé que l'administration pouvait déclarer la comptabilité de la SARL L'ESPLANADE non probante ; que la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires de la SARL adoptée par l'administration présentait un caractère exagéré ; qu'elle propose d'ailleurs une méthode de reconstitution plus précise que celle retenue par l'administration ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2006, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre demande à la Cour de rejeter la requête ; il soutient que la requête est irrecevable faute d'avoir été enregistrée dans le délai de deux mois imparti pour interjeter appel ; que la comptabilité de la SARL L'ESPLANADE présentait bien un caractère non probant ; que la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires mise en oeuvre par le vérificateur, qui prenait en compte les spécificités de l'activité de la SARL, ne présentait pas un caractère exagéré ; que la méthode de reconstitution proposée par la SARL L'ESPLANADE ne saurait être retenue, dès lors qu'elle repose sur des affirmations dénuées de tout élément de preuve venant les corroborer ; que les différentes pénalités sont dues ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et M. Manuel Delamarre, premier conseiller :
- le rapport de M. Manuel Delamarre, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la SARL L'ESPLANADE exploite depuis 1997 une discothèque sous l'enseigne « Le Huit et demi » ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, dont l'entreprise a fait l'objet pour les années 1998 et 1999, l'administration a opéré des redressements en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur le chiffre d'affaires ; que la SARL L'ESPLANADE a contesté la décision de l'administration ; qu'elle fait appel du jugement en date du 15 décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires résultant de ces redressements ;
Considérant que pour écarter comme non probante la comptabilité de la
SARL L'ESPLANADE, l'administration a relevé à l'occasion des opérations de vérification susévoquées le défaut de caisse enregistreuse, l'absence de remise de ticket aux clients à l'occasion des ventes de consommation, la comptabilisation sans distinction des recettes par chèques, par carte bleue ou en espèces, ainsi que des soldes créditeurs ayant une origine irrégulière, alors que la société requérante se borne à indiquer, sans apporter la moindre précision relative à ces allégations, que l'entrée dans les lieux étant gratuite, l'établissement « Le Huit et demi » ne délivrait pas de ticket d'entrée et ne pouvait ainsi être considéré comme une discothèque ; qu'eu égard à l'ensemble de ces irrégularités, l'administration a pu à bon droit écarter la comptabilité de la société comme dénuée de valeur probante ;
Considérant que les impositions ayant été mises en recouvrement conformément à l'avis émis le 30 mai 2002 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, il appartient à la société requérante, en vertu des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, d'établir l'exagération des impositions contestées ; qu'elle soutient que la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires choisie par l'administration serait exagérée faute de tenir compte des conditions réelles de l'exploitation ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que le vérificateur s'est fondé sur le montant des achats à partir du dépouillement des factures, qu'il a corrigés au vu des variations de stocks déclarées, avant de valoriser en prix de vente les quantités revendues par produit et par mode de consommation ; que le vérificateur a, en outre, tenu compte des consommations offertes ainsi que des consommations du personnel ; que, par ailleurs, la
SARL L'ESPLANADE reconnaît elle-même qu'en 1998 et 1999, les conditions d'exploitation de l'établissement sont demeurées globalement les mêmes ; qu'enfin, la méthode de reconstitution proposée par la société requérante, qui repose sur des affirmations qui ne sont assorties d'aucun élément de preuve, relatives par exemple au nombre de plus d'une centaine de soirées « étudiants » par an ou encore au nombre de boissons offertes aux clients alors qu'aucun document n'évoque cette pratique, ne peut être regardée comme plus précise que la méthode retenue par l'administration ; que la société requérante n'établit pas que la méthode de reconstitution utilisée par le vérificateur a abouti à une exagération des bases d'imposition ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que la SARL L'ESPLANADE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la somme que la
SARL L'ESPLANADE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL L'ESPLANADE est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL L'ESPLANADE et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord, ainsi qu'à Me Emmanuel Malfaisan, représentant des créanciers de la SARL L'ESPLANADE en redressement judiciaire.
N°06DA00331 2