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20/02/2007 | FRANCE | N°06DA00257

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (ter), 20 février 2007, 06DA00257


Vu la requête, enregistrée le 17 février 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SARL THE MUST CONSULTING GROUP et ASSOCIES, dont le siège est 1 route de la Chapelle, résidence Belvédère n° 25, au Tholy (88530), représentée par son gérant en exercice, par la SCP Avocats du Nouveau Siècle ; la SARL THE MUST CONSULTING GROUP et ASSOCIES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0305839 du 1er décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge totale des droits supplémentair

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Vu la requête, enregistrée le 17 février 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SARL THE MUST CONSULTING GROUP et ASSOCIES, dont le siège est 1 route de la Chapelle, résidence Belvédère n° 25, au Tholy (88530), représentée par son gérant en exercice, par la SCP Avocats du Nouveau Siècle ; la SARL THE MUST CONSULTING GROUP et ASSOCIES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0305839 du 1er décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge totale des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période de juillet 1998 à décembre 2001 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'ayant son siège social dans les Vosges, la recette principale des impôts d'Arras-Est n'était pas compétente pour procéder à la mise en recouvrement ; que la procédure de taxation d'office entraîne un renversement de la charge de la preuve quant au bien-fondé des impositions litigieuses ; que les intérêts de retard fixés à 0,75 % par mois constituent indiscutablement une sanction et non la réparation d'un préjudice ; que les pénalités infligées en vertu des dispositions des articles 1728-1 et 1728-3 du code général des impôts doivent se conformer aux dispositions de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'application de cette convention s'impose aux juridictions de l'ordre interne ; qu'en l'absence de recours reconnu au contribuable, il convient de déclarer nulles les pénalités infligées ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 juillet 2006, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre conclut au rejet de la requête ; il soutient que la vérification de comptabilité a permis d'établir que la société requérante exerce effectivement son activité dans l'immeuble situé à Arras avec des clients locaux, cet immeuble constituant son principal établissement ; que l'administration ayant réuni les éléments de fait lui permettant de conclure à la compétence territoriale de la recette des impôts d'Arras-Est, il appartient à la société d'apporter la preuve contraire ; que l'affirmation selon laquelle le principal établissement serait situé dans les Vosges n'est étayée d'aucun élément de nature à prouver le contraire ; que selon une jurisprudence constante, les litiges relatifs à des amendes et majorations relèvent de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour ce qui concerne les procédures contentieuses devant les juridictions ; que les dispositions de l'article 6 de la convention ne peuvent être invoquées à l'encontre de la procédure par laquelle l'administration fiscale établit les pénalités ; que les intérêts de retard n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 6 de la convention dès lors qu'ils n'ont pour objet que de réparer le préjudice subi par le Trésor du fait du retard de paiement ; que la requérante ne peut pas non plus soutenir que la part des intérêts de retard qui excède celle qui résulterait de l'application du taux de l'intérêt légal constituerait une sanction au sens de l'article 6 de la convention ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 février 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant,

président-assesseur et M. Christian Bauzerand, premier conseiller :

- le rapport de M. Christian Bauzerand, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Patrick Minne, commissaire du gouvernement ;

Sur la compétence du comptable ayant établi l'avis de mise en recouvrement :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales dans sa version en vigueur au titre de la période d'imposition : « (…) / L'avis de mise en recouvrement est individuel ou collectif. Il est signé et rendu exécutoire par l'autorité administrative désignée par décret / (…) » ; qu'aux termes de l'article R. 256-8 du même livre : « (…) Le comptable public compétent pour établir l'avis de mise en recouvrement est soit celui du lieu de déclaration ou d'imposition du redevable, soit, dans le cas où ce lieu a été ou aurait dû être modifié, celui compétent à l'issue de ce changement, même si les sommes dues se rapportent à la période antérieure à ce changement. (…) » ; qu'aux termes de l'article 32 annexe IV au code général des impôts : « a. (…) les déclarations prescrites par l'article 286 et le 1 de l'article 287 du code général des impôts doivent être souscrites par les redevables de la taxe sur la valeur ajoutée pour l'ensemble des opérations qu'ils réalisent autres que les importations auprès du service des impôts auquel doit parvenir leur déclaration de bénéfice ou de revenu ; (…) » et qu'au sens de l'article 218 A dudit code dans sa version en vigueur au titre de la période d'imposition :

« 1. l'impôt sur les sociétés est établi au lieu du principal établissement de la personne morale. (…) » ;

Considérant que si la société requérante soutient que le lieu de son principal établissement correspond à son siège social situé au Tholy dans le département des Vosges, il résulte de l'instruction que n'est situé dans cette commune, où elle n'a aucune activité, que le studio de vacances du gérant, alors même qu'elle loue des locaux professionnels à Arras où se situe sa clientèle et qu'elle a demandé à l'administration fiscale d'exercer les opérations de vérification dans cette dernière ville ; que ces éléments de fait concordants ne sont pas utilement contredits par la société par la seule production d'une lettre indiquant que ses bureaux d'Arras ne constitueraient pas, en dépit de ces circonstances, le lieu de son principal établissement ; qu'il ressort des dispositions précitées que le service compétent pour signer l'avis de mise en recouvrement est soit celui auquel la contribuable adresse ses déclarations de chiffre d'affaires, soit celui se situant dans le ressort du principal établissement du contribuable ; que, par suite, le receveur principal de la recette des impôts d'Arras-Est était compétent pour établir l'avis de mise en recouvrement litigieux ;

Sur les intérêts de retard et les majorations de 10 % et de 40 % :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (…) » ;

Considérant, en premier lieu, que si le taux des intérêts de retard excède le taux de l'intérêt légal, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un document non négocié ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient la société requérante, la fraction excédant l'intérêt légal ne peut être assimilée à une sanction entrant dans le champ d'application de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que la société requérante a déposé tardivement ses déclarations du mois de septembre 2000 et des mois de juin à

décembre 2001 ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a appliqué la majoration de 10 % prévue par les dispositions de l'article 1728-1 du code général des impôts ; qu'il résulte également de l'instruction que la société requérante n'a pas déposé ses déclarations pour la période de juillet 2000 à mai 2001 à l'exception des mois de septembre et de décembre 2000 dans les 30 jours suivant la réception d'une mise en demeure ; que c'est à bon droit que l'administration a assorti les droits rappelés de la majoration de 40 % prévue par l'article 1728-3 du même code ; que ces dispositions, qui proportionnent les pénalités aux agissements du contribuable et prévoient des taux de majoration différents selon le comportement de l'intéressé sont compatibles avec les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales alors même qu'elles ne confèrent pas au juge un pouvoir de modulation du taux de ces pénalités ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL THE MUST CONSULTING GROUP et ASSOCIES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la SARL THE MUST CONSULTING GROUP et ASSOCIES la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL THE MUST CONSULTING GROUP et ASSOCIES est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL THE MUST CONSULTING GROUP et ASSOCIES et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie sera adressée au directeur de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience du 6 février 2007 à laquelle siégeaient :

- Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre,

- Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur,

- M. Christian Bauzerand, premier conseiller.

Lu en audience publique le 20 février 2007.

Le rapporteur,

Signé : Ch. BAUZERAND

Le président de chambre,

Signé : C. V. HELMHOLTZ

Le greffier,

Signé : M. T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le Greffier

M. T. LEVEQUE

2

N°06DA00257


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 06DA00257
Date de la décision : 20/02/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: M. Christian Bauzerand
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : SCP AVOCATS DU NOUVEAU SIECLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-02-20;06da00257 ?
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