Vu I, sous le n° 06DA00020, la requête enregistrée le 7 janvier 2006 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et son original enregistré le 12 janvier 2006, et régularisé par télécopie le 25 janvier 2006 et son original le 26 janvier 2006, présentée pour
M. Saka X, demeurant ..., par
Me Abbas, avocat ; M. X demande à la Cour :
11) d'annuler le jugement nos 0505327-0505328 en date du 6 décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du
8 août 2005 par laquelle le préfet du Nord a retiré le récépissé détenu par M. X en qualité de demandeur d'asile, valable jusqu'au 11 novembre 2005, et l'a invité à quitter le territoire dans un délai d'un mois ;
2°) d'annuler ladite décision ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour, et ce, sous astreinte de
150 euros par jour de retard ;
Il soutient qu'en ne se prononçant pas sur l'existence de liens familiaux en France pour les mettre en balance avec d'éventuels liens familiaux en Serbie-Monténégro, la décision litigieuse, qui ne comporte pas d'indication de fait et de droit précise le concernant, ne pouvait qu'être annulée pour erreur manifeste d'appréciation ; que la généralité des termes utilisés par le préfet du Nord démontre qu'aucune instruction sérieuse du dossier n'a été faite ; que la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il appartient à la communauté tzigane rom dont les membres font l'objet de nombreuses discriminations, de vexations et d'atteintes à leur intégrité physique ainsi qu'à la dignité humaine ; qu'accompagné de son épouse et de ses trois enfants, il a été ainsi dans l'obligation de s'exiler en France où il s'est construit une vie privée, familiale, sociale et professionnelle et où sa fille aînée est scolarisée ;
Vu II, sous le n° 06DA00021, la requête enregistrée le 7 janvier 2006 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et son original enregistré le 12 janvier 2006, et régularisé par télécopie le 25 janvier 2006 et son original le 26 janvier 2006, présentée pour Mme Silva X, demeurant ..., par Me Abbas, avocat ; Mme X demande à la Cour :
11) d'annuler le jugement nos 0505327-0505328 en date du 6 décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du
8 août 2005 par laquelle le préfet du Nord a retiré le récépissé détenu par Mme X en qualité de demandeur d'asile, valable jusqu'au 11 novembre 2005, et l'a invitée à quitter le territoire dans un délai d'un mois ;
2°) d'annuler ladite décision ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour, et ce, sous astreinte de
150 euros par jour de retard ;
Elle présente des moyens identiques à ceux présentés par M. X et visés sous le numéro précédent ;
Vu le jugement et les décisions attaqués ;
Vu les ordonnances du président de la Cour en date du 7 février 2006 portant clôture de l'instruction au 15 avril 2006 ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 mars 2006, présenté par le préfet du Nord, qui conclut au rejet des requêtes ; le préfet fait valoir que, contrairement à ce que soutiennent
M. et Mme X, leur situation a été parfaitement examinée au regard de l'ensemble des fondements juridiques et des considérations de fait qui leur auraient permis de se maintenir légalement sur le territoire français ; qu'il n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de leur situation ; que ses décisions n'ont pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'est nullement démontré, à l'aide de preuves matérielles et circonstanciées, que la vie familiale des époux X ne puisse se poursuivre avec leurs trois enfants dans leur pays d'origine où ils ont conservé la majorité de leurs attaches familiales ; qu'ils séjournent irrégulièrement en France où ils sont arrivés récemment à l'âge de 23 et 28 ans et sur le territoire duquel un de leurs enfants n'est scolarisé que depuis peu ; qu'il n'a pas commis d'erreur de droit ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 octobre 2006 à laquelle siégeaient
Mme Christiane Tricot, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et Mme Agnès Eliot, premier conseiller :
- le rapport de M. Olivier Yeznikian, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes n° 06DA00020 et n° 06DA00021, présentées pour
M. et Mme X, sont dirigées contre le même jugement et présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Considérant, d'une part, que les arrêtés du 8 août 2005, par lesquels le préfet du Nord a retiré à chacun des époux X le récépissé qui leur avait été délivré en qualité de demandeur d'asile, et les a invités à quitter le territoire, comportent les indications des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'ils sont, par suite, suffisamment motivés nonobstant le fait qu'ils ne précisent ni le nom du conjoint et le prénom des enfants ni l'existence d'attaches en France et dans leur pays d'origine ; qu'il ne ressort, toutefois, pas des pièces du dossier que le préfet ne se serait pas livré à un examen complet de la situation des intéressés avant de prendre sa décision ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ; que M. et Mme X, ressortissants serbo-monténégrins, soutiennent qu'ils appartiennent à la communauté tzigane rom, dont les membres font l'objet de nombreuses discriminations, vexations et atteintes à l'intégrité physique et à la dignité humaine et qu'ils ont été, avec leurs enfants, dans l'obligation de s'exiler en France, où ils se sont construits une vie privée, familiale, sociale et professionnelle ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que M. et Mme X sont entrés clandestinement sur le territoire français le 10 décembre 2002 à l'âge respectivement de 23 et 28 ans et qu'ils ont tous deux fait l'objet d'une décision de rejet de leur demande d'asile politique par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 4 avril 2003, confirmée par décision en date du 13 juillet 2005 de la Commission des recours des réfugiés ; qu'ils n'apportent aucun élément de nature à démontrer que leur vie familiale ne pourrait se poursuivre avec leurs trois enfants dans leur pays d'origine où ils ont habituellement vécu, où ils se sont mariés en 1997 et ont fondé leur famille et où ils n'établissent, ni même allèguent, se trouver isolés en cas de retour ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjours des intéressés en France, les décisions du préfet du Nord en date du 8 août 2005 n'ont pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises et n'ont, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle des intéressés nonobstant le fait que leur fille soit scolarisée en France et qu'ils y ont tissé des liens amicaux ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à l'annulation des décisions préfectorales du 8 août 2005 ; que les conclusions à fin d'injonction présentées par les intéressés ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme X sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Saka X, à Mme Silva X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
Copie sera transmise au préfet du Nord.
Nos06DA00020,06DA00021 2