Vu la requête, enregistrée le 22 mars 2003, présentée pour la société anonyme ELECTRONIC EQUIPMENT MARINE INDUSTRY, dont le siège est situé ... représentée par son président-directeur général en exercice, par Me X..., avocat ; la société ELECTRONIC EQUIPMENT MARINE INDUSTRY demande à la Cour :
1') d'annuler le jugement n° 98-482 en date du 30 décembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à ce qu'elle soit reconnue titulaire d'une créance sur le Trésor d'un montant de 188 821 francs, imputable à hauteur de 187 150 francs sur l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1995 ;
2°) à titre principal, de reconnaître qu'elle est titulaire d'une créance sur le Trésor d'un montant de 188 821 francs, imputable à hauteur de 187 150 francs sur l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1995 ;
3°) à titre subsidiaire, de réduire l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1995 par imputation du déficit correspondant à sa créance sur le Trésor sur le résultat taxable de l'exercice clos en 1995 ;
Elle soutient que sa demande était recevable devant le tribunal administratif ; qu'en effet, sa créance sur le Trésor était inscrite à l'actif de son bilan 1992 et 1993 ; qu'elle n'a pas été remise en cause par le service lors de la vérification ultérieure de sa comptabilité ; que cette vérification et l'absence de redressement valent interprétation formelle au sens de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales et réouvrent le délai de réclamation ; que c'est la contestation par le Trésor public de sa créance qui a porté à sa connaissance la défaillance de l'inspecteur des impôts qui n'avait pas avisé le percepteur de sa créance ; qu'elle ne saurait être pénalisée des carences de l'administration fiscale ; que, s'agissant du bien-fondé de sa créance, elle a déposé la demande n° 2039 en même temps que la liasse fiscale de l'exercice clos le
31 décembre 1992 ; qu'elle établit la réalité du dépôt de cette demande par la référence lors du contrôle à un carry back de 39 058 francs, alors qu'elle n'a pas déposé d'autre déclaration n° 2039 pour l'année 1993 ; que pour évoquer ce carry back, les services fiscaux devaient nécessairement détenir la déclaration n° 2039 qu'elle avait jointe à la déclaration des résultats de l'exercice 1992 ; que, subsidiairement, la Cour devra constater que sa créance de carry back constitue un déficit, qui n'ayant pas été reporté en arrière, peut être reporté en avant sur les cinq exercices suivants, y compris donc l'exercice 1995 ; qu'à hauteur de 84 663,47 euros, ce déficit est imputable sur la plus-value taxable au taux de 19 % soit 16 086,06 euros ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 décembre 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la liquidation de l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 1992 étant intervenue le 15 mars 1993, la société disposait d'un délai de réclamation s'achevant le 31 décembre 1995 pour justifier avoir produit la déclaration n° 2039 relative au report en arrière de son déficit de l'exercice 1992, concomitamment à la déclaration de ses résultats, et non le 31 décembre 1997, comme elle le soutient ; qu'en effet l'option pour le report en arrière du déficit de l'exercice clos en 1992, en tant qu'elle crée une créance sur le Trésor public, est sans influence sur le bien-fondé de l'impôt sur les sociétés dû au titre de l'exercice 1995 ; que le non dépôt de la déclaration n° 2039, matérialisant la décision de gestion quant aux modalités de report des déficits est opposable à la société ; que celle-ci ne peut invoquer une surtaxation à hauteur de l'impôt mis en recouvrement pour l'exercice 1995 ; qu'elle ne peut davantage invoquer un évènement au sens de l'article R*196-1 c du livre des procédures fiscales ; que l'absence de redressement sur l'exercice 1992, lors du contrôle de la société ne vaut pas prise de position formelle quant à la reconnaissance d'une créance sur le Trésor ; que, contrairement à ce qu'elle soutient, la société a, au titre de l'exercice 1993, déposé une déclaration n° 2039 pour un montant de 39 058 francs ; que cette somme a d'ailleurs été prise en compte dans le cadre de la confirmation du rappel d'impôt effectué le 26 avril 2000 ; que la société n'établit pas le dépôt de cette même déclaration pour l'exercice 1992 ; que la demande de la société d'imputation du déficit né en 1992 sur l'imposition d'une plus-value constatée au titre de l'exercice clos en 1995 ne peut être formée qu'à l'occasion de la contestation de l'imposition au titre de 1995 ; qu'elle est étrangère au litige soumis à la Cour, et par suite irrecevable ;
Vu l'ordonnance en date du 3 mai 2005 portant clôture de l'instruction au 30 mai 2005 ;
Vu le mémoire, enregistré le 26 mai 2005, présenté pour la société ELECTRONIC EQUIPMENT MARINE INDUSTRY qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; elle ajoute que sa réclamation porte sur l'année 1992 en ce qui concerne la constatation de la créance mais sur l'année 1995 en ce qui concerne l'imputation de cette créance ; qu'à titre conservatoire, elle a déposé une réclamation portant sur l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 1995 ;
Vu la lettre, en date du 15 juin 2005, par laquelle le président de la 3ème chambre a, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, informé les parties que la solution du litige était susceptible d'être fondée sur le moyen relevé d'office tiré de ce que les conclusions tendant au report en avant du déficit constaté au titre de l'exercice clos en 1992 sur le résultat constaté au titre de l'exercice clos en 1995 et à la réduction de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de ladite année sont nouvelles en appel et par suite irrecevables ;
Vu la lettre, enregistrée le 27 juin 2005, par laquelle le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie indique qu'il n'a pas d'observations à formuler sur le moyen relevé d'office ;
Vu les observations, enregistrées le 3 juillet 2005, présentées pour la société ELECTRONIC EQUIPMENT MARINE INDUSTRY qui soutient que les conclusions de sa requête tendant au report en avant du déficit constaté au titre de l'exercice clos en 1992 sur le résultat constaté au titre de l'exercice clos en 1995 et à la réduction de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de ladite année sont recevables ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juillet 2005 à laquelle siégeaient M. Couzinet, président de chambre, M. Berthoud, président-assesseur et Mme Brenne, premier conseiller :
- le rapport de Mme Brenne, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Michel, commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la demande présentée devant le tribunal administratif et relative à la créance sur le Trésor résultant du report en arrière du déficit constaté au titre de l'exercice clos en 1992, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête d'appel :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des troisième et quatrième alinéas du I de l'article 209 du code général des impôts relatif à la détermination des bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés : Sous réserve de l'option prévue à l'article 220 quinquies, en cas de déficit subi pendant un exercice, ce déficit est considéré comme une charge de l'exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice. Si ce bénéfice n'est pas suffisant pour que la déduction puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur les exercices suivants jusqu'au cinquième exercice qui suit l'exercice déficitaire... La limitation du délai de report prévue à l'alinéa précédent n'est pas applicable à la fraction du déficit qui correspond aux amortissements régulièrement comptabilisés mais réputés différés en période déficitaire... ; qu'aux termes de l'article 220 quinquies du même code, dans sa rédaction applicable en l'espèce : I. Par dérogation aux dispositions des troisième et quatrième alinéas du I de l'article 209, le déficit constaté au titre d'un exercice ouvert à compter du 1er janvier 1984 par une entreprise soumise à l'impôt sur les sociétés peut, sur option, être considéré comme une charge déductible du bénéfice de l'antépénultième exercice et, le cas échéant, de celui de l'avant-dernier exercice puis de celui de l'exercice précédent, dans la limite de la fraction non distribuée de ces bénéfices... Cette option porte, pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 1985, sur les déficits reportables à la clôture d'un exercice en application des troisième et quatrième alinéas du I de l'article 209. Le déficit imputé dans les conditions prévues au premier alinéa cesse d'être reportable sur les résultats des exercices suivant celui au titre duquel il a été constaté. L'excédent d'impôt sur les sociétés résultant de l'application du premier alinéa fait naître au profit de l'entreprise une créance égale au produit du déficit imputé dans les conditions prévues au même alinéa par le taux de l'impôt sur les sociétés applicable à l'exercice déficitaire... IV. Un décret fixe les conditions d'application du présent article, notamment les obligations déclaratives des entreprises... ; que le I de l'article 46 quater 0W de l'annexe III au code général des impôts pris pour l'application de ces dispositions, précise que l'entreprise qui exerce l'option prévue au premier alinéa du I de l'article 220 quinquies du code général des impôts doit joindre à la déclaration de résultat de l'exercice au titre duquel cette option a été exercée, une déclaration conforme au modèle fixé par l'administration... ; que si la déclaration ainsi requise vaut réclamation au sens de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, cette réclamation doit être présentée dans le délai de dépôt de la déclaration de résultat ;
Considérant que la société anonyme ELECTRONIC EQUIPMENT MARINE INDUSTRY, qui demande l'imputation sur l'impôt sur les sociétés auquel elle est assujettie au titre de l'année 1995 de la créance qui résulterait du report en arrière, en application des dispositions précitées de l'article 220 quinquies du code général des impôts, du déficit constaté au titre de l'exercice clos en 1992, n'établit avoir produit ni avec sa déclaration de résultat, ni dans le délai de dépôt de cette déclaration, la déclaration prévue par les dispositions de l'article 46 quater 0W de l'annexe III au même code, valant option pour le report en arrière de ce déficit, en se bornant à produire la copie, non signée, de ladite déclaration ; qu'elle n'établit pas davantage le dépôt de cette déclaration dans le délai précité en se prévalant de ce que le vérificateur, qui a procédé à la vérification de comptabilité des exercices clos en 1991, 1992 et 1993, n'a pas remis en cause la créance sur le Trésor, résultant du report en arrière du déficit constaté au titre de l'exercice clos en 1992, qui était inscrite à son bilan ; qu'enfin, il résulte de l'instruction que, contrairement à ce qu'elle soutient, la société requérante a joint à la déclaration de ses résultats au titre de l'exercice clos en 1993 une déclaration valant option pour le report en arrière du déficit constaté au titre de cet exercice ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la mention par le vérificateur d'une créance sur le Trésor au titre du report en arrière du déficit de l'exercice clos en 1993 établit, en fait, le dépôt de la déclaration valant option pour le report en arrière du déficit de l'exercice clos en 1992 ne peut qu'être écarté ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R*196-3 du livre des procédures fiscales : Dans le cas où un contribuable fait l'objet d'une procédure de reprise ou de redressement de la part de l'administration des impôts, il dispose d'un délai égal à celui de l'administration pour présenter ses propres réclamations ;
Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées des articles 209.I et 220 quinquies du code général des impôts que le déficit constaté au titre d'un exercice peut être considéré comme une charge déductible du bénéfice de l'antépénultième exercice et le cas échéant de celui de l'avant-dernier exercice puis de celui de l'exercice précédent y compris dans le cas où ce bénéfice d'imputation ne résulte que de rehaussements apportés par l'administration aux résultats déclarés à la condition que la demande d'imputation soit exercée dans les délais de réclamation ; qu'il suit de là qu'une entreprise à laquelle ont été notifiés des redressements consécutifs à une vérification de comptabilité opérée par l'administration qui ont eu pour effet de rectifier les résultats fiscaux qu'elle a déclarés au titre des exercices sur lesquels a porté le contrôle, est en droit de souscrire la déclaration d'option de report en arrière de déficit, laquelle vaut réclamation au sens de l'article L.190 du livre des procédures fiscales, dans les formes, conditions et délais fixés par l'article R*196-3 précité du livre des procédures fiscales, sans qu'y fassent obstacle les dispositions susrappelées de l'article 46 quater-0W de l'annexe III au code général des impôts ;
Considérant que si la société ELECTRONIC EQUIPMENT MARINE INDUSTRY a, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, fait l'objet, du 10 novembre 1994 au 1er mars 1995, d'une vérification de comptabilité des exercices clos en 1991, 1992 et 1993, aucun redressement ne lui a été notifié au titre de l'exercice clos en 1992 ; que, par suite, elle n'était pas en droit de souscrire à l'issue de cette procédure de vérification, une déclaration d'option de report en arrière de déficit au titre de cet exercice ; qu'il suit de là que la déclaration déposée pour la première fois le 28 mai 1996 par la société ELECTRONIC EQUIPMENT MARINE INDUSTRY en vue d'obtenir le report en arrière du déficit de son exercice clos en 1992, était, comme le soutient le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, tardive ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société ELECTRONIC EQUIPMENT MARINE INDUSTRY n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à ce qu'elle soit reconnue titulaire d'une créance sur le Trésor d'un montant de 188 821 francs, imputable à hauteur de 187 150 francs sur l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1995 ;
Sur les conclusions subsidiaires tendant à la réduction de l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 1995 :
Considérant que si la société ELECTRONIC EQUIPMENT MARINE INDUSTRY demande le report en avant du déficit constaté au titre de l'exercice clos en 1992 sur le résultat constaté au titre de l'exercice clos en 1995 et la réduction de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de cette dernière année, de telles conclusions qui portent sur l'impôt dû au titre d'une autre année que celle au titre de laquelle la société revendique la naissance d'une créance sur le Trésor sont nouvelles en appel et, par suite, irrecevables ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société ELECTRONIC EQUIPMENT MARINE INDUSTRY est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme ELECTRONIC EQUIPMENT MARINE INDUSTRY et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie sera transmise au directeur des services fiscaux chargés de la direction de contrôle fiscal Nord.
2
N°03DA00303