Vu le recours, enregistré le 24 octobre 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; Il demande à la Cour :
1') d'annuler le jugement n° 01-1557 en date du 5 juin 2003 par lequel le Tribunal administratif de Lille a déchargé la SA UF Aciers des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos le 31 août 1996 et le 31 août 1997 ;
2°) de rétablir ladite société au rôle de l'impôt sur les sociétés, de la contribution à l'impôt sur les sociétés ainsi que des pénalités y afférentes au titre des exercices clos en 1996 et 1997 ainsi que de la contribution temporaire sur l'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes pour 1997 à concurrence de la somme dont la décharge a été ordonnée par le Tribunal ;
Il soutient qu'au titre de l'article 39 du code général des impôts les versements effectués par les entreprises pour assurer le service des pensions de retraite à leurs anciens salariés dans le cadre d'un régime de retraite constituent en principe des charges déductibles à la double condition que ces dépenses résultent d'un engagement juridique opposable à l'employeur et que cet engagement présente un caractère général et impersonnel, dans la mesure où il s'adresse à une catégorie de personnels définie de manière objective ; qu'en l'espèce, le contrat à l'origine des cotisations de retraite complémentaire a été souscrit au bénéfice des cadres de direction, code 115 et ne concerne donc pas de façon générale et impersonnelle une véritable catégorie de personnels ; que seul M. X, président-directeur général de la société a été concerné par le contrat de retraite complémentaire ; qu'en outre, l'employeur n'a pris aucun engagement puisque, d'une part, ni le personnel dans son ensemble, ni ses représentants n'ont été informés d'un tel engagement et, d'autre part, aucun accord d'entreprise n'a été passé en vertu d'une convention collective dont relève l'entreprise ; que, dès lors, le contrat de retraite ne remplit pas les conditions, telles que définies par la jurisprudence, pour permettre d'admettre la déductibilité des cotisations pour l'employeur et leur exclusion de la base imposable sur le revenu pour le bénéficiaire ; que le contribuable n'est pas fondé à se prévaloir de l'instruction du 5 décembre 1985 n° F-23-85 qui envisage l'hypothèse d'une catégorie de bénéficiaires pouvant, de fait, se trouver réduite à un salarié dans le cadre de contrat de groupe intéressant plusieurs entreprises ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 décembre 2003, présenté pour la SA UF Aciers qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 762-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que la circonstance selon laquelle M. X était, à la date de souscription du contrat de groupe, le seul cadre de direction de la société susceptible de bénéficier du dispositif en cause n'exclut pas, à elle seule, qu'il puisse s'agir d'un régime collectif ; que tant la jurisprudence du Conseil d'Etat que la doctrine administrative admettent que les contrats de retraite puissent s'appliquer à une catégorie donnée et que cette catégorie peut ne comporter qu'un nombre très limité de salariés voire un seul ; que le contrat de retraite est conçu comme ayant un caractère obligatoire ; que ni la loi, ni la doctrine administrative n'impose le respect d'une condition supplémentaire tenant à l'exigence d'une cotisation à taux uniforme pour l'ensemble des entreprises adhérentes d'un contrat dit ouvert ; que la fixation de la rémunération du président n'est pas soumise à la procédure de contrôle prévue par les articles L. 225-38 et suivants du code du commerce ;
Vu le mémoire, enregistré le 26 avril 2004, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 6 juin 2005, présenté pour la SA UF Aciers qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 juin 2005, à laquelle siégeaient
M. Daël, président de la Cour, M. Gipoulon, président de chambre, Mme Signerin-Icre, président-assesseur, M. Stéphan, premier conseiller et Mme Eliot, conseiller :
- le rapport de Mme Eliot, conseiller ;
- et les conclusions de M. Paganel, commissaire du gouvernement ;
Sur l'application de la loi fiscale :
Considérant qu'aux termes de l'article 39-1 du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... notamment : 1°) les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel ... ; que, parmi ces dépenses, qui doivent avoir été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise, figurent les cotisations versées par l'entreprise au titre d'un régime de retraite, dans la mesure où le régime de retraite en vertu duquel ces cotisations sont versées s'applique de plein droit à l'ensemble du personnel ou à certaines catégories de celui-ci ;
Considérant que si le contrat souscrit par la SA UF Aciers, dont M. X est le président-directeur général, prévoit que le régime de retraite supplémentaire qu'il définit est applicable à la catégorie des cadres de direction, l'administration affirme sans être contestée que l'effectif de ladite société, en dehors de M. X, ne dispose pas de cadre de direction l'encadrement étant assuré par des cadres mis à disposition par la société mère SOMETAM, en application d'une convention signée entre les deux sociétés moyennant une refacturation en fonction du temps de travail de ce personnel ; qu'en outre, compte tenu du taux de cotisation fixé à 53% de la tranche A des rémunérations de base, il est difficilement envisageable que ce contrat puisse bénéficier à d'autres salariés en raison de l'importance de la charge financière que ce montant représente pour l'entreprise ; que par ailleurs, contrairement à ce que soutient la SA UF Aciers, le contrat dont s'agit aurait du être soumis à l'approbation du conseil d'administration de la société, en application de l'article 101 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales en vigueur au moment des faits litigieux ; qu'en l'absence de délibération en ce sens, il n'est pas établi que le contrat litigieux ait conféré aux cadres de la société qui seraient susceptibles d'entrer dans son champ d'application un avantage sur le maintien duquel ils seraient en droit de compter ; qu'enfin si la société requérante fait valoir que la circonstance selon laquelle M. X était, à la date de souscription du contrat, le seul cadre de direction de la SA UF Aciers susceptible de bénéficier du dispositif, n'exclut pas par elle-même qu'il puisse s'agir d'un régime collectif, elle n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, qu'au cours des années 1996 et 1997 en litige, les cotisations versées en exécution du contrat résultaient d'un engagement général et impersonnel pris par l'entreprise à l'égard d'une catégorie de ses salariés ; qu'ainsi c'est à bon droit que l'administration a exclu lesdites cotisations des charges déductibles de la société ;
Sur l'application de la doctrine :
Considérant, d'une part, que si le paragraphe 24 alinéa 3 de l'instruction 5 F-23-85 du
5 décembre 1985 envisage l'hypothèse d'une catégorie de bénéficiaires réduite à un salarié, c'est uniquement dans le cadre de contrats de groupe intéressant plusieurs entreprises ; que les données sus-analysées ne permettent pas de rattacher le contrat litigieux à cette hypothèse ; qu'ainsi la société requérante ne peut utilement invoquer à son profit, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, l'instruction précitée ;
Considérant, d'autre part, que, contrairement à ce que soutient la société requérante, les réponses ministérielles en date des 8 août 1988 et 21 novembre 1994 à MM Y et Z, parlementaires, ne donnent pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle qui est indiquée ci-dessus ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif en date du 5 juin 2003 et le rétablissement de la SA UF Aciers au rôle de l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos de 1996 et 1997 à hauteur de l'intégralité des droits et pénalités contestés ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la SA UF Aciers la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE
Article 1er : Le jugement n° 01-1557 du Tribunal administratif de Lille en date du 5 juin 2003 est annulé.
Article 2 : La SA UF Aciers est rétablie au rôle de l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos de 1996 et 1997 à hauteur de l'intégralité des droits et pénalités contestés.
Article 3 : Les conclusions de la SA UF Aciers présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et à la SA UF Aciers.
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N°03DA01143