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27/12/2004 | FRANCE | N°00DA01426

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation a 3 (quater), 27 décembre 2004, 00DA01426


Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2000 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par Mme Réjane X, demeurant ... ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9704324 du 28 septembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1989, 1990 et 1991 dans les rôles de la commune de Dourlers ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

Mme X sout

ient, d'une part, en se prévalant de la doctrine administrative, que la procédure d'imp...

Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2000 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par Mme Réjane X, demeurant ... ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9704324 du 28 septembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1989, 1990 et 1991 dans les rôles de la commune de Dourlers ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

Mme X soutient, d'une part, en se prévalant de la doctrine administrative, que la procédure d'imposition est irrégulière, dès lors que la notification de redressement lui a été remise après expiration du délai de prescription et que les redressements se rapportant aux exercices en cause sont insuffisamment motivés ; d'autre part, que le service a fait une inexacte application des règles relatives à la dévolution de la charge de la preuve ; que le redressement n'est pas fondé, dès lors que l'administration, qui, s'agissant de la fraction de son salaire jugée comme excessive, avait précédemment abandonné les redressements applicables aux années 1990 et 1991 et qui n'est pas fondée à évaluer le rehaussement litigieux par la méthode de la comparaison interne, n'a pas réellement établi le caractère excessif des salaires qu'elle percevait au sein de la société d'Etudes générales et industrielles (SEGI) ; que la décision par laquelle le service a fait connaître l'abandon des redressements applicables aux années 1990 et 1991 doit être regardée comme une prise de position formelle de l'administration au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ; que l'administration n'établit pas le bien fondé des redressements portant sur les remboursements des frais de déplacements de la requérante ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 décembre 2001, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conclut au rejet de la requête ; il soutient que la requérante ne saurait, s'agissant de la régularité de la procédure d'imposition, se prévaloir de la doctrine administrative qui est, au demeurant, d'interprétation stricte ; que la décision par laquelle le service a fait connaître l'abandon des redressements applicables aux années 1990 et 1991 ne saurait être regardée comme une prise de position formelle de l'administration au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ; que les redressements attaqués sont suffisamment motivés et que l'administration qui se place sur le terrain des dispositions de l'article 111 du code général des impôts, établit tant le bien fondé des redressements portant sur les salaires versés à Mme X par la SARL SEGI que celui des redressements portant sur les remboursements des frais de déplacements de la requérante ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 janvier 2002, présenté par Mme Réjane X ;

elle conclut aux mêmes fins et par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 mars 2002, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conclut au rejet de la requête pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 novembre 2004, présenté pour Mme X, par Me Meriaux ; elle conclut aux mêmes fins et par les mêmes moyens et, en outre, par les moyens que la prescription de l'imposition n'a pu, contrairement à ce qu'affirme l'administration, être valablement interrompue par l'envoi de la notification de redressements portant sur les années 1990 et 1991, dès lors que la preuve n'est pas faite par le service qu'un dépôt d'un avis de passage par le préposé de la Poste a bien été fait le 23 décembre 1993 ; que l'administration n'a pas mis la requérante à même de contester les impositions qui lui étaient assignées, faute de lui avoir communiqué la nature des renseignements qu'elle a recueillis pour établir celles-ci ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 décembre 2004, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui conclut au rejet de la requête, par les mêmes moyens que ceux énoncés précédemment ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 décembre 2004 à laquelle siégeaient M. Gipoulon, président de chambre, Mme Signerin-Icre, président-assesseur et M. Mesmin d'Estienne, premier conseiller :

- le rapport de M. Mesmin d'Estienne, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Paganel, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X fait appel du jugement du Tribunal administratif de Lille du 28 septembre 2000 qui a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1989, 1990 et 1991 dans les rôles de la commune de Dourlers ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant que Mme X, qui n'est pas fondée à se prévaloir, s'agissant de la régularité de la procédure d'imposition, de la doctrine administrative contenue dans la documentation administrative de base, ne saurait prétendre que les redressements notifiés tant le 22 décembre 1992 portant sur les revenus de l'année 1989 que le 23 décembre 1993 portant sur les revenus de l'année 1990 et de l'année 1991, sont insuffisamment motivés, alors que les redressements en cause contenaient, sans qu'il soit nécessaire de se référer pour connaître cette motivation aux réponses données par le service aux observations du contribuable, l'objet des divers chefs de redressements, leur nature et leur montant, leurs motifs, la catégorie de revenus auxquels ils se rapportaient et l'année d'imposition à laquelle ils s'appliquaient ; que si l'administration doit informer le contribuable de l'origine et de la teneur des informations qu'elle a recueillies auprès de tiers et doit pouvoir ainsi le mettre en mesure de contester les informations qu'elle a de cette manière collectées avant la mise en recouvrement de l'imposition, elle n'est toutefois pas tenue de communiquer spontanément ces informations ; que Mme X n'établit pas que le service aurait été rendu destinataire d'une demande de sa part tendant à obtenir des services fiscaux des précisions sur l'origine et la teneur des informations que ceux-ci ont recueillies auprès de tiers et qu'il n'est pas davantage établi qu'un refus aurait été opposé à sa demande ;

Sur le bien fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la prescription des compléments d'imposition assignées au titre de l'année 1990 et de l'année 1991 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due... et qu'aux termes de l'article L. 189 du même livre : La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de redressement... ;

Considérant que pour établir que la notification de redressements, en date du 23 décembre 1993 portant sur les revenus qu'elle avait perçus durant l'année 1990, a été remise à Mme X avant l'expiration du délai de prescription prévu à l'article L. 169 sus rappelé du livre des procédures fiscales, l'administration a produit devant les premiers juges la copie de l'accusé de réception de cette notification de redressements qui atteste que le pli a été effectivement retiré par son destinataire le 3 janvier 1994 ; que toutefois, si cet accusé de réception indique que le pli aurait été présenté par les services de la Poste au domicile de la requérante le 28 décembre 1993, il ne comporte pas d'autres mentions claires et précises selon lesquelles Mme X aurait été avisée, par le dépôt à l'adresse mentionnée d'un avis de passage, de la mise en instance du pli recommandé ; que, dans ces conditions, Mme X ne peut être regardée comme ayant été régulièrement rendue destinataire d'une notification de redressements susceptible d'interrompre la prescription du droit de reprise ; que Mme X est, par suite, fondée à soutenir pour ce motif devant la Cour que la notification de redressements du 23 décembre 1993, portant sur les revenus qu'elle avait perçus durant l'année 1990, lui a été remise après expiration du délai de prescription et à demander, en conséquence, la décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel elle a été assujettie au titre de ladite année 1990 ;

Considérant que Mme X n'est, à l'inverse de ce qui précède, pas fondée à soutenir que les redressements d'impositions dus au titre de l'année 1991 qui lui ont été également notifiés le 28 décembre 1993 et dont elle prit connaissance, au plus tard, le 3 janvier 1994, s'appliquaient à un exercice prescrit ;

En ce qui concerne le bien fondé de l'imposition des revenus considérés comme distribués :

Considérant qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts : Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c) Les rémunérations et avantages occultes ; d) La fraction des rémunérations qui n'est pas déductible en vertu du 1° du 1 de l'article 39 ; (...) ; qu'aux termes de l'article 39-1 du même code : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, (...), notamment : 1° les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main d'oeuvre (...).Toutefois, les rémunérations ne sont admises en déduction que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais (...) ;

Considérant, en premier lieu, que l'administration fiscale, compte tenu, d'une part, des précisions qu'elle apporte en ce qui concerne le montant des salaires que Mme X percevait de la part de la société d'Etudes générales et industrielles (SEGI) au sein de laquelle elle exerçait une fonction de secrétaire commerciale et qui démontre, d'autre part, le bien fondé du rehaussement litigieux en faisant usage de la méthode de la comparaison des rémunérations perçues par les salariés au sein de l'entreprise qui les emploie en se référant, notamment, à la situation financière de trois agents de la même société SEGI placés dans une situation proche de celle de la requérante, établit, ainsi qu'il lui incombe de le faire, le caractère excessif des rémunérations ainsi perçues ; qu'à l'inverse, la requérante ne produit aucun élément de nature à justifier qu'elle pouvait percevoir, compte tenu de la fonction qu'elle tenait dans cette société et des tâches qu'elle accomplissait au sein de celle-ci, une telle rémunération ; que, par suite, l'administration pouvait à bon droit regarder comme constituant des revenus distribués, au sens de l'article 111 d) du code général des impôts, la fraction excessive du salaire brut mensuel versé à Mme X supérieure à 10 000 francs en 1989 et à 11 025 francs en 1991 et l'imposer dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

Considérant, en second lieu, que l'administration qui relève que ces remboursements forfaitaires de dépenses n'étaient appuyés par aucun justificatif et faisaient double emploi avec des dépenses de déplacements remboursées au gérant de la SARL SEGI, doit être regardée comme établissant que les indemnités kilométriques perçues en 1989 par Mme X constituaient des revenus distribués au sens de l'article 111 c) du Code général des impôts, imposables comme tels dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que Mme X n'apporte, à l'inverse, aucun élément de preuve à l'appui de ses allégations selon lesquelles les remboursements qu'elle a reçus correspondaient à des frais exposés pour des déplacements et séjours à caractère professionnel et avaient été engagés dans l'intérêt de l'entreprise qui l'employait ;

Considérant, en troisième lieu, que Mme X n'est pas fondée, en invoquant les dispositions contenues à l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, à se prévaloir pour obtenir la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1989 et 1991, de la décision d'abandon par le service des redressements applicables à l'année 1991 qui lui avait été précédemment adressée, lequel abandon ne saurait être regardé comme constituant une prise de position formelle de la part de l'administration ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à se plaindre que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1989 et 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : Mme X est déchargée du complément d'impôt sur le revenu auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1990.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Lille du 28 septembre 2000 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Réjane X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2004, à laquelle siégeaient :

- M. Gipoulon, président de chambre,

- Mme Signerin-Icre, président-assesseur,

- M. Mesmin d'Estienne, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 27 décembre 2004.

Le rapporteur,

O. MESMIN D'ESTIENNE

Le président de chambre,

J.F. GIPOULON

Le greffier,

G. VANDENBERGHE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le Greffier

G. VANDENBERGHE

2

N°00DA001426


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation a 3 (quater)
Numéro d'arrêt : 00DA01426
Date de la décision : 27/12/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Gipoulon
Rapporteur ?: M. Olivier Mesmin d'Estienne
Rapporteur public ?: M. Paganel
Avocat(s) : SCP MERIAUX-DE FOUCHER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2004-12-27;00da01426 ?
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