Vu l'ordonnance en date du 30 août 1999 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nancy a, en application du décret n° 99-435 du 28 mai 1999 portant création d'une cour administrative d'appel à Douai et modifiant les articles R. 5, R. 7 et R. 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, alors applicables, transmis à la cour administrative d'appel de Douai le recours formé par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;
Vu le recours, enregistré le 2 juillet 1999 au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy, par lequel le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie demande à la Cour :
1') à titre principal, de rétablir M. et Mme X aux rôles de l'impôt sur le revenu au titre des années 1990, 1991, 1992, 1993 et 1994 à hauteur des sommes dont la décharge a été prononcée par le jugement n° 95-5116 et autres du 25 février 1999 du tribunal administratif de Lille, et de réformer en ce sens ledit jugement ;
Code C+ Classement CNIJ : 19-01-01-05
2°) à titre subsidiaire, de rétablir M. et Mme X aux rôles de l'impôt sur le revenu des années 1990 à 1994 à concurrence des bases réintégrant les frais de double résidence indûment déduits, au surplus de rétablir ces derniers aux rôles de l'impôt sur le revenu des années 1992, 1993 et 1994 à raison de l'application de la règle du taux effectif et de réformer en ce sens le même jugement du tribunal administratif de Lille ;
3°) d'annuler l'article 5 dudit jugement en ce qu'il condamne l'Etat au versement d'une somme de 10 000 francs au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Il soutient que le jugement est irrégulier dès lors que la réduction des bases imposables suite à l'admission des frais de double résidence et de la non imposition en France des rémunérations perçues en 1992, 1993 et 1994 n'est pas chiffrée ; qu'ainsi les juges ont méconnu l'étendue de leurs obligations ; que M. X n'a pas justifié de la réalité, nature et montant, des frais de double résidence qu'il aurait exposés au titre des années en litige, c'est-à-dire tant les années 1990, 1991 et le premier trimestre 1992, période retenue par le tribunal pour admettre la déduction de ces frais, que les trois derniers trimestres 1992 et les années 1993 et 1994, période qui correspond au détachement de M. X en Italie, au cas où la Cour fait droit au moyen tiré de la non applicabilité de la convention franco-italienne ; qu'au regard du droit interne M. X a son domicile fiscal en France ; qu'il était, de ce fait, passible de l'impôt sur le revenu en France sur l'ensemble de ses revenus ; que les conventions fiscales internationales ont pour objet d'éviter les doubles impositions ; que M. X qui n'a pas fait l'objet d'une imposition en Italie au titre de ses revenus n'est pas fondé à se prévaloir des stipulations de la convention franco-italienne ; quoi qu'il en soit, la durée totale des jours de présence de M. X au titre de ses séjours en Italie au cours des années concernées n'a pas été établie ; que si la Cour confirme l'applicabilité de l'article 15 de ladite convention, il est demandé qu'il soit tenu compte des rémunérations en cause pour le calcul de l'impôt dû en France sur les autres revenus, selon la méthode dite du taux effectif prévue à l'article 197 C du code général des impôts ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 1999, présenté pour M. René X, demeurant ..., par Me Jacques Gougaud, avocat ; M. X demande à la Cour de rejeter le recours et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 francs en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; il soutient qu'il semble que le recours soit formé hors délai ; que le jugement est régulier car il vide le litige et devient exécutable ; que l'administration prétend pour la première fois que les frais de double résidence exposés par M. X ne sont pas justifiés ; que cet argument n'a jamais été opposé au contribuable spécialement au niveau des notifications de redressement ; qu'en réalité, un état mentionnant les motifs de la déduction des frais litigieux, leur nature ainsi que leur montant a été produit chaque année ; qu'il appartenait à l'administration de lui demander de produire les justificatifs ; que, pour apprécier la situation de M. X, il convient d'abord de s'en référer à la convention fiscale franco-italienne ; que s'il avait sa résidence en France, il réunissait les conditions prévues par l'article 15 de ladite convention et il était sur les salaires perçus en Italie redevable de l'impôt italien ; que, n'ayant pas eu durant les années 1993 et 1994 d'autres revenus que ces salaires, l'application de la convention ne présente pas de difficultés ; que l'administration, en première instance, a admis que M. X avait établi avoir séjourné plus de 183 jours en Italie ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 5 octobre 2001, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui demande à la Cour de rejeter la demande de M. X de condamnation de l'Etat au paiement de la somme de 10 000 francs et, par les mêmes moyens, reprend les conclusions du recours ; il soutient, en outre, que le recours adressé par télécopie a été enregistré au greffe de la cour administrative d'appel le 2 juillet 1999 soit dans le délai prévu par l'article R. 200-18 du livre des procédures fiscales ; qu'il abandonne le moyen relatif à la régularité du jugement attaqué ; que l'administration, en vertu de l'article L. 199 C du même livre, est fondée à faire valoir tout moyen nouveau ; que le principe de la réalité des frais s'oppose à toute évaluation forfaitaire des dépenses ; que M. X n'a pas assorti ces évaluations de l'ensemble des justificatifs nécessaires ; qu'en ce qui concerne ceux relatifs aux frais exposés en Italie, nombre de factures sont libellées à un autre nom que M. X ;
Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 5 novembre 2001, présenté pour M. X qui, par les mêmes moyens, maintient ses précédentes conclusions ; il soutient, en outre, qu'il a toujours été admis que les frais de repas et de déplacement pouvaient faire l'objet d'une évaluation forfaitaire ; que l'indemnité kilométrique est mentionnée dans la notice délivrée par l'administration pour faciliter la rédaction de la déclaration de revenus ; que l'évaluation des frais de repas est prévue par l'instruction du 30 décembre 1998 (5F-1-99 n°46, documentation administrative 5F-2542 n°33) ; qu'il se prévaut de ces instructions par application du 2ème alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; que si les factures de gaz sont libellées à un autre nom, il s'agit d'une pratique courante en Italie pour les contrats de gaz ; que l'administration qui avait jusqu'à présent contesté le principe de la déduction ne peut, à ce stade de la procédure, opposer le défaut de justifications du montant des frais déduits ;
Vu les pièces du dossier établissant que les parties ont été informées, conformément à l'article R. 411-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n°92-422 du 4 mai 1992 portant publication de la convention entre la France et l'Italie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune du 5 octobre 1989 ;
Vu le décret n° 99-435 du 28 mai 1999 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 mars 2004 où siégeaient M. Gipoulon, président de chambre, Mme Brin, président-assesseur et M. Soyez, premier conseiller :
- le rapport de Mme Brin, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Paganel, commissaire du gouvernement ;
Considérant que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie fait appel du jugement du 25 février 1999 du tribunal administratif de Lille en tant que, d'une part, par ses articles 2 et 3 ledit jugement a accordé à M. René X une décharge partielle du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1990, 1991 et 1992 résultant de la réduction des bases imposables des sommes représentatives des frais de double résidence supportés au cours des années 1990 et 1991 et du premier trimestre 1992, d'autre part, par son article 4 a accordé à M. X, au titre de l'année 1992 une réduction et au titre des années 1993 et 1994, la décharge des cotisations tant primitives que complémentaires d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au motif de l'application de l'article 15 de la convention fiscale franco-italienne aux rémunérations relatives à l'emploi exercé par l'intéressé en Italie au cours de ces années, enfin, par son article 5 a condamné l'Etat à verser à M. X une somme de 10 000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; que le ministre demande à la Cour, à titre principal, de rétablir M. et Mme X aux rôles de l'impôt sur le revenu des années 1990 à 1994 à hauteur des sommes dont la décharge a été décidée par le tribunal administratif, à titre subsidiaire, de rétablir M. et Mme X aux rôles de l'impôt sur le revenu des années 1990 à 1994 à concurrence des bases réintégrant les frais de double résidence indûment déduits, au surplus, de rétablir les intéressés aux rôles de l'impôt sur le revenu des années 1992 à 1994 à raison de l'application de la règle dite du taux effectif ;
Sur la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté du recours :
Considérant qu'il est constant que la télécopie du recours formé par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie contre le jugement attaqué qui a été notifié au directeur des services fiscaux le 3 mars 1999 a été enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy le 2 juillet 1999 ; qu'ainsi, alors même que l'exemplaire original de ce recours qui était nécessaire à sa régularisation n'a été enregistré que le 6 juillet 1999, soit postérieurement à l'expiration du délai de quatre mois imparti par les dispositions de l'article R. 200-18 du livre des procédures fiscales pour faire appel, la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté du recours ne saurait être accueillie ;
Sur les frais de double résidence concernant les années 1990 et 1991 et le premier trimestre 1992 :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 83 du code général des impôts alors applicable : Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : ... 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales ... La déduction à effectuer du chef des frais professionnels est calculée forfaitairement en fonction du revenu brut ... elle est fixée à 10 % du montant de ce revenu ... Les bénéficiaires de traitements et salaires sont également admis à justifier du montant de leurs frais réels ... ; qu'il résulte de ces dispositions que les frais de double résidence que les contribuables exposent en raison de la nécessité pour ces derniers de résider pour des raisons professionnelles dans un lieu distinct de leur domicile habituel ne peuvent, en tout état de cause être admis qu'à la condition que la réalité de ces frais soit justifiée par les intéressés ;
Considérant que si M. X a annexé à ses déclarations de revenus une liste de ses dépenses professionnelles avec l'indication de leur montant par rubrique, il n'a à aucun moment de la procédure contentieuse apporté de justifications suffisamment précises permettant d'apprécier le montant des frais effectivement exposés par lui ; qu'il ne produit aucune pièce justificative, attestation ou facture ni à l'appui des dépenses de loyer, charges locatives et frais de logement, ni à l'appui de ses frais supplémentaires de repas qu'il a évalués de façon forfaitaire ; qu'il ne peut prétendre calculer ses frais de transport à partir du barème kilométrique établi par l'administration, lequel ne peut s'appliquer que lorsque le nombre, l'importance et la nature professionnelle des déplacements sont déterminés avec une exactitude suffisante, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; que, par suite, alors même que devant le tribunal administratif le directeur des services fiscaux n'a pas invoqué l'absence de justification de la réalité et du montant des frais en cause, le ministre appelant est fondé, ainsi que le lui permettent les dispositions de l'article L. 199 C du livre des procédures fiscales, à soutenir qu'à défaut de telles justifications le tribunal administratif a, à tort, accordé à M. X la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels ce dernier a été assujetti à raison de la réintégration dans les bases imposables desdits frais de double résidence ;
Considérant, en second lieu, que M. X se prévaut, sur le fondement du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la notice délivrée par l'administration pour faciliter la rédaction de la déclaration de revenus en ce qui concerne l'évaluation forfaitaire des frais de déplacement ainsi que du point n° 46 de l'instruction du 30 décembre 1998 (B.O.I.5F-I-99) en ce qui concerne le calcul forfaitaire des frais de repas ; que, toutefois, d'une part, alors que M. X produit la notice explicative relative à l'année 2000, une telle notice ne peut en tout état de cause être regardée comme contenant une interprétation d'un texte fiscal au sens du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; que, d'autre part, les dispositions du point n°46 de l'instruction du 30 décembre 1998, laquelle d'ailleurs est postérieure à l'expiration du délai de déclaration, ne peuvent être utilement invoquées dès lors qu'elles précisent que l'application des évaluations forfaitaires ne dispense pas le salarié de faire la preuve par tous moyens qu'il supporte effectivement des frais supplémentaires ;
Considérant qu'il suit de là que c'est à tort que les premiers juges ont accordé à M. X la décharge des droits et pénalités correspondant à la réduction des bases de l'impôt sur le revenu assignées à celui-ci au titre des années 1990, 1991 et 1992 des sommes de respectivement 114 747 francs, 144 264 francs et du montant des frais de double résidence supportés au cours du premier trimestre de l'année 1992 ; que, par suite, le ministre appelant est fondé à demander l'annulation des articles 2 et 3 du jugement attaqué ;
Sur l'application de la convention fiscale entre la France et l'Italie :
Considérant qu'aux termes de l'article 15 de la convention conclue le 5 octobre 1989 entre la France et l'Italie : 1 ..., les salaires ... qu'un résident d'un Etat reçoit au titre d'un emploi salarié ne sont imposables que dans cet Etat à moins que l'emploi ne soit exercé dans l'autre Etat. Si l'emploi y est exercé, les rémunérations reçues à ce titre sont imposables dans cet autre Etat. 2. Nonobstant les dispositions du paragraphe 1, les rémunérations qu'un résident d'un Etat reçoit au titre d'un emploi salarié exercé dans l'autre Etat ne sont imposables que dans le premier Etat si : a) Le bénéficiaire séjourne dans l'autre Etat pendant une période ou des périodes n'excédant pas au total 183 jours au cours de l'année fiscale considérée, et b) Les rémunérations sont payées par un employeur ou pour le compte d'un employeur qui n'est pas un résident de l'autre Etat, et c) La charge des rémunérations n'est pas supportée par un établissement stable ou une base fixe que l'employeur a dans l'autre Etat ; qu'il résulte de ces stipulations que si un résident de France séjourne en Italie pendant une période ou des périodes excédant 183 jours au cours d'une année fiscale, les rémunérations qu'il a reçues au titre d'un emploi salarié exercé en Italie ne sont pas imposables en France ; que, contrairement à ce que soutient le ministre, la circonstance que M. X ait, ce qui est constant, la qualité de résident de France au sens de l'article 4 A de ladite convention, ou ait son domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A du code général des impôts, et celle à la supposer établie, qu'il n'ait pas fait l'objet d'imposition en Italie au titre des revenus qu'il a reçus à raison de l'emploi qu'il a exercé dans cet Etat sont sans incidence sur l'application des stipulations précitées du I de l'article 15 de la convention fiscale entre la France et l'Italie ;
En ce qui concerne l'année 1992 :
Considérant qu'il résulte de l'instruction notamment que la fiche de déduction établie par M. X lui-même indique qu'il ne procède à la déduction de frais de double résidence en France et en Italie à raison d'un logement et des repas qu'à compter d'août 1992 et que le permis de séjour délivré par les autorités italiennes mentionne comme date d'entrée en Italie de l'intéressé celle du 26 octobre 1992 ; que, dès lors, M. X, qui occupait un emploi exercé en Italie en tant que détaché dans ce pays par la société Rossman, ne saurait être regardé comme établissant qu'il a séjourné plus de 183 jours en Italie au cours de l'année 1992 ce qui fait obstacle à l'application des stipulations précitées de l'article 15-I de la convention fiscale franco-italienne ; que, par suite, c'est à tort que les premiers juges ont décidé la réduction des cotisations tant primitives que supplémentaires auxquelles il a été assujetti au titre de cette année à concurrence des rémunérations relatives à l'emploi exercé en Italie ; que le ministre est ainsi fondé à demander le rétablissement de M. et Mme X aux rôles de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1992 à hauteur des sommes correspondant à la réduction décidée par le jugement en son article 4 ;
Considérant qu'au titre de l'année 1992 M. X, avant de demander à l'administration fiscale l'application des stipulations précitées de l'article 15-I de la convention fiscale franco-italienne, avait déduit de ses salaires imposables les frais de double résidence en France et en Italie pour un montant de 133 971 francs ; que le service a réintégré cette somme dans les bases imposables ; que M. X ne justifie pas davantage qu'en ce qui concerne les années 1990 et 1991 la réalité et le montant des frais de logement, de repas et de transport qu'il a effectivement supportés ; que, par suite, la réintégration à laquelle le service a procédé étant fondée, les bases d'imposition à concurrence desquelles M. et Mme X sont rétablis à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1992 doivent comprendre la somme résultant de ladite réintégration ;
En ce qui concerne les années 1993 et 1994 :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des pièces produites par M. X devant le tribunal administratif, telles la réponse de la société Rossman à une demande d'information de l'administration fiscale, l'attestation de la société Sikor du 17 avril 1996, le permis de séjour que lui ont délivré les autorités italiennes, les quittances de loyer, les factures d'électricité et de téléphone, que M. X a été détaché en Italie auprès de la société Supercarton Italiana, jusqu'au 31 décembre 1993 par la société Rossman puis chargé de mission dans ce pays à compter du 1er janvier 1994 jusqu'au 3 mars 1995 auprès de la société Cartonbox et que la durée de son séjour dans cet Etat a dépassé 183 jours au cours des années fiscales 1993 et 1994 ; que, par suite, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Lille, les rémunérations perçues par l'intéressé au cours de ces deux années à raison des emplois qu'il a exercés en Italie par ses employeurs successifs n'étaient pas imposables en France, en vertu des stipulations précitées de l'article 15-I de la convention fiscale franco-italienne ;
Considérant qu'à titre subsidiaire le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie demande à la Cour qu'il soit tenu compte des rémunérations reçues par M. X à raison de l'exercice de son activité salariée en Italie pour le calcul de l'impôt dû en France sur les autres revenus, selon la méthode dite du taux effectif prévue à l'article 197 C du code général des impôts aux termes duquel : L'impôt dont le contribuable est redevable en France sur les revenus autres que les traitements et salaires exonérés en vertu des dispositions des I et II de l'article 81 A est calculé au taux correspondant à l'ensemble de ses revenus, imposables et exonérés ;
Considérant cependant que, d'une part, l'article 197 C précité est issu de l'article 9 de la loi n°76-1234 du 29 décembre 1976 modifiant les règles de territorialité et les conditions d'imposition des français de l'étranger ainsi que les autres personnes non domiciliées en France ; que, selon son article 17, ladite loi s'applique sous réserve des conventions internationales ; que, d'autre part, aux termes de l'article 24 de la convention conclue le 5 octobre 1989 entre la France et l'Italie : La double imposition est évitée de la manière suivante : 1. Dans le cas de la France : a) les bénéfices et autres revenus positifs qui proviennent d'Italie et qui y sont imposables conformément aux dispositions de la convention, sont également imposables en France lorsqu'ils reviennent à un résident de France. L'impôt italien n'est pas déductible pour le calcul du revenu imposable en France. Mais le bénéficiaire a droit à un crédit d'impôt imputable sur l'impôt français dans la base duquel ces revenus sont compris. Ce crédit d'impôt est égal : ... - pour tous les autres revenus, au montant de l'impôt français correspondant... ; que, par suite, les dispositions de l'article 197 C du code général des impôts dont le ministre
revendique l'application ne sont pas applicables en l'espèce ; que les conclusions subsidiaires susrappelées du recours doivent dès lors être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est seulement fondé à demander l'annulation des articles 2 et 3 du jugement qu'il attaque et à la réformation de l'article 4 en ce qu'il concerne l'année 1992 ;
Sur les conclusions relatives aux frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant, en premier lieu, qu'en conséquence de ce qui vient d'être dit, c'est à tort que, par application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, alors en vigueur, le tribunal administratif a jugé qu'il y avait lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à M. X la somme de 10 000 francs au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que l'article 5 du jugement attaqué doit, par suite, être annulé ;
Considérant, en second lieu, que, par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à M. X la somme qu'il demande devant la Cour au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : M. et Mme René X sont rétablis aux rôles de l'impôt sur le revenu au titre des années 1990 et 1991 à raison de l'intégralité des droits et pénalités qui leur ont été assignés.
Article 2 : Les bases de l'impôt sur le revenu assignées à M. et Mme X au titre de l'année 1992 comprennent les rémunérations relatives à l'emploi exercé en Italie et les sommes réintégrées à raison des frais de double résidence.
Article 3 : Les articles 2 et 3 du jugement n° 95-5116 et autres en date du 25 février 1999 du tribunal administratif de Lille sont annulés.
Article 4 : L'article 4 du même jugement est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 2 du présent arrêt.
Article 5 : L'article 5 du même jugement est annulé.
Article 6 : Le surplus des conclusions du recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est rejeté.
Article 7 : Les conclusions de M. René X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et à M. René X.
Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.
Délibéré à l'issue de l'audience publique du 23 mars 2004 dans la même composition que celle visée ci-dessus.
Prononcé en audience publique le 6 avril 2004.
Le rapporteur
Signé : D. Brin
Le président de chambre
Signé : J.F.Gipoulon
Le greffier
Signé : G. Vandenberghe
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
Le Greffier
G. Vandenberghe
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N°99DA01494