Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2001 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société civile immobilière C.A.N.F., dont le siège social est 27, rue de Louviers à Acquigny (27400), représentée par M. X, gérant ; la société civile immobilière C.A.N.F. demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9900200 du 5 avril 2001 par lequel le vice-président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande en décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1997 et 1998 à raison d'un immeuble situé ... ;
2°) d'annuler la décision de nomination des commissaires siégeant à la commission communale des impôts directs ainsi que la délibération de ladite commission ;
3°) de prononcer la décharge demandée ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4 500 francs au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
Code C Classement CNIJ : 19-03-03-01
Elle soutient que le tribunal a méconnu la jurisprudence du Conseil d'Etat du 8 avril 1998 nos 140458 et 167473 (Cardot) ; que le jugement est entaché de défaut de motivation ; que les commissaires siégeant à la commission communale des impôts directs ont été nommés irrégulièrement ; que ladite commission était irrégulièrement établie, composée et présidée ; que les décisions de ladite commission ne lui sont donc pas opposables ; qu'aucune forclusion ne peut lui être opposée ; que, par suite, la valeur locative en cause ne peut pas lui être opposée ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 décembre 2001, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui conclut au rejet de la requête ; il expose que la commission communale était régulièrement composée le 8 juin 1971 et a fonctionné régulièrement ; que les contestations relatives aux éléments d'évaluation déterminés dans les opérations de révision ne pouvaient être présentées que dans les trois mois suivant l'affichage réalisé le 5 décembre 1972 ; que le caractère prétendument illégal de la composition de cette commission ne peut justifier un dégrèvement ; que la partie perdante ne peut bénéficier du remboursement des frais d'instance ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 21 janvier 2002, par lequel la société civile immobilière C.A.N.F. reprend les conclusions de la requête, par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 18 juillet 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, concluant aux mêmes fins que son précédent mémoire, par les mêmes motifs ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 28 août 2003, présenté par la société civile immobilière C.A.N.F. qui conclut aux mêmes fins que ses précédents mémoires, par les mêmes moyens ; elle soutient en outre que l'article 1503-II du code général des impôts méconnaît l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu les pièces du dossier établissant que les parties ont été informées le 27 juin 2003, conformément à l'article R. 611-7 du code de justice administrative ; de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 septembre 2003 où siégeaient Mme de Segonzac, président de chambre, M. Berthoud, président-assesseur et Mme Brenne, premier conseiller :
- le rapport de M. Berthoud, président-assesseur,
- les observations de M. X, gérant de la société civile immobilière C.A.N.F.,
- et les conclusions de M. Michel, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision de nomination des commissaires siégeant à la commission communale des impôts directs ainsi que la délibération de ladite commission :
Considérant que lesdites conclusions présentées dans un litige portant sur des cotisations supplémentaires à la taxe foncière sur les propriétés bâties dont il est demandé la décharge, ne sont pas recevables devant le juge de l'impôt ; que, par suite, elles doivent être rejetées ;
Sur les conclusions en décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles la société civile immobilière C.A.N.F. a été assujettie :
Considérant qu'en soutenant à l'appui desdites conclusions que la valeur locative affectée aux locaux dont elle est propriétaire ne peut lui être opposée au motif que des irrégularités ont entaché notamment la composition de la commission communale des impôts directs qui a établi la liste des locaux de référence et les tarifs correspondants, la société civile immobilière C.A.N.F. doit être regardée comme contestant la régularité des délibérations de ladite commission relatives au choix des locaux-types et à l'évaluation de leur surface pondérée et de leur valeur locative au mètre carré et, par suite, la régularité de la procédure suivie lors des opérations d'évaluation ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 1503 du code général des impôts : Le représentant de l'administration et la commission communale des impôts directs dressent la liste des locaux de référence visés à l'article 1496, déterminent leur surface pondérée et établissent les tarifs d'évaluation correspondants. Le service des impôts procède à l'harmonisation des éléments d'évaluation... Il les notifie au maire qui doit, dans les cinq jours les afficher à la mairie... ; qu'aux termes du II du même article 1503 : Dans les trois mois qui suivent l'affichage, ces éléments peuvent être contestés, tant par le maire, dûment autorisé par le conseil municipal, que par les propriétaires et les locataires à la condition que les réclamants possèdent ou tiennent en location plus du dixième du nombre total des locaux de la commune ou du secteur de commune intéressé, chaque local n'étant compté qu'une seule fois. La contestation est soumise à la commission départementale prévue à l'article 1651 qui statue définitivement ; qu'il résulte de ces dispositions, lesquelles sont opposables à tout contribuable assujetti à la taxe foncière sur les propriétés bâties et non pas uniquement aux propriétaires des locaux choisis comme référence, que les opérations de détermination et d'évaluation des locaux de référence ne peuvent être contestées que dans les trois premiers mois de l'affichage prévu à l'article 1503-II et que, si un contribuable est en droit de contester, à l'occasion d'une demande en décharge de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle il a été assujetti, le bien-fondé de la valeur locative affectée par le service à son immeuble, il ne peut cependant, à l'expiration de ce délai de trois mois, présenter à l'appui de sa contestation des moyens tirés de la procédure suivie lors des opérations d'évaluation ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le tableau des locaux de référence et les tarifs d'évaluation de ces locaux, prévus par les dispositions précitées du I de l'article 1403 du code général des impôts, ont été affichés à la porte de la mairie de Rouen le 5 décembre 1972 ; qu'ils ont été ainsi portés à la connaissance du public dans des conditions conformes à ces dispositions ; que la société requérante n'a pas contesté les éléments dont s'agit dans le délai et les formes prévus à l'article 1503-II précité ; qu'elle n'est, dès lors, pas recevable à se prévaloir des irrégularités qui auraient entaché la procédure suivie lors des opérations d'évaluation ;
Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier la portée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société civile immobilière C.A.N.F. n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa réclamation soumise d'office au tribunal ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la société civile immobilière C.A.N.F. la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Sur l'amende :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende qui ne peut excéder
3 000 euros ; qu'en l'espèce la requête de la société civile immobilière C.A.N.F. présente un caractère abusif ; qu'il y a lieu de condamner la société civile immobilière C.A.N.F. à payer une amende de 500 euros ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société civile immobilière C.A.N.F. est rejetée.
Article 2 : La société civile immobilière C.A.N.F. est condamnée à payer une amende de
500 euros.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière C.A.N.F., au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au trésorier-payeur général du Nord.
Copie sera adressée au directeur de contrôle fiscal du Nord.
Délibéré à l'issue de l'audience publique du 9 septembre 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.
Prononcé en audience publique le 23 septembre 2003.
Le rapporteur
Signé : J. Berthoud
Le président de chambre
Signé : M. de Segonzac
Le greffier
Signé : P. Lequien
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
Le greffier
Philippe Lequien
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N°01DA00549