Vu la requête, enregistrée le 13 janvier 2000, présentée par M. et Mme Faraj X, demeurant ... ; M. et Mme Faraj X demandent à la Cour :
1') d'annuler le jugement du 9 novembre 1999 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a, premièrement, prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête
n° 98-2527, deuxièmement, rejeté leur demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis au titre des années 1994 et 1995 ainsi que des pénalités dont ils ont été assortis et, troisièmement, rejeté la contestation qu'ils ont formée à la suite du commandement décerné à leur encontre par le receveur-percepteur de Compiègne pour avoir paiement des impositions susmentionnées ;
2') de prononcer la décharge demandée ;
3°) d'ordonner à l'administration le remboursement des sommes versées par eux ainsi que le paiement des intérêts au taux légal ;
Code C Classement CNIJ : 19-04-01-02-03-04
19-01-05-01-03
Ils soutiennent qu'ils ont produit les justificatifs démontrant l'état de besoin de leurs parents respectifs et la réalité des versements effectués ; qu'ils étaient fondés à déduire les sommes en cause, conformément aux dispositions de l'article 156 du code général des impôts ; que le dégrèvement accordé au titre de l'année 1996 constitue une prise de position formelle opposable à l'administration ; que c'est à tort que les premiers juges ont prononcé un non-lieu à statuer sur la requête n° 98-2527 ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 28 décembre 2000, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (direction générale des impôts), tendant au rejet de la requête ; le ministre soutient que le service d'assiette était compétent pour examiner la réclamation du 18 avril 1998 de M. et Mme Faraj X ; que le dégrèvement accordé au titre de l'année 1996 ne saurait être regardé comme une prise de position formelle de l'administration, au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ; que les requérants ne justifient ni de l'état de besoin dans lequel se seraient trouvées les personnes bénéficiaires des sommes litigieuses ni de la réalité des versements ;
Vu le mémoire en réplique enregistré le 7 juin 2001, présenté pour M. et Mme Faraj X, par la société civile professionnelle d'avocats Bournilhas-Citron-Mirande, tendant aux mêmes fins que la requête et, en outre, à la condamnation de l'Etat à leur verser la somme de 8 000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, par les mêmes moyens et, en outre par les moyens que le rejet de l'administration, par lettre en date du 18 août 1998, de leur réclamation du 4 août 1998, est seulement motivé par référence au rejet de la réclamation du 18 avril 1998 adressée au service du recouvrement et transmise par celui-ci au directeur des services fiscaux de l'Oise ; que l'administration aurait dû se prononcer sur cette nouvelle réclamation et le tribunal administratif statuer sur celle-ci ; que cette réclamation, même postérieure, à laquelle était associée une demande de sursis de paiement, rendait sans effet le commandement de payer du 10 juin 1998 ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 19 juillet 2001, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (direction générale des impôts), tendant au rejet de la requête ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 11 juin 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (direction générale de la comptabilité publique), tendant au rejet de la requête ; le ministre soutient qu'à la date du commandement de payer les époux X n'avaient pas demandé le sursis légal de paiement ; que si la seconde réclamation comportait une telle demande, celle-ci, postérieure à l'acte de poursuite, n'avait pas été enregistrée comme tel par le service d'assiette ;
Vu le mémoire en réplique enregistré le 27 août 2003, présenté pour M. et Mme Faraj X, tendant aux mêmes fins que leur précédent mémoire en réplique, par les mêmes moyens et, en outre, par le moyen que la procédure d'imposition concernant l'année 1996 est irrégulière dès lors que la deuxième notification de redressements du 21 juin 1999 est antérieure à la décision de dégrèvement ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 29 août 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (direction générale des impôts), tendant au rejet de la requête, par les mêmes motifs et, en outre, par le motif que la circonstance que l'imposition de l'année 1996 aurait été irrégulièrement émise est sans incidence sur le litige qui porte sur des années antérieures ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 septembre 2003 où siégeaient M. Gipoulon, président de chambre, M. Nowak, premier-conseiller et Mme Eliot, conseiller :
- le rapport de Mme Eliot, conseiller,
- et les conclusions de M. Paganel, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 196-3 du livre des procédures fiscales : Dans le cas où un contribuable fait l'objet d'une procédure de reprise ou de redressement de la part de l'administration des impôts, il dispose d'un délai égal à celui de l'administration pour présenter ses propres réclamations ; qu'aux termes de l'article R. 199-1 du même livre : L'action doit être introduite devant le tribunal compétent dans le délai de deux mois à partir du jour de la réception de l'avis par lequel l'administration notifie au contribuable la décision prise sur sa réclamation... ; que par ces dispositions, le pouvoir réglementaire a voulu accorder aux redevables, d'une part, le droit de présenter des réclamations contre les impositions auxquelles ils sont assujettis, jusqu'à l'expiration du délai imparti par l'article R. 196-3 précité du livre des procédures fiscales, d'autre part, de saisir le tribunal administratif de chacune des décisions prises sur lesdites réclamations ; qu'il suit de là que si une réclamation antérieure contre la même imposition a déjà été rejetée par le directeur, la décision qui a rejeté une nouvelle réclamation ne peut être considérée comme confirmative du rejet de cette réclamation ; qu'également, en l'absence de jugement préalable ayant l'autorité de la chose jugée sur la décision prise sur la réclamation antérieure, le recours formé contre la décision ayant rejeté cette nouvelle réclamation ne saurait être regardé, dans le jugement statuant sur lesdites décisions, comme étant devenu sans objet ;
Considérant qu'en vertu de ce qui précède, le tribunal administratif, après avoir joint les requêtes n° 98-1940 et n° 98-2527 de M. et Mme Faraj X introduites respectivement à la suite des décisions rejetant les réclamations en date des 18 avril 1998 et 4 août 1998 et tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis au titre des années 1994 et 1995, n'a pu, en tout état de cause, pour déclarer sans objet la requête n° 98-2527, par voie de conséquence du rejet des conclusions de la requête n° 98-1940, se fonder sur ce que la lettre susmentionnée du 4 août 1998 ne pouvait être regardée comme étant une nouvelle réclamation ; qu'il suit de là que le jugement doit être annulé en tant qu'il a prononcé un non-lieu sur les conclusions de la requête n° 98-2527 ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la requête n° 98-2527 et d'examiner, par l'effet dévolutif de l'appel, les moyens soulevés par
M. et Mme Faraj X dans les autres requêtes ;
Sur les impositions litigieuses :
En ce qui concerne la procédure d'imposition :
Considérant que les vices qui entachent la décision par laquelle la réclamation est rejetée sont sans influence sur le bien-fondé de l'imposition contestée ; qu'il suit de là que le moyen invoqué par M. et Mme Faraj X tiré de ce que l'administration aurait irrégulièrement motivé la décision du 18 août 1998 rejetant leur réclamation est, en tout état de cause, inopérant ;
Considérant que le moyen invoqué par les requérants tiré du caractère irrégulier de la procédure d'imposition concernant l'année 1996 qui n'est pas en litige, est inopérant ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
Considérant, en premier lieu, que selon les dispositions de l'article 156-II-2° du code général des impôts, pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, le revenu net est déterminé sous déduction des pensions alimentaires répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211 et 367 du code civil ; que, pour pouvoir bénéficier de cette déduction, le contribuable doit prouver notamment la réalité de l'existence et du montant des sommes qu'il prétend avoir versées à titre de pensions alimentaires ; que si M. et Mme Faraj X soutiennent avoir versé à ce titre, au cours des années 1994 et 1995 à leurs parents qui résidaient au Liban, respectivement les sommes de 60 000 francs et 45 000 francs et produisent au dossier, d'une part, des attestations selon lesquelles les parents de ceux-ci seraient à leur charge, d'autre part, des bordereaux de transfert de 60 000 francs, 35 000 francs et 10 000 francs en date des 1er juin 1994,
27 janvier 1995 et 30 septembre 1995, au bénéfice de M. Abdul Y , ces documents ne suffisent pas, comme l'ont estimé les premiers juges, à constituer la preuve de la réalité des versements d'espèces prétendus en litige ;
Considérant, en second lieu, que M. et Mme Faraj X ne peuvent utilement invoquer la décision, non motivée, de dégrèvement dont ils ont bénéficié au titre de l'année 1996 dès lors que celle-ci n'a pas constitué une interprétation formelle de la loi fiscale qui soit opposable à l'administration en vertu des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme Faraj X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande en décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis au titre des années 1994 et 1995 ;
Sur le commandement de payer :
Considérant qu'il résulte des articles L. 277 et R. 277-1 du livre des procédures fiscales que les impositions contestées par un contribuable qui a assorti sa réclamation d'une demande régulière de sursis de paiement cessent d'être exigibles à compter de la date de cette demande ; que par suite, et dans l'hypothèse où un acte de poursuite a été antérieurement décerné pour le recouvrement des impositions contestées, celui-ci devient caduc à compter de la date à laquelle les impositions ont cessé d'être exigibles ; qu'il appartient au comptable, si ces impositions redeviennent par la suite exigibles, de délivrer un nouvel acte de poursuite afin de poursuivre le recouvrement de celles-ci ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la réclamation adressée par
M. et Mme Faraj X aux services fiscaux le 5 août 1998, pour contester les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1994 et 1995 était assortie d'une demande de sursis de paiement ; que si ces impositions étaient encore exigibles lorsque le receveur-percepteur de Compiègne a notifié aux intéressés, le 10 juin 1998, le commandement de payer lesdites impositions, les requérants sont toutefois fondés à demander la réformation du jugement attaqué en tant qu'il n'a pas fixé, à la date de réception par le service d'assiette de la réclamation de M. et Mme Faraj X, la caducité du commandement ;
Sur les conclusions tendant au remboursement des sommes versées par les requérants :
Considérant qu'il n'appartient pas au juge, en tout état de cause, d'ordonner à l'administration de rembourser aux requérants les montants des impositions litigieuses qu'ils auraient acquittées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. et Mme Faraj X tendant au remboursement des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du
9 novembre 1999 est annulé.
Article 2 : L'obligation de payer dont procède le commandement de payer du 10 juin 1998 est devenue caduque le 5 août 1998.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 2 de la présente décision.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Faraj X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (direction générale des impôts et direction générale de la comptabilité publique).
Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal Nord.
Délibéré à l'issue de l'audience publique du 4 septembre 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.
Prononcé en audience publique le 16 septembre 2003.
Le rapporteur
Signé : A. Eliot
Le président de chambre
Signé : J.F Gipoulon
Le greffier
Signé : M.T. Lévèque
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
Le greffier
Marie-Thérèse Lévèque
N°00DA00079 7