Vu la requête, enregistrée le 6 février 2001 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Lisette X, demeurant ..., M. Daniel X, demeurant ..., Mme Gisèle X, demeurant ..., M. Christian X, demeurant ..., Mme Lysiane X demeurant ..., Mme Nadine X demeurant ..., M. Dominique X, demeurant ..., par la SCP Julia et Chabert, avocats ; les consorts X demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 99-954 en date du 29 novembre 2000 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à ce que le centre hospitalier universitaire de Rouen soit condamné à les indemniser du fait du préjudice que leur a causé le décès de leur époux et père, M. Robert X ;
2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Rouen à verser, d'une part, à Mme Lisette X, les sommes de 100 000 francs au titre des souffrances subies par son époux et de 100 000 francs au titre de son préjudice moral, et, d'autre part, à chacun des enfants, la somme de 100 000 francs au titre du préjudice moral qu'ils ont subi ;
3°) de condamner ledit centre hospitalier à leur régler la somme de 20 000 francs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Code C Classement CNIJ : 60-02-01-01-01-02
60-04-01-03-01
Ils soutiennent que M. Robert X ayant été victime d'une infection nosocomiale par le germe du candida tropicalis lors de son hospitalisation en juillet 1997 au centre hospitalier universitaire de Rouen, la responsabilité de cet établissement s'en trouve, dès lors, engagée ; que les préjudices dont l'indemnisation est demandée sont justifiés ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 mai 2001, présenté pour le centre hospitalier universitaire de Rouen, ayant son siège 1, rue de Germont à Rouen (76000), représenté par son directeur en exercice, par la SCP Emo-Hébert et associés, avocats ; le centre hospitalier universitaire conclut au rejet de la requête ; il soutient que le décès de M. X, qui souffrait d'un cancer hépatique évoluant en phase terminale, a résulté de la rupture de l'équilibre biologique et bactérien dû à l'état de santé extrêmement précaire du patient ; qu'en toute hypothèse, les chances de survie de M. X étaient des plus réduites, compte tenu de sa pathologie ;
Vu le mémoire, enregistré le 19 juillet 2001, présenté pour les consorts X et tendant aux mêmes fins que leur requête, par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 5 octobre 2001, présenté pour le centre hospitalier universitaire de Rouen et tendant aux mêmes fins que son mémoire précédent, par les mêmes motifs ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale :
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2003 où siégeaient Mme Fraysse, président de chambre, M. Laugier, président-assesseur et M. Nowak, premier conseiller :
- le rapport de M. Laugier, président-assesseur,
- les observations de Me Jegu, avocat, membre de la SCP Julia-Chabert, pour les consorts X, et de Me Campergue, avocat, membre de la SCP Emo-Hébert pour le centre hospitalier universitaire de Rouen,
- et les conclusions de M. Michel, commissaire du gouvernement ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Robert X, âgé de 76 ans et atteint d'un cancer de l'estomac en cours d'extension au foie, a été opéré au centre hospitalier universitaire de Rouen le 4 juillet 1997 où ont été pratiquées une exérèse gastrique distale palliative et une exérèse hépatique partielle ; qu'à la suite de diverses complications et notamment de l'apparition d'une fistule, M. X a été de nouveau opéré le 21 juillet 1997 puis le 30 juillet suivant, à raison de la persistance de la fistule ; que des hémocultures réalisées le 4 août ont montré la présence d'une infection à candida tropicalis, laquelle, en dépit des traitements notamment antibiotiques appropriés, évoluera en septicémie dont M. X décèdera le 16 août 1997 ;
Considérant que, si Mme X et ses enfants soutiennent que le décès est imputable à l'infection d'origine nosocomiale contractée lors de son hospitalisation, il résulte du rapport d'expertise judiciaire établi par le docteur Le Baron, que les candida tropicalis sont des germes ubiquitaires et commensaux tenus en équilibre habituellement chez l'homme et dont le développement pathogène est favorisé par la baisse des réactions immunitaires et par l'antibiothérapie d'autant qu'elle est polyvalente, c'est-à-dire à large spectre et prolongée, ce qui a été le cas chez M. X ; que l'expert précise que la baisse de réaction immunitaire est évidente chez ce malade cancéreux ayant subi plusieurs interventions et que la rupture d'équilibre biologique, bactérien, provient de l'éradication des bactéries par les antibiotiques laissant ainsi le champ libre aux levures et champignons ; que, par suite, dans les circonstances de l'affaire, l'infection dont a été atteint M. X, quant bien même s'est-elle développée à l'hôpital, ne peut être regardée comme révélant une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service public hospitalier, eu égard à l'état général du patient et aux pathologies en phase terminale précédemment rappelées ; qu'il résulte de ce qui précède que les consorts X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande de condamnation dirigée contre le centre hospitalier régional universitaire de Rouen ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le centre hospitalier régional universitaire de Rouen, qui n'est pas la partie perdante en l'instance, soit condamné à payer aux consorts X la somme que ceux-ci demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme Lisette X, M. Daniel X, Mme Gisèle X, M. Christian X, Mme Lysiane X, Mme Nadine X et M. Dominique X est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Lisette X, M. Daniel X, Mme Gisèle X, M. Christian X, Mme Lysiane X, Mme Nadine X, M. Dominique X, au centre hospitalier régional universitaire de Rouen, à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Eure ainsi qu'au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
Délibéré à l'issue de l'audience publique du 3 juin 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.
Prononcé en audience publique le 17 juin 2003.
Le rapporteur
Signé : L-D Laugier
Le président de chambre
Signé : G. Fraysse
Le greffier
Signé : M.T. Lévèque
La République mande et ordonne au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
Le greffier
Marie-Thérèse Lévèque
N°01DA00123 5