Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 2 juin 2002, présentée pour M. Joël Y demeurant ..., Mme Catherine Z, demeurant ..., Mme Christine F demeurant ..., Mmes Isabelle G et Philippa C et la SNC de la Chaussée demeurant 61, rue de la Chaussée à Chauny (02300), M. Luc H demeurant ... et Mme Annick E demeurant ..., par Me Véronique Michel, avocat ; M. Joël Y, Mme Catherine Z, Mme Christine F, Mmes Isabelle G et Philippa C et la SNC de la Chaussée, M. Luc H et Mme Annick E demandent à la Cour :
1'' d'annuler le jugement n° 02-422, 02-425, 02-427, 02-428, 02-429, 02-430, 02-434, 02-435, 02-437, 02-438, 02-504 et 02-506 du 23 mai 2002 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs requêtes tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 15 janvier 2002 par lequel le préfet de l'Aisne a autorisé M. Olivier X à créer une officine de pharmacie sur le territoire de la commune d'Ognes ;
2'' de condamner l'Etat à leur verser la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Code C Classement CNIJ : 55-03-04-01
Ils soutiennent qu'ils ont intérêt à agir à l'encontre de la décision attaquée qui leur cause un préjudice ; que les habitants de la commune d'Ognes s'approvisionnent auprès des officines de Chauny ; que c'est par erreur que la commune d'Ognes n'a pas été rattachée à celle de Chauny ; que le dossier de la demande présentée par M. X comporte d'importantes lacunes ; que la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que la commune d'Ognes n'est pas un centre d'approvisionnement ; que la création d'une nouvelle officine à moins de 600 mètres de Chauny sans avoir tenu compte de l'évolution des populations qui n'a pas progressé est inopportune ; que les populations concernées sont suffisamment desservies ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu, enregistré au greffe le 25 juillet 2002, le mémoire en défense présenté par le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées et concluant au rejet de la requête ; il soutient que les requérants n°apportent aucun élément susceptible de modifier les écritures produites en première instance ;
Vu, enregistré au greffe le 5 août 2002, le mémoire en défense présenté par M. Olivier X et concluant au rejet de la requête et à la condamnation de M. Joël Y, Mme Catherine Z, Mme Christine F, Mmes Isabelle G et Philippa C et la SNC de la Chaussée, M. Luc H et Mme Annick E à lui verser chacun la somme de 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que, si les requérants soutiennent que le projet autorisé mettrait en péril l'exploitation des pharmacies de Chauny, ils ne le justifient pas ; que la population de la commune d'Ognes est inférieure à 2 500 habitants ; que les communes retenues par l'arrêté préfectoral attaqué sont dépourvues de pharmacies et leur population n'a pas été prise en compte pour la création d'officine dans une autre commune ; que la décision attaquée applique le critère de contiguïté imposé par la loi et non celui lié aux besoins des habitants existant antérieurement ; que les moyens fondés sur les notions de centre d'approvisionnement et d'attractivité ne peuvent qu'être rejetés ; que le dossier de sa demande était complet ; que le préfet n'était pas tenu de se conformer à l'avis défavorable émis par l'ordre des pharmaciens ; que l'autorisation a été accordée dans le respect des conditions prévues par la loi du 27 juillet 1999 ;
Vu, enregistré au greffe le 17 février 2003, le mémoire en réplique, présenté pour M. Joël Y, Mme Catherine Z, Mme Christine F, Mmes Isabelle G et Philippa C et la SNC de la Chaussée, M. Luc H et Mme Annick E et tendant aux mêmes fins par les mêmes moyens ;
Vu, enregistré au greffe le 21 février 2003, le mémoire complémentaire présenté pour M. Olivier X, par Me Hélène Farge, avocate, et concluant au rejet de la requête par les mêmes motifs ; il demande, en outre, la condamnation de Mmes E, F, Z, G et C et de MM. Y et H à lui verser la somme de 2 400 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu l'ordonnance en date du 9 janvier 2003 fixant la clôture d'instruction au 21 février 2003 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'arrêté en date du 21 mars 2000 fixant la liste des pièces justificatives devant être jointes à une demande de création des transfert ou de regroupement d'officines de pharmacie ;
Vu le code de la santé ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2003 où siégeaient Mme Sichler, président de chambre, Mme Merlin-Desmartis, président-assesseur et M. Quinette, premier conseiller :
- le rapport de M. Quinette, premier conseiller,
- les observations de M. Joël Y, Mme Catherine Z, Mme Christine F, Mme Isabelle G, requérants et de M. Olivier X, défendeur,
- et les conclusions de M. Yeznikian, commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité de l'autorisation de création d'une officine de pharmacie :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 5089-1, deuxième alinéa, du code de la santé publique : La demande est accompagnée d'un dossier comportant : (...) la localisation de l'officine projetée (...) La liste des pièces justificatives correspondantes est fixée par un arrêté du ministre chargé de la santé ; qu'aux termes de l'article 1° de l'arrêté du 21 mars 2000 susvisé : Pour toute demande de création d'une officine de pharmacie, le dossier prévu à l'article R. 5089-1 du code de la santé publique comporte : (...) 5° (...) Pour les communes de moins de 2 500 habitants : - la liste des communes contiguës dépourvues d'officines dont la desserte est revendiquée et des documents cartographiques faisant apparaître la zone géographique d'implantation ; - le secteur d'implantation proposé dans la commune ; - les officines existantes les plus proches ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que, contrairement à ce qui est soutenu par les requérants, l'autorisation de création d'une officine de pharmacie accordée le 15 janvier 2002 par le préfet de l'Aisne l'a été au vu d'une demande présentée par M. Olivier X qui comportait les documents cartographiques exigés par les dispositions précitées de l'article 1° de l'arrêté ministériel en date du 21 mars 2000 ;
Considérant, en deuxième lieu, que si la décision de création d'une officine de pharmacie est prise, en application de l'article L. 5125-4 du code de la santé publique, par le représentant de l'Etat dans le département après avis des syndicats représentatifs de la profession et du conseil régional de l'ordre des pharmaciens, il n'est pas exigé que cet avis soit conforme ; que le moyen tiré de l'existence d'avis défavorables rendus par le syndicat des pharmaciens de l'Aisne et de l'ordre des pharmaciens de Picardie est, par suite, inopérant ;
Considérant, en troisième lieu, que la circulaire du 5 janvier 2000 du ministre chargé de la santé est dépourvue de caractère réglementaire ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la demande de création d'officine de pharmacie présentée par M. X aurait été instruite et l'autorisation accordée en méconnaissance de cette circulaire est inopérant ;
Considérant, en quatrième lieu, que la légalité de l'arrêté préfectoral qui autorise la création d'une officine de pharmacie n'est pas subordonnée à la présence en annexe de cet arrêté d'une carte permettant de situer les choix préfectoraux de création de pharmacies ;
Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 5125-12 du code de la santé publique : 'Pour les communes de moins de 2 500 habitants disposant d'au moins une officine à la date du 28 juillet 1999, un arrêté du représentant de l'Etat dans le département détermine, pour chacune de ces officines, la ou les communes desservies par cette officine, après avis d'une commission qui comprend des représentants de l'administration et des professionnels. Seuls peuvent être retenues les communes dont au moins 50 % des habitants sont desservis par l'officine de manière satisfaisante. Dans ce cas, la totalité des habitants de la commune est considérée comme desservie par l'officine pour l'application de l'alinéa ci-dessus'. ;
Considérant que les dispositions susvisées qui ne concernent que les communes comportant moins de 2 500 habitants disposant d'au moins une officine à la date du 28 juillet 1999 ne sont pas applicables en l'espèce et ne peuvent, par suite, être utilement invoquées ;
Considérant, en sixième lieu, que la circonstance invoquée par les requérants selon laquelle la commune d'Ognes sur le territoire de laquelle la pharmacie litigieuse a été autorisée ne constituerait pas un centre d'approvisionnement est inopérante dès lors que ce critère ne figure pas au nombre de ceux au vu desquels l'autorisation sollicitée par M. X pouvait être accordée ou refusée ;
Considérant, en septième lieu, qu'aux termes de l'article L. 5125-4, premier alinéa, du code de la santé publique : 'Toute création d'une nouvelle officine, tout transfert d'une officine et tout regroupement d'officines sont subordonnés à l'octroi d'une licence délivrée par le représentant de l'Etat dans le département selon les critères prévus aux articles L. 5125-11, L. 5125-13, L. 5125-14 et L. 5125-15 ; qu'aux termes de l'article L. 5125-11, sixième alinéa, dudit code : 'Dans les communes de moins de 2 500 habitants dépourvues d'officine et dont la population n°a pas été ou n°est plus prise en compte pour une création d'officine dans une autre commune, une création peut être accordée dans une zone géographique constituée d'un ensemble de communes contiguës, si la totalité de la population de cette zone est au moins égale à 2 500 habitants. Le représentant de l'Etat dans le département précise, dans sa décision, les communes prises en compte pour l'octroi de la licence. La totalité de la population de ces communes est considérée comme desservie par la nouvelle création ;
Considérant que les communes d'Ognes, Abbecourt, Béthancourt-en-Vaux, Caumont, Commenchon, Marest-Dampcourt et Neuflieux dont la population est inférieure au seuil de 2 500 habitants sont dépourvues d'officine ; qu'il ressort des pièces du dossier que la population d'aucune de ces communes n'a été prise en compte pour une création dans une autre commune ; que, pour accorder à M. X l'autorisation de créer une officine de pharmacie, le préfet de l'Aisne a, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 5125-11 du code de la santé publique, retenu une zone géographique regroupant les sept communes précitées, qui sont contiguës et dont la totalité de la population est de 2 982 habitants ; qu'en autorisant cette officine sur le territoire d'Ognes qui est la commune la plus peuplée au sein de cette zone géographique et qui dispose d'un centre médical et en fixant son emplacement en bordure d'une rue aisément accessible pour l'ensemble des habitants de cette même zone, le préfet de l'Aisne, nonobstant la proximité de Chauny où sont exploitées six officines, n'a pas commis d'erreur dans l'appréciation des besoins de la population ;
Considérant, en dernier lieu, que si l'article L. 5215-6 du code de la santé publique charge le préfet de fixer l'emplacement où sera exploitée une future officine, les dispositions de cet article ne lui font pas obligation d'imposer une distance minimale entre deux officines ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs requêtes ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n°y a pas lieu à cette condamnation ; que ces dispositions font obstacle à ce que M. Olivier X qui n°est pas la partie perdante dans la présente instance soit condamné à verser aux requérants la somme qu'ils demandent au titre des frais qu'ils ont exposés et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. Joël Y, Mme Catherine Z, Mme Christine F, Mmes Isabelle G et Philippa C, la SNC de la Chaussée, M. Luc H et Mme Annick E à verser à M. Olivier X la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. Joël Y, Mme Catherine Z, Mme Christine F, Mmes Isabelle G et Philippa C, la SNC de la Chaussée, M. Luc H et Mme Annick E est rejetée.
Article 2 : M. Joël Y, Mme Catherine Z, Mme Christine F, Mmes Isabelle G et Philippa C, la SNC de la Chaussée, M. Luc H et Mme Annick E verseront à M. Olivier X une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Joël Y, Mme Catherine Z, Mme Christine F, Mmes Isabelle G et Philippa C, la SNC de la Chaussée, M. Luc H et Mme Annick E, M. Olivier X et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
Copie sera transmise au préfet de l'Aisne.
Délibéré à l'issue de l'audience publique du 3 avril 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.
Prononcé en audience publique le 29 avril 2003.
Le rapporteur
Signé : J. Quinette
Le président de chambre
Signé : F. Sichler
Le greffier
Signé : M. Milard
La République mande et ordonne au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
Le greffier
M. Milard
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N°02DA00476