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21/03/2024 | FRANCE | N°21BX04208

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 1ère chambre, 21 mars 2024, 21BX04208


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... B..., M.Stéphane B..., Mme D... B..., Mme A... B... et la SCEA Château Bourgneuf B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Pomerol a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la " décision implicite du 26 septembre 2014 accordant un permis de construire à la SARL Groupe Clinet " à la suite de sa demande du 22 mai 2014 et d'annuler ce permis de construire tacite.



Par un jugement n° 1903931 du 16 septembre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B..., M.Stéphane B..., Mme D... B..., Mme A... B... et la SCEA Château Bourgneuf B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Pomerol a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la " décision implicite du 26 septembre 2014 accordant un permis de construire à la SARL Groupe Clinet " à la suite de sa demande du 22 mai 2014 et d'annuler ce permis de construire tacite.

Par un jugement n° 1903931 du 16 septembre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé le permis de construire tacite né le 25 septembre 2014 au bénéfice de la SARL Groupe Clinet.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 16 novembre 2021, le 31 octobre 2022, le 3 janvier 2023 et le 4 mai 2023, ainsi qu'un mémoire récapitulatif enregistré le 7 juin 2023, la SARL Groupe Clinet, représentée par Me Poulain et Me Leconte, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 septembre 2021 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) de rejeter la demande des consorts B... et de la SCEA Château Bourgneuf B... ;

3°) de rejeter l'appel incident présenté par les consorts B... et la SCEA Château Bourgneuf B... ;

4°) à titre subsidiaire de surseoir à statuer en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme afin de lui permettre de régulariser le permis de construire litigieux ;

5°) de supprimer en application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative, les passages litigieux des mémoires responsifs n°1 et 2 des consorts B... et la SCEA Château Bourgneuf B... enregistrés le 5 juillet 2022 et le 13 mars 2023 ;

6°) de condamner à raison des propos diffamants tenus les consorts B... et la SCEA Château Bourgneuf B... à lui verser une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 741-3 du code de justice administrative ;

7°) de mettre à la charge des consorts B... et de la SCEA Château Bourgneuf B... une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il n'a pas examiné le moyen tiré de l'atteinte au principe de sécurité juridique ;

- les requérants ne démontrent pas disposer d'un intérêt à agir au sens de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme lequel doit s'apprécier uniquement au regard des modifications apportées par le permis modificatif ; leur argumentation concerne l'activité généré par le permis initial, ou par l'activité d'autres exploitations ; en outre ce permis a pour objet de faciliter les manœuvres des camions et la circulation ; l'impact visuel n'est pas modifié par le permis de construire en litige ; le projet ne comporte pas de stationnement poids-lourds supplémentaires ; la capacité de vinification n'est pas augmentée ;

- le recours gracieux et la demande devant le tribunal administratif étaient tardifs en application de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme dès lors que ce permis tacite avait fait l'objet d'un affichage régulier et complet à compter du 15 octobre 2014 ;

- la demande était également tardive au regard de l'article R. 600-3 du code de l'urbanisme dès lors que les travaux étaient terminés depuis le 16 novembre 2015 et qu'ils étaient identiques à ceux autorisés par le permis du 20 octobre 2014, dont l'annulation a fait renaître le permis tacite ;

- admettre la recevabilité de cette demande au-delà du délai de recours raisonnable serait contraire au principe de sécurité juridique ; l'annulation du permis du 20 octobre 2014 qui procédait au retrait du permis tacite a fait renaître ce permis tacite qui n'est donc pas inexistant ; les demandeurs avaient connaissance de l'existence de ce permis tacite dès son affichage et avant l'arrêt de la cour du 13 décembre 2018 ;

- le permis de construire ne méconnaît pas l'article A2 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors que seule doit être prise en compte la teneur du projet et non la qualité du titulaire du projet ; en outre le fait que des constructions à usage agricole puissent servir à d'autres activités ne leur retire pas le caractère de construction nécessaires à l'exploitation agricole ; les bâtiments objet du permis de construire modificatif sont destinés à la vinification qui correspond à une activité agricole et se rattache à l'activité de la SCEA Château Clinet qui représente plus de 60% de son activité ; elle détient 99,99% des parts de la SCEA Château Clinet qui exerce une activité d'exploitant agricole dans les locaux objet du permis en litige ; les locaux correspondant au besoin de l'activité existante et à son développement et n'ont pas consommé de terres agricoles; le juge n'a pas à remettre en cause les choix de gestion de l'exploitant ; la vinification constitue la prolongation d'une activité agricole ;

- à titre subsidiaire, les modifications portant sur la création du parvis et de places de stationnements qui élargissent le chemin communal et sont ouverts à tous peuvent être considérées comme nécessaire aux services publics et d'intérêt collectifs ;

- les nuisances alléguées ne sont pas établies ;

- les autres moyens soulevés par les défendeurs ne sont pas fondés ;

- elle demande la suppression des passages injurieux p 26 du mémoire responsif n°1 et p 29 du mémoire responsif n°2 et n°3 et la condamnation à des dommages et intérêts sur le fondement des articles L. 741-2 et L. 741-3 du code de justice administrative ;

- elle sollicite à titre subsidiaire un sursis à statuer pour lui permettre de régulariser le permis de construire en litige en le transférant à la SCEA Château Clinet.

Par des mémoires en défense enregistrés le 5 juillet 2022 et le 13 mars 2023, et un mémoire non communiqué enregistré le 29 janvier 2024, M. C... B..., M.Stéphane B..., Mme D... B..., Mme A... B... et la SCEA Château Bourgneuf B..., représentés par Me Magret et Me Ciliento, concluent au rejet de la requête et demandent qu'une somme de 15 000 euros soit mise à la charge de la SARL Groupe Clinet ainsi que les entiers dépens.

Ils soutiennent que :

- leur demande est recevable dès lors que leur exploitation est voisine immédiate du projet et que celui-ci a un impact visuel indéniable depuis leur fonds, que la création de places de stationnement va affecter les conditions d'occupation, d'utilisation et de jouissance de leur fonds et créé une gêne en raison du trafic de gros camions double citernes et de la gêne constante générée par l'extension et ce alors que ce permis a pour objet de transformer un bâtiment à usage agricole en bâtiment à usage commercial interdit dans la zone ; le projet engendre une gêne pour leur maison d'habitation ;

- leur demande n'est pas tardive dès lors qu'à la suite du retrait du permis du 20 octobre 2014, le permis initial a été rétabli à compter de la lecture de l'arrêt de la cour d'appel et doit faire l'objet d'un nouvel affichage ; le permis de construire du 20 octobre 2014 résulte d'une demande déposée le 28 septembre 2014, le " permis de construire tacite du 26 septembre 2014 " n'existe donc plus ; en outre, l'affichage du 14 octobre 2014 n'était pas complet ;

- retenir l'application de l'article R. 600-3 reviendrait à priver les tiers de recours dès lors que le permis tacite retiré ne pouvait être attaqué avant l'annulation de la décision explicite le retirant ;

- les autres moyens soulevés ne sont pas fondés ;

- ce projet méconnaît l'article A-1 du plan local d'urbanisme dès lors qu'il ne s'agit pas de constructions nécessaires à l'activité agricole ainsi que cela résulte de l'arrêt du 13 décembre 2018 passé en force de chose jugée ; le permis modificatif a pour objet de modifier la destination du bâtiment pour exercer une activité commerciale ;

- pour les mêmes raisons, il méconnaît l'article A-2 de ce règlement ;

- le transfert du permis de construire à la SCEA Château Clinet n'est pas de nature à permettre une régularisation dès lors que les locaux sont destinés à une activité commerciale et non agricole.

Par une ordonnance du 17 janvier 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er février 2024.

Un mémoire a été enregistré pour la commune de Pomerol le 27 février 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christelle Brouard-Lucas,

- les conclusions de M. Romain Roussel Cera, rapporteur public,

- les observations de Me Leconte et de Me Poulain, représentant la SARL Groupe Clinet, de Me Magret, représentant M. B... et autres et de Me Chudziak, représentant la commune de Pomerol.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Groupe Clinet a déposé le 29 mai 2013 une demande de permis de

construire quatre bâtiments, d'une surface de plancher totale de 2 035 m², comprenant un logement pour le directeur technique, un cuvier et une salle de dégustation, un hangar à tracteurs ainsi qu'un bouteiller, une zone de préparation et d'expédition, et des bureaux sur un terrain situé 4 chemin de Bourgneuf sur le territoire de la commune de Pomerol. Par arrêté du 13 septembre 2013, le maire lui a délivré ce permis de construire, qui est devenu définitif. Le 22 mai 2014, la SARL Groupe Clinet a déposé une nouvelle demande de permis de construire en vue de procéder, d'une part, à la suppression de la maison du directeur technique et du hangar à tracteurs, d'autre part, à l'agrandissement d'un bâtiment existant et enfin à la création d'aires de stationnement supplémentaires. Les pièces complémentaires demandées par le maire ont été déposées en mairie le 25 juin 2014. En l'absence de réponse du maire dans le délai d'instruction de trois mois notifié lors de la demande de pièces, un permis de construire tacite est né au bénéfice de la SARL Groupe Clinet le 25 septembre 2014. L'arrêté du 20 octobre 2014 par lequel le maire a explicitement délivré ce permis de construire, en l'assortissant de prescriptions, a eu pour effet de retirer ce permis de construire tacite. Toutefois, cet arrêté a été annulé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 13 décembre 2018, ce qui a eu pour effet de faire revivre ce permis de construire tacite, dont M. B... et autres ont demandé l'annulation au tribunal administratif de Bordeaux. La SARL Groupe Clinet relève appel du jugement du 16 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif a annulé le permis de construire tacite dont elle était titulaire.

Sur l'intérêt à agir des consorts B... et de la SCEA B... :

2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Lorsque le requérant, sans avoir contesté le permis initial ou après avoir épuisé les voies de recours contre le permis initial, ainsi devenu définitif, forme un recours contre un permis de construire modificatif, son intérêt pour agir doit être apprécié au regard de la portée des modifications apportées par le permis modificatif au projet de construction initialement autorisé. Il appartient dans tous les cas au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées, mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction ou, lorsque le contentieux porte sur un permis de construire modificatif, des modifications apportées au projet.

4. Il ressort du dossier de demande que les travaux prévus par le permis de construire déposé le 22 mai 2014 ont pour objet d'augmenter la surface de plancher du bâtiment situé en première ligne de 170 m2 afin d'agrandir le chai de vinification, de créer un chai à barriques dans ce bâtiment ainsi qu'un parvis de stationnement et de manœuvre le long de la voie publique.

5. D'une part, les consorts B... se prévalent à l'appui de leur demande de leur qualité de propriétaires d'une habitation et d'une exploitation agricole situées en face du bâtiment de la SARL Groupe Clinet et font état de l'impact visuel " indéniable " du projet, de ce que la création de places de stationnement va affecter les conditions d'occupation, d'utilisation et de jouissance de leur bien au regard des nuisances olfactives, sonores et en terme de sécurité ainsi que de la gêne constante générée par le projet du fait de la circulation importante de poids-lourds de grand volume aux abords de leur propriété. Il ressort des pièces du dossier que du fait de la suppression de la maison du directeur technique, le projet ne comporte qu'une augmentation de la surface construite de 3 m2 correspondant à une extension du bâtiment le plus proche de la voie publique sur une largeur de 5 mètres, et que cette construction, haute de 7 mètres en façade, comme le bâtiment existant, est éloignée de la voie publique de 4 mètres de plus que la maison du directeur technique initialement prévue en première ligne qui comportait une hauteur de 7,70 mètres. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'impact visuel du bâtiment depuis la propriété des requérants serait majoré par les travaux autorisées par le permis en litige. Alors que le projet prévoit une augmentation des places de stationnement pour le personnel à l'intérieur du site, que les places de stationnement créées en façade pour la clientèle sont en retrait de la voie publique de plus de 7 mètres et que la création d'un large parvis de manœuvre parallèle à la voie publique permettra d'améliorer les conditions de circulation aux abords du site, il ne ressort pas des pièces du dossier que la création de ces places de stationnement en façade aurait un impact en terme de nuisances sonores, olfactives ou de sécurité pour les consorts B..., leur maison d'habitation se trouvant au surplus séparée du projet par le chai de la SCEA B.... Enfin, au regard du faible agrandissement du centre de vinification, qui correspond à 8% de l'ensemble des surfaces et à une augmentation de 10% du volume de stockage en cuve de vinification, les problèmes de circulation et de dangerosité invoqués du fait de la desserte des installations de la SARL Groupe Clinet par des poids-lourds ne peuvent pas être regardés comme résultant des modifications prévues par le permis attaqué, qui au contraire améliore et sécurise les conditions de desserte du site, mais comme relevant du projet issu du permis de construire initial. Ainsi, au regard de la portée des modifications apportées par le permis en litige au projet de construction initialement autorisé, qui ne peuvent pas être regardées comme de nature à modifier la destination du bâtiment, il ne ressort pas des pièces du dossier que les atteintes invoquées par les consorts B... seraient en lien avec ces modifications et que par suite les travaux ainsi autorisés seraient de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de leur bien. Par suite, ils ne justifient pas d'un intérêt leur donnant qualité pour demander l'annulation du permis de construire modificatif délivré à la SARL Groupe Clignet.

6. D'autre part, en dehors du cas où les caractéristiques particulières de la construction envisagée sont de nature à affecter par elles-mêmes les conditions d'exploitation d'un établissement commercial, ce dernier ne justifie pas d'un intérêt à contester devant le juge de l'excès de pouvoir un permis de construire délivré à une entreprise concurrente, même située à proximité.

7. S'agissant de l'intérêt à agir de la SCEA B..., ainsi qu'il a été dit, le projet permet une amélioration des conditions de desserte et de circulation sur le site de la SARL Groupe Clinet par la création de stationnements supplémentaires et d'une zone de manœuvre et d'attente pour les poids-lourds en dehors de la voie publique, et ne comporte qu'une augmentation très modérée des capacités du site. Dans ce contexte, l'existence d'une augmentation sensible du trafic du fait des travaux objet du permis en litige n'est pas établie par la seule production des photographies et des constats d'huissier, qui permettent uniquement d'attester de l'existence d'un trafic de poids-lourd lié à la présence du site de la SARL Groupe Clinet. Ainsi au regard de la portée des modifications apportées par le permis en litige au projet de construction initialement autorisé, la SCEA B... ne saurait se prévaloir de l'existence d'une dangerosité accrue pour ses dirigeants, ses salariés ou ses clients. Par suite, en l'absence d'impact de l'extension en litige sur ses conditions d'exploitation, elle ne justifie pas d'un intérêt pour contester le permis tacite dont la SARL Groupe Clinet est bénéficiaire depuis le 25 septembre 2014.

8. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur sa régularité, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé le permis tacite dont la SARL Groupe Clinet est bénéficiaire depuis le 25 septembre 2014.

Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 741-2 et L. 741-3 du code de justice administrative :

9. Aux termes du quatrième alinéa de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881, reproduits à l'article L. 741-2 du code de justice administrative : " Pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts. "

10. Contrairement à ce que soutient la société requérante, le passage dont elle demande la suppression dans les mémoires de M. B... et autres enregistrés le 5 juillet 2022 et le 13 mars 2023 n'excède pas les limites de la controverse entre parties dans le cadre d'une procédure contentieuse et ne présente pas un caractère injurieux, outrageant ou diffamatoire. En l'absence d'un préjudice établi, les conclusions tendant à sa suppression au versement par les défendeurs d'une somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts doivent par suite être rejetées.

11. Enfin, le mémoire en défense des consorts B... ne comporte pas de conclusions d'appel incident. Par suite, les conclusions de la SARL Groupe Clinet tendant à leur rejet ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais de l'instance :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SARL Groupe Clinet qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B... et autres demandent au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. B... et autres une somme de 1 500 euros à verser à la SARL Groupe Clinet au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 16 septembre 2021 est annulé.

Article 2 : La demande de M. B... et autres devant le tribunal administratif de Bordeaux et leurs conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : M. B... et autres verseront une somme de 1 500 euros à la SARL Groupe Clinet au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL Groupe Clinet est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Groupe Clinet et à la SCEA Château Bourgneuf B..., désignée représentant unique en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, et à la commune de Pomerol.

Délibéré après l'audience du 29 février 2024, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Claude Pauziès, président,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Edwige Michaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 mars 2024.

La rapporteure,

Christelle Brouard-LucasLe président,

Jean-Claude Pauziès

La greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21BX04208 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX04208
Date de la décision : 21/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PAUZIÈS
Rapporteur ?: Mme Christelle BROUARD-LUCAS
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL CERA
Avocat(s) : MAGRET

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-21;21bx04208 ?
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