Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. F... G... et Mme B... G... ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés du 21 février 2023 par lesquels le préfet des Hautes-Pyrénées a rejeté leurs demandes de titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2300664, 2300669 du 26 juin 2023, le tribunal administratif de Pau, après avoir joint leurs demandes, a annulé la mesure d'éloignement et les décisions accessoires prises à l'encontre de Mme G..., et a rejeté le surplus des demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 16 octobre 2023, M. F... G..., représenté par Me Elsaesser, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 26 juin 2023, en tant qu'il rejette sa demande ;
2°) de faire droit à sa demande de première instance ;
3°) d'enjoindre au préfet des Hautes-Pyrénées de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation, et dans tous les cas de le munir d'une autorisation provisoire de séjour lui donnant le droit de travailler, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- la décision de refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation compte tenu de la nécessité des soins médicaux dont il bénéficie en France et de la gravité potentielle de la rupture de soins sur son état psychique et son intégrité physique ;
- le refus de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;cette décision est privée de base légale, du fait des illégalités entachant la décision de refus de séjour ;
- cette décision est entachée d'erreur de droit et d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation dès lors que la demande d'asile présentée par son enfant mineur a fait l'objet d'un examen spécifique de la part de la préfecture puis de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, dont la décision de refus fait l'objet d'un recours devant la Cour nationale du droit d'asile en procédure normale ; cet enfant est titulaire d'une attestation de demandeur d'asile ;
- le traitement de la demande d'asile des enfants mineurs accompagnés prévue par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas conforme aux articles 7§3, 33 et 40§6 de la directive " procédures " ;
- le préfet de la Haute-Vienne a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur son intégrité psychique ;
- la mesure d'éloignement porte atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant, qui a des raisons sérieuses de craindre être victime d'excision en cas de retour au Nigéria, ainsi que de mauvais traitements en raison de la qualité de victime de la traite d'êtres humains de sa mère, de sa particulière vulnérabilité et de celle de ses deux parents ;
- la mesure d'éloignement est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation et porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison des risques pour son état de santé et de la qualité de victime d'un réseau de traite d'êtres humains de son épouse ;
- le préfet des Hautes-Pyrénées n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'intérêt supérieur de son enfant du fait de la procédure d'asile actuellement pendante.
La requête a été communiquée au préfet des Hautes-Pyrénées, qui n'a pas produit d'observations en défense.
M. G... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux du 14 septembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1734 du 16 décembre 2020 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'OFII de leurs missions prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. E... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. F... G..., ressortissant nigérian né le 29 décembre 1992, est entré sur le territoire le 1er janvier 2020 afin de rejoindre son épouse, compatriote entrée en France le 19 août 2019 et avec laquelle il a eu deux enfants, C..., né le 19 septembre 2019, et Donatella, née le 14 juillet 2021. Ils ont déposé des demandes d'asile, définitivement rejetées par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) par deux décisions du 12 mai 2022. M. G... a sollicité son admission au séjour en qualité d'étranger malade. Le préfet des Hautes-Pyrénées a rejeté la demande de titre de séjour de M. G..., a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de renvoi par un arrêté du 21 février 2023. Par un jugement du 26 juin 2023, la présidente du tribunal a rejeté la demande de M. G... tendant à l'annulation de cet arrêté. M. G... relève appel de ce jugement en tant qu'il rejette sa demande.
Sur la régularité du jugement :
2. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé et doit, par suite, être écarté.
Sur la légalité de la décision de refus de séjour :
3. A... termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. / Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. / Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée ". Et aux termes de l'article R. 425-11 de ce code : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées au troisième alinéa de l'article L. 425-9 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ".
4. En application de l'article 3 du décret du 16 décembre 2020, les références à des dispositions abrogées par le décret n° 2020-1734 du 16 décembre 2020 sont remplacées par les références aux dispositions correspondantes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction annexée au présent décret.
5. A... termes de l'article 4 de l'arrêté du 5 janvier 2017 susvisé : " Les conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge médicale, mentionnées au 11° de l'article L. 313-11 du CESEDA, sont appréciées sur la base des trois critères suivants : degré de gravité (mise en cause du pronostic vital de l'intéressé ou détérioration d'une de ses fonctions importantes), probabilité et délai présumé de survenance de ces conséquences./Cette condition des conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge doit être regardée comme remplie chaque fois que l'état de santé de l'étranger concerné présente, en l'absence de la prise en charge médicale que son état de santé requiert, une probabilité élevée à un horizon temporel qui ne saurait être trop éloigné de mise en jeu du pronostic vital, d'une atteinte à son intégrité physique ou d'une altération significative d'une fonction importante. / Lorsque les conséquences d'une exceptionnelle gravité ne sont susceptibles de ne survenir qu'à moyen terme avec une probabilité élevée (pathologies chroniques évolutives), l'exceptionnelle gravité est appréciée en examinant les conséquences sur l'état de santé de l'intéressé de l'interruption du traitement dont il bénéficie actuellement en France (rupture de la continuité des soins). Cette appréciation est effectuée en tenant compte des soins dont la personne peut bénéficier dans son pays d'origine ". L'annexe II " Outils d'aide à la décision et références documentaires sur les principales pathologies " de l'arrêté, auquel renvoie son article 3, précise, s'agissant des troubles psychiques et pathologies psychiatriques, que " Le problème des états de stress post-traumatique (ESPT) est fréquemment soulevé, notamment pour des personnes relatant des violences, tortures, persécutions, traitements inhumains ou dégradants subis dans le pays d'origine. La réactivation d'un ESPT, notamment par le retour dans le pays d'origine, doit être évaluée au cas par cas ".
6. S'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de délivrance de la carte de séjour prévue par ces dispositions, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, aux conséquences de l'interruption de sa prise en charge médicale ou à la possibilité pour lui d'en bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire, il appartient au juge administratif de prendre en considération l'avis médical rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Si le demandeur entend contester le sens de cet avis, il appartient à lui seul de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, afin de permettre au juge de se prononcer en prenant en considération l'ensemble des éléments pertinents, notamment l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'OFII, en sollicitant sa communication, ainsi que les éléments versés par le demandeur au débat contradictoire.
7. Au vu de l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, consulté le 3 février 2023, le préfet des Hautes-Pyrénées a estimé que le défaut de prise en charge médicale de M. G... ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Pour contester cette appréciation, l'appelant produit un certificat médical en date du 12 septembre 2023 du docteur D..., psychiatre assurant son suivi, qui mentionne que l'état de l'intéressé " reste fragile avec une symptomatologie de type post-traumatique qui le handicape (obsessions et ruminations sinistrosiques) " et qu'il bénéficie toujours d'une prise en charge spécialisée associant psychiatre et psychologue avec traitement psychotrope. M. G... produit également un certificat de son médecin traitant du 28 juin 2023 faisant état, outre du syndrome de stress post-traumatique, d'un suivi par urologue pour un varicocoele, et d'une chirurgie à venir pour cicatrice compressive de la racine du cou, un avis d'un médecin de l'OFII du 1er décembre 2022 selon lequel il nécessite une prise en charge spécialisée, ainsi que deux attestations de ses psychologues cliniciens témoignant de ce que M. G... présente un état de souffrance psychique important, se traduisant par une symptomatologie psychotraumatique invalidante en lien avec les événements traversés dans son pays d'origine tels des troubles du sommeil avec cauchemars traumatiques récurrents, un état anxieux majeur avec hypervigilance, une plainte algique envahissante (maux de tête, de ventre, douleurs aux membres inférieurs sans cause organique décelée). Ces pièces concluent que la gravité de son état psychique, qui reste fragile, nécessite une prise en charge multiple en complément du suivi psychologique que M. G... investit très positivement. Il ne ressort pas pour autant de ces documents que l'absence de prise en charge de M. G... mettrait en cause son pronostic vital ou détériorerait une de ses fonctions importantes. Par suite, le préfet de la Haute-Vienne n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant que le défaut de prise en charge de M. G... n'est pas de nature à emporter des conséquences d'une exceptionnelle gravité.
8. Les moyens tirés de la dénaturation des pièces du dossier, du défaut d'examen réel et sérieux de la situation de M. G..., et de l'atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont dépourvus de toute précision et doivent par suite être écartés.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
9. Il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus par le premier juge au point 21 de son jugement, le moyen repris en appel par M. G..., sans autre précision, tiré de l'insuffisante motivation de l'obligation de quitter le territoire français.
10. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 8 du présent arrêt que la décision de refus de séjour opposée à M. G... n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de cette décision, soulevé à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, doit être écarté.
11. A... termes de l'article L. 541-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français ". A... termes de l'article L. 542-1 du même code : " En l'absence de recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin à la notification de cette décision. / Lorsqu'un recours contre la décision de rejet de l'office a été formé dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français prend fin à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ou, s'il est statué par ordonnance, à la date de la signature de celle-ci ". A... termes de l'article L. 542-2 de ce code : " Par dérogation à l'article L. 542-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin : / 1° Dès que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a pris les décisions suivantes : (...) / d) une décision de rejet dans les cas prévus à l'article L. 531-24 (...) / Les dispositions du présent article s'appliquent sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ". A... termes de l'article L. 531-24 : " L'Office français de protection des réfugiés et apatrides statue en procédure accélérée dans les cas suivants : (...) / 2° Le demandeur a présenté une demande de réexamen qui n'est pas irrecevable ; (...) ". Et aux termes de l'article L. 521-3 : " Lorsque la demande d'asile est présentée par un étranger qui se trouve en France accompagné de ses enfants mineurs, elle est regardée comme présentée en son nom et en celui de ses enfants ". A... termes de l'article L. 531-28 du code : " L'Office français de protection des réfugiés et apatrides peut décider de ne pas statuer en procédure accélérée, sauf si la présence du demandeur en France constitue une menace pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat, comme mentionné au 5° de l'article L. 531-27, lorsque cela lui paraît nécessaire pour assurer un examen approprié de la demande, en particulier si le demandeur provenant d'un pays inscrit sur la liste mentionnée à l'article L. 531-25 invoque des raisons sérieuses de penser que son pays d'origine ne peut pas être considéré comme sûr en raison de sa situation personnelle et au regard des motifs de sa demande ". Enfin, aux termes de l'article R. 521-17 du code : " Lorsque le préfet compétent pour enregistrer la demande constate qu'un demandeur d'asile se trouve dans l'un des cas de procédure accélérée prévus aux articles L. 531-24 et L. 531-27, il en informe le demandeur ".
12. M. G... soutient que le préfet des Hautes-Pyrénées a commis une erreur de droit et n'a pas examiné sérieusement sa situation dès lors qu'une demande d'asile avait été formée au nom de sa fille mineure dont il a la charge, Donatella G..., enregistrée le 30 mai 2022, et qu'une attestation de demandeur d'asile lui avait été délivrée. Toutefois, ainsi que l'a relevé le premier juge, il ressort des pièces du dossier, notamment de la fiche Télemofrpra, que cette demande d'asile avait été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 29 juillet 2022, en procédure accélérée, en tant que demande de réexamen, si bien que le droit au maintien sur le territoire de sa fille avait cessé à cette date. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté contesté, celle-ci aurait été munie d'une attestation de demandeur d'asile.
13. M. G... critique l'examen en procédure accélérée de la demande d'asile formée au nom de sa fille, en faisant valoir que cette demande enregistrée le 19 mai 2022, étant antérieure à la notification de la décision de la CNDA rejetant sa propre demande, le 1er juin 2022. Il soutient également que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui conduisent à traiter systématiquement en demande de réexamen les demandes déposées par les mineurs accompagnés, ne sont pas conformes aux objectifs de la directive du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale. Toutefois, M. G... ne peut se prévaloir utilement, dans le cadre du présent contentieux, de l'illégalité de la décision de l'OFPRA de traiter la demande d'asile de sa fille en procédure accélérée, critique dont l'examen relève de la Cour nationale du droit d'asile.
14. Si M. G... fait valoir que la CNDA, saisie de la décision de rejet de l'OFPRA du 29 juillet 2022 a renvoyé l'examen du recours à une formation collégiale, et qu'une nouvelle attestation de demandeur d'asile a été délivrée à sa fille, ces circonstances, postérieures à l'arrêté contesté, sont, en tout état de cause, sans incidence sur sa légalité, la CNDA ayant, au demeurant, rejeté la requête le 9 janvier 2024.
15. A... termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
16. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés précédemment, M. G... n'est pas fondé à soutenir que le préfet des Hautes-Pyrénées aurait méconnu l'intérêt supérieur de sa fille compte tenu de sa demande d'asile en cours d'examen. En outre, l'obligation de quitter le territoire français n'implique pas, par elle-même, le retour de la fille de M. G... au Nigéria.
17. Le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement contesté sur l'état de santé de M. G... doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux figurant au point 7 du présent arrêt.
18. Si l'appelant fait valoir que Mme G... n'avait pas reçu l'information prévue par l'article R. 425-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce qui a conduit le tribunal, par le jugement du 26 juin 2023, à annuler la mesure d'éloignement prise à son encontre, cette circonstance est, par elle-même, sans incidence sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français visant M. G....
19. A... termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
20. Il ressort des pièces du dossier que M. G... est entré en France le 1er janvier 2020, n'a été autorisé à s'y maintenir qu'en qualité de demandeur d'asile jusqu'au 12 mai 2022, sans avoir vocation à s'y maintenir. Si l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de Mme G... a été annulée par le tribunal administratif de Pau, cette dernière ne justifie d'aucun droit au séjour, pas plus que leurs enfants, à la date de la décision contestée. M. G... ne fait état d'aucune autre attache familiale ou privée sur le territoire, alors qu'il n'allègue pas être dépourvu de telles attaches au Nigeria où il a vécu jusqu'à l'âge de 27 ans. Dans ces conditions, le préfet des Hautes-Pyrénées n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. G... une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été prise la mesure d'éloignement.
Sur la légalité de la décision fixant le Nigéria comme pays de renvoi :
21. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet des Hautes-Pyrénées n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la situation de M. G... avant de fixer le Nigéria comme pays de renvoi en cas d'exécution d'office de l'obligation de quitter le territoire français.
22. Le dernier alinéa de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". A... termes de ces dernières stipulations : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
23. Au regard de ce qui a été dit au point 7 du présent arrêt, le moyen tiré de ce qu'en raison de son état de santé, M. G... serait soumis à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Par ailleurs, l'appelant n'apporte aucun élément sérieux au soutien de ses allégations selon lesquelles sa vie ou sa liberté seraient menacées au Nigeria au motif que sa compagne a été victime d'un réseau international de prostitution actif dans ce pays, et que son enfant souffrirait d'autisme sévère.
24. Enfin, pour les mêmes motifs que ceux figurant aux points 12 à 14, M. G... n'est pas fondé à soutenir que le préfet des Hautes-Pyrénées aurait méconnu l'intérêt supérieur de sa fille compte tenu de sa demande d'asile en cours d'examen.
25. Il résulte de ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. G... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... G... et au ministre de l'intérieur et des outre mer. Copie en sera transmise pour information au préfet des Hautes-Pyrénées.
Délibéré après l'audience du 26 février 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Ghislaine Markarian, présidente,
M. Frédéric Faïck, président assesseur,
M. Julien Dufour, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 mars 2024.
Le rapporteur,
Julien E...
La présidente,
Ghislaine Markarian La greffière,
Catherine JussyLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°23BX02582 2