La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/02/2024 | FRANCE | N°22BX01214

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 27 février 2024, 22BX01214


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société Eurovia Aquitaine a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner le syndicat intercommunal à vocations multiples (SIVOM) de Lavardac Ouest à lui régler la somme de 32 902 euros, avec les intérêts au taux légal à compter du 28 janvier 2020, date de sa réclamation préalable.



Par un jugement n° 2001996 du 2 mars 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour : >


Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 avril 2022 et le 26 août 2022, la société Eurovia Aquita...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Eurovia Aquitaine a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner le syndicat intercommunal à vocations multiples (SIVOM) de Lavardac Ouest à lui régler la somme de 32 902 euros, avec les intérêts au taux légal à compter du 28 janvier 2020, date de sa réclamation préalable.

Par un jugement n° 2001996 du 2 mars 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 avril 2022 et le 26 août 2022, la société Eurovia Aquitaine représentée par la SCP Salesse et Associés, agissant par Me Soliveres, demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 2 mars 2022 en tant qu'il a rejeté sa demande et l'a condamnée à verser au SIVOM de Lavardac- Ouest une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de condamner le syndicat intercommunal à vocations multiples (SIVOM) de Lavardac Ouest à lui régler la somme de 32 902 euros, avec les intérêts au taux légal à compter du 28 janvier 2020 ;

3°) de mettre à la charge du SIVOM de Lavardac Ouest les dépens ainsi qu'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de réformer le jugement en tant qu'il.

Elle soutient que :

- le SIVOM a commis une faute en procédant au règlement du solde qui lui était dû auprès de la société Agilis au regard du paiement direct établi en matière de sous-traitance ;

- le tribunal a commis une erreur dès lors qu'elle n'entend pas solliciter le paiement de sa facture auprès du SIVOM sur le fondement du paiement direct mais sollicite, en application des dispositions de l'article 1240 du code civil, une indemnisation du préjudice résultant de la faute commise par le SIVOM qui a réglé la société Agilis;

- le SIVOM n'a pas procédé à une retenue de sa créance comme cela aurait été possible en application des dispositions de l'article 13.6 du CCAG Travaux.

Par un mémoire, enregistré le 5 août 2022, la société Agilis, représentée par TGS France Avocats, agissant par Me Meziane, demande à la Cour de prendre acte de ce que la société Eurovia Aquitaine ne formule aucune demande à son encontre et de mettre à la charge de la partie perdante une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 septembre 2022, le SIVOM de Lavardac-Ouest, représenté par le cabinet Lexia, agissant par Me Ruffié, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à sa charge une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

-le tribunal s'est expressément prononcé sur une éventuelle faute commise par le SIVOM en ayant procédé au règlement du solde restant dû à la société Agilis et n'a pas statué ultra petita ;

- le SIVOM ne pouvait pas procéder au paiement direct du solde restant dû à la société Eurovia Aquitaine eu égard au refus opposé par la société Agilis ;

- les travaux réalisés par la société Eurovia Aquitaine ne sont pas conformes aux règles de l'art et aux prestations demandées dans le cadre du marché ;

- si la réception est intervenue sans réserve, ce n'est qu'en raison du fait que la société Agilis a repris à ses frais les travaux mal réalisés.

Par ordonnance du 8 juin 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 modifiée ;

- le décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Au cours de l'audience publique, ont été entendus :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Duplan, rapporteur public,

- et les observations de Me Barthélémy, substituant Me Ruffié, pour le SIVOM de Lavardac-Ouest.

Considérant ce qui suit :

1. Le syndicat intercommunal à vocations multiples (SIVOM) de Lavardac-Ouest a confié à la société Agilis l'exécution d'un marché de travaux relatif à la réalisation d'un plateau multisports et de pistes d'athlétisme sur la commune de Lavardac. Par un contrat de sous-traitance signé le 20 avril 2017 par la société Eurovia Aquitaine, celle-ci s'est vu confier les travaux d'enrobés pour un montant de 32 902 euros hors taxes, la taxe sur la valeur ajoutée étant autoliquidée, et le SIVOM de Lavardac-Ouest a agréé les conditions de paiement de ce sous-traitant à hauteur du montant de ces prestations. En l'absence de paiement de sa facture d'un montant de 32 902 euros hors taxes, reçue par la société Agilis le 6 juin 2017, la société Eurovia a demandé au SIVOM de Lavardac-Ouest, par un courrier du 7 février 2018, de procéder au paiement direct de cette somme. Par courriers des 20 février 2018 et 24 juillet 2019, le SIVOM a indiqué à la société Eurovia qu'il s'était acquitté de la facture auprès de la société Agilis, titulaire du marché, dès lors que la société Agilis s'était opposée au règlement de la facture en cause. La société Eurovia Aquitaine, par un courrier du 28 janvier 2020, a demandé au SIVOM de l'indemniser du préjudice subi à hauteur de la somme de 32 902 euros. En l'absence de réponse, elle a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner le SIVOM de Lavardac Ouest à lui verser cette somme assortie des intérêts au taux légal. Elle relève appel du jugement par lequel le tribunal a rejeté sa demande indemnitaire.

2. Aux termes de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance : " Le sous-traitant direct du titulaire du marché qui a été accepté et dont les conditions de paiement ont été agréées par le maître de l'ouvrage, est payé directement par lui pour la part du marché dont il assure l'exécution. ". Aux termes de l'article 8 de cette même loi : " L'entrepreneur principal dispose d'un délai de quinze jours, comptés à partir de la réception des pièces justificatives servant de base au paiement direct, pour les revêtir de son acceptation ou pour signifier au sous-traitant son refus motivé d'acceptation. / Passé ce délai, l'entrepreneur principal est réputé avoir accepté celles des pièces justificatives ou des parties des pièces justificatives qu'il n'a pas expressément acceptées ou refusées. (...) ".

3. L'article 136 du décret du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, alors en vigueur dès lors que le marché a été attribué à la société Agilis le 7 mars 2017, dispose également : " I. - Le sous-traitant admis au paiement direct adresse sa demande de paiement au titulaire du marché public, sous pli recommandé avec accusé de réception, ou la dépose auprès du titulaire contre récépissé./ Le titulaire dispose d'un délai de quinze jours à compter de la signature de l'accusé de réception ou du récépissé pour donner son accord ou notifier un refus, d'une part, au sous-traitant et, d'autre part, à l'acheteur ou à la personne désignée par lui dans le marché public./ Le sous-traitant adresse également sa demande de paiement à l'acheteur ou à la personne désignée dans le marché public par l'acheteur, accompagnée des copies des factures adressées au titulaire et de l'accusé de réception ou du récépissé attestant que le titulaire a bien reçu la demande ou de l'avis postal attestant que le pli a été refusé ou n'a pas été réclamé./ L'acheteur ou la personne désignée par lui dans le marché public adresse sans délai au titulaire une copie des factures produites par le sous-traitant. /L'acheteur informe le titulaire des paiements qu'il effectue au sous-traitant. (...) ".

4. Il résulte de l'instruction que si la société Eurovia, sous-traitante de la société Agilis, dont les conditions de paiement avaient été agréées par le SIVOM de Lavardac-Ouest, bénéficiait d'un droit au paiement direct de ses prestations, elle ne conteste pas que la société Agilis s'est opposée à sa demande de paiement direct de sa facture d'un montant de 32 902 euros. Si la société Eurovia, qui entend, dans le cadre de ce litige, poursuivre la responsabilité quasi-délictuelle du SIVOM de Lavardac-Ouest, soutient que ce dernier a commis une faute en réglant à la société Agilis cette somme de 32 902 euros correspondant au montant des prestations qu'elle a exécutées au motif que le SIVOM de Lavardac-Ouest a méconnu son droit au paiement direct, le maître de l'ouvrage était tenu, en raison de l'opposition manifestée par la société Agilis au règlement de la facture en cause, dans des conditions qui ne sont pas contestées par la société Eurovia, de refuser de lui verser la somme en cause, la circonstance alléguée selon laquelle le SIVOM de Lavardac Ouest aurait réceptionné les travaux sans réserve étant sans incidence dès lors que l'absence de réserve résulte de la reprise des travaux par l'entrepreneur principal avant leur réception par le maître de l'ouvrage.

5. Si la société Eurovia conteste également les travaux de reprise de ses prestations, qui ont été effectués en raison de défauts constatés par constat d'huissier dressé le 8 juin 2017, il lui appartient, si elle estime l'opposition de la société Agilis abusive, de contester son refus devant le juge judiciaire.

6. La société Eurovia soutient enfin que le SIVOM de Lavardac-Ouest aurait dû procéder à une retenue de la somme qu'elle réclame sur celles restant à payer à la société Agilis, conformément aux stipulations de l'article 13.6 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux issues du décret n° 76-87 du 21 janvier 1976. A supposer même que ces stipulations aient été applicables au marché conclu entre le SIVOM de Lavardac-Ouest et la société Agilis, il résulte de ce qui a été dit précédemment, que la société Eurovia ne pouvait prétendre au paiement direct par le maître de l'ouvrage, sur le fondement de la loi du 31 décembre 1975, des travaux qu'elle a effectués en exécution de la commande de la société Agilis.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le SIVOM de Lavardac-Ouest n'a pas commis de faute à l'origine du préjudice allégué par la société Eurovia résultant du versement de la somme de 32 902 euros entre les mains de l'entrepreneur principal. Par suite, la société Eurovia Aquitaine n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande indemnitaire et a mis à sa charge une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur les frais de l'instance :

8. En l'absence de dépens, les conclusions présentées à ce titre par la société Eurovia ne peuvent qu'être rejetées.

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du SIVOM qui n'est pas partie perdante dans le cadre de la présente instance une somme sur ce fondement. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la société Eurovia Aquitaine une somme de 1 500 euros à verser au SIVOM sur le fondement de ces mêmes dispositions. Dans les circonstances de l'espèce, les conclusions de la société Agilis présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Eurovia Aquitaine est rejetée.

Article 2 : La société Eurovia Aquitaine versera au SIVOM de Lavardac-Ouest une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par la société Agilis sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Eurovia Aquitaine, au syndicat intercommunal à vocations multiples de Lavardac-Ouest et à la société Agilis.

Délibéré après l'audience du 5 février 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Ghislaine Markarian, présidente,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 février 2024.

La rapporteure,

Caroline A...

La présidente,

Ghislaine Markarian La greffière,

Catherine JussyLa République mande et ordonne au préfet de Lot-et-Garonne en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22BX01214


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01214
Date de la décision : 27/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MARKARIAN
Rapporteur ?: Mme Caroline GAILLARD
Rapporteur public ?: M. DUPLAN
Avocat(s) : CABINET LEXIA

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-27;22bx01214 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award