Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 30 mars 2023 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2302287 du 29 juin 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des pièces complémentaires enregistrés les 28 juillet et 7 août 2023, M. D..., représenté par Me Babou, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2302287 du 29 juin 2023 du tribunal administratif de Bordeaux ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 mars 2023 du préfet de la Gironde ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " étudiant ", " salarié " ou " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- la décision de refus de séjour attaquée méconnaît les stipulations de l'article 9 de la convention relative à la circulation et au séjour des personnes entre la République Française et la République du Bénin et les dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il remplit les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiant ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il remplit les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour en qualité de salarié ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que son admission au séjour répond à des considérations humanitaires.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 novembre 2023, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention signée le 21 décembre 1992 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Bénin relative à la circulation et au séjour des personnes ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., de nationalité béninoise, né le 27 mai 1995, est entré en France le 6 octobre 2019, sous couvert d'un visa étudiant valable du 25 septembre 2019 au 25 septembre 2020. Il s'est ensuite vu délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ", renouvelée une fois, jusqu'au 10 novembre 2022. Le 26 octobre 2021, il a sollicité le renouvellement de ce titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 30 mars 2023, le préfet de la Gironde a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par la présente requête, M. C... relève appel du jugement du 29 juin 2023 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...). ". En vertu de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
3. L'arrêté en litige vise les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Au titre des considérations de fait, il mentionne notamment les conditions d'entrée et de séjour en France de M. C..., son absence de validation de diplôme en trois années d'études ainsi que l'absence du caractère sérieux de ses études. Il précise également qu'il ne démontre aucunement l'intensité et la stabilité de ses liens privés, familiaux et sociaux en France, et que la décision prise ne méconnaît ni l'article 8 ni l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, le préfet de la Gironde, qui n'était pas tenu de décrire de façon exhaustive la situation personnelle de M. C... et notamment le détail des éléments relatifs à son intégration professionnelle, a suffisamment motivé l'arrêté du 30 mars 2023.
4. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu notamment de ce qui a été dit au point précédent, que le préfet de la Gironde n'aurait pas procédé à un examen approfondi de la situation de M. C... avant de refuser de lui délivrer un titre de séjour et de lui faire obligation de quitter le territoire français.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 9 de la convention franco-béninoise du 21 décembre 1992 invoqué en première instance par le préfet de la Gironde comme fondement légal de l'arrêté attaqué et dont la portée est équivalente, s'agissant des ressortissants béninois désireux de poursuivre des études supérieures, aux dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, visé par l'arrêté attaqué : " Les ressortissants de chacun des Etats contractants désireux de poursuivre des études supérieures ou d'effectuer un stage de formation de niveau supérieur sur le territoire de l'autre Etat doivent, outre le visa de long séjour prévu à l'article 4, justifier d'une attestation d'inscription ou de préinscription dans l'établissement d'enseignement choisi, ou d'une attestation d'accueil de l'établissement où s'effectue le stage, ainsi que, dans tous les cas, de moyens d'existence suffisants. Les intéressés reçoivent un titre de séjour temporaire portant la mention " étudiant ". Ce titre de séjour est renouvelé annuellement sur justification de la poursuite effective des études ou du stage et de la possession de moyens d'existence suffisants. (...) ". Le renouvellement du titre de séjour " étudiant " est subordonné, notamment, à la justification par son titulaire de la réalité et du sérieux des études qu'il a déclaré accomplir.
6. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. C..., entré en France en octobre 2019 sous couvert d'un visa de long séjour en vue d'y accomplir des études, a bénéficié de titres de séjour en qualité d'étudiant jusqu'en novembre 2022. Inscrit en première année de licence anglais-espagnol à l'université Bordeaux Montaigne, il s'est montré défaillant au titre de l'année universitaire 2019-2020, puis a été ajourné au titre des années universitaires 2020-2021 et 2021-2022 pour résultats insuffisants et n'a validé sur l'ensemble de cette période qu'un seul semestre. S'agissant de l'année universitaire 2022-2023, l'intéressé s'est inscrit en formation en alternance dans un brevet de technicien supérieur (BTS) " Management commercial opérationnel ", formation sans aucun rapport avec son cursus antérieur. S'il justifie des revenus qu'il tire de son statut d'apprenti au sein de l'entreprise Novotel Aéroport Bordeaux, le seul bulletin de scolarité qu'il produit ne suffit pas à démontrer le sérieux des études suivies. Dans ces conditions et compte tenu notamment de l'absence de diplôme obtenu en France par l'intéressé depuis 2019, M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté refusant le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étudiant a méconnu les stipulations précitées de l'article 9 de la convention franco-béninoise du 21 décembre 1992.
7. En quatrième lieu, d'une part aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " d'une durée maximale d'un an. / La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail. / Par dérogation aux dispositions de l'article L. 433-1, elle est prolongée d'un an si l'étranger se trouve involontairement privé d'emploi. Lors du renouvellement suivant, s'il est toujours privé d'emploi, il est statué sur son droit au séjour pour une durée équivalente à celle des droits qu'il a acquis à l'allocation d'assurance mentionnée à l'article L. 5422-1 du code du travail. ". D'autre part, aux termes de l'article L. 435-1 du même code : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (....) ".
8. S'il ressort des termes de l'arrêté attaqué que le préfet de la Gironde a spontanément examiné si la situation de M. C... entrait dans un cas d'attribution d'un titre de séjour de plein droit, ce dernier, dès lors qu'il n'a pas présenté de demande d'admission exceptionnelle au séjour, ni de titre de séjour en sa qualité de salarié, ne peut en revanche utilement invoquer les dispositions des articles L. 435-1 et L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lesquelles ne prévoient aucunement la délivrance d'un titre de séjour de plein droit. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de ces dispositions doivent être écartés.
9. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine ". En outre, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
10. M. C... soutient que la décision attaquée porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale dès lors qu'il est intégré en France, qu'il a poursuivi des études et qu'il justifie d'un emploi. Toutefois, il résulte de ce qui précède que le caractère sérieux de ses études n'est pas démontré et que s'il justifie d'un emploi stable sur les derniers mois, cette circonstance est consécutive à son inscription en BTS en alternance. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier qu'il n'est entré en France qu'en 2019, qu'il est célibataire et sans charge de famille et que sa famille réside dans son pays d'origine. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Une copie en sera adressée pour information au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 23 janvier 2024 à laquelle siégeaient :
M. Luc Derepas, président de la cour,
Mme Elisabeth Jayat, présidente de chambre,
Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 février 2024.
La rapporteure,
Héloïse B...
Le président,
Luc Derepas
La greffière,
Virginie Santana
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23BX02144