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16/01/2024 | FRANCE | N°22BX01003

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 16 janvier 2024, 22BX01003


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler la note de service n° 2020/10.04/C19/PIL/FR prise le 10 avril 2020 par le directeur chef de corps du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Guyane en tant qu'elle a suspendu la possibilité pour les policiers et les gendarmes de cumuler leur activité avec celle de sapeur-pompier volontaire.



Par un jugement n° 2000399 du 30 décembre 2021, le tribunal administratif de

la Guyane a rejeté sa demande.





Procédure devant la Cour :



Par une requ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler la note de service n° 2020/10.04/C19/PIL/FR prise le 10 avril 2020 par le directeur chef de corps du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Guyane en tant qu'elle a suspendu la possibilité pour les policiers et les gendarmes de cumuler leur activité avec celle de sapeur-pompier volontaire.

Par un jugement n° 2000399 du 30 décembre 2021, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 avril 2022, M. A... B..., représenté Me Lobeau demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Guyane du 30 décembre 2021 précité ;

2°) d'annuler la note de service n° 2020/10.04/C19/PIL/FR du 10 avril 2020 ;

3°) de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours de la Guyane une somme de 2 300 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas répondu au moyen soulevé devant lui tiré de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation, ce qui entache le jugement d'irrégularité ;

- il n'est pas justifié d'une compétence propre du signataire ou d'une délégation pour prendre la décision ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle a été prise en méconnaissance des dispositions des articles L. 723-3 et suivants du code de la sécurité intérieure ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; elle n'est pas adaptée et proportionnée et a pour effet de priver le SDIS de moyens humains dans un contexte de crise sanitaire ;

- elle a un caractère superfétatoire dès lors qu'une convention établie entre l'employeur et le SDIS de la Guyane en application du code de la sécurité intérieure établit déjà les conditions de mise à disposition des sapeurs-pompiers volontaires.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mars 2023, le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Guyane, représenté par Me Semonin, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. B... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que la requête de première instance était irrecevable dès lors que la décision contestée ne lui fait pas grief et qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 10 mai 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 11 juillet 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- la loi n° 83-364 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 96-370 du 3 mai 1996 ;

- le décret n° 2007-658 du 2 mai 2007 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Au cours de l'audience publique, ont été entendus :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. Duplan, rapporteur public,

- et les observations de Me Latour, substituant Me Semonin, pour le SDIS de la Guyane.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B... a été nommé gardien-brigadier de police municipale à temps complet en novembre 2017 et affecté au service de police municipale de Cayenne. Il a également la qualité de caporal-chef sapeur-pompier volontaire, affecté au centre d'incendie et de secours de Macouria depuis 2005. Par une note de service n° 2020/10.04/C19/PIL/FR prise le 10 avril 2020, le directeur-chef de corps du service départemental d'incendie et de secours de la Guyane a suspendu, compte tenu du contexte sanitaire alors en vigueur, la possibilité pour les policiers et les gendarmes de cumuler leur activité avec celle de sapeur-pompier volontaire. M. B... a demandé au tribunal administratif de la Guyane l'annulation de cette note de service. Il relève appel du jugement par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort de la lecture du jugement attaqué que le tribunal a répondu, aux points 4 à 6, de manière suffisamment précise aux moyens tirés de ce que la note de service en litige serait entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation. Par suite, le moyen tiré de l'omission à statuer sur ces deux moyens ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 1424-33 du code général des collectivités territoriales : " Le directeur départemental des services d'incendie et de secours est placé sous l'autorité du représentant de l'Etat dans le département et, dans le cadre de leur pouvoir de police, des maires, pour :/- la direction opérationnelle du corps départemental des sapeurs-pompiers ;/- la direction des actions de prévention relevant du service départemental d'incendie et de secours ;/- le contrôle et la coordination de l'ensemble des corps communaux et intercommunaux ;/- la mise en oeuvre opérationnelle de l'ensemble des moyens de secours et de lutte contre l'incendie. /Il est placé sous l'autorité du président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours pour la gestion administrative et financière de l'établissement "

4. Il ressort des pièces du dossier que l'auteur de la note de service en litige, qui est directeur-chef de corps a la qualité de chef de service et pouvait ainsi prendre une note suspendant temporairement le cumul d'activités pour des raisons de crise sanitaire dès lors qu'une telle mesure relève de l'organisation du service et que l'état de crise sanitaire le justifiait.

5. En deuxième lieu, au soutien du moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée, M. B... ne se prévaut devant la Cour d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à son argumentation en première instance et ne critique pas utilement la réponse apportée par le tribunal. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par le tribunal.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 723-3 du code de la sécurité intérieure : " Toute personne, qu'elle soit ou non en activité et quelle que soit son activité professionnelle, peut devenir sapeur-pompier volontaire, sous réserve de satisfaire aux conditions d'engagement ". Aux termes de l'article L. 723-5 du même code : " L'activité de sapeur-pompier volontaire, qui repose sur le volontariat et le bénévolat, n'est pas exercée à titre professionnel mais dans des conditions qui lui sont propres ". Aux termes de l'article L. 723-6 du même code : " Le sapeur-pompier volontaire prend librement l'engagement de se mettre au service de la communauté. Il exerce les mêmes activités que les sapeurs-pompiers professionnels. Il contribue ainsi directement, en fonction de sa disponibilité, aux missions de sécurité civile de toute nature confiées aux services d'incendie et de secours ou aux services de l'Etat qui en sont investis à titre permanent mentionnés au premier alinéa de l'article L. 721-2. Il concourt aux objectifs fixés à l'article L. 112-1 ". Il résulte de ces dispositions que les sapeurs-pompiers volontaires exercent, dans les conditions qui leur sont propres et en fonction de leur disponibilité, la même activité que les sapeurs-pompiers professionnels.

7. M. B... soutient que la décision en litige, qui suspend momentanément le cumul des activités notamment de policier municipal et de sapeur-pompier volontaire, a pour effet de priver le service départemental d'incendie et de secours de la Guyane de moyens humains dans un contexte de crise sanitaire et qu'elle revêt ainsi un caractère ni adapté ni proportionné. En l'espèce, l'état d'urgence sanitaire a été déclaré sur l'ensemble du territoire national, dont la Guyane, par la loi du 23 mars 2020, à compter de cette date, et il a été prorogé pour ce seul territoire, par la loi du 9 juillet 2020 jusqu'au 16 septembre 2020. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'en estimant que cette mesure, prise à titre provisoire, se justifiait par la nécessité d'éviter les contacts entre des professions déjà très exposées au virus, le chef de service aurait eu une appréciation manifestement erronée de la situation sanitaire et n'aurait pas pris les mesures strictement nécessaires pour assurer la continuité du service. Par suite, la mesure contestée prise, à titre provisoire, pour assurer la continuité du service public d'incendie et de secours n'apparaît pas disproportionnée eu égard à l'ampleur de la crise sanitaire. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles L.723-3 et suivants du code de la sécurité intérieure concernant les activités du sapeur-pompier volontaire ne peut qu'être écarté.

8. Le requérant soutient enfin que cette note de service présente un caractère superfétatoire au regard des dispositions des articles L.723-11 et L. 723-12 du code de la sécurité intérieure qui permettent par voie conventionnelle aux employeurs et au SDIS de la Guyane de planifier les interventions des sapeurs-pompiers volontaires en fonction de leurs disponibilités. Toutefois, l'objet de ces dispositions est différent de celui de la note de service en litige qui vise une période bien définie et temporaire d'urgence sanitaire et constitue un mécanisme dérogatoire et exceptionnel par rapport au dispositif conventionnel prévu par le code de la sécurité intérieure. Par suite le moyen susvisé ne peut qu'être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande.

Sur les frais de l'instance :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge du SDIS de la Guyane, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par le requérant au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de mettre à la charge de M. B... une somme de 1500 euros à verser au SDIS de la Guyane en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B... versera au SDIS de la Guyane une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au SDIS de la Guyane.

Délibéré après l'audience du 11 décembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Ghislaine Markarian, présidente,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 janvier 2024.

La rapporteure,

Caroline C...

La présidente,

Ghislaine Markarian

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au préfet de la Guyane en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22BX01003


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01003
Date de la décision : 16/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MARKARIAN
Rapporteur ?: Mme Caroline GAILLARD
Rapporteur public ?: M. DUPLAN
Avocat(s) : SEMONIN

Origine de la décision
Date de l'import : 28/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-16;22bx01003 ?
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