Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Le Potager Gourmand a demandé au tribunal administratif de La Réunion de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des pénalités correspondantes mis à sa charge au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015.
M. B... A..., gérant de la SARL Le Potager Gourmand, a demandé au tribunal de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux et des pénalités correspondantes mis à sa charge au titre de l'année 2013.
M. et Mme A... ont demandé au tribunal de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux et des pénalités correspondantes mis à leur charge au titre des années 2014 et 2015.
Par un jugement n° 1901451, 1901413 et 1901414 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté ces trois demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 3 août 2021 et le 15 mars 2022, la SARL Le Potager Gourmand et M. et Mme A..., représentés par la SAS Baroche et Associés, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 15 juin 2021 ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels la SARL Le Potager Gourmand a été assujettie au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015 ;
3°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels M. et Mme A... ont été assujettis au titre des années 2013, 2014 et 2015 ;
4°) de prononcer le paiement des intérêts moratoires en faveur de la SARL Le Potager Gourmand et de M. et Mme A... pour la partie des sommes déjà versée à l'administration ;
5°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la procédure de rectification est irrégulière dès lors que :
o le chiffre d'affaires de la société a été reconstitué à partir d'éléments correspondant à un exercice qui ne faisait pas l'objet de la vérification et qu'ils n'ont pas bénéficié d'un délai suffisant pour se faire assister par un conseil, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ;
o les propositions de rectification du 11 octobre 2016 adressées à M. et Mme A... sont insuffisamment motivées en méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;
- la rectification est infondée, dès lors que :
o la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires de la société est sommaire et aboutit à des résultats exagérés ;
o l'administration fiscale n'a pas tenu compte du régime des travailleurs non-salariés applicable à M. A..., la partie des revenus dépassant 10% du capital social devant être intégrée dans l'assiette des cotisations sociales dues au titre des revenus d'activité ;
- les pénalités sont infondées dès lors que l'administration n'apporte pas la preuve d'un manquement délibéré des requérants dans leurs déclarations d'impôts, en méconnaissance des dispositions de l'article 1729 du code général des impôts.
Par deux mémoires enregistrés le 17 février 2022 et le 3 juillet 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés sont infondés.
Par une ordonnance du 16 mai 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 17 juillet 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
- Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code général des impôts ;
- le livre des procédures fiscales ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Sébastien Ellie ;
- les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public
Considérant ce qui suit :
1. La société à responsabilité limitée (SARL) Le Potager Gourmand, détenue par M. et Mme A..., a fait l'objet d'une vérification de comptabilité de son activité de vente de fruits et légumes pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015. À l'issue de ce contrôle, le service vérificateur lui a notifié, par une proposition de rectification du 28 juillet 2016, des suppléments d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour un montant de 326 612 euros. Il a également notifié à M. et Mme A..., par deux propositions de rectification du 11 octobre 2016, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2013 et des années 2014 et 2015, pour un montant total de 505 643 euros. La SARL Le Potager Gourmand et M. et Mme A... demandent à la cour d'annuler le jugement du 15 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de la Réunion a rejeté leurs demandes tendant à la décharge de l'ensemble de ces impositions, en droits et pénalités.
Sur la régularité de la procédure :
2. Aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification (...) ".
3. En premier lieu, il est constant qu'un avis de vérification a été remis en main propre à M. A..., gérant de la SARL Le Potager Gourmand, le 20 mai 2016, pour l'informer de l'engagement d'une vérification de la comptabilité de la société portant sur les exercices clos en 2013, 2014 et 2015. Par ailleurs, ainsi que l'ont jugé à bon droit les premiers juges, la vérification peut sans irrégularité porter sur un exercice non mentionné sur l'avis de vérification, dès lors que ce contrôle s'avère utile à la vérification de la période indiquée sur cet avis et que les redressements notifiés n'ont concerné que cette période. Ainsi, la circonstance que les investigations menées par le service ont porté sur des opérations effectuées au cours des mois de mai et juin 2016 qui n'étaient pas visées par l'avis de vérification n'entache pas d'irrégularité la procédure d'imposition.
4. En deuxième lieu, pour apprécier si le délai s'écoulant entre la réception de l'avis et le début de la vérification fiscale est suffisant pour permettre au contribuable de se faire assister par le conseil de son choix, il y a lieu de ne tenir compte, dans la computation de ce délai, ni du jour de la réception de l'avis, ni de celui marquant le début des opérations de contrôle fiscal. Il y a lieu également d'exclure les samedis, dimanches et jours fériés. Les requérants, qui ont reçu l'avis de vérification le vendredi 20 mai 2016 pour une première opération de contrôle le 27 mai 2016, ont disposé d'un délai de quatre jours ouvrés, du lundi 23 mai au jeudi 26 mai 2016, pour recourir aux services du conseil de leur choix, délai suffisant au sens des dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales.
5. En dernier lieu, l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dispose que : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée ". Il résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées. Hormis le cas où elle se réfère à un document qu'elle joint à la proposition de rectification ou à la réponse aux observations du contribuable, l'administration peut satisfaire cette obligation en se bornant à se référer aux motifs retenus dans une proposition de rectification, ou une réponse à ses observations, consécutive à un autre contrôle et qui lui a été régulièrement notifiée, à la condition qu'elle identifie précisément la proposition ou la réponse en cause et que celle-ci soit elle-même suffisamment motivée.
6. Il résulte de l'instruction que la SARL Le Potager Gourmand s'est vu notifier une proposition de rectification comportant les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils étaient opérés, ainsi que les années d'imposition concernées. Contrairement à ce que soutient la société requérante, la proposition de rectification comporte les bases de calcul des rappels de TVA, année par année ainsi que le taux applicable de 2,10%.
7. Les propositions de rectification adressées à M. et Mme A... le 11 octobre 2016 indiquent que le rehaussement est fondé sur la vérification de comptabilité de la société, faisant ressortir des distributions liées à des recettes non déclarées sur les exercices clos de 2013 à 2015, l'administration ajoutant que la société n'avait pas présenté de comptabilité sincère et probante. Elles mentionnent l'article 109-1-1° du code général des impôts, fondement légal de la rectification et indiquent que ces sommes, précisément détaillées par année, entrent dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers (2013 et 2014) et dans les traitements et salaires (2015). M. A... a en outre reconnu les distributions de revenus réalisées par la société à son profit, en sa qualité de gérant, et les époux A... ont déposé des déclarations de revenus rectificatives dont les éléments ont été repris par les propositions de rectification du 11 octobre 2016 adressées par l'administration fiscale. Celles-ci sont par suite suffisamment motivées au regard des exigences des dispositions précitées, M. et Mme A... ayant disposé dans les circonstances particulières de l'espèce, des informations leur permettant de formuler leurs observations ou de faire connaître leur acceptation.
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
En ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires de la société :
8. Aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables ". L'article L. 13 A du même livre dispose que : " Le défaut de présentation de la comptabilité est constaté par procès-verbal que le contribuable est invité à contresigner. Mention est faite de son refus éventuel ". L'article L. 193 du même livre dispose que : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ". Enfin, l'article R. 194-1 du même livre dispose que : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré ".
9. L'administration procède à la vérification de comptabilité d'une entreprise lorsqu'en vue d'assurer l'établissement d'impôts ou de taxes totalement ou partiellement éludés par les intéressés, elle contrôle sur place la sincérité des déclarations fiscales souscrites par cette entreprise ou ce contribuable en les comparant avec les écritures comptables ou les pièces justificatives dont elle prend alors connaissance et dont, le cas échéant, elle peut remettre en cause l'exactitude. En l'absence de données fiables permettant de déterminer les conditions d'exploitation d'exercices vérifiés, il est loisible tant à l'administration fiscale, dans le cadre des opérations de reconstitution de chiffre d'affaires, qu'au contribuable, pour critiquer la reconstitution ainsi opérée, de se référer aux données de l'activité d'exercices antérieurs ou postérieurs, pourvu que les conditions d'exploitation, établies par tout moyen, de ces exercices n'aient pas varié ou qu'elles puissent être ajustées pour tenir compte de leur évolution. Il appartient à la société d'apporter la preuve de l'exagération de l'évaluation faite par l'administration de ses bases d'impositions sans pouvoir se référer, de manière pertinente, à sa comptabilité pour apporter cette preuve. Par ailleurs, l'absence de présentation des pièces justificatives de recettes suffit pour que la comptabilité d'une entreprise soit regardée comme dépourvue de valeur probante.
10. Au regard des documents présentés par la SARL Le Potager Gourmand, qui ne comportaient aucun inventaire des stocks, fichiers d'écritures comptables et justificatifs de recettes, l'administration a valablement pu dresser un procès-verbal constatant le défaut de présentation de la comptabilité de la société et procéder à la reconstitution du chiffre d'affaires au regard d'autres éléments. Pour reconstituer le chiffre d'affaires de la société, l'administration a tout d'abord constaté la faiblesse des paiements en espèces pour ce type de commerces au regard de l'étude des recettes comptabilisées sur la période vérifiée, comparée au ticket récapitulatif dressé par le vérificateur le 1er juin 2016 et du récapitulatif de recettes édités pour le mois de mai 2016. L'administration a ainsi constaté, pour ce dernier mois, une proportion de 69% de paiements en espèces, ces derniers étant 2,21 fois plus importants que les autres modes de paiement. Elle a ainsi appliqué un coefficient de 221,88% aux paiements autres qu'en espèces réalisés sur la période vérifiée. Pour contester la méthode ainsi utilisée, la société se borne à faire valoir que l'administration a procédé à une extrapolation en utilisant des éléments qui ne portent pas sur la période couverte par la vérification, qui reposent sur des constatations réalisées uniquement sur un mois de l'année et sans tenir compte du nombre réel de jours d'ouverture de l'établissement. Ce faisant, elle n'établit pas que cette méthode serait excessivement sommaire ni qu'elle aurait conduit à la détermination d'un coefficient inexact, dès lors que l'administration ne disposait d'aucun document justificatif du détail des recettes journalières, qu'elle est fondée sur l'examen d'un nombre suffisant de ventes au regard des conditions d'exploitation du magasin ouvert tous les jours de l'année et qu'il n'est pas démontré que ces conditions d'exploitation auraient connu une modification sensible entre 2012 et 2016. Dans ces conditions, la société requérante, qui a par ailleurs déposé des déclarations rectificatives d'impôt sur les sociétés mentionnant des bénéfices recalculés au regard de la reconstitution des recettes de la société finalement retenus par l'administration pour établir les impositions en litige, n'apporte pas la preuve que la méthode utilisée par l'administration est excessivement sommaire ni qu'elle aboutit à une évaluation exagérée des bases d'imposition.
En ce qui concerne les prélèvements sociaux :
11. L'article L. 136-3 du code de la sécurité sociale soumet les revenus des travailleurs indépendants à la contribution sociale sur les revenus d'activités mentionnée à l'article L. 136-1 du même code, cette contribution étant assise sur le montant brut des traitements, indemnités, émoluments, salaires, allocations, pensions ainsi que le prévoit l'article L. 136-2 de ce code. Aux termes de l'article L. 131-6 du même code : " Les cotisations d'assurance maladie et maternité, d'allocations familiales et d'assurance vieillesse des travailleurs indépendants non agricoles sont assises sur leur revenu d'activité non salarié. (...) Est également prise en compte, dans les conditions prévues au deuxième alinéa, la part (...) des revenus (...) qui est supérieure à 10 % du capital social ". Aux termes du I de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors applicable, relatif à la contribution sur les revenus du patrimoine, aux dispositions duquel renvoient directement ou indirectement le I de l'article 1600-0 C du code général des impôts relatif à la contribution sociale généralisée sur les revenus du patrimoine, l'article 1600-0 G du code général des impôts relatif à la contribution pour le remboursement de la dette sociale, l'article L. 1600-0 F bis du code général des impôts relatif au prélèvement social, l'article 1600-0 S du code général des impôts relatif à la contribution additionnelle " solidarité autonomie " et l'article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles relatif au prélèvement de solidarité : " Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts sont assujetties à une contribution sur les revenus du patrimoine assise sur le montant net retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, à l'exception de ceux ayant déjà supporté la contribution au titre des articles L. 136-3, L. 136-4 et L. 136-7 : (...) ".
12. Il résulte de ces dispositions que les revenus tirés d'une activité non salariée sont assujettis à la contribution sociale sur les revenus d'activité dès lors que cette activité est exercée à titre professionnel, que ce soit de manière accessoire ou non. En outre, la part de ces revenus perçue par le gérant majoritaire d'une société à responsabilité limitée, relevant en cette qualité du régime des travailleurs non-salariés non agricoles, doit être regardée, pour son assujettissement aux prélèvements sociaux, comme des revenus d'activité pour leur fraction excédant 10 % du capital social. Cette fraction entrant ainsi dans le champ des contributions portant sur les revenus d'activité, elle ne saurait être soumise à celles assises sur les revenus du patrimoine.
13. En sa qualité de gérant majoritaire d'une SARL, M. A... peut se prévaloir de la qualité de travailleur non-salarié dès lors qu'il ne relève pas des catégories énumérées à l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale affiliées au régime général de la sécurité sociale. Il est ainsi assujetti aux cotisations sociales prévues par les dispositions de l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale, dès lors que ses fonctions de gérant caractérisent en l'espèce une activité professionnelle. Si l'administration fait valoir qu'aucun élément ne permet de considérer que M. A... aurait versé la contribution sociale sur les revenus d'activité et de remplacement prévue par l'article L. 136-3 du code de la sécurité sociale pour les revenus distribués au titre des années 2013 et 2014, une telle situation n'autorise pas l'administration fiscale à faire application d'un autre régime social au gérant majoritaire d'une SARL, sauf à établir que ces revenus doivent être qualifiés de revenus du patrimoine ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Il en résulte que la part des revenus distribués à M. A... pour les années 2013 et 2014 supérieure à 10% du capital social de la société doit être réintégrée à l'assiette des cotisations sociales du gérant due à la sécurité sociale des indépendants. La part du dividende inférieure à 10% du capital social de la société est quant à elle soumise aux prélèvements sociaux à hauteur de 15,5%, taux en vigueur en 2013 et 2014. M. A... est ainsi fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a imposé les revenus distribués pour les années 2013 et 2014 excédant 10% du capital social comme des revenus du patrimoine. M. A... doit ainsi être déchargé de la somme de 79 042 euros.
Sur les pénalités :
14. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ". La pénalité pour mauvaise foi prévue par ces dispositions a pour seul objet de sanctionner la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives. Pour établir cette mauvaise foi, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt.
15. Il résulte de l'instruction que M. A... est le principal associé et gérant de la SARL Le Potager Gourmand, laquelle n'a pas été en mesure de produire une comptabilité sincère et probante. Les contrôles réalisés par l'administration fiscale sur cette société ont fait ressortir une sous-évaluation importante des recettes de cette société, les paiements en espèces n'étant pas systématiquement comptabilisés, ce qui a conduit à un redressement de près de 800 000 euros, pénalités et intérêts de retard inclus. La mauvaise foi des contribuables est suffisamment caractérisée en l'espèce par l'administration en raison de l'importance des revenus non déclarés, de l'absence de comptabilité permettant de retracer les recettes réelles, de l'absence d'inventaire des stocks, ces manquements graves n'étant pas isolés mais au contraire répétés sur les trois années vérifiées par l'administration. Le gérant majoritaire d'une SARL ne saurait se prévaloir de sa méconnaissance du fonctionnement normal de ses obligations administratives et fiscales pour se soustraire au paiement de l'impôt. Le fait que les requérants aient finalement déposé des déclarations rectificatives avant la notification des propositions de rectification ne suffit pas pour écarter les autres éléments précédemment évoqués, dès lors que ces déclarations résultent des opérations de contrôle réalisées en 2016.
16. En revanche, la majoration de 40% ne saurait être appliquée aux cotisations sociales telles que calculées par l'administration, dès lors que les revenus distribués en 2013 et 2014 à M. A... ne pouvaient se voir appliquer le taux de 15,5% applicable aux contributions sociales des salariés, ainsi qu'il a été dit au point 14 du présent arrêt. M. A... est ainsi fondé à demander la décharge de la somme de 31 616 euros, correspondant à 40% de 79 042 euros.
17. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à demander la décharge en droits et pénalités des suppléments de prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014 à hauteur de 110 658 euros.
18. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à M. A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : M. A... est déchargé des prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014 et des pénalités correspondantes à hauteur de la somme de 110 658 euros.
Article 2 : L'État versera à M. A... une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le jugement du 15 juin 2021 est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Le Potager Gourmand, à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Une copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal du Sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 24 octobre 2023 où siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, présidente,
M. Sébastien Ellie, premier conseiller,
Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 novembre2023.
Le rapporteur,
Sébastien Ellie
La présidente,
Elisabeth Jayat
La greffière,
Virginie Santana
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°21BX03331